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20/06/2019 | FRANCE | N°18/01280

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 20 juin 2019, 18/01280


COUR D'APPEL D'ORLÉANS


CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE






GROSSES + EXPÉDITIONS : le 20/06/2019
la SCP LPA-CGR AVOCATS
Me Anne CARROGER
ARRÊT du : 20 JUIN 2019


No : 224 - 19
No RG 18/01280 -
No Portalis DBVN-V-B7C-FV34


DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de Tours en date du 04 Mai 2018


PARTIES EN CAUSE


APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265222716737184
SAS BOIS ENERGIE FRANCE
Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domici

lié en cette qualité audit siège [...]


Ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, Avocat au barreau D'ORLEANS et pour avocat plaidant M...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 20/06/2019
la SCP LPA-CGR AVOCATS
Me Anne CARROGER
ARRÊT du : 20 JUIN 2019

No : 224 - 19
No RG 18/01280 -
No Portalis DBVN-V-B7C-FV34

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de Tours en date du 04 Mai 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265222716737184
SAS BOIS ENERGIE FRANCE
Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [...]

Ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, Avocat au barreau D'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Gilles GASSENBACH, membre de la SCP LPA-CGR AVOCATS, avocat au barreau de PARIS,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265230178233652
la SA BOIS CHAUDS DU BERRY
prise en la qualité de ses représentants légaux y domiciliés en cette qualité audit siège ZA DE LA FORGE HAUTE 36120 ARDENTES

Ayant pour avocat postulant ME Anne CARROGER, avocat au barreau D'ORLEANS et pour avocat plaidant Me Flavie DE MEERLEER, avocat au barreau de TOULOUSE,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 14 Mai 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 14 mars 2019

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 04 AVRIL 2019, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, en son rapport, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé le 20 JUIN 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE :

La société BIOMASSE ET DÉVELOPPEMENT qui a fait l'objet, à compter du 31 octobre 2016, d'une fusion absorption par la société BOIS ENERGIE FRANCE a conclu le 4 juin 2012 avec la société BOIS CHAUDS DU BERRY un contrat d'achat de matière de biomasse aux termes duquel elle s'est engagée à commander une quantité annuelle de 54 000 MWh, soit environ 20.000 tonnes de produit ligneux, pouvant varier de plus ou moins 20%.

Le contrat passé pour une durée de 10 ans à compter de la première livraison et devant s'achever au plus tard le 31 décembre 2022, prévoyait des critères de qualité du produit définis à l'article 5-2, un prix de 18,50 euros HT /Mwh modifiables dans les cas énumérés à l'article 11-2, l'application de pénalités dans les conditions de l'article 14-2 qui stipule qu'en cas de non-respect par l'acheteur des quantités annuelles commandées prévues, ne revêtant pas les caractéristiques de la force majeure, l'acheteur indemnisera le vendeur d'un montant égal à 25% du prix de base défini à l'article 9 sur les tonnages annuels non réalisés par rapport à la prévision moyennant une franchise de 20% de cette prévision, cette indemnisation interviendra à titre global, forfaitaire et définitif et à titre de dommages et intérêts réputés compenser l'entièreté du préjudice subi par le vendeur.

Conformément aux stipulations du contrat, un constat d'huissier a été dressé le 4 juin 2012 attestant de l'existence d'un stock de produits équivalent à la valeur de l'avance de 185.000 euros consentie par la société BOIS ENERGIE FRANCE.

Le 11 avril 2013 la société BOIS ENERGIE FRANCE a refusé 3 camions de livraison.

En novembre 2013, un accord est intervenu entre les parties pour fixer à compter du 11 novembre la composition du produit livré sur Orléans et Tours sur la base 80% de broyats et 20% d'écorces pour un prix de 25 euros HT/ Mwh.

La société BOIS ENERGIE FRANCE ayant cessé ses commandes en mai 2014, les parties se sont rencontrées les 8 octobre et 18 décembre 2014, sans qu'il y ait à l'issue de reprises de commandes pour des motifs sur lesquels elles s'opposent.

Par lettre recommandée du 17 mars 2017, la société BOIS CHAUDS DU BERRY a, par l'intermédiaire de son conseil, mis en demeure la société BOIS ENERGIE FRANCE de lui payer la somme de 810.000 euros en application de l'article 14-2 du contrat à titre d'indemnisation pour non respect de l'obligation de commande et de se conformer pour l'avenir à ses engagements.

Par lettre du 7 avril 2017, la société BOIS ENERGIE FRANCE a répondu que les produits fournis n'étaient pas conformes aux stipulations contractuelles, qu'elle avait accepté, à titre dérogatoire et pour une durée d'un an, un prix de 25 euros HT/ Mwh mais qu'elle refusait la mise en place d'une avance de trésorerie de 400.000 euros et une augmentation du prix de 29,30 euros HT comme l'exigeait la société BOIS CHAUDS DU BERRY et que celle-ci ne lui avait pas indiqué comme elle le lui avait demandé si elle souhaitait poursuivre ses relations commerciales dans le respect des termes et conditions du contrat du 4 juin 2012.

Par acte du 26 avril 2017, la société BOIS CHAUDS DU BERRY a fait assigner la société BOIS ENERGIE FRANCE devant le tribunal de commerce de Tours à l'effet, en l'état de ses dernières prétentions de la voir condamner, avec exécution provisoire, pour non respect de son obligation de commande à lui payer en application de l'article 14-2 du contrat la somme de 2.795.653,28 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure le 20 mars 2017 et, subsidiairement, si le tribunal ne retenait pas le préjudice d'investissement subi, la somme de 2.160.000 euros outre intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2017. Il était également réclamé une somme de 15.000 euros pour frais de procédure.

La société BOIS ENERGIE FRANCE, qui a opposé l'exception d'inexécution pour mauvaise qualité des produits livrés et modification unilatérale du prix, a conclu au débouté des prétentions de la société BOIS CHAUDS DU BERRY. Elle a demandé subsidiairement de limiter le montant des pénalités et a sollicité, en tout état de cause, la condamnation de la société BOIS CHAUDS DU BERRY à lui payer la somme de 15.000 euros pour frais de procédure.

Par jugement du 16 mars 2018, le tribunal a dit que la société BOIS ENERGIE FRANCE n'a pas respecté son obligation contractuelle de commande, l'a déboutée de toutes ses demandes et l'a condamnée à payer à la société BOIS CHAUDS DU BERRY la somme de 2.160.000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2017 et à lui payer 10.000 euros pour frais de procédure.

Pour statuer ainsi le tribunal a retenu que le simple défaut de qualité ponctuel affectant 66 tonnes sur 40.000 livrées n'était pas un défaut de livraison et ne constituait pas une inexécution suffisamment grave pour faire jouer l'exception d'inexécution, qu'à la date à laquelle la société BOIS ENERGIE FRANCE s'était affranchie de son obligation de commande en mai 2014, le prix était de 25 euros/Mwh, que cette modification tarifaire avait été décidée d'un commun accord et que la société BOIS ENERGIE FRANCE s'était d'ailleurs acquittée de 23 factures établies à ce prix, que l'indemnité prévue au contrat devait par conséquent être calculée sur cette base tarifaire en fonction d'un tonnage de 54.000 Mwh sur 8 années et que s'agissant d'une indemnisation forfaitaire la société BOIS CHAUDS DU BERRY ne pouvait pas prétendre à l'indemnisation d'un préjudice complémentaire au titre des investissements réalisés.

La société BOIS ENERGIE FRANCE a relevé appel de la décision le 14 mai 2018.

Elle en poursuit l'infirmation et demande à la cour à titre principal de juger qu'elle pouvait se prévaloir du principe d'exception d'inexécution et suspendre toute commande, et de prononcer, en conséquence, la résolution du contrat à la date du 6 mars 2014 et, subsidiairement, à effet du 23 janvier 2015, aux torts et griefs exclusifs de la société BOIS CHAUDS DU BERRY. Elle souhaite, à titre subsidiaire, pour le cas où sa responsabilité serait retenue, voir juger que la pénalité de l'article 14.2 du contrat n'a vocation à s'appliquer que sur la période du 1er mai au 11 novembre 2014, calculée sur la base du prix provisoire de 25 euros et du prix de 18,50 euros pour la période du 11 novembre 2014 au 28 janvier 2015 et, très subsidiairement au prix de 18,50 euros sur les seules périodes échues de non-respect de commandes, voir réduire substantiellement le montant de la clause pénale par application de l'article 1152 (ancien) et 1231-5 (nouveau) du code civil, voir juger que le préjudice subi par la société BOIS CHAUDS DU BERRY sur les périodes à échoir de non-respect de commande ne peut être constitué que de la perte de chance d'obtenir la marge sur les gains espérés de l'exécution du contrat jusqu'à son terme, voir constater que sur les années à échoir la société BOIS CHAUDS DU BERRY ne formule aucune demande d'indemnisation et la voir débouter, en conséquence, de l'ensemble de ses demandes. Il est réclamé 25.000 euros pour frais de procédure.

Elle s'estime fondée à opposer le principe d'exception d'inexécution en raison du défaut de qualité des produits livrés et du désaccord sur le prix.

Elle fait valoir que ce n'est pas en raison, comme prétendu par l'intimée, de l'arrêt technique des centrales thermiques qu'elle a décidé de suspendre les livraisons mais bien du fait de la non conformité des produits livrés aux spécifications du contrat et que c'est par une erreur manifeste d'appréciation que le tribunal a limité l'obligation du vendeur à une obligation de livraison sans tenir compte de la conformité des produits livrés et qu'il a considéré que le défaut de qualité était ponctuel alors que ce problème était récurrent, comme elle le prouve par les courriels, courriers et photographies communiqués, et comme l'a d'ailleurs reconnu l'intimée lors de leurs échanges.

Elle soutient qu'elle était par conséquent bien fondée, après avoir fait preuve de bonne volonté en acceptant des produits non conformes aux risques de détériorer ses installations et de perdre des contrats d'achat d'énergie, à suspendre toute commande, ce d'autant que la société BOIS CHAUDS DU BERRY n'a pris aucune mesure pour respecter les critères qualitatifs qu'elle considérait dès le mois d'avril 2013 incompatibles avec le prix contractuellement fixé.

