COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 12/09/2019
la SCP CHAPELIN VISCARDI-VERGNAUD-LEITAO
ARRÊT du : 12 SEPTEMBRE 2019
No : 277 - 19
No RG 18/02436
No Portalis DBVN-V-B7C-FYME
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTARGIS en date du 17 Mai 2018
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265230845153272
SARL FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS
[...]
Ayant pour avocat Maître Dominique CHAPELIN-VISCARDI, membre de la SCP CHAPELIN-VISCARDI-VERGNAUD&LEITAO, avocat au barreau de Montargis,
D'UNE PART
INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: -/-
Madame J... R...
née le [...] à PARIS (75012) [...]
[...]
Défaillante
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 10 Août 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 9 Mai 2019
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l'audience publique du 23 MAI 2019, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, en son rapport, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,
Greffier :
Madame Marie-Lyne EL BOUDALI, lors des débats,
Madame Marie-Claude DONNAT, lors du prononcé,
ARRÊT :
Prononcé le 12 SEPTEMBRE 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
***
EXPOSE DU LITIGE :
Par acte sous seing privé du 15 avril 2000, Madame J... R... a donné à bail commercial un local sis [...] à la société IMMO'VAL aux droits de laquelle se trouve la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS par suite de la cession du fonds de commerce et du droit au bail par acte du 28 février 2008.
Par acte du 28 janvier 2012, la société FONTENOY IMMOBILIER a sollicité le renouvellement du bail pour une durée de 9 ans à compter du 1er avril 2012.
Par acte du 25 avril 2012 Madame R... a accepté le principe du renouvellement du bail moyennant un loyer de 14.000 euros.
Le 19 octobre 2012 Madame R... a fait délivrer à la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS un acte de rétractation de son accord sur le renouvellement du bail et lui a donné congé pour motifs graves et légitimes.
Madame R... a fait assigner le 16 octobre 2014, la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS devant le tribunal de grande instance de Montargis, à l'effet de voir valider le congé du 19 octobre 2012, de voir ordonner en conséquence l'expulsion de la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS et de tous occupants de son chef sous astreinte, de la voir condamner à lui payer 1.200 euros par mois à compter du 1er juillet 2013 à titre d'indemnité d'occupation jusqu'à la libération effective des lieux, 1.005,06 euros au titre de la taxe foncière, 1.401,40 euros au titre de l'actualisation des loyers, 420,51 euros au titre des travaux d'entretien ainsi qu'à effectuer tous travaux d'entretien et notamment de peinture et de papiers peints. Il était également réclamé l'exécution provisoire du jugement et une somme de 3.000 euros pour frais de procédure.
La société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS qui s'est opposée aux prétentions, a demandé au tribunal de juger que le bail s'est renouvelé à compter du 1er avril 2012 pour 9 années, de condamner Madame R... à lui payer 3.248,76 euros correspondant à la facture de remplacement de la chaudière et 2.000 euros pour frais de procédure.
Par jugement du 21 septembre 2017, le tribunal a ordonné la réouverture des débats aux fins de production de pièces listées en annexe de l'assignation.
Par jugement du 17 mai 2018, le tribunal a dit que le congé résultant de la rétractation était valable avec indemnité d'éviction, a condamné la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS à payer une indemnité d'occupation égale au montant du loyer payé au 30 juin 2013 et jusqu'à libération effective des lieux, a débouté Madame R... de sa demande d'expulsion, a condamné la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS à lui payer la somme de 420,51 euros, a débouté Madame R... de ses autres demandes et l'a condamnée à payer une indemnité de procédure de 1.200 euros et a débouté la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS de sa demande reconventionnelle.
Pour se déterminer le tribunal a retenu que Madame R... ne justifiait d'aucun motif grave et légitime découvert postérieurement à l'acte de rétractation, que le congé était valable mais que le locataire qui pouvait en conséquence prétendre à une indemnité d'éviction avait droit au maintien dans les lieux jusqu'à son paiement, que l'indemnité d'occupation devait être fixée au montant du loyer, que Madame R... ne fournissait pas les justificatifs de ses demandes au titre de la taxe foncière et de l'actualisation des loyers, qu'elle était en revanche en droit d'obtenir paiement des factures de travaux acquittées pour 420,51 euros et enfin que les travaux de remplacement de la chaudière dont la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS réclamait le remboursement lui incombaient en application du bail.
La société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS a relevé appel du jugement le 10 août 2018.
Elle en poursuit l'infirmation partielle et souhaite voir juger que le bail consenti le 15 avril 2000 s'est renouvelé à compter du 1er avril 2012 pour une durée de 9 années jusqu'au 31 mars 2021, voir condamner Madame R... à lui payer la somme de 3.248,76 euros avec intérêts de droit à compter du paiement de la facture et voir dire que la condamnation se compensera à due concurrence avec les loyers à venir. Il est également sollicité la condamnation de Madame R... à payer 2.000 euros pour frais de procédure ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de la SCP CHAPELIN-VISCARDI et VERGNAUD.
Elle soutient que l'acte de rétractation délivré le 19 octobre 2012 est sans effet dans la mesure où Madame R... a par acte du 25 avril 2012 consenti au renouvellement du bail et que par voie de conséquence le congé pour refus de renouvellement est un acte inexistant puisque le bail s'est renouvelé à effet du 1er avril 2012 pour une durée de 9 années.
Elle prétend que la faculté de rétractation n'existe que pour autant que les parties ne se sont pas accordées sur le prix du bail renouvelé et qu'en l'espèce, à la date à laquelle Madame TACHETa introduit son action aux fins de faire valider son congé le montant du loyer du bail renouvelé était fixé puisqu'elle avait laissé se prescrire l'action en fixation du loyer.
Elle affirme surabondamment que les griefs invoqués dans le congé ne sont pas fondés et fait valoir qu'il existe un différend avec Madame R... concernant le montant de l'impôt foncier qui correspond à 50% de la surface commerciale à l'exclusion du local à usage d'habitation contrairement à ce que celle-ci prétend, que les locaux sont régulièrement assurés, qu'elle s'acquitte sans retard du montant des loyers depuis 2009, qu'elle avait jusqu'en 2018 pour effectuer les travaux de peinture et qu'elle les a commandés.
Elle indique avoir été contrainte, du fait de l'inertie de la propriétaire, de faire remplacer la chaudière et s'estime fondée à obtenir la condamnation de Madame R... à lui rembourser le coût de ces travaux dès lors qu'il s'agit d'une grosse réparation au sens de l'article 606 du code civil à la charge du propriétaire.
Madame R... n'ayant pas constitué avocat, la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS lui a fait signifier sa déclaration d'appel et ses conclusions par acte du 8 novembre 2018 par acte déposé en l'étude de l'huissier instrumentaire.
SUR CE
Attendu que Madame R... ayant adressé plusieurs courriers à la cour à la suite de l'assignation délivrée en l'étude de l'huissier, il est établi qu'elle a eu connaissance de la lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile, de sorte que l'arrêt doit être qualifié de réputé contradictoire ;
I - Sur le congé pour motif grave et légitime :
Attendu que Madame R... qui a accepté par acte extrajudiciaire du 25 avril 2012, le principe du renouvellement du bail à compter du 1er avril 2012 moyennant un loyer annuel porté à 14.000 euros en application de l'article L 145-10 du code de commerce, disposait d'un délai de 2 ans prévu à l'article L 145-60 du même code pour engager à compter de son acceptation une action en fixation du loyer ;
Attendu que faute d'avoir saisi le juge des loyers commerciaux dans le délai imparti expirant le 26 avril 2014 aux fins de fixation du montant du loyer, le bail s'est trouvé renouvelé aux conditions initiales à effet du 1er avril 2012 pour une durée de 9 années ;
Qu'il s'ensuit qu'à la date du 16 octobre 2014 à laquelle Madame R... a introduit son action en validation du congé donné pour motifs graves et légitimes le 19 octobre 2012 sans indemnité d'éviction à effet du 30 juin 2013, elle ne pouvait plus rétracter son accord puisqu'il n'existait plus de contestation sur le montant du loyer du fait du renouvellement du bail aux conditions initiales à l'expiration du délai de prescription ;
Qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le congé résultant de la rétractation était valable avec indemnité d'éviction et a condamné la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS à payer une indemnité d'occupation égale au montant du loyer payé au 30 juin 2013 et jusqu'à la libération effective des lieux ;
II - Sur la demande reconventionnelle de la société FONTENOY IMMOBILIER :
Attendu que la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS s'estime en droit d'obtenir la condamnation de Madame R... à lui payer la somme de 3.248,76 euros correspondant au coût de remplacement de la chaudière et d'achat de radiateurs électriques, aux motifs qu'il s'agit d'une grosse réparation prévue par l'article 606 du code civil à la charge du bailleur ;
Attendu que selon l'article 606 les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières, celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier, toutes les autres réparations sont d'entretien ;
Attendu que contrairement à ce que soutient l'appelante l'article 606 énumère limitativement les grosses réparations (Cass Civ 3ème 27 novembre 2002 pourvoi no 01719 2002) ;
Attendu que selon les stipulations du bail reproduites dans le jugement, le bailleur n'est tenu que des grosses réparations de l'article 606 du code civil ;
Qu'il s'ensuit que les travaux de changement de chaudières n'étant pas visés par l'article 606 du code civil c'est à juste titre que le tribunal a débouté la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS de sa demande de remboursement des frais de remplacement de la chaudière et d'achat de radiateurs électriques et le jugement doit être confirmé ;
Attendu que les autres chefs de la décision n'étant pas querellés le jugement est part conséquent définitif ;
Attendu que Madame R... qui succombe sera condamnée aux dépens et à payer à la société FONTENOY IMMOBILIER une indemnité de 2.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, réputé contradictoire et en dernier ressort :
CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a dit que le congé résultant de la rétractation est valable avec indemnité d'expulsion et a condamné la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS à payer une indemnité d'occupation égale au montant du loyer payé au 30 juin 2013 et jusqu'à la libération effective des lieux ;
STATUANT À NOUVEAU
DIT que le bail consenti le 15 avril 2000 s'est renouvelé à compter du 1er avril 2012 aux clauses et conditions du bail précèdent pour 9 années soit jusqu'au 31 mars 2021 ;
CONDAMNE Madame J... R... à payer à la société FONTENOY IMMOBILIER MONTARGIS la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE Madame J... R... aux dépens ;
ACCORDE à la SCP CHAPELIN-VISCARDI et VERGNAUD le droit prévu à l'article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT