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23/01/2020 | FRANCE | N°19/005871

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 23 janvier 2020, 19/005871


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 23/01/2020
la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS
la SARL ARCOLE
ARRÊT du : 23 JANVIER 2020

No : 10 - 20
No RG 19/00587 - No Portalis
DBVN-V-B7D-F3YJ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 18 Janvier 2019

PARTIES EN CAUSE

APPELANTES :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265233501886757
SASU [...]
Prise en la personne de son Président, en exercice, et de tous autres représentants légaux domiciliÃ

©s ès-qualité audit siège [...]
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Isabelle TURBAT, membre de la SELARL LEXAVOUE P...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 23/01/2020
la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS
la SARL ARCOLE
ARRÊT du : 23 JANVIER 2020

No : 10 - 20
No RG 19/00587 - No Portalis
DBVN-V-B7D-F3YJ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 18 Janvier 2019

PARTIES EN CAUSE

APPELANTES :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265233501886757
SASU [...]
Prise en la personne de son Président, en exercice, et de tous autres représentants légaux domiciliés ès-qualité audit siège [...]
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Isabelle TURBAT, membre de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau d'ORLEANS,
et pour avocat plaidant Me G... S..., membre de la SELARL [...], avocat au barreau de TARBES

SARL [...]
Prise en la personne de ses gérants, en exercice, et de tous autres représentants légaux domiciliés ès-qualité audit siège [...]
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Isabelle TURBAT, membre de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau d'ORLEANS,
et pour avocat plaidant Me G... S..., membre de la SELARL [...], avocat au barreau de TARBES

D'UNE PART

INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265234515365746
Monsieur M... R...
né le [...] à TOURS (37000)
[...]
[...]

Ayant pour avocat Me Sophie CHARRON, membre de la SARL ARCOLE, avocat au barreau de TOURS

Monsieur K... R...
né le [...] à CHAMBRAY LES TOURS (37)
[...]
[...]

Ayant pour avocat Me Sophie CHARRON membre de la SARL ARCOLE, avocat au barreau de TOURS

Madame F... R... épouse X...
née le [...] à BETZ-LE-CHATEAU (37600)
[...]
[...]

Ayant pour avocat Me Sophie CHARRON membre de la SARL ARCOLE, avocat au barreau de TOURS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 07 Février 2019
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 24 octobre 2019

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 21 NOVEMBRE 2019, à 14 heures, Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, en son rapport, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel D'ORLEANS, et Madame Fanny CHENOT, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS,
Madame Fanny CHENOT, Conseiller,
Madame Nathalie MICHEL, Conseiller,

Greffier :

Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé publiquement par arrêt contradictoire le 23 JANVIER 2020 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :

Par acte authentique 29 mars 2016, reçu par Maître B... I..., notaire à Pau, M. M... R..., Mme F... R... et M. K... R... ont cédé à la société [...] (société [...]) la totalité des 1000 actions qu'ils détenaient dans le capital de la société par actions simplifiées [...] qui exerce la profession de généalogiste successoral, ce à effet du 30 mars 2016, au prix de 1 220 000 €.

La convention contenait une clause de révision de prix en fonction du bilan arrêté au 29 mars 2016 et une garantie d'actif et de passif consentie par les consorts R... à la société [...]. Elle stipulait aussi que serait attribué aux cédants tout ou partie du résultat net de la situation arrêtée au 29 mars 2016 sous forme de dividendes à prélever sur le poste "autres réserves".

Par acte authentique du 13 juin 2016 intitulé "convention d'arrêté définitif de prix" comportant en annexe la situation servant de bilan de référence de la société [...] au 29 mars 2016, le prix fixé initialement a été définitivement arrêté.

Indiquant reprocher au cessionnaire de ne pas avoir procédé à la distribution de dividendes convenue au profit des cédants et devant intervenir au plus tard le 13 juillet 2016, en dépit d'une mise en demeure du 20 novembre 2017 et d'une procédure de conciliation mise en oeuvre par le cabinet d'expertise comptable [...], les consorts R... ont fait assigner par acte du 12 avril 2018, la société [...] et la société [...] au visa des articles 1147 ancien et 1240 du Code civil, afin d'obtenir leur condamnation in solidum à leur payer à titre de dommages-intérêts la somme globale de 63 730€ au titre de l'absence de perception de leur quote part de dividendes (32.640€ pour M... R..., 25.600€ pour Mme R... et 5760€ pour K... R...) et la somme de 20.000€ pour résistance abusive.

Par jugement du 18 janvier 2019, le tribunal de commerce de Tours a :
- déclaré recevable l'action de M. K... R...,
- débouté la société [...] de sa demande de mise « hors de cause »,
- débouté la société [...] et la société [...] de leur demande au titre du cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle ;
- débouté la société [...] et la société [...] de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions ;
- condamné la société [...] à verser aux demandeurs la somme de 63 370 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2016 ;
- dit que les intérêts échus par année entière produiront eux-mêmes intérêts ;
- condamné la société [...] à verser aux demandeurs la somme de 20 000 € au titre de la résistance abusive ;
- condamné la société [...] à payer la somme de 2500 € aux demandeurs à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit n'y avoir lieu de prononcer l'exécution provisoire de la décision,
- condamné la société [...] au coût des assignations, soit la somme totale de 138,95 €, ainsi qu'aux entiers dépens liquidés et taxés en jugeant à la somme de 146,41 €.

La sociétés [...] et [...] ont formé appel de la décision par déclaration du 7 février 2019 en intimant M. M... R..., M. K... R... et Mme F... X... épouse R... et en critiquant les chefs du jugement suivants :
- débouté la société [...] de sa demande de mise "hors de cause",
- débouté la société [...] et la société [...] de leur demande au titre du cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle ;
- débouté la société [...] et la société [...] de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions ;
- condamné la société [...] à verser aux demandeurs la somme de 63 370 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2016 ;
- dit que les intérêts échus par année entière produiront eux-mêmes intérêts ;
- condamné la société [...] à verser aux demandeurs la somme de 20 000 € au titre de la résistance abusive ;
- condamné la société [...] à payer la somme de 2500 € aux demandeurs à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit n'y avoir lieu de prononcer l'exécution provisoire de la décision,
- condamné la société [...] au coût des assignations, soit la somme totale de 138,95 €, ainsi qu'aux entiers dépens liquidés et taxés en jugeant à la somme de 146,41 €.

Dans leurs dernières conclusions du 12 septembre 2019, elles demandent à la cour de :
Déclarer le présent appel recevable et bien fondé,
Vu ensemble les articles 1116 etamp; 1134 de l'ancien Code civil et 1240 du nouveau Code civil ;
Vu l'acte authentique de cession de parts sociales intervenu entre les parties le 29 mars 2016 en
l'étude de Me I..., notaire à Pau ;
1- Sur l'appel incident des consorts R...,
Voir la cour confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Tours le 18 janvier 2019 en ce qu'ils ont été déboutés de leurs demandes de condamnation solidaire contre la société [...] .
2- Voir juger les conclusions des sociétés [...] et [...] parfaitement recevables par application des articles 564 et suivants du Code de procédure civile.
3- Sur l'appel principal des sociétés Groupe [...] développement et [...]
Voir la cour réformer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Tours le 18 janvier 2019 ;
Voir juger les consorts R... auteur d'un dol par une affirmation fausse sur un élément du contrat.
Voir juger que tous les éléments constitutifs du dol sont réunis ;
Voir juger qu'après retraitement des données comptables la société enregistre au 29 mars 2016 un déficit de 26.458 en lieu et place d'un résultat bénéficiaire de 64 445 €;
Voir juger nulle la clause de l'article 2o page 23 de l'acte de cession qui précise que les créances clients qui constituent des avances sur frais de dossiers ne sont pas concernées par la garantie de passif ;
Voir juger M. K... R... comme tenu à la garantie des créances non recouvrées dans le délai de six mois, y compris le non recouvrement sur frais de dossiers ;
Voir Débouter les consorts R... de l'ensemble de leurs demandes et notamment d'un paiement de dividende à hauteur de 64.445 € ;
Voir Condamner solidairement les consorts R... à la somme de 80 000 €
à titre de dommages intérêts sur le fondement de l'article 1240 du nouveau Code civil au titre
d'une saisie conservatoire opérée sur les comptes de la SARL [...];
Voir Condamner solidairement les consorts R... à la somme de 7.789,19 € en réduction du prix de vente, restitution du paiement de l'indu ;
Voir Condamner solidairement les consorts R... à la somme de 20.000 € à titre de dommages intérêts pour procédure abusive outre la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Voir Condamner les consorts R... aux entiers dépens.

Sur l'irrecevabilité prétendue de leurs demandes, elles relèvent que devant le tribunal, elles ont conclu au débouté des demandes des consorts R... et à une réduction du prix de vente au motif qu'elles avaient été victimes de manoeuvres dolosives, de sorte que leur argumentation est identique et que leurs nouvelles demandes tendent aux mêmes fins que leurs demandes initiales.

Elles font valoir que trois semaines après la signature de l'acte authentique, le comptable de la société [...] les a alertées sur le poste de "frais sur succession" qui ne pouvait être contrôlé et qu'au 30 septembre 2016, il a dû être procédé à un retraitement des données comptables, concernant des données antérieures au 29 mars 2016 et qu'il a ainsi été comptabilisé, afin de présenter des comptes réguliers et sincères, une perte définitive d'un montant de 57726,61 € sur les frais engagés sur succession au 29 mars 2016 et une provision pour dépréciation des frais engagés au 29 mars 2016 d'un montant de 33177,55€, de sorte que contrairement aux déclarations des consorts R... lors de la cession, le résultat au 29 mars 2016 enregistrait une perte de 26458 € au lieu du bénéfice de 64445€ déclaré par eux et qu'ils n'étaient donc pas en droit de réclamer un dividende au 29 mars 2016.

Elles précisent qu'après audit de l'ensemble des dossiers, il est apparu que les consorts R... avaient cédé des créances à recouvrer pour un montant de 187.584,90€, (compte 411 du plan comptable) alors que certains dossiers avaient été réglés par les notaires, sans que les frais soient récupérés par les consorts R..., que d'autres avaient fait l'objet d'une facture forfaitaire qui n'a pas non plus été recouvrée par eux, ou n'ont pu aboutir et auraient dû être rebutés et archivés, et que d'autres encore ont été archivés sans que les frais avancés aient été rebutés.

Elles en déduisent que les cédants ont cédé des parts sociales d'une société, dont un montant de 187.584,90€ de frais de dossiers alors qu'à la date de la cession, le 29 mars 2016, ils savaient pertinemment que sur cette somme, celle de 90.904,16€ devait être passée en perte au titre des frais de dossiers rebutés, ce qui ramenait le résultat à un déficit de 26.458€ au lieu du bénéfice déclaré à hauteur de 64.445€, et caractérise un dol qui justifie la nullité de la clause article 2o de la page 23 de l'acte de cession de parts sociales ainsi qu'une simple réduction de prix.