Elle dénonce, le caractère diffamatoire du témoignage de Monsieur J... produit par l'intimé et indique qu'il lui a causé un préjudice irrécouvrable de 130.000 euros à la suite de sa mise en liquidation judiciaire.

Elle affirme que la société BOIS CHAUDS DU BERRY a, dès le mois de juillet 2013, sollicité une augmentation du prix du Mwh alors que les conditions de révision prévues par le contrat n'étaient pas remplies, que face à ses tentatives permanentes de modifier les tarifs, il a été convenu de déroger temporairement aux stipulations du contrat en fixant la composition du produit à 80% de broyats et 20% d'écorces et en retenant un prix de 25 euros /Mwh pour une durée d'un an à compter du 11 novembre 2013. Et elle souligne qu'il résulte clairement des échanges de courriels communiqués et des aveux de la société BOIS CHAUDS DU BERRY qui écrit dans ses conclusions signifiées le 19 février 2019 qu'elle avait accepté le prix de 25 euros pour une durée d'un an, qu'il s'agissait d'un prix dérogatoire et temporaire et que l'intimée a voulu, dès le mois de mars 2013, lui imposer un prix de 35 euros pour lui livrer de la plaquette forestière.

Elle considère que c'est par conséquent à bon droit qu'elle a légitimement cessé de passer commande à partir du mois de mai 2014, en raison de la décision de la société BOIS CHAUDS DU BERRY de modifier le prix du contrat, de son incapacité à lui fournir les quantités convenues et à respecter le prix prévu au contrat. Et elle relève qu'elle l'a vainement invitée par lettre du 3 février 2015, en réponse à une nouvelle demande de modification du prix et d'octroi d'une avance de trésorerie formulée le 23 janvier 2015, à poursuivre le contrat selon les modalités convenues.

Elle estime que c'est par conséquent, la société BOIS CHAUDS DU BERRY qui a rompu le contrat en subordonnant son exécution à une augmentation unilatérale du prix de vente. Et elle réplique que l'existence dans le contrat d'une clause résolutoire prévoyant une mise en demeure préalable et une clause pénale en cas de non conformité des produits ne la privent pas de la faculté de se prévaloir du principe d'inexécution qui est toujours sous entendu dans les contrats synallagmatiques ni de solliciter la résolution judiciaire du contrat.

Elle fait valoir subsidiairement sur le préjudice, que la clause pénale de l'article 14.2 s'applique sur les périodes échues et non à échoir comme l'a retenu à tort le tribunal qui en a dénaturé les termes clairs et précis en l'appliquant jusqu'au terme du contrat en 2022 alors qu'elle ne pouvait s'appliquer que jusqu'au 23 janvier 2015, date à laquelle la société BOIS CHAUDS DU BERRY a rompu le contrat en conditionnant la poursuite des livraisons au versement d'une avance de 400.000 euros et au paiement d'un prix de 29,30 euros du Mwh en violations des stipulations contractuelles. Pour le cas où la cour considérerait que la clause s'applique au-delà de cette date, elle soutient que son montant doit être calculé en retenant le prix de 18,50 euros au-delà du 11 novembre 2014 et prétend que pour les périodes à échoir l'intimée ne peut se prévaloir que d'une perte de chance de réaliser le chiffre d'affaires attendu et que celle-ci est inexistante compte tenu de l'incapacité de la société BOIS CHAUDS DU BERRY à livrer les produits conformes.

Elle prétend enfin que l'intimée ne peut pas réclamer l'indemnisation du préjudice correspondant aux investissements réalisés en sus des pénalités de l'article 14-2 du contrat qui réparent de manière forfaitaire le préjudice résultant de l'inexécution du contrat. Et elle fait observer qu'en tout état de cause des investissements ne sont pas constitutif d'un préjudice puisqu'ils ne constituent ni un gain manqué, ni une perte subie et qu'il n'est pas prouvé qu'ils ont été réalisés pour les besoins exclusifs du contrat et qu'ils ne peuvent plus être utilisés.

La société BOIS CHAUDS DU BERRY sollicite la confirmation de la décision déférée, sauf en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts complémentaires et elle poursuit la condamnation de la société BOIS ENERGIE FRANCE à lui payer au titre de l'article 14.2 du contrat, à titre principal 2.160.000 euros et subsidiairement 1.668.600 euros et en toutes hypothèses, au titre du préjudice distinct lié aux investissements effectués pour honorer son obligation de livraison, 635.635, 28 euros, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2017. Elle réclame 25.000 euros pour frais de procédure.

Elle affirme que la cessation des commandes est due à l'arrêt technique des centrales thermiques et que l'appelante ne peut s'exonérer de sa responsabilité en invoquant une mauvaise qualité du produit et un désaccord sur le prix, alors que l'exception d'inexécution qu'elle lui oppose s'applique uniquement en cas d'obligations interdépendantes, et qu'elle a respecté son obligation de livraison qui est la contrepartie de l'obligation de passer commande à laquelle la société BOIS ENERGIE FRANCE était tenue.

Elle dénie en tout état de cause que les produits livrés n'aient pas été conformes aux stipulations du contrat et relève que la quantité et de la qualité des produits en stocks a été contrôlée par un huissier de justice, que l'appelante n'a pas appliqué les pénalités contractuelles en cas de non conformité du produit et qu'elle n'a pas usé de la faculté de résilier le contrat prévu à l'article 17 ce qui prouve qu'elle n'a pas jugé qu'il existait des manquements graves et persistant comme elle le prétend, que le seul refus de trois camions soit 66 tonnes sur 40.000 tonnes livrées ne constitue pas une inexécution suffisamment grave pour opposer l'exception d'inexécution et que l'appelante ne produit aucun élément prouvant la réalité des défauts de qualité qu'elle lui impute.

Elle dénonce la mauvaise foi de la société BOIS ENERGIE FRANCE qui pour s'affranchir de ses obligations invoque des défauts de conformité comme elle l'a fait avec d'autres contractants comme en atteste Monsieur J... dirigeant d'une société qui a été victime de ses agissements.

Elle soutient que n'ayant pas le pouvoir de fixer le prix et n'étant pas débitrice de l'obligation de paiement, l'appelante ne peut lui opposer une exception d'inexécution pour non respect des conditions de prix qui au demeurant n'est pas caractérisée. Elle soutient que le fait d'avoir proposé des ajustements de prix compte tenu des nouvelles exigences de l'appelante, ne peut constituer une inexécution contractuelle pouvant justifier de lui opposer l'exception d'inexécution, et souligne que le changement de prix à compter du 11 novembre 2013 a été accepté par la société BOIS ENERGIE FRANCE qui a réglé les factures à ce tarif pendant 6 mois sans contestation de sorte qu'elle ne peut invoquer un changement de prix pour justifier l'arrêt des commandes en mai 2014. Elle conteste avoir voulu imposer un prix de 35 euros du Mwh comme le soutient l'appelante, que le prix de 25 euros ait été fixé pour une durée limitée d'un an et considère qu'elle n'avait pas à adresser une sommation de commander à l'appelante alors qu'elle l'avait invitée à reprendre ses commandes et qu'au surplus des rencontres ont été organisées pour trouver une solution.

Elle s'estime fondée en raison du non respect par la société BOIS ENERGIE FRANCE de son obligation de commande à obtenir paiement de l'indemnité prévue par l'article 14-2 du contrat, calculée sur la base du prix accepté de 25 euros du Mwh en vigueur à la date de la rupture, des quantités prévues au contrat et du nombre d'années restant à courir jusqu'à son terme. Elle réplique que l'article 14-2 fait référence aux tonnages non réalisés par rapport à la prévision ce dont il résulte que la quantité à prendre en compte pour le calcul de l'indemnité est bien celle correspondant à la durée contractuelle, qu'il n'y a pas lieu d'opérer une distinction entre période échue et à échoir, que le calcul de l'indemnité ne doit pas à être limitée jusqu'au 23 janvier 2015 comme demandé par l'appelante alors qu'elle s'est contentée de lui indiquer à cette date qu'elle souhaitait pérenniser la relation et lui avait simplement proposé une révision du prix pour compenser l'absence de commandes pendant 7 mois. Elle ajoute que la perte de chance ne peut s'appliquer en l'absence d'aléas compte tenu de la durée du contrat et du tonnage qui devait être commandé chaque année et jusqu'à son terme.

Elle insiste sur l'importance de son préjudice complémentaire correspondant aux investissements qu'elle a dû réaliser pour honorer le contrat correspondant à l'achat d'un terrain pour stocker les produits, aux travaux d'aménagement et à la souscription d'un crédit bail portant sur un engin de levage.

SUR CE :

- I - sur l'exception d'inexécution et la résiliation du contrat :

Attendu que l'interdépendance des obligations résultant d'un contrat synallagmatique donne le droit à l'une des parties de ne pas exécuter son obligation quand l'autre n'exécute pas la sienne ;

Attendu que la stipulation de sanctions à l'inexécution du contrat n'exclut pas la mise en œuvre des solutions issues du droit commun des obligations ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1184 du code civil dans sa rédaction applicable au litige , la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances ;

Attendu que le contrat d'achat de matière biomasse conclu entre les parties comporte les stipulations suivantes :
- obligations du vendeur : le vendeur s'engage à mettre à disposition de l'acheteur dans les conditions définies ci-après la quantité de 54.000 Mwh, soit environ 20.000 tonnes de produits sur le site du réseau de chaleur d'Orléans ; le produit sera composé de plaquettes forestières toutes essences, broyats de chute et culées, broyats de bois de recyclage classe A, ces trois produits représenteront au minimum 20% du volume livré, écorces feuillues, écorces résineuses ;
- obligation acheteur : l'acheteur s'engage à commander une quantité annuelle de 54.000 Mwh soit environ 20.000 tonnes de produits pouvant varier de + ou - 20% de la quantité annuelle moyenne ;

Que l'article 7.1.4 est ainsi rédigé :
- si le produit ne correspond pas à la qualité attendue, celui-ci peut faire l'objet d'un refus catégorique lors de la livraison, les frais de transport aller/retour sont à la charge du vendeur,
- en cas de non livraison ou d'insuffisance de livraison, le contrat pourra être résilié par l'acheteur et communiqué au vendeur par lettre recommandée avec accusé de réception (...) ;

Qu'il prévoit un prix de 18,50 euros HT du Mwh, révisable dans les cas suivants précisés à l'article 11, tous les 5 ans à partir de la date d'entrée en vigueur du contrat, en cas de variation de plus de 20% de la quantité annuelle achetée, en cas de modification substantielle des conditions d'exploitation de l'une ou l'autre des parties, en cas d'évolution importante de la réglementation ou de la législation entraînant la nécessité de procéder à d'importantes transformations du produit, si par le jeu des indices le prix de la biomasse devait être décalé du prix comparatif de plus de 10% le prix ; qu'il est prévu qu'en cas d'accord des parties le prix et ou sa formule d'indexation révisés donneront lieu à la conclusion d'un avenant ;

Que l'article 14.2 relatif au non respect des quantités prévues est ainsi formulé :
- en cas de défaillance du vendeur à fournir les quantités programmées, ne revêtant pas les caractéristiques de la force majeure, le vendeur indemnisera l'acheteur d'un montant égal à 25% du prix de base défini à l'article 9, sur les tonnages annuels non réalisés par rapport à la prévision, moyennant une franchise de 20% de cette prévision, cette prise en charge interviendra à titre global forfaitaire et définitif et à titre de dommages et intérêts réputés compenser l'entièreté du préjudice subi,
- de la même façon, en cas de non respect par l'acheteur des quantités annuelles commandées prévues, ne revêtant pas les caractéristiques de la force majeure, l'acheteur indemnisera le vendeur d'un montant égal à 25% du prix de base défini à l'article 9, sur les tonnages annuels non réalisés par rapport à la prévision, moyennant une franchise de 20% de cette prévision. Cette indemnisation interviendra à titre global, le forfaitaire et définitif et à titre de dommages et intérêts réputés compenser l'entièreté du préjudice subi par le vendeur ;
Attendu qu'il est acquis que la société BOIS ENERGIE FRANCE a refusé 3 camions de livraison de la société BOIS CHAUDS DU BERRY le 11 avril 2013 ;

Qu'à ce sujet Monsieur T... de la société BOIS ENERGIE FRANCE écrivait dans un courriel interne du 16 avril 2013 adressé à Monsieur U..., qu'il avait refusé les camions au motif que les écorces étaient polluées de morceaux trop longs, qu'il avait rencontré Monsieur C... de la société BOIS CHAUDS DU BERRY et qu'il avait été convenu de broyer plus fin les broyats de chêne, de trier à l'entrée de la plate-forme les écorces longues et de faire des essais produits en cas de doute ;

Attendu qu'il ressort par ailleurs des courriers et courriels communiqués :

- que par lettre du 17 juillet 2013, la société BOIS CHAUDS DU BERRY a écrit à la société BOIS ENERGIE FRANCE que compte tenu des modifications des critères sur les écorces nécessitant un criblage donc un coup supplémentaire, elle souhaitait facturer ce produit 21 euros HT le Mw livré à partir de juillet 2013 et qu'au-delà des 4.000 tonnes prévues par le contrat de broyats ou plaquettes, elle était dans l'obligation de les facturer 27,70 euros HT le Mwh ;

- que par lettre de 29 juillet 2013, la société BOIS ENERGIE FRANCE a répondu que les produits livrés ne correspondaient pas aux spécifications techniques de l'article 5.2.3 du contrat, comme cela pouvait être constaté sur les photographies jointes, qu'elle n'entendait pas accepter la modification unilatérale du prix, que le contrat prévoyait que les broyats et plaquettes devaient représenter au minimum 20% des 54.000 MWh soit 10.800 MWh, que ces deux catégories atteignaient à ce jour 9.100 MW h soit 49% du total des livraisons et elle proposait la tenue d'une réunion dans ses bureaux de Tours le 17 septembre 2013 pour étudier la question ;

- que par courrier du 4 novembre 2013 la société BOIS CHAUDS DU BERRY a proposé, à la suite de l'entretien du même jour à Tours, de continuer les livraisons avec 80% de broyats et 20% d'écorces livrées sur Orléans ou Tours sur la base de 25 euros HT du Mw h, à compter du 11 novembre 2013, précisant qu'en cas de refus, elle serait obligée de ne pas poursuivre le contrat, qu'elle avait continué à livrer de la marchandise hors contrat de qualité nettement supérieure depuis plusieurs mois et qu'il avait été évoqué la possibilité de livrer au cours de la saison 10.000 tonnes de rondins en 2 mètres et plus, diamètre 7 cm au prix de 45 euros HT la tonne ;

- que par courriel du 25 novembre 2013, Monsieur U... de la société BOIS ENERGIE FRANCE a écrit à sa collègue Madame D... qui l'interrogeait au sujet du paiement de la facture du mois d'octobre de la société LES BOIS CHAUDS d'un montant de 25.007,49 euros pour 1.335,87 MW H, qu'il avait donné son accord à Monsieur C... pour la livraison en 2014 de 2 x 10.000 tonnes à 25 euros le MW h, que cela devait être acté par avenant, que le prix était livrable sur Orléans et Saint Pierre des Corps, qu'en 2015, ils revenaient au contrat initial quitte à renégocier fin 2014, que le produit était composé à 80% de plaquettes forestières et 20 % d'écorces et autres produits, qu'il avait refusé l'avance sollicitée et qu'il fallait donc bloquer la facture ;

- que par courriel du 14 février 2014, Monsieur A... chef de secteur DALKIA s'est plaint notamment auprès de Monsieur U... de la qualité du bois livré depuis plusieurs jours par la société BOIS CHAUDS DU BERRY, q'il a indiqué qu'il lui était livré de la classe A avec des morceaux de classe B, que la matière reçue était mal broyée et qu'il envisageait de ne pas décharger le camion suivant s'il recevait le même type de bois de mauvaise qualité, qu'étaient joints à son envoi des photographies des produits livrés ;

- que par courriel du même jour Monsieur U... en a informé Monsieur C..., lui demandant d'agir rapidement s'il ne voulait pas que ses camions soient refusés ; que ce dernier lui a répondu par retour : "toutes les personnes concernées vont être averties. J'ose espérer que cela reste très occasionnel et provient de fonds de bennes dans les menuiseries notamment. Je recommande de suite la vigilance à tous les opérateurs." ;

- que le 6 mars 2014, Monsieur C... lui a répondu que les 10.000 tonnes étaient déjà livrées en février et que le lundi 10 avril 2014 il ne pourrait livrer que de la plaquette forestière au prix déjà indiqué de 35 euros le Mw h, qu'il n'avait pas d'autre solution, qu'il fallait espérer que le temps permettrait de travailler en forêt et qu'il n'avait plus beaucoup de stock de billons sur la plate-forme ;

- que suivant courriel du 7 mars 2014, adressé à Monsieur C..., Monsieur U... lui a rappelé que les quantités livrées à Orléans de septembre 2013 à février 2014 soit 7.153,07 tonnes et à Tours de novembre 2013 à février 2014 soit 4.306,16 euros, et qu'il s'était engagé en dérogation provisoire au contrat qui les liait, à fournir 2 x 10.000 tonnes sur Tours et Orléans, volume identique au contrat de base mais dont 50% dérouté sur Tours et incluant une modification de produit 80% de broyats et 20% d'écorces au prix dérogatoire de 25 euros par Mw h à compter du 11 novembre 2013 et il exprimait le souhait d'un fonctionnement plus fiable ;

- que par courriel du 11 avril 2014, Monsieur T..., s'est plaint auprès de Monsieur C... de la qualité de la biomasse reçue à Orléans, qu'il a expliqué avoir refusé la veille une livraison car le taux de fine était de 19% (maxi contractuel 6%) et le taux de bois inférieur à 3,15 mm était de 42% (maxi contractuel 30%), que s'agissant de la livraison du jour le taux de fine constaté à la réception était de 17,5% et le taux de bois inférieur à 3,15mm était de 48%, qu'il lui rappelait qu'il l'avait déjà appelé pour lui faire part des problèmes de combustion et qu'il était en conséquence dans l'obligation de refuser la livraison ;

- que suivant courriel du 14 avril 2014, Monsieur T... a informé Monsieur C... que le réceptionniste avait fait une analyse granulométrique sur le broyats que la livraison était encore une fois hors cahier des charges, qu'il lui proposait de temporiser les livraisons jusqu'à ce qu'ils se rencontrent mercredi et qu'il faisait l'effort d'accepter le camion bien que cela fasse au moins trois livraisons consécutives non conformes ;

- que par courriel du 13 janvier 2015, Monsieur C... a écrit à Monsieur M... pour lui faire part de ce que les premières livraisons avaient été contestées au motif qu'il y avait trop de grandes longueurs alors que la qualité des produits en stock avait été constatée par huissier de justice, qu'il avait livré des plaquettes et broyats de qualité au-delà de 20% en attendant de cribler les écorces ce qui avait un coût, qu'il avait demandé un prix de 25 euros du Mw h pour les frais complémentaires engendrés, qu'il avait maintes fois réclamé un avenant, qu'en avril il lui avait été reproché que les écorces criblées étaient trop fines, qu'il n'y avait pas eu de reprise de livraison après l'arrêt technique à Orléans puis à Tours en mai 2014, que Monsieur U... lui avait indiqué que les autres fournisseurs étaient moins chers et qu'il serait temps de voir le problème en novembre, que lors de sa visite le 8 octobre 2014, Monsieur M... lui avait fait une proposition à 27,50 euros qui était trop faible par rapport à ses prix de revient, que lors de sa rencontre avec Monsieur K... le 18 décembre 2014 à SAINTE, il lui avait été indiqué que le contrat de sécurisation sur la base de 27,50 euros du MW h n'était plus souhaité, qu'il avait sécurisé son stock en volume et en quantité et qualité pour respecter le contrat, qu'il était urgent de lui apporter une réponse et que chacun respecte ses engagements, qu'une solution amiable lui paraissait préférable à une procédure judiciaire ;

- que le 23 janvier 2015 Monsieur C... a écrit à Monsieur M... : "Suite à notre entretien téléphonique de mercredi 21 janvier 2015, je vous propose, en tenant compte d'une avance de trésorerie de 400.000 euros sur un an 27.000 MW h pour Orléans et également 27.000 MW h pour Tours sur une base de 29,30 euros Mw. Stock sécurisé en broyats et plaquettes comme livré précédemment nous souhaitons bien sûr ainsi pérenniser notre collaboration. Nous souhaitons une réponse rapide afin de bloquer la marchandise sur plate-forme." ;

- que par lettre du 3 février 2015, la société BOIS ENERGIE FRANCE a répondu que cette offre qui était sensiblement éloignée des conditions ayant prévalu à la conclusion du contrat qui les liait n'était pas compétitive au regard du marché, ne pouvait être acceptée, que cela faisait plusieurs mois qu'ils réfléchissaient conjointement aux moyens de pérenniser leurs relations face aux difficultés que rencontrait la société LES BOIS CHAUDS DU BERRY depuis l'été 2013 dans l'exécution de ses obligations contractuelles, que pour mémoire dans un courrier du 17 juillet 2013, elle avait unilatéralement souhaité modifier le prix du contrat pour le porter à 21 euros HT du MW h pour les écorces et 27,70 euros pour les broyats et plaquette, qu'après plusieurs réunions fin 2013 et face à ses difficultés et ses menaces de résilier le contrat, elle avait accepté une dérogation provisoire d'un an au contrat à compter du 11 novembre 2013, sur la base de 25 euros HT le MW h avec 80% de broyats et 20% d'écorces, qu'au terme de cette période dérogatoire ils n'étaient pas parvenus à trouver une solution et elle concluait en demandant à la société LES BOIS CHAUDS DU BERRY de lui confirmer qu'elle était en mesure de poursuivre leurs relations dans le respect du contrat du 4 juin 2012 ;

- que par lettre du 17 mars 2017, la société BOIS CHAUDS DU BERRY a par l'intermédiaire de son conseil mis en demeure la société BOIS ENERGIE FRANCE de lui payer une indemnité de 810.000 euros pour non respect de son engagement de commande ;

- que suivant courrier du 7 avril 2017, la société BOIS ENERGIE FRANCE s'est opposée à cette demande rappelant notamment que la société BOIS CHAUD DU BERRY ne s'était pas prononcée comme elle l'avait invitée à le faire sur la poursuite des relations commerciales dans les termes du contrat du 4 juin 2012;

Attendu qu'il résulte de ces éléments que contrairement à ce que soutient la société BOIS CHAUDS DU BERRY l'accord conclu à compter du 11 novembre 2013 pour la fourniture de 2 x 10.000 tonnes de 80% de broyats et 20% d'écorces, réparties entre les sites d'Orléans et Tours au prix de 25 euros du MW h était un accord dérogatoire et temporaire au contrat du 4 juin 2012 ;

Qu'en effet, dès le 25 novembre 2013, Monsieur U... écrivait sans que l'on puisse suspecter que le courriel ait été établi pour les besoins de la cause qu'il avait donné son accord à Monsieur C... pour la livraison en 2014 de 2 x 10.000 tonnes à 25 euros le MW h et que la situation devrait être revue fin 2014 ; que par ailleurs Monsieur C... n'a pas contredit Monsieur U... ni réagi lorsque celui-ci lui a, par courriel du 7 mars 2014, rappelé les engagements de livraison et de prix de la société BOIS CHAUDS DU BERRY à compter du 11 novembre 2013 et qu'il s'agissait d'une dérogation provisoire au contrat qui les liait ; que par ailleurs et contrairement à ce qu'écrit Monsieur C... dans son courriel du 15 janvier 2015, il ne justifie pas avoir réclamé un quelconque avenant qu'il ressort au contraire de ce courriel que comme l'avait annoncé Monsieur U... des négociations ont été reprises à l'issue de la période dérogatoire pour fixer les conditions de la poursuite de la relation commerciale ;

Attendu que contrairement à ce que prétend la société BOIS CHAUDS DU BERRY c'est elle qui a fait la proposition d'augmenter le prix du Mw h à 25 euros et de modifier la composition du produit comme cela ressort clairement de son courriel du 4 novembre 2013 et ce après que la société BOIS ENERGIE DE FRANCE lui ait reproché par lettre de 29 juillet 2013 de livrer des produits ne correspondant pas aux spécifications techniques de l'article 5.2.3 du contrat, comme cela pouvait être constaté sur les photographies jointes et qu'elle lui ait indiqué qu'elle n'entendait pas accepter la modification unilatérale du prix à 27,70 euros HT le Mw h exigé alors au surplus que la quantité de broyats et plaquettes livrée n'excédait pas les volumes prévus au contrat ;

Attendu qu'il est établi par les courriels qu'outre les camions refusés en avril 2013, la société BOIS ENERGIE DE FRANCE s'est plainte en juillet 2013 puis en février 2014 et en avril 2014 de la qualité des produits livrés sans que la société BOIS CHAUDS DU BERRY qui avait admis le problème en février, ne réagisse, aucun courrier ou courriel de contestation de ces réclamations n'étant produit ;

Attendu qu'il est constant qu'en mai 2014, la société BOIS ENERGIE DE FRANCE a cessé de passer commandes à la société BOIS CHAUDS DU BERRY; que cependant contrairement à ce que celle-ci prétend, il n'est pas démontré, ce qui est contesté, que cette interruption des commandes serait due à l'arrêt des centrales thermiques ; qu'il ressort en revanche du courriel du 14 avril 2014 de Monsieur T... qu'elle fait suite aux problèmes de qualité des livraisons puisque celui-ci indiquait qu'il convenait pour ce motif de temporiser les livraisons ;

Attendu que c'est à juste titre que la société BOIS ENERGIE FRANCE soutient qu'elle pouvait nonobstant les stipulations du contrat opposer l'exception d'inexécution dans les conditions du droit commun ;

Attendu toutefois que l'exception d'inexécution pour être retenue suppose que le cocontractant qui l'invoque ait lui-même respecté ses obligations ;

Or, attendu qu'en cessant de passer commande la société BOIS ENERGIE FRANCE a manqué à ses obligations contractuelles alors qu'elle n'avait pas fait constater que les matériaux livrés n'étaient pas conformes au contrat, les analyses de granulométrique invoquées par Monsieur T... dans son courriel du 14 avril 2014 n'étant pas produites et alors même que n'étaient en cause que quelques livraisons ; qu'elle ne peut pas davantage se prévaloir de ce que la société BOIS CHAUD DU BERRY aurait exigé de modifier les conditions financières du contrat par courriel de 6 mars 2014 alors qu'à cette date l'accord dérogatoire était en cours et que les livraisons du mois d'avril se sont faites sur cette base ;

Qu'il s'ensuit que c'est à tort que la société BOIS ENERGIE FRANCE se prévaut de l'exception d'inexécution pour justifier le non respect de son obligation contractuelle de commande ;

Attendu qu'il ressort en revanche des échanges de courriels que dès le mois de juillet 2013, soit un an après la conclusions du contrat la société BOIS CHAUDS DU BERRY a sollicité des modifications tarifaires en menaçant de ne pas en poursuivre l'exécution ; qu'elle a demandé une nouvelle augmentation à l'issue de l'accord dérogatoire jugeant une augmentation à 27,50 euros trop faible et a réclamé le 23 janvier 2015 une avance de trésorerie de 400.000 euros et un prix de 29,30 euros MW pour la livraison de broyats et plaquettes, ce qui constituait une modification substantielle du contrat sans qu'il soit justifié du bien fondé de telles exigences, étant relevé qu'il n'est pas démontré que la société BOIS ENERGIE FRANCE ait eu d'autres exigences quant à la qualité des produits livrés que celles prévues au contrat et que la société BOIS CHAUDS DU BERRY ne peut à cet égard utilement se prévaloir du constat d'huissier établi dans le cadre de la signature du contrat qui n'avait pas pour objet de vérifier la qualité des produits mais uniquement de ce qu'elle disposait d'un stock d'une valeur au moins équivalente au montant de l'avance qui lui a été consentie ;

Attendu qu'il se trouve ainsi établi que la société BOIS CHAUD DU BERRY a également manqué à ses obligations contractuelles en subordonnant leur exécution à des conditions financières fixées unilatéralement et sans référence au contrat ;

Attendu que sa détermination à ne pas respecter les termes du contrat résulte en outre du silence qu'elle a gardé alors que la société BOIS ENERGIE FRANCE lui avait demandé, par lettre du 3 février 2015 dont un exemplaire lui a été transmis par courriel, si elle entendait poursuivre le contrat dans les conditions initiales, étant observé que ce silence a perduré pendant 2 ans jusqu'à ce qu'elle réclame le paiement d'indemnités par l'intermédiaire de son conseil ;

Attendu que les manquements réciproques des parties justifient que la résiliation du contrat soit prononcée à la date du 23 janvier 2015 à laquelle la société BOIS CHAUDS DU BERRY a subordonné la poursuite du contrat à ses exigences financières ;

Attendu qu'il ressort des échanges de courriels et notamment de celui de Monsieur C... du 23 janvier 2015 que les sociétés avaient entrepris des discussions postérieurement à la décision de la société BOIS ENERGIE FRANCE de temporiser les livraisons en raison des problèmes de qualités pour négocier un nouveau prix qui n'a pas été remise en cause par la société BOIS CHAUDS DU BERRY ;

Qu'il convient dès lors que des négociations étaient en cours, que la société BOIS CHAUDS DU BERRY n'a jamais remis en cause la décision de temporiser les livraisons en raison des problèmes de qualité qui lui ont été signalées et que la résiliation est prononcée à torts partagés de la débouter de sa demande indemnitaire fondée sur l'article 14.2 du contrat d'infirmer la décision déférée sur ce point et de la confirmer en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts distincts puisqu'en raison de sa faute, elle ne peut prétendre être indemnisée des conséquences de la rupture du contrat ;

Attendu que le sens de la décision justifie de laisser à chaque partie la charge de ses dépens et de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêts mis à disposition au greffe, contradictoire en dernier ressort:

INFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la société BOIS CHAUDS DU BERRY de sa demande de dommages et intérêts au titre de son préjudice distinct ;

STATUANT À NOUVEAU

PRONONCE la résiliation du contrat du 4 juin 2012 aux torts partagés des sociétés BOIS CHAUDS DU BERRY E et BOIS ENERGIE FRANCE ;

DÉBOUTE la société BOIS CHAUDS DU BERRY de ses demandes formées en application de l'article 14.2 du contrat du 4 juin 2012 ;

DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 18/01280
Date de la décision : 20/06/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-20;18.01280 ?
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