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02/05/2019 | FRANCE | N°18/01304

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 02 mai 2019, 18/01304


COUR D'APPEL D'ORLÉANS


CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE






GROSSES + EXPÉDITIONS : le 02/05/2019
la SELARL PRUNIER-D'INDY
la SCP SAINT-CRICQ, NEGRE ET LA RUFFIE
ARRÊT du : 02 MAI 2019


No : 175 - 19
No RG 18/01304 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FV5Z


DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 16 Mars 2018


PARTIES EN CAUSE


APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265222265687184


Monsieur S... D...
[...]


Ayant pour avocat Me Alai

n PRUNIER, membre de la société d'avocats PRUNIER-D'INDY, avocat au barreau de TOURS






D'UNE PART


INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265226675...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 02/05/2019
la SELARL PRUNIER-D'INDY
la SCP SAINT-CRICQ, NEGRE ET LA RUFFIE
ARRÊT du : 02 MAI 2019

No : 175 - 19
No RG 18/01304 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FV5Z

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 16 Mars 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265222265687184

Monsieur S... D...
[...]

Ayant pour avocat Me Alain PRUNIER, membre de la société d'avocats PRUNIER-D'INDY, avocat au barreau de TOURS

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265226675562973

BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [...]

Ayant pour avocat postulant Me Valerie DESPLANQUES, membre de la SCP Valerie DESPLANQUES, avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Me Eric NEGRE, avocat au barreau de TOURS,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 15 Mai 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 14 mars 2019

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 28 MARS 2019, à 9 heures 30, devant Madame Elisabeth HOURS , Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 02 MAI 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Monsieur S... D... s'est, le 9 novembre 1991, porté caution solidaire à hauteur de 200.000 francs de tous les engagements souscrits par la S.A.R.L. D... envers la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE (la BPVF) dans les livres de laquelle cette société avait ouvert un compte.

Par jugement en date du 15 septembre 2015, la Société D... a été placée en liquidation judiciaire et la BPVF a procédé à la déclaration de sa créance par lettre en date du
13 octobre 2015 pour les sommes de 73.799,97 euros et 65.108,75 euros correspondant au solde débiteur du compte bancaire, aux cessions de créances impayées et aux cautions données par la banque. Les créances ainsi déclarées ont fait l'objet d'une admission définitive.

Après vaine mise en demeure adressée à Monsieur D... d'honorer son engagement, la BPVF l'a assigné le 10 avril 2017 devant le tribunal de commerce de Tours en réclamant paiement de la somme de 30.545,63 euros correspondant à 200.000 francs.

Par jugement en date du 16 mars 2018, le tribunal a débouté Monsieur D... de toutes ses demandes et l'a condamné à payer à la BPVF la somme de 30.545,63 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2017, a ordonné la capitalisation des intérêts échus par années entières, et l'a condamné à verser une indemnité de procédure de 500 euros ainsi qu'à supporter les dépens.

Monsieur D... a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 15 mai 2018.

Il en poursuit l'infirmation en demandant à la cour à titre principal de juger que le cautionnement qu'il a consenti à la BPVF était manifestement disproportionné à ses ressources et de l'en décharger. A titre subsidiaire, il réclame paiement de 30.545,63 euros assortis des intérêts au taux légal à compter du 19 janvier 2017 et la compensation des créances réciproques des parties en raison de la faute commise par la banque en le laissant souscrire un cautionnement disproportionné. En tout état de cause, il sollicite paiement de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnation de la BPVF à supporter les dépens de première instance et d'appel.

Il fait valoir qu'en novembre 1991, il percevait un salaire mensuel net de 13.598,75 francs ; que son épouse ne travaillait pas et n'avait aucun revenu comme le démontre son relevé de carrière ARRCO ; qu'ils avaient tous deux acquis le 10 septembre 1987, un terrain situé sur la commune de [...] la somme de 233.573 francs et y avaient fait édifier un immeuble d'habitation à l'aide d'un emprunt souscrit pour une durée de 20 ans auprès du CRÉDIT FONCIER DE FRANCE pour un montant de 540.000 francs. Et il soutient qu'il n'est nul besoin de verser aux débats une attestation d'un professionnel de l'immobilier sur la valeur vénale de cet immeuble pour se convaincre de la faiblesse de l'actif net subsistant au regard du passif contracté à hauteur de 692.252,64 francs, intérêts compris, en 1987.

La BPVF sollicite la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de Monsieur D... à lui verser 1.000 euros sur le fondement de l'article 1240 du code civil pour appel abusif et 3.600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP VALÉRIE DESPLANQUES.

Elle fait valoir que l'appelant ne démontre pas l'impossibilité manifeste de faire face à ses engagements avec ses biens et revenus et qu'il importe peu que le montant de son cautionnement soit pratiquement du montant de son patrimoine puisque la réalisation de ce dernier lui permet de s'acquitter des sommes dues. Elle précise que la jurisprudence retenait que seul le créancier qui fait souscrire de mauvaise foi à la caution un engagement disproportionné commet une faute. Elle souligne que Monsieur D... ne communique aucune pièce sur sa situation actuelle ; qu'il ne prétend pas avoir vendu le bien immobilier dont le prêt est désormais remboursé ; que son compte chèque [...] était, en juin 2017, créditeur à hauteur de 56.812,95 euros ; qu'il perçoit un revenu mensuel total de 2.383,43 euros et que son appel est manifestement dilatoire.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu qu'il n'est pas discuté que le cautionnement de Monsieur D..., souscrit le 9 novembre 1991 est antérieur aux dispositions légales contenues dans les articles L.332 1 et suivants du code de la consommation qui ne lui sont donc pas applicables (Cass. chambre mixte. 22 septembre 2006 no 00.244 ) ;

Attendu que Monsieur D... fait valoir que l'exception de disproportion était reconnue par la jurisprudence avant à l'entrée en vigueur de ces dispositions légales (Cf notamment Cass. Com. 17 juin 1997 no95-14.105 ; Cass Com. 1er juillet 2003 no00-18.154);

Mais attendu que, contrairement à ce que soutient l'appelant, la souscription d'un cautionnement disproportionné ne conduisait pas à retenir qu'un tel engagement était inopposable à la caution mais, lorsqu'il était démontré que la banque ne pouvait ignorer cette disproportion, à condamner le prêteur à verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice de perte de chance de ne pas avoir souscrit un tel engagement si la banque avait porté à la connaissance de la caution les risques encourus ;

Qu'en effet, à la date à laquelle le cautionnement litigieux a été souscrit, les établissements prêteurs n'étaient pas contraints de se renseigner sur les capacités financières des cautions et de vérifier la proportionnalité de leurs engagements à ces ressources et à leur patrimoine ;

Que la jurisprudence retenait en conséquence que, pour les dirigeants d'entreprises qui se portaient cautions personnelles de leur société, ce n'était que lorsque l'établissement bancaire avait des informations particulières sur les revenus, le patrimoine et les facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l'état du succès escompté de l'opération cautionnée qui auraient dû le conduire à constater l'existence d'une disproportion, qu'il commettait une faute engageant sa responsabilité en ne mettant pas en garde la caution chef d'entreprise ;

Qu'il ne suffit donc pas à l'appelant de faire état de ses ressources, de ses charges et de son patrimoine à la date de signature de l'engagement de caution mais qu'il doit également démontrer que la banque, en ayant parfaite connaissance, l'a laissé souscrire un engagement disproportionné et ainsi commis une faute engageant sa responsabilité ;

Et attendu que l'appelant non seulement ne le justifie pas mais qu'il ne le prétend même pas étant observé que le prêt immobilier dont il fait état lui a été consenti par le Crédit Foncier et non par la BPVF à laquelle il n'indique pas en avoir fait part ;

Que le montant du cautionnement souscrit par Monsieur D..., dirigeant d'entreprise, n'apparaissait pas exorbitant ; qu'il connaissait parfaitement la société qu'il cautionnait et qui a remboursé le prêt consenti pendant plus de 20 ans ; que ce sont ses fonctions dans cette société qui lui ont, pendant cette même durée de temps, apporté les revenus qui lui ont permis de rembourser le crédit immobilier dont il se prévaut aujourd'hui et lui ont permis de se constituer un patrimoine ;

Qu'en l'absence de tout élément pouvant démontrer une faute commise par la banque au regard des obligations légales et contractuelles qui étaient les siennes le 9 novembre 1991, l'appelant n'est pas fondé à rechercher la responsabilité de la banque en raison d'une disproportion entre le montant de son engagement et sa capacité financière ;

Que ce n'est donc que surabondamment qu'il sera relevé que Monsieur D... n'est pas aujourd'hui empêché de verser la somme de 30.545,63 euros et qu'un tel paiement ne le placerait pas en difficulté financière ;

Qu'il convient en conséquence de confirmer entièrement la décision déférée ;

Attendu que l'intimée ne fait état d'aucun élément caractérisant l'abus de procédure qu'elle reproche à l'appelant et sera déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;

Attendu que Monsieur D..., succombant à l'instance en supportera les dépens et qu'il sera fait application, au profit de l'intimée, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise,

Y AJOUTANT,

DÉBOUTE la Banque Populaire Val de France de sa demande en paiement de dommages et intérêts,

CONDAMNE Monsieur S... D... à payer à la Banque Populaire Val de France la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur S... D... aux dépens d'appel,

ACCORDE à la SCP VALÉRIE DESPLANQUES, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 18/01304
Date de la décision : 02/05/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-02;18.01304 ?
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