COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 29/08/2019
la SELARL BLANC GILLMANN
Me Amelie TOTTEREAU - RETIF
ARRÊT du : 29 AOUT 2019
No : 265 - 19
No RG 18/02270 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FYAW
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal d'Instance de MONTARGIS en date du 23 Mars 2018
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]
SA CREDIPAR
Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège, [...]
Ayant pour avocat postulant Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Chantal BLANC, membre de la SELARL BLANC-GUILLMAN et BLANC, avocat au barreau de MARSEILLE
D'UNE PART
INTIMÉ : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]
Monsieur A... S...
né le [...] à MIGENNES [...]
[...]
Ayant pour avocat Me Amélie TOTTEREAU-RETIF, avocat au barreau d'ORLEANS,
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 26 Juillet 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 9 Mai 2019
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 23 MAI 2019, à 9 heures 30, devant Madame Elisabeth HOURS , Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.
Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,
Greffier :
Lors des débats : Madame Fatima HAJBI,
Lors du prononce : Madame Marie-Claude DONNAT.
ARRÊT :
Prononcé le 29 AOUT 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 24 mai 2014, la société CREDIPAR a consenti à Monsieur A... S... un crédit affecté à l'acquisition d'un véhicule automobile d'un montant de 12.235 euros remboursable en 60 mensualités au taux nominal annuel de 7,81%.
Des échéances de remboursement étant demeurées impayées, CREDIPAR, après avoir en vain mis en demeure Monsieur S... de s'acquitter des arriérés, a prononcé la déchéance du terme et fait procéder le 25 août 2016 à l'appréhension du véhicule avant d'assigner l'emprunteur le 24 novembre 2017 devant le tribunal d'instance de Montargis en réclamant sa condamnation à lui verser la somme de 6.695,12 euros restant due.
Par jugement en date du 23 mars 2018 le tribunal a déclaré recevable cette demande mais prononcé la déchéance de CREDIPAR de son droit aux intérêts conventionnels , écarté l'application des articles 1153 du code civil et L. 313-3 du code monétaire et financier, condamné Monsieur S... à payer à CREDIPAR la somme de 2.140,18 euros et dit que cette somme ne portera pas intérêt au taux légal, autorisé Monsieur S... à apurer sa dette en 9 mensualités de 250 euros, la dernière mensualité étant constituée du solde, débouté les parties du surplus de leurs demandes et condamné Monsieur S... aux dépens. Pour statuer ainsi il a retenu que le prêteur ne justifiait pas avoir remis la notice d'assurance à l'emprunteur alors que le contrat était accompagné d'une proposition d'assurance facultative.
CREDIPAR a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 26 juillet 2018.
Elle en poursuit l'infirmation en demandant à la cour de condamner Monsieur S... à lui payer la somme de 3.420,67 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 19 mars 2019, outre celle de 1.500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens et le montant des sommes retenues par l'huissier de justice au titre de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 en cas d'exécution forcée, et d'accorder à Maître GARNIER le droit prévu à l'article 699 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que, pour démontrer que la notice d'assurance a bien été remise à l'emprunteur, elle produit un exemplaire vierge "en général" de l'offre de crédit signé par Monsieur S... qui démontre qu'est communiqué l'extrait significatif des conditions générales des contrats d'assurance facultatives décès ainsi que l'extrait significatif de la complémentaire assistance et rappelle que Monsieur S..., en signant et acceptant l'offre de crédit, a expressément déclaré reconnaître avoir reçu un exemplaire du contrat de crédit. Elle soutient donc que l'offre de crédit était donc parfaitement conforme aux exigences du code de la consommation.
Elle ne conteste pas par ailleurs les versements dont fait état l'intimé et produit un décompte actualisé de sa créance.
Monsieur S... sollicite la confirmation du jugement déféré et demande à la cour d'y ajouter la condamnation de CREDIPAR à lui restituer la somme trop versée de 2.568,45 euros et à lui verser une indemnité de procédure de 3.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de Maître Amélie TOTTEREAU-RETIF.
Il souligne que la proposition d'assurance facultative n'a été communiquée par le prêteur ni en première instance ni en appel.
Il précise que le capital emprunté, hors intérêts, s'élève à la somme de 6.027,46 euros et qu'il a réglé au total 8.595,91 euros.
