COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 25/04/2019
la SELARL DA COSTA - DOS REIS
PG
ARRÊT du : 25 AVRIL 2019
No : 173 - 19
No RG 18/02118 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FXWV
DÉCISION ENTREPRISE : jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 25 Juin 2018
PARTIES EN CAUSE
APPELANT :
- Timbre fiscal dématérialisé No: ./.
Monsieur C... F... B...
né le [...] à AIRAES-FELGUEIRAS (PORTUGAL)
[...]
Ayant pour avocat Me Antonio DA COSTA, membre de la SELARL DA COSTA - DOS REIS, avocat au barreau d'ORLEANS
D'UNE PART
INTIMÉS :
- Timbre fiscal dématérialisé No: ./.
Monsieur U... H...
né le [...] à MARGARIDE-FEILGUEIRAS(PORTUGAL
[...]
[...]
défaillant
Monsieur M... T...
ès qualité de « Mandataire liquidateur » de la « Société RST ISOLATION »
[...]
défaillant
Monsieur LE PROCUREUR GENERAL- COMMERCIAL
Cour d'Appel d'ORLEANS
[...]
non comparant, non représenté
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 13 Juillet 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 10 janvier 2019
Dossier communiqué au Ministère Public le 8 octobre 2018
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l'audience publique du 14 FEVRIER 2019, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, en son rapport, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,
Greffier :
Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors des débats et du prononcé,
ARRÊT :
Prononcé le 25 AVRIL 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Exposé du litige :
La S.A.R.L. RST ISOLATION a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Orléans en date du 22 avril 2015, ayant fixé la date de cessation des paiements au 17 avril 2015. Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire par décision en date du 7 octobre 2015. Elle a été clôturée pour insuffisance d'actif le 2 août 2018.
Cette société avait pour cogérants Monsieur C... B... et Monsieur U... H... , ce dernier ayant démissionné de ses fonctions le 15 juin 2015 et Monsieur B... étant alors devenu seul et unique gérant.
Par jugement en date du 25 juin 2018 le tribunal de commerce d'Orléans a prononcé à l'encontre de Monsieur B... et de Monsieur H... une mesure d'interdiction de gérer pendant une durée de 12 ans.
Monsieur B... a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 13 juillet 2018.
Il en poursuit l'infirmation en demandant à la cour de dire n'y avoir lieu à prononcer de sanction à son encontre et de statuer ce que de droit sur les dépens.
Il souligne que la procédure collective a été initiée par une déclaration de cessation des paiements formée par les dirigeants de la société et fait valoir que les premiers juges fondent leur décision sur des faits antérieurs de plusieurs mois à la date de cessation des paiements, laquelle est restée maintenue au 17 avril 2015.
Il affirme que, si l'exploitation avait réellement été déficitaire, le tribunal n'aurait pas décidé d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire, mais une procédure de liquidation judiciaire immédiate, ce qui démontre que la situation de la société n'était pas totalement obérée.
Il rappelle que le secteur du bâtiment a traversé une crise en 2014/2015 et que les difficultés de la société ont été aggravées par son absence pour maladie pendant plus d'une année.
Il reproche au tribunal de n'avoir pas précisé en quoi la poursuite de l'activité aurait été abusive et ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements et de s'être contenté d'un jugement de valeur sur les capacités de gestion des dirigeants. Il affirme que le seul reproche d'une faute de gestion constitue un motif impropre à justifier le prononcé d'une mesure de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer et prétend qu'aucune faute n'est en outre établie et caractérisée.
Il précise que lui sont reprochés des retraits sur le compte bancaire de la société qui se trouvait déjà à découvert pour un montant total de 940 euros entre le 3 et le 15 avril 2015, dates auxquelles il était encore en convalescence à la suite de son accident du travail, ce qui suffit à établir qu'il ne peut en être l'auteur. Il fait valoir que ne peut pas plus lui être reprochée la disparition d'une partie importante du matériel inventorié le 13 mai 2015 par le commissaire priseur désigné lors de l'ouverture de la procédure collective puisque seuls des faits antérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective peuvent justifier le prononcé d'une sanction et il fait valoir que le matériel aurait disparu à une époque où il était absent de l'entreprise, tandis que le véhicule présent dans le rapport d'inventaire n'appartenait pas à la société.
Maître T... assigné à domicile n'a pas constitué avocat. Le présent arrêt sera donc rendu par défaut.
Le Ministère Public conclut à l'infirmation du jugement déféré au regard de l'absence de l'appelant pour maladie jusqu'en mars 2015, ce qui empêche de lui reprocher la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire.
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :
Attendu que l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire par le tribunal ne démontre aucunement que la poursuite d'une activité déficitaire n'était pas caractérisée, le tribunal ayant statué au regard des seules déclarations du gérant qu'il ne pouvait alors vérifier ;
Qu'il est démontré que les charges fiscales et sociales de la société n'étaient plus réglées depuis 2014 ;
Que le passif était en effet composé de privilèges du Trésor pour les années 2014 et 2015, d'une créance des caisses de retraite et de prévoyance du BTP et de cotisations URSSAF dues au titre des deuxième et troisième trimestres 2014 ;
Que la poursuite de l'activité de la société était abusive dès lors que le passif social et fiscal était déjà très élevé à la fin de l'année 2014 et que des factures demeuraient en souffrance depuis avril pour un montant de 7.900 euros et depuis juillet 2014 pour 900 euros ;
Que le déficit était manifeste puisque la société était redevable de 58.403,10 euros et que la poursuite de l'activité depuis le mois de juin 2014 ne pouvait que conduire à la cessation des paiements ;
Attendu par ailleurs que le liquidateur à la liquidation judiciaire a constaté des retraits d'un montant total de 940 euros alors que le compte bancaire de la société présentait un découvert de 6.179,83 euros ;
Qu'il importe peu que Monsieur G... K... ait alors été en convalescence puisque, s'il est certain qu'il ne travaillait plus manuellement au sein de la société, il ne démontre aucunement qu'il était empêché d'exercer ses fonctions de gérant ;
Qu'il était encore cogérant de la société à la date à laquelle les retraits ont été effectués ;
Que ces retraits constituent le détournement de partie de l'actif de la personne morale prévu par l'article L 653-4-4o du code de commerce ;
Attendu enfin que, s'il est exact que la disparition d'une partie de l'actif après l'ouverture de la procédure collective ne peut caractériser le détournement d'actifs prévu par l'article 653-4, lequel n'est constitué que lorsque sont établis des faits antérieurs à l'ouverture d'une procédure collective, il caractérise l'absence de coopération avec les organes de la procédure et l'obstacle à son bon déroulement ;
Que Monsieur G... K..., qui en était parfaitement conscient et qui a reconnu avoir lui-même vendu le véhicule de la société et avoir encaissé son prix s'était expressément engagé à restituer avant le 15 juillet 2016 une somme de 1.800 euros correspondant à la valeur du véhicule présent dans le rapport d'inventaire mais n'a pas honoré sa promesse et que l'actif net de la société estimé par le commissaire priseur à 2.960 euros était réduit à 60,09 euros ;
Attendu que l'appelant, qui n'a pas demandé la suspension de ses fonctions de gérant et n'a pas démissionné de ces fonctions pendant son arrêt maladie, est responsable, comme son co-gérant de l'ensemble de ces faits ;
Qu'il est seul responsable des faits d'obstacle au bon déroulement de la procédure collective ;
Qu'il encourt donc une peine d'interdiction de gérer ;
Qu'au regard du passif de 117.401 euros généré par une société au capital social de 4.000 euros dont les cogérants ne se sont pas portés caution les premiers juges ont fait une exacte appréciation des faits qui leur étaient soumis en prononçant cette sanction pendant une durée de 12 années ;
Attendu que l'appelant, succombant en ses prétentions, devra supporter les dépens de l'instance et qu'il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, rendu par défaut et en dernier ressort,
CONFIRME la décision entreprise,
Y AJOUTANT,
CONDAMNE Monsieur C... B... aux dépens d'appel.
Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Madame Marie-Claude DONNAT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT