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22/08/2019 | FRANCE | N°18/02038

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 22 août 2019, 18/02038


COUR D'APPEL D'ORLÉANS


CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE






GROSSES + EXPÉDITIONS : le 22/08/2019
Me Damien VINET
la SELARL WALTER & [...]
ARRÊT du : 22 AOUT 2019


No : 246 - 19
No RG 18/02038 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FXRZ


DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 22 Février 2018


PARTIES EN CAUSE


APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265220972048721


Monsieur A... M...
né le [...] à MOULINS
[...]
[...]


Ayant pour avocat Me Damien VINET, avocat au barreau de BLOIS






D'UNE PART


INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265229365050739


SA BMCE EXERCANT SOUS L...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 22/08/2019
Me Damien VINET
la SELARL WALTER & [...]
ARRÊT du : 22 AOUT 2019

No : 246 - 19
No RG 18/02038 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FXRZ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 22 Février 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265220972048721

Monsieur A... M...
né le [...] à MOULINS
[...]
[...]

Ayant pour avocat Me Damien VINET, avocat au barreau de BLOIS

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265229365050739

SA BMCE EXERCANT SOUS L'ENSEIGNE POINT P
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux pour ce domiciliés audit siège en cette qualité. [...]
[...]

Ayant pour avocat Me Alexis LEPAGE, membre de la SELARL WALTER et GARANCE, avocat au barreau de TOURS.

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 06 Juillet 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 25 avril 2019

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 16 MAI 2019, à 9 heures 30, devant Madame Elisabeth HOURS, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 22 AOUT 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

La S.A.R.L. ECOBATI a, dans le cadre de son activité de travaux de maçonnerie générale et gros œuvre de bâtiment, conclu un contrat de livraison de marchandises, avec la société BMCE exerçant sous l'enseigne POINT P. et son gérant, Monsieur A... M...,a conclu le 5 octobre 2015 avec cette société un contrat de garantie à première demande à hauteur de 40.000 euros

ECOBATI a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 12 février 2016, désignant Maître Y... K... es qualités et la BMCE a régulièrement déclaré sa créance le 17 février 2016 à hauteur cette fois de 20642.08 euros.

Après avoir vainement mis en demeure Monsieur M... de lui régler la somme de 24.113,65 euros au titre du contrat de garantie à première demande précédemment cité, la BMCE l'a, le 26 mai 2016, assigné devant le tribunal de grande instance de Blois en réclamant sa condamnation à lui verser cette somme outre une indemnité de procédure de 1.200 euros.

Par jugement en date du 22 février 2018 le tribunal a fait droit à la demande principale et alloué à la BMCE une indemnité de procédure de 500 euros.

Monsieur M... a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 6 juillet 2018.

Il en poursuit l'infirmation en demandant à la cour de constater la nullité de son engagement et de débouter la BMCE de l'ensemble de ses demandes ; à titre subsidiaire de juger que son engagement est un cautionnement et de constater l'absence de respect des dispositions du code de la consommation et donc la nullité de l'acte passé le 5 octobre 2015.

A titre infiniment subsidiaire il sollicite condamnation de la BMCE à lui verser 25.000 euros à titre de dommages et intérêts et la compensation des sommes respectivement dues par les parties ; à titre extrêmement subsidiaire il demande que lui soient accordés des délais de paiement et, en tout état de cause sollicite paiement d'une indemnité de procédure de 2.000 euros et condamnation de l'appelante à supporter les dépens.

Il fait valoir que la garantie à première demande, qui est usuellement utilisée entre professionnels et tout particulièrement en matière de commerce international, n'a pas été créée pour les particuliers compte tenu de sa complexité et de l'absence totale de formalisme ; qu'en l'espèce, le contrat litigieux a été conclu entre la société BCME, vendeur professionnel, et lui-même, garant particulier et profane, en faveur de la S.A.R.L. ECOBATI ; que la Cour de Cassation a étendu l'obligation pour les professionnels de satisfaire à leur devoir d'information et de conseil envers les profanes aux garanties à première demande afin que ces derniers aient conscience de la portée de leur engagement et que la BMCE ne démontre pas avoir rempli son devoir d'information et de mise en garde mais a au contraire commis une réticence dolosive en ne l'avertissant pas des conséquences de son engagement.

Il prétend ensuite que la simple mention d'une garantie à première demande est insuffisante pour caractériser une garantie autonome ; que son engagement ne porte pas sur une somme déterminée mais sur une somme indéterminée dans la limite de 40.000 euros ; que le décompte de créance versé aux débats par la demanderesse mentionne plusieurs sommes successives correspondant aux dettes de la S.A.R.L. ECOBATI ; que l'objet du contrat n'est dès lors pas le versement d'une somme déterminée en garantie du contrat principal, mais bien le versement des sommes qui ne sont pas payées par le donneur d'ordre, ce qui ne répond pas aux critères d'une garantie autonome mais à ceux d'un cautionnement; que le contrat doit donc être requalifié et annulé comme ne comportant pas les mentions manuscrites exigées par la loi.

La BMCE sollicite la confirmation du jugement entrepris et demande à la cour d'y ajouter la condamnation de l'appelant à lui verser une indemnité de procédure de 2.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens.

Elle fait valoir que la garantie à première demande n'implique pas une relation de professionnel à client, mais une relation d'affaires entre deux professionnels ; que contrairement à ce que prétend Monsieur M..., il n'existe aucune décision de justice imposant une obligation d'information à la charge du bénéficiaire de la garantie à première demande ; que la preuve du respect de son obligation générale d'information est rapportée par les mentions explicites de la garantie à première demande et la mention manuscrite apposée par Monsieur M..., qui ne peut se prévaloir d'une qualité de profane, et qui permet de vérifier qu'il avait connaissance de la portée et de l'étendue de son engagement.

Elle précise que la somme de 40.000 euros qu'il s'est engagé à régler est déterminée, que Monsieur M... ajoute à l'article 2321 du code civil qui ne vise à aucun moment une somme « déterminée » et que la garantie souscrite est bien une garantie autonome. Elle s'oppose subsidiairement à la demande de délais formulée par Monsieur M... en faisant valoir que ce dernier a bénéficié de larges délais pour s'acquitter du montant des sommes dues, qu'il n'a répondu à aucune des mises en demeure qui lui ont été adressées, et qu'il ne justifie pas de sa situation financière actuelle.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que Monsieur M... emploie des notions de "profane" et de "non averti" empruntées au droit de la consommation, lequel n'a pas à être appliqué en l'espèce puisque le contrat est de nature commerciale ;

Qu'il sera au surplus relevé qu'est considéré comme "averti" non celui qui dispose de connaissances juridiques ou bancaires particulières mais celui qui est en mesure d'appréhender les risques et l'opportunité des dettes qu'il projette de garantir ;

Que Monsieur M..., gérant de la société ECOBATI était parfaitement à même d'appréhender les risques qu'il prenait en s'engageant à payer à première demande à hauteur de 40.000 euros le fournisseur de cette société ;

Que l'engagement qu'il a souscrit était très clair et ne nécessitait pas plus d'explications que n'en comportaient l'acte lui-même et la mention manuscrite qui y a été portée par Monsieur M... ;
Attendu en effet que le contrat signé par ce dernier contient la clause suivante : « Sans pouvoir faire valoir aucune objection ou exception, le garant paiera à première demande du bénéficiaire, formulée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, et sans qu'il soit besoin d'aucune autre formalité ou justification, le montant réclamé dans la limite de quarante mille euros (40.000 €) »

Que Monsieur M... a écrit de sa main et signé la mention suivante : " Bon pour engagement de paiement à la société ¿POINT P BMCE à première demande de cette société toute somme dans la limite de quarante mille euros (40.000 euros) de façon inconditionnelle et autonome sans pouvoir opposer aucune exception, de quelque nature que ce soit";

Que l'acte précise ensuite que "Le présent engagement est autonome si bien que la disparition des rapports de droit ou de fait existant entre les garants et la personne garantie ne saurait en rien affecter sa portée ni sa mise en jeu" ;

Attendu que ces mentions éclairaient complètement Monsieur M... sur la portée de son engagement, cette compréhension étant renforcée par le fait qu'il a lui-même écrit le contenu de son engagement et ne pouvait donc se méprendre sur le fait qu'il ne s'agissait pas d'un cautionnement ;

Attendu en effet qu'aux termes de l'article 2321 du code civil la garantie autonome est l'engagement par lequel le garant s'oblige en considération d'une obligation souscrite par un tiers, à verser une somme soit à première demande soit suivant les modalités convenues ;

Qu'en cas de garantie autonome, le garant souscrit une obligation nouvelle, distincte de la dette garantie ;

Que cependant, comme l'indique l'article 2321 susvisé, son engagement a pour fonction de garantir l'exécution d'un contrat de base, mais que cette obligation nouvelle est détachée de ce contrat initial dès qu'elle est mise en place, puisque son sort n'est pas lié à celle de la dette garantie ;

Que la jurisprudence a dégagé deux critères cumulatifs permettant de constater l'existence d'une garantie autonome exclusive d'un cautionnement, en retenant qu'est une garantie autonome celle qui prévoit, d'une part l'inopposabilité des exceptions, qui doit être explicite, d'autre part qu'elle n'a pas pour objet la dette même du débiteur principal ;

Qu'en l'espèce Monsieur M... a expressément accepté une clause d'inopposabilité des exceptions qui permet de vérifier que la volonté des parties était d'établir un engagement indépendant et démontre l'autonomie de l'objet de la garantie ;

Que celle-ci n'avait pas pour objet la dette de la société ECOBATI même si elle était nécessairement mise en place pour sûreté d'une dette de somme d'argent puisqu'il est de l'essence d'une garantie, accessoire ou autonome, de se référer à un contrat de base ;

Que la simple référence à ce contrat, dès lors que l'objet de la garantie est bien distinct, n'est pas incompatible avec la qualification de garantie autonome ;

Que l'engagement de Monsieur M... n'implique aucune appréciation des modalités d'exécution du contrat de base pour en évaluer le montant, et que la mention de la limitation de son obligation à une somme maximale, en l'espèce 40.000 euros, ne modifie en rien la qualification de garantie autonome qui lui est applicable;

Qu'il convient dès lors d'écarter les contestations de l'appelant et de confirmer le jugement qui l'a condamné au paiement ;

Attendu que Monsieur M..., qui n'avait communiqué aucun justificatif de sa situation personnelle devant le tribunal n'en produit pas plus aujourd'hui devant la cour ;

Qu'il prétend obtenir des délais de paiement en faisant valoir que c'est à tort que le tribunal a considéré qu'il avait déjà bénéficié de larges délais de paiement pour solder sa dette alors qu'entre la mise en demeure, en date du 10 février 2016, et l'assignation il s'était écoulé à peine 3 mois ; que la somme réclamée par la société BMCE s'élève à 24.113,65 euros ; qu'il est "évident (qu'il) n'est pas en mesure de s'acquitter d'une telle somme." ; qu'enfin BMCE aurait tenté frauduleusement d'encaisser un chèque à l'ordre de la Société LBB DISTRIBUTION dont il est également gérant pour couvrir les sommes réclamées à la S.A.R.L. ECOBATI ;

Mais attendu que de tels arguments sont inopérants puisque le tribunal s'est placé à la date à laquelle il statuait pour constater qu'entre le 10 février 2016 et le 22 février 2018, Monsieur M... avait bénéficié d'un délai de deux années sans s'acquitter de la moindre somme ;

Qu'en l'absence de communication de quelconques éléments sur ses ressources et son patrimoine il ne peut être tenu pour "évident" qu'il ne peut s'acquitter de 24.00 euros ;

Que les éventuels agissements de la BMCE, à les supposer démontrés, sont sans effet sur les délais qui peuvent être accordés à un débiteur puisqu'en application de l'article 1244-1 devenu 1343-5 du code civil, le juge doit fonder sa décision relative aux délais qu'il accorde d'une part sur les ressources du débiteur, d'autre part sur les besoins du créancier ;

Qu'en ne communiquant aucune pièce relative à ses ressources et à ses charges, Monsieur M... empêche la cour de faire application des dispositions de l'article 1343-5 susvisé ;

Qu'il convient dès lors de confirmer entièrement le jugement déféré ;

Attendu que Monsieur M..., qui succombe entièrement en ses prétentions, devra supporter les dépens d'appel et qu'il sera fait application, au profit de l'intimée des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE Monsieur A... M... à payer à la société BMCE, exerçant sous l'enseigne POINT P, la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

CONDAMNE Monsieur A... M... aux dépens d'appel.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 18/02038
Date de la décision : 22/08/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-08-22;18.02038 ?
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