Elles soutiennent en outre que M. K... R... n'est pas concerné par l'exclusion de la garantie de passif que constituent des avances sur frais de dossier, et que le prix de cession doit être réduit de 7789,19€ car du fait de la perte réelle de 26.458€, les capitaux propres au passif du bilan deviennent inférieurs à la somme de 400.000€, étant de 392.210,84€.

M. M... R..., Mme F... R... et M. K... R... demandent à la cour, par dernières conclusions du 3 septembre 2019 de:
Vu les articles 564 et 566 du Code de procédure civile
Constater qu'aucune omission de statuer n'affecte le jugement du 18 janvier 2019.
Déclarer irrecevables comme nouvelles les demandes des appelantes visant à :
-Voir juger que tous les éléments constitutifs du dol sont réunis
-Voir en conséquence juger nulle la clause de l'article 2 page 23 de l'acte de cession qui précise que les créances clients qui constituent une avance sur frais de dossiers ne sont pas concernés par la garantie de passif
-Voir juger M. K... R... comme tenu à la garantie des créances non recouvrées dans le délai de six mois, y compris le non recouvrement sur frais de dossiers
-Voir Condamner solidairement les consorts R... à la somme de 80 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du Code Civil au titre d'une saisie conservatoire opérée sur les comptes de la SARL [...]
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société [...] à payer à titre de dommages et intérêts à M. M... R..., Mme F... R... et M. K... R..., pris conjointement et solidairement la somme globale de 63730€ augmentée des intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2016 et dit que les intérêts échus par année entière produiront eux-mêmes intérêts.
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la SAS [...] n'avait pas commis de faute.
Statuant à nouveau Condamner in solidum la société [...] et la société [...] à payer à titre de dommages et intérêts à M. M... R... Mme F... R... et M. K... R..., pris conjointement et solidairement la somme globale de 63 730€.
Confirmer le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions en ce qu'il a dit que les intérêts échus par année produiront eux-mêmes intérêts et Condamner la société [...] à verser aux demandeurs la somme de 20.000€ à titre de résistance abusive outre une somme 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamner en cause d'appel in solidum la société [...] et la société [...] au paiement de la somme de 5 000€ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Débouter la société [...] et la société [...] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions
Condamner in solidum la Société [...] et la société [...] aux entiers dépens.

Ils soutiennent que certaines des demandes adverses sont irrecevables, car on ignore à qui elles s'adressent et au profit de qui elles sont formées, et car le tribunal n'a commis aucune omission de statuer puisqu'en première instance, les deux sociétés n'ont jamais demandé qu'il soit statué sur un quelconque dol et sur la nullité d'une clause de non garantie stipulée en page 23 de l'acte, de sorte que la demande de nullité pour dol formée pour la première fois en appel est une demande nouvelle qui ne se rattache pas aux demandes initiales et est irrecevable.

Sur le fond ils estiment que la société [...], cessionnaire, a commis une faute de nature contractuelle et agi en fraude de leur droits en ne prenant pas la décision d'affectation du bénéfice arrêté au 29 mars 2019 à leur profit ainsi que convenu, et en décidant au contraire en sa qualité d'actionnaire unique de procéder à son propre bénéfice, le 31 juillet 2017 à la clôture des comptes arrêtés au 30 septembre 2016, à la distribution de dividendes d'un montant de 123.215,40€, et que la société [...] , qui n'ignorait pas la portée des engagements pris par son actionnaire unique lors de la cession, a, en versant les dividendes à l'actionnaire unique la société [...] en connaissance de cause, commis une faute de nature quasi délictuelle qui engage sa responsabilité. Ils ajoutent qu'ils subissent un préjudice résultant de la non-perception par eux de la quote part de dividendes à laquelle ils avaient conventionnellement droit.

En réponse aux arguments adverses, ils expliquent au préalable que dans le cadre de son activité de génalogiste, la société [...] , chargée par le notaire en charge du règlement d'une succession, d'un mandat de recherche des héritiers d'un défunt, engage des frais pour retrouver ces derniers, appelés "frais engagés sur succession", qui soit, sont remboursés par les héritiers effectivement retrouvés, outre la rémunération du généalogiste, dans le cadre d'un contrat de révéléation de succession, soit restent à la charge du généalogiste et passent en "perte" ou en provision sur charge si aucun héritier n'est retrouvé, étant précisé qu'il peut se passer plusieurs années entre le moment où les frais sont engagés et celui où ils sont remboursés et que parfois les frais sont passés en perte puis réintégrés comptablement parcequ'ultérieurement, des héritiers sont retrouvés qui remboursent les frais.

Ils soutiennent que les appelantes remettent en cause la véracité du bilan intermédiaire arrêté au 29 mars 2016 alors que le montant des frais engagés sur succession est exact, qu'une liste exhaustive des clients concernés a été annexée à l'acte notarié du 29 mars 2016, que les parties ont ensuite reçu les audits et informations transmises par les experts comptables respectifs et, par acte authentique du 13 juin 2016 dressé par Maître I..., ont validé la situation servant de bilan de référence au 29 mars 2016 et arrêté définitivement le prix fixé initialement, sans opérer de quelconque réduction.

Ils précisent que contrairement à ce que soutiennent les appelantes, les consorts R... n'ont pas cédé leurs créances mais des titres sociaux dont le prix été déterminé d'un commun accord en fonction d'un bilan sur lequel figurait le montant des frais engagés sur succession et dont la société [...] savait qu'ils pouvaient ne pas être remboursés, tout dépendant de l'issue des dossiers. Ils indiquent que c'est dans ce contexte que ces frais ont été exclus de la garantie de passif selon une clause de l'acte page 23 et qu'il n'y a aucune raison d'annuler cette clause. Ils s'opposent aussi à ce que M. K... R..., qui n'a pas été désigné comme garant et n'a jamais signé une quelconque garantie, soit tenu d'un passif de la société cédée.

Enfin, ils font valoir que la demande de restitution d'une partie du prix de cession à hauteur de 7789,19€ soit disant payée indûment n'est pas justifiée puisque la situation au 29 mars 2016 a été arrêtée en connaissance de cause et le prix confirmé par acte du 13 juin 2016 sans demande de réduction et que la société [...] a pris seule, postérieurement à la cession, une décision de gestion dont la responsabilité lui incombe, concernant la comptabilisation d'une provision de 33178€ et la passation en perte de la somme de 57.726,61€.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits ainsi que de leurs moyens et prétentions.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 24 octobre 2019.
MOTIFS DE LA DÉCISION :

La cour constate à titre liminaire que les appelantes n'ont pas critiqué, dans leur déclaration d'appel, la disposition du jugement déféré ayant déclaré recevable l'action de M. K... R.... Il ne sera donc pas statué sur ce chef du jugement donc la cour n'est pas saisie.

Les dispositions du jugement ayant débouté la société [...] de sa demande de mise "hors de cause" et les deux sociétés défenderesses de leur demande au titre du cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle, sont visées dans la déclaration d'appel mais les appelantes ne forment aucune demande à ce titre dans dispositif de leurs conclusions ni ne développement de moyen sur ces deux points et ces dispositions seront confirmées.

Sur la demande d'irrecevabilité des demandes formées par les appelantes

Les appelantes soulèvent dans leurs motifs l'irrecevabilité de l'ensemble des demandes de condamnation formées par les appelantes au motif qu'on ne saurait pas à qui elles adressent ces demandes et au profit de qui elles sont formées.

Néanmoins, dans le dispositif de leurs écritures qui seul saisit la cour, elle sollicitent seulement de déclarer irrecevables comme nouvelles les demandes des appelantes visant à :
-voir juger que tous les éléments constitutifs du dol sont réunis
- voir en conséquence juger nulle la clause de l'article 2 page 23 de l'acte de cession qui précise que les créances clients qui constituent une avance sur frais de dossiers ne sont pas concernés par la garantie de passif .
- voir juger M. K... R... comme tenu à la garantie des créances non recouvrées dans le délai de six mois, y compris le non recouvrement sur frais de dossiers
- voir condamner solidairement les consorts R... à la somme de 80 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du Code Civil au titre d'une saisie conservatoire opérée sur les comptes de la SARL [...]

La cour doit donc statuer sur l'irrecevabilité éventuelle de ces quatre seules demandes, soulevée au visa de l'article 564 du code de procédure civile qui dispose : "A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait".

La demande tendant à voir juger que tous les éléments constitutifs du dol sont réunis n'était pas formée en tant que tel dans le dispositif de leurs conclusions de première instance mais les sociétés [...] et [...] sollicitaient le débouté des demandes formées par les consorts R... et invoquaient comme moyen l'existence de manoeuvres dolosives. Cette demande tend donc aux mêmes fins que la demande formée devant le tribunal de débouté de la demande de paiement de dividendes. Elle est recevable.

Les demandes de nullité de la clause figurant en page 23 et tendant à dire que K... R... est tenu à la garantie des créances non recouvrées dans le délai de six mois concernent la garantie de passif. Elles ne tendent pas à la même fin que leur demande de débouté des consorts R... au paiement de dividendes puisque la garantie d'actif et de passif, quand elle est mise en oeuvre conduit à une indemnisation du dommage subi (cf page 16 de l'acte du 29 mars 2016), ce qui est différent d'un débouté d'une demande adverse. Il s'agit toutefois de demandes reconventionnelles au sens de l'article 567 du code de procédure civile qui ont un lien suffisant avec les demandes adverses dans la mesure où la clause relative au paiement de dividendes invoquée par les consorts R... se situe aussi dans la partie de l'acte de cession relative à la garantie d'actif et de passif (page 22). Elles sont recevables.

La demande de dommages et intérêts à hauteur de 80.000€ est formée au titre du préjudice que les appelantes indiquent subir en raison de la saisie conservatoire réalisée par les consorts R... pour garantir la créance dont ils réclament la reconnaissance dans la présente instance. Elle se rattache donc également aux demandes formées par ces derniers et est recevable.

Sur la demande de paiement des dividendes formée par les consorts R...

L'acte de cession du 29 mars 2016 stipule en page 22 :
« Les parties ayant convenu d'arrêter une situation en forme de bilan au 29 mars 2016, il résultera de cette situation un bénéfice intermédiaire réalisé par la société.
En conséquence il est convenu d'un commun accord entre les parties que le cessionnaire
s'engage à procéder à une distribution de dividendes prélevés sur le poste « autres réserves » au profit du cédant, d'un montant équivalent à tout ou partie du résultat réalisé par la société du 1 er octobre 2015 au 29 mars 2016 que le cédant souhaite appréhender.
Il est ici précisé que ledit résultat de référence, après retraitement fiscal, devra être calculé en retenant un chiffre d'affaires au plus égal à 380 000 euros.
Si par cas ce chiffre d'affaires était supérieur à 380 000 euros, le résultat appréhendable par le cédant, sous forme de distribution de dividendes prélevés sur le poste « autres réserves »
sera plafonné au résultat dégagé sur un chiffre d'affaires de 380 000 euros.
Cet engagement de distribution au bénéfice du cédant devra intervenir dans le mois de
l'arrêté définitif de la situation en forme de bilan au 29 mars 2016. »

Le bilan (situation des comptes) arrêté au 29 mars 2016, mentionné dans cette clause, établi par le [...] comptable des cédants, et annexé à l'acte authentique du 13 juin 2016
(Convention de d'arrêté définitif de prix) qui y fait référence en page 7, fait apparaître les éléments suivants :
- un résultat net comptable au 29 mars 2016 de 64.445 € tenant notamment compte parmi les produits d'exploitation d'un chiffre d'affaires de 384.262€ net,
- un total bilan de 637.422€ comprenant à l'actif, entre autres éléments des créances à hauteur de 230.120€, dont 187.585€ de "débours avancés sur dossiers" (compte no 467100) et au passif, des capitaux propres à hauteur de 483.115€ englobant le résultat de l'exercice (bénéfice de 64.445€).

Il est constant que les consorts R... n'ont perçu aucun dividende dans le mois suivant l'arrêté définitif de la situation au 29 mars 2016 ni après, en dépit de mises en demeure et qu'au contraire, par décision du 31 juillet 2017 de son associée unique, la société [...], la société [...] a décidé d'affecter son résultat de l'exercice clos le 30 septembre 2019 à hauteur de 123.215,40€ à son associé unique la société [...].

Pour s'opposer à la demande des consorts R..., les appelantes invoquent le retraitement des données comptables susvisées qui a dû être opéré postérieurement aux deux actes authentiques conclus les 29 mars 2016 et 13 juin 2016 pour tenir compte de données antérieures au 29 mars 2016, dont il ressort selon elles que le résultat de la société au 29 mars 2016 serait en réalité un déficit de 26.458€ et non un résultat bénéficiaire de 64.445€. Elles expliquent que sur la somme de 187.584,90€ de débours avancés sur dossiers, présentée dans le bilan comme des créances à recouvrer, d'une part la somme de 57.726,61€ était en réalité définitivement perdue et aurait dû apparaître en charges et non en créances, s'agissant de frais ne pouvant être recouvrés parce que les dossiers étaient archivés ou très anciens, ou avaient donné lieu à des renonciations à la succession, d'autre part, la somme de 33.177,55€ devant être passée en provision pour dépréciation des frais engagés au 29 mars 2016 d'un montant de 33 177,55€. Elles en déduisent que les consorts R... n'ont droit à aucune distribution de dividende.

Ce raisonnement ne peut toutefois être suivi pour deux raisons.

En premier lieu, "l'arrêté définitif de la situation en forme de bilan au 29 mars 2016" mentionné en toute fin de la clause précitée figurant en page 22 de l'acte a été validé dans l'acte du 13 juin 2016 et ce, conformément à l'acte de cession du 29 mars 2016 qui prévoyait en pages 12, 13 et 14 une procédure très précise pour parvenir à l'arrêté définitif de cette situation :
"Le prix de 1.220.000€ constitue un prix plafond et ne vairera qu'à la baisse si la situation en forme de bilan arrêtée au 29 mars 2016 faisait apparaître des capitaux propres inférieurs à 400.000€. (...)
Cette situation arrêtée en forme de bilan au 29 mars 2016 servira de référence à la clause de garantie d'actif et de passif ci-après prévue.
(...)
Hormis ce qui a spécialement été convenu ci-dessus, l'ensemble des comptes de bilan, actif et passif et des comptes de produits et de charges du bilan de référence seront déterminées et arrêtées par le cédant seul.
Le bilan de référence établi comme il vient d'être dit devra être remis au cessionnaire au plus tard le 15 mai 2016.
Il sera contrôlé dans le délai maximum de dix jours de sa remise au cessionnaire par l'expert comptable de ce dernier et à ses frais. Le cessionnaire devra dans ce même délai faire part au cédant de ses observations sur ce bilan de référence. Ses observations ne pourront porter que sur les comptes de charges et de produits et de bilan, actif et passif, faisant l'objet de ce qui a été spécialement convenu ci-dessus.
Dans les quinze jours de la réception de ces observations, le cédant et le cessionnaire arrêteront à titre définitif le bilan de référence et le prix définitif de cession selon les modalités fixées ci-dessus.
(...) Le bilan de référence sera établi en autant d'exemplaoires que de parties ; il sera signé par les parties, chacune en conservant un, notamment pour les besoins de la convention de garantie.
A défaut d'accord entre les parties sur l'établissement du bilan de référence et sur la fixation du prix définitif, ce bilan de référence et le prix définitif de cession seront établis définitivement par un expert comptable choisi d'un commen accord entre elles, ou à défaut d'accord par un expert comptable désigné par le président du tribunal de commerce de Pau statuant en référé conformément aux dispositions de l'article 1592 du Code civil. (...)"

Cette procédure a été respectée ainsi qu'il ressort du courrier adressé le 20 mai 2016 à la société [...] par son expert comptable la SARL [...], dans lequel elle indique que la situation de la société [...] arrêtée au 29 mars 2016 lui a été communiquée le 9 mai 2016, qu'elle a pu obtenir du comptable du cédant les pièces et éclaircissements nécessaires (pièce 2 produite par les appelantes).

L'expert comptable a effectué certains retraitements et a considéré que la situation arrêtée au 29 mars 2016 faisait bien ressortir des capitaux propres d'un montant supérieur à 400.000€ et que le résultat pouvait être fixé à 60.183€ (page 14). Il n'a pas effectué de retraitements concernant le compte "débours avancés sur dossiers" évalué à 187.584,90€ et a toutefois attiré l'attention du cessionnaire sur la nécessité d'examiner attentivement ce poste inclus dans l'actif cédé en faisant un point sur chaque dossier, précisant : "si ces dossiers n'aboutissent pas à un règlement pour les diverses raisons que vous connaissez bien, ces frais constituent des charges qui viendraient impacter les résultats futurs et la situation au 29 mars 2017 en baissant le résultat et les capitaux propres et donc éventuellement le prix d'acquisition des titres ou le dividende à verser su rle résultat acquis au 29 mars 2016".

Il ressort des termes de ce courrier que la société [...] connaissait le fonctionnement du métier et notamment le mécanisme des avances de frais qui peuvent ne pas être recouvrés pour des raisons qu'elle "connaît bien". Or, alors qu'elle avait cette connaissance et avait en outre été précisément mise en alerte sur le poste "débours avancés sur dossiers" évalué à 187.584,90€, elle n'a adressé aucune observation au cédant et a approuvé les comptes sociaux au 29 mars 2016, dans le cadre de l'acte authentique signé le 13 juin suivant, sans demander un délai supplémentaire pour étudier les dossiers concernés ni émettre aucune réserve sur le poste susvisé et les conséquences pouvant en résulter.

La situation arrêtée au 29 mars 2016 a donc été validée le 13 juin 2016 et ne peut être remise en cause après coup par un retraitement comptable et une décision de gestion unilatérale qui ne sont pas opposables aux cédants, sauf pour le cessionnaire à démontrer que des informations déterminantes lui ont été cachées dont il n'a eu connaissance que postérieurement, ce qui peut remettre en cause la validité de la convention ou justifier la mise en jeu de la garantie d'actif et de passif prévue dans le contrat.

Or, en second lieu, le bien fondé du retraitement comptable opéré après les deux actes notariés par les appelantes, qui conduit à retenir un résultat un déficitaire de 26.458€ au lieu d'un bénéfice de 64.445€, n'est pas démontré de manière suffisante et il n'est pas établi, ainsi que prétendu, que les cédants auraient délibérément caché des informations voire même utilisé des éléments faux rendant erronée la situation comptable arrêtée au 29 mars 2016, et constituant un dol.

En effet, les attestations de l'expert comptable établies les 3 mai 2018 et 14 septembre 2018, produites en pièce 5 et 11 (expert comptable) et 6 (commissaire au compte) se bornent à indiquer que la société a bien enregistré à la demande de son commissaire aux comptes deux écritures au 30 septembre 2016 pour constater une perte définitive sur frais de successions de 57.726,61€ et une perte probable par voie de provision de 33.177€, ce pour des frais engagés avant le 29 mars 2016, ce qui ramène le résultat à une perte de 26.458€. De même le commissaire aux comptes atteste le 5 mai 2018 que les informations obtenues par sondages ou d'autres méthodes de sélection concordent avec les éléments ayant servide base à l'établissement des comptes annuels de l'exercice clos le 30 septembre 2016. Ces attestations ne peuvent à elles seules remettre en cause l'accord des parties intervenu le 13 juin 2016 sur la situation de la société [...] au 29 mars 2016.

Les autres documents produits par les appelantes sont également insuffisants. Elles produisent en pièce 10 un tableau excel très peu lisible qui viserait les dossiers "rebutés" (c'est à dire ceux dont les frais ne peuvent être retrouvés) et dont l'origine et par suite la force probante ne sont pas établies, et en pièce 15 la copie d'un cahier manuscrit mentionnant certains dossiers comme archivés et qui aurait été le "cahier de traçage des dossiers de l'étude de généalogie". Outre le fait que ce document contient 188 pages avec mentions de noms sans aucune référence de numéros, contrairement à la liste des dossiers de succession en cours au 31 mars 2016 jointe au bilan de référence, la cour constate qu'il n'est ni daté ni signé et que les intimés ne reconnaissent pas son origine ni surtout son authenticité, précisant qu'il aurait été annoté après la cession. Maître A..., huissier de justice à [...] (64) se borne à indiquer par procès verbal du 12 juillet 2019, soit plus de trois ans après la cession, que le cahier a été retrouvé dans les locaux de l'étude de Tours, sans l'avoir constaté elle-même, ce cahier lui ayant été remis par la société [...]. En outre, les appelantes se limitent à mentionner dans leurs conclusions que certaines de ces dossiers, dont elles donnent des numéros mais sans mentionner les noms des personnes concernées (alors que le document produit ne comporte que des noms) seraient archivés, en se fondant uniquement sur le fait qu'un numéro qui serait un numéro de boite d'archive serait indiqué en face du nom. Cette affirmation n'est pas suffisamment étayée et il ne peut être reconnu de force probante à ce document pour l'ensemble de ces raisons.

Les factures ou courriers produits en pièces 17 à 45 ne sont pas non plus probants. La production de factures d'honoraires ou frais même anciennes, adressées par la société [...] ne signifie pas que les sommes correspondantes auraient dû être comptabilisées en pertes puisqu'ainsi que l'expliquent les intimés, le traitement des dossiers de succession peut être très long et certains frais avancés sont recouvrés plusieurs années après l'ouverture de la succession. En outre, certaines des pièces produites de nature à établir que les avances ne pourront être recouvrées, en l'absence de fonds disponibles, sont postérieures au 29 mars 2016 et ne pouvaient être connues des cédants (pièces 38 et 39).

Si la pièce 42 établit que le dossier dont s'agit, concernant des frais avancés à hauteur de 212,90€, a été classé sans suite par M. R... le 15 septembre 2015, de sorte qu'il n'était plus actif au 29 mars 2016, il peut s'agir d'une simple erreur et il n'est pas démontré qu'il s'agissait d'un mensonge délibéré.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de retenir, d'une part que le bilan de référence arrêté au 29 mars 2016 a été validé par les parties lors de l'acte authentique du 13 juin 2016 après que la société [...] ait reçu les informations nécessaires et ait pu les faire analyser par son expert compable et d'autre part que les appelantes ne démontrent pas que les cédants auraient, ainsi qu'elles l'allèguent, sciemment fait apparaître dans le poste de créances "débours avancés sur dossiers" des sommes dont ils savaient avant le 29 mars 2016 qu'elles étaient en réalité irrecouvrables et auraient dû être passés en pertes. Le caractère non-sincère de la situation comptable arrêtée au 29 mars 2016 et par suite le dol allégué, ne sont donc pas établis.

Les consorts R... ont en conséquence vocation à percevoir les dividendes sur la base du bilan de référence arrêté au 29 mars 2016 validé dans l'acte du 13 juin 2016.

Les appelantes prétendent à titre subsidiaire que cette demande de paiement de dividendes ne pourrait prospérer car la clause susvisée mentionne la distribution de dividendes d'un montant équivalent à "tout ou partie" du résultat réalisé par la société du 1er octobre 2015 au 29 mars 2016 et non de sa totalité.

Cette formulation ne signifie toutefois pas que la part de dividendes devant être distribuée aux cédants ne pourrait pas être déterminée, notamment par le juge, mais s'explique par le fait qu'en vertu de la clause susvisée, le montant des dividendes à distribuer se calcule à partir du résultat de référence, mais en retenant un chiffre d'affaires au plus égal à 380 000 euros, de sorte que si le chiffre d'affaires réellement réalisé au 29 mars 2016 est supérieur à cette somme, le résultat pouvant être appréhendé par le cédant est plafonné au résultat dégagé sur un chiffre d'affaires de 380 000 euros et ne correspond donc qu'à une partie du résultat net initial.

Tel est le cas en l'espèce puisqu'il ressort du bilan arrêté au 29 mars 2016 que la société [...] a réalisé un chiffre d'affaires de 384.262€, supérieur au chiffre d'affaires plafond de 380.000€ ce qui explique après calcul que le montant des dividendes auxquels avait droit les consorts R... ne représente qu'une partie du résultat net initial, soit la somme de 63.730€ (64.445 x 380.000/384.262), ainsi qu'il ressort du courrier adressé le 15 février 2018 par le [...] (pièce 11 produite par les intimés).

En ne faisant pas procéder à la distribution de dividendes conformément à la clause susvisée, la société [...] a commis une faute qui engage sa responsabilité contractuelle conformément à l'article 1147 ancien du Code civil.

C'est à bon droit que le tribunal a retenu que la société [...] n'avait pas commis de faute sur le fondement de l'article 1240 du Code civil, la décision de prélever les dividendes incombant à sa seule associée unique la société [...] .

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la seule société [...] à verser aux demandeurs la somme de 63.370€. Le tribunal a octroyé sur cette somme les intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2016. Néanmoins, la première mise en demeure au sens de l'article 1231-6 du Code civil, versée aux débats est du 20 novembre 2017. Les intérêts au taux légal sont donc dus à compter du 20 novembre 2017. Le jugement sera infirmé de ce chef et confirmé en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts, sauf à ajouter que cette capitalisation prend effet à compter du 12 avril 2018 date de l'assignation contenant cette demande.

Sur les demandes relatives à la garantie d'actif et de passif

L'acte de cession contient une garantie d'actif et de passif incombant à M. M... R... et à Mme R... et stipule notamment :
- en page 16 : "M. M... R... agissant tant en son nom propre qu'en qualité de représentant de la société [...] , déclare et garantit au cessionnaire qu'à la date des présentes, les déclarations faites par lui ci-après et que les annexes aux présentes sont complètes, sincères et exactes dans les conditions prévues aux présentes.
(...) Le cédant sera tenu d'indemniser le Cessionnaire de tous dommages résultant de l'inexactitude ou du caractère incomplet de toutes déclarations et informations ci-après ou de tout manquement aux obligations par lui ci-après souscrites",
- en page 22 "bonne foi" : "Ni la présente convention, ni aucune de ses annexes, ni aucun autre document écrit fourni au cessionnaire par le cédant, ne contient une déclaration inexacte ou erronée portant sur un fait important, ni n'omet de préciser un fait dont l'importance serait telle que l'absence de sa révélation donnerait aux déclarations contenues dans la présente convention, ou dans ses annexes, un caractère trompeur.
Le cédant n'a connaissance d'aucun fait de nature à affecter de façon importante et défavorable les activités, les actifs, la situation financière ou les perspectives de la Société qui n'aient été exposés ou identifiés dans les présentes ou dans leurs annexes".

L'acte stipule toutefois aussi en page 23, 2o-1.a : "M. R... et Mme R... seuls garants s'engagent à désintéresser le cessionnaire (...)
- soit en raison du non encaissement par la société dans le délai de six mois des créances inscrites dans le bilan de cession, étant précisé que les créances clients qui constituent des avances sur frais de dossiers ne sont pas concernées par la présente disposition".

Pour mettre en oeuvre la garantie, le cessionnaire doit porter à la connaissance du cédant le fait ou l'événement susceptible d'entraîner le jeu de la garantie, dans un délai de 15 jours à compter du jour où il en lui-même eu connaissance, ce à peine de déchéance.

La société [...] a demandé à M et Mme R... par lettre recommandée du 20 juillet 2017 la mise en jeu de la garantie de passif. Ces derniers se sont opposés au jeu de la garantie d'actif et de passif en visant l'exclusion prévue dans la clause précitée page 23 article 2o- 1 a).

Les appelantes demandent à la cour de déclarer nulle cette clause au motif qu'elle a été stipulée pour couvrir le dol commis à la formation du contrat quant à un paiement de dividende qui en réalité n'est pas dû, sans toutefois demander devant la cour la mise en ouvre de la garantie à l'égard de M et Mme R... qu'ils ne sollicitent qu'à l'égard de M. K... R....

Néanmoins, et en tout état de cause, les éléments chiffrés que les appelantes prétendent faux ne ressortent pas de la convention du 29 mars 2016 elle-même ou de ses annexes, mais du bilan arrêté au 29 mars 2016 qui n'était pas annexé à cet acte et a été communiqué postérieurement avant d'être annexé à l'acte notarié du 13 juin 2016. En outre et ainsi qu'il a déjà été dit, la preuve d'un dol et d'une surestimation des éléments d'actif n'est pas démontrée.

Il n'y a donc pas lieu à nullité de la clause susvisée ni à mise en oeuvre de la garantie à l'égard de M. K... R..., qui au surplus n'est pas mentionné comme garant en page 23 de l'acte du 29 mars 2016, seuls M. M... R... et Mme R... étant visés en cette qualité.

Sur la demande de paiement de l'indû formée par les sociétés [...] et [...]

La convention du 29 mars 2016 stipule en page 11 que le prix de 1.220.000€ constitue un prix plafond et ne variera qu'à la baisse si la situation en forme de bilan arrêtée au 29 mars 2016 faisait apparaître des capitaux propres inférieurs à 400 000 €.

L'argumentation des appelantes concernant le retraitement de la situation comptable arrêté au 29 mars 2016 n'ayant pas été retenue, le montant des capitaux propres tel que rappelé dans l'acte du 13 juin 2016 est exact et il n'y a pas lieu à réduction du prix de vente ni à remboursement d'un indû au cessionnaire.

Sur les demandes de dommages et intérêts

Aucune faute n'étant retenue contre les consorts R... et leur demande en paiement étant retenue, les appelantes ne peuvent arguer d'un préjudice au titre de la saisie conservatoire pratiquée par les cédants. Leur demande de dommages et intérêts à hauteur de 80.000€ doit donc être rejetée. Il en va de même de la demande des appelantes à hauteur de 20.000€ pour procédure abusive, la procédure engagée par les consorts R... étant reconnue bien fondée.

Les consorts R... demandent des dommages et intérêts à hauteur de 20 000€ pour résistance abusive, au motif que les défenderesses se sont abstenues de payer spontanément pendant plus de trois ans une dette pourtant incontestable.

Néanmoins, outre le fait que le préjudicedes consorts R... lié au retard dans le paiement est réparé par l'octroi des intérêts au taux légal sur la somme due, la cour constate que les sociétés [...] et [...] ont développé des arguments motivés à l'appui de leur refus de régler les sommes réclamées et que si ces arguments ont été rejetés en première instance puis en appel, ils n'établissent pas pour autant un abus de leur part.

La demande de dommages et intérêts pour résistance abusive sera rejetée par infirmation du jugement.

Sur les autres demandes

Les appelantes qui succombent dans leurs demandes seront condamnées in solidum aux entiers dépens et devront verser aux intimés pris ensemble la somme de 5000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Déboute les consorts R... de leur demande d'irrecevabilité concernant une partie des demandes formées par les sociétés [...] et [...] ;

- Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :
* dit que la somme de 63.370€ sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2016,
* condamné la société [...] à verser aux demandeurs la somme de 20 000 € au titre de la résistance abusive ;

Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés,

- Dit que la somme de 63.730€ au paiement de laquelle la société [...] est condamnée produit intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2017
- Rejette la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive formée par les consorts R... ;

- Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;

Y ajoutant,

- Dit que la capitalisation des intérêts dus pour une année entière prend effet le 12 avril 2018 ;

- Rejette l'ensemble des demandes formées par les sociétés [...] et [...] ainsi que le surplus des demandes ;

- Condamne in solidum les sociétés [...] et [...] à verser à M. M... R..., Mme F... X... épouse R... et M. K... R... pris ensemble la somme de 5000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne in solidum les sociétés [...] et [...] aux dépens.

Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 19/005871
Date de la décision : 23/01/2020
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2020-01-23;19.005871 ?
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