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR
- Sur la déchéance du prêteur de son droit à percevoir les intérêts contractuels :
Attendu qu'aux termes de l'article L.311-19 devenu L.312-29 du code de la consommation, lorsque l'offre préalable est assortie d'une proposition d'assurance, une notice doit être remise à l'emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l'assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l'assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus ;
Qu'une jurisprudence constante, tant en ce qui concerne l'application du code des assurances (cf notamment Cass. civ. 2ème 18 mars 2004 no 03-11273) qu'en ce qui concerne le code de la consommation (Cass. civ. 1ère 10 décembre 2014 no 13-23522) rappelle que la loi exige que soit annexée au contrat de prêt une notice définissant de façon claire et précise les modalités de mise en jeu de la garantie et les risques couverts ;
Attendu qu'en application de l'article 1315 du code civil, il incombe au prêteur de prouver la remise de cette notice, mais aussi d'établir sa régularité au regard des exigences prescrites par le code de la consommation ;
Or attendu que le premier juge a retenu que cette preuve n'était pas rapportée, par des motifs pertinents qui ne sont pas réfutés en cause d'appel, et que la cour adopte ;
Attendu, en effet, que le fait, pour l'emprunteur, d'avoir déclaré "avoir pris connaissance de la notice comportant les extraits des conditions générales de l'assurance" et "reconn(u) rester en possession d'un exemplaire de la notice d'assurance"(cf pièce no1 de l'appelante), ne permet pas de vérifier que la notice qui lui a été remise était conforme aux exigences de l'article L.311-12 ;
Que cette reconnaissance, par l'emprunteur, qu'il a été mis en possession d'une notice, n'exonère pas l'établissement de crédit de la preuve, lui incombant, du contenu de cette notice ;
Attendu qu'à cet égard, la production par l'appelante d'une notice d'assurance vierge de toute signature ou paraphe ne saurait satisfaire à cette preuve qui lui incombe, en l'absence d'élément permettant de vérifier que la notice dont les emprunteurs ont reconnu rester en possession était identique à ce document, puisqu'il était loisible à CREDIPAR de faire signer ou parapher par les emprunteurs, en annexe à son exemplaire de l'offre, un double ou une copie de la notice qui leur était remise ;
Et attendu que la sanction du défaut de remise d'une notice régulière consiste bien, par application de l'article L.311-33, en la déchéance du droit du prêteur aux intérêts (cf Cass 1o 19/02/2013 no1215764) et que le premier juge a ainsi valablement appliqué cette sanction ;
- Sur les sommes dues par Monsieur S... :
Attendu que Monsieur S... indique qu'il a déjà réglé la somme de 8.595,91 euros tandis que CREDIPAR précise qu'elle a reçu 8.949,01 euros, cette dernière somme étant en conséquence retenue ;
Qu'il ne peut cependant être compris comment Monsieur S... soutient que le capital emprunté, hors intérêts, s'élève à la somme de 6.027,46 euros alors que le contrat, comme toutes les pièces contractuelles, et notamment l'échéancier de remboursement, mentionnent un capital emprunté de 12.253 euros ;
Que le décompte établi par CREDIPAR le 19 mars 2019 mentionne des agios et des "prestations supplémentaires" de 1.383,67 euros qui ne sont pas dus au regard de sa déchéance du droit à percevoir les intérêts contractuels ainsi qu'une somme de 1.816,55 euros au titre des intérêts de retard arrêtés au taux de 7,81% au 19 mars 2019 qui ne peut être réclamée ;
Que CREDIPAR sollicite donc à tort versement de 3.200,22 euros ;
Que lui sont dues les sommes de :
1.310,65 euros au titre de 5 échéances impayées,
8.315,14 euros au titre du capital restant dû,
665,21 euros au titre de l'indemnité conventionnelle
Soit la somme totale de 10.291 euros dont il convient de déduire celle de 8.949,01 euros déjà versée ;
Que les paiements opérés ne soldent cependant pas entièrement la dette de l'intimé qui s'élève à 1.341,99 euros et que Monsieur S... sera débouté de sa demande tendant à obtenir condamnation de CREDIPAR au titre d'un trop perçu et condamné à payer à CREDIPAR la somme de 220,45 euros restant due au 19 mars 2019 déduction étant éventuellement à faire d'autres versements opérés à compter de cette date ;
Qu'au regard de la somme restant due, les délais de paiement accordés à l'intimé par le jugement n'ont pas à être infirmés ;
- Sur les autres demandes formées par les parties :
Attendu que CREDIPAR succombant en son appel supportera les dépens de l'instance mais qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Monsieur S... qui succombe également dans sa demande incidente ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME la décision entreprise,
Y AJOUTANT,
CONDAMNE Monsieur A... S... à payer à la société CREDIPAR la somme de 1.341,99 euros restant due au 19 mars 2019 déduction étant éventuellement à faire d'autres versements opérés à compter de cette date
DÉBOUTE les parties de leurs demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,
CONDAMNE la société CREDIPAR aux dépens d'appel,
ACCORDE à Maître TOTTEREAU-RETIF, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT