COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 13/06/2019
Me Anne CARROGER
la SELARL SEBAUX ET ASSOCIES
ARRÊT du : 13 JUIN 2019
No : 210 - 19
No RG 18/01023 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FVLM
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal d'Instance de BLOIS en date du 15 Novembre 2017
PARTIES EN CAUSE
APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265212598447091
Monsieur E... D...
[...]
Ayant pour avocat postulant Me Anne CARROGER, avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant ME Franck LAVOUE, avocat au barreau de CHATEAUROUX,
D'UNE PART
INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265224472696077
Banque Populaire VAL DE FRANCE
Société anonyme coopérative de Banque Populaire à capital variable, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...]
Ayant pour avocat Me Yves andré SEBAUX, membre de la SELARL SEBAUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de BLOIS,
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 15 Avril 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 24 janvier 2019
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l'audience publique du 28 MARS 2019, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, en son rapport, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,
Greffier :
Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,
ARRÊT :
Prononcé le 13 JUIN 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE :
La Banque Populaire Val de France a, le 19 février 2005, consenti à Monsieur E... D... et à son épouse, Madame K... O..., un prêt d'équipement professionnel de 70.000 euros remboursable en 84 mensualités leur permettant d'acquérir un fonds de commerce de coiffure à Vendôme et d'alimenter la trésorerie.
Madame D... a fait l'objet le 14 mars 2008 d'une procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire le 13 mars 2009 et la banque a déclaré sa créance à Maître I... désigné mandataire puis liquidateur judiciaire.
Après avoir mis en vain Monsieur D... en demeure de lui régler la somme restant due, la Banque Populaire l'a assigné le 20 août 2014 devant le tribunal de commerce de Blois qui, par jugement en date du 3 mars 2015, a condamné le défendeur à payer la somme de 68.263,64 euros augmentée des intérêts au taux de 9,75% sur les échéances impayées et le capital restant dû, et au taux légal sur l'indemnité forfaitaire de 2.189,93 euros à compter 25 février 2014, ordonné la capitalisation des intérêts, et condamné Monsieur D... au paiement d'une indemnité de procédure de 400 euros.
Le 16 juin 2015, la Banque Populaire a saisi le tribunal d'instance de Blois d'une demande tendant à la saisie des rémunérations de Monsieur D....
Par jugement en date du 15 novembre 2017 le tribunal a ordonné la saisie des rémunérations réclamée à hauteur de 43.872,24 euros et a condamné le défendeur à payer à la Banque Populaire la somme de 250 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur D... relevé appel de cette décision par déclaration en date du 15 avril 2018.
Il en poursuit l'infirmation en demandant à la cour à titre principal, de juger irrecevable la requête aux fins de saisie des rémunérations ou de débouter la Banque Populaire de l'intégralité de ses demandes. A titre subsidiaire il demande à la cour de réduire le taux d'intérêts au taux légal et de juger que les sommes saisies s'imputeront en priorité sur le capital de la créance.
Il fait valoir que la demande de l'intimée n'est pas recevable puisque les salaires d'un époux marié sous un régime de communauté sont des biens communs frappés par la saisie collective au profit des créanciers de l'époux faisant l'objet de la procédure collective qui ne peuvent être saisis, pendant la durée de celle-ci, au profit d'un créancier de l'époux demeuré maître de ses biens ; que l'arrêt des poursuites individuelles concerne les biens communs, y compris les salaires du conjoint in bonis; qu'il s'est marié sans contrat de mariage en Turquie le 16 mars 1996, et que la première résidence des époux étant en France, s'applique le régime français de la communauté légale.
Il soutient ensuite que, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le juge a la faculté, en matière de saisie des rémunérations, de réduire le taux des intérêts de la créance et d'imputer les sommes saisies sur le capital.
La Banque Populaire sollicite la confirmation du jugement critiqué et la condamnation de l'appelant à lui verser une nouvelle indemnité de procédure de 3.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de la Selarl SEBAUX & ASSOCIES.
Elle soutient que l'argumentation présentée est sans objet puisque la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'encontre de Madame D... a été clôturée pour insuffisance d'actifs par jugement en date du 31 mars 2017. Elle souligne par ailleurs que Monsieur D... ne rapporte aucunement la preuve de ce qu'il serait marié sous le régime de communauté.
Elle prétend que la demande subsidiaire de Monsieur D... est irrecevable puisqu'il a été définitivement condamné à payer la somme due assortie des intérêts au taux contractuel capitalisés et que le juge de la saisie immobilière, investi des pouvoirs du juge de l'exécution, ne peut modifier le dispositif d'une décision irrévocable.
Elle précise enfin que l'appelant se contente de produire un mandat de vente de son immeuble sans aucunement justifier du prix réel de ce dernier et sans faire connaître les suites de ce mandat.
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :
Attendu que, sans même tenir compte de ce que :
- Monsieur D... est désormais divorcé de Madame O... ainsi qu'il est démontré par les pièces communiquées par les parties qui permettent de vérifier que cette dernière se prénomme K... et est née le [...] , tandis que le mandat de vente de l'immeuble de l'appelant est signé par son épouse madame D... A... née en [...],
- ce divorce est nécessairement intervenu avant le 14 avril 2015 puisque le mandat de vente a été signé à cette date par Madame A... D...,
- l'appelant ne justifie pas que la première résidence des époux, mariés en Turquie, a été établie en France,
- Monsieur D... ne produit pas l'acte de liquidation de son premier régime matrimonial,
ce qui ne permet pas de vérifier ses dires d'une application du régime matrimonial français de la communauté et encore moins de salaires entrant, depuis le mois d'avril 2015, dans la communauté qui existait avec Madame K... D... dont il était divorcé, il ne peut qu'être constaté que l'argumentation de l'appelant est, en tout état de cause, sans fondement ;
Qu'en effet la jurisprudence de la Cour de cassation qu'il verse aux débats ne concerne que l'arrêt des poursuites individuelles pendant la durée de la procédure collective ;
Qu'en l'espèce la liquidation judiciaire dont Madame D... faisait l'objet a été clôturée pour insuffisance d'actif le 31 mars 2017 ainsi qu'en a justifié l'intimée à la demande de la cour et que l'arrêt des poursuites individuelles dont pouvait éventuellement bénéficier Monsieur D... a définitivement pris fin ;
Qu'il est en tout état de cause constant qu'à la date à laquelle la cour statue, Monsieur D... est divorcé de la débitrice placée en liquidation des biens et qu'il ne peut faire état d'aucun moyen lui permettant d'échapper au paiement auquel il a été condamné ;
Que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a ordonné la saisie de ses rémunérations ;
Attendu que Monsieur D... demande à la cour de réduire le taux d'intérêts au taux légal et de juger que les sommes saisies s'imputeront en priorité sur le capital de la créance ;
Que, pour fonder cette demande, il fait valoir qu'il a mis en vente son immeuble d'habitation et produit un mandat de vente démontrant selon lui sa volonté de désintéresser la créancière ;
Mais attendu qu'il sera tout d'abord relevé que ce mandat de vente, daté d'avril 2015, était conclu pour une durée de 12 mois sans qu'il soit justifié qu'il est aujourd'hui toujours en cours et sans que Monsieur D... n'expose pourquoi son immeuble n'aurait pas trouvé acquéreur pendant 4 ans ;
Que, surtout, aux termes de l'article L.3252-13 du code du travail, le juge peut décider, à la demande du débiteur ou du créancier et en considération de la quotité saisissable de la rémunération, du montant de la créance et du taux des intérêts dus, que la créance cause de la saisie produira intérêt à un taux réduit à compter de l'autorisation de saisie ou que les sommes retenues sur la rémunération s'imputeront d'abord sur le capital ;
Que, pour faire usage du droit qui lui est ainsi ouvert par ces dispositions légales, le juge doit expressément motiver sa décision en tenant compte de trois éléments cumulatifs à savoir le montant de la créance et le taux des intérêts dus, qui sont connus parla cour mais aussi la quotité saisissable de la rémunération, laquelle est inconnue puisque Monsieur D... n'a pas produit un seul bulletin de salaire et n'a pas fait connaître ses charges de famille ;
Qu'il convient dès lors de rejeter les demandes tendant à la réduction du taux d'intérêts ainsi qu'à l'imputation des paiements sur le capital de la créance et de confirmer entièrement le jugement déféré ;
Attendu que Monsieur D..., succombant à l'instance, en supportera les dépens et qu'il sera fait application, au profit de l'intimée, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME la décision entreprise,
Y AJOUTANT,
CONDAMNE Monsieur E... D... à payer à la Banque Populaire Val de France la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Monsieur D... E... aux dépens d'appel,
ACCORDE à la Selarl SEBAUX & ASSOCIES, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT