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04/04/2019 | FRANCE | N°18/00807

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 04 avril 2019, 18/00807


COUR D'APPEL D'ORLÉANS


CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE






GROSSES + EXPÉDITIONS : le 04/04/2019
la SCP Valerie DESPLANQUES
la SCP LAVAL - FIRKOWSKI
ARRÊT du : 04 AVRIL 2019


No : 140 - 19
No RG : 18/00807 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FU4X


DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTARGIS en date du 22 Février 2018


PARTIES EN CAUSE


APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265212176936016
SAS JSM PERRIN
agissant poursuites et diligences de son reprÃ

©sentant légal domicilié en cette qualité audit siège [...]


Ayant pour avocat postulant Me Valerie DESPLANQUES, membre de la SCP Valerie DESPLA...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 04/04/2019
la SCP Valerie DESPLANQUES
la SCP LAVAL - FIRKOWSKI
ARRÊT du : 04 AVRIL 2019

No : 140 - 19
No RG : 18/00807 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FU4X

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTARGIS en date du 22 Février 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265212176936016
SAS JSM PERRIN
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [...]

Ayant pour avocat postulant Me Valerie DESPLANQUES, membre de la SCP Valerie DESPLANQUES, avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Me Marc PEUFAILLIT, membre de la JFA SOUILLAC&ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265224447395761
SCI JSM II
prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège [...]

Ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL, membre de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS, et pour avocat plaidant Me André GUILLEMAIN, membre de la SCP GUILLEMAIN-SAINTURAT-PANEPINTO, avocat au barreau de PARIS,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 15 Mars 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 22 novembre 2018 2019

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 24 JANVIER 2019, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, en son rapport, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :
Madame Marie-Lyne EL BOUDALI, Greffier lors des débats,
Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé le 04 AVRIL 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

RG No18/807 JSM PERRIN / JSM II audience du 24 janvier 2019 délibéré 4 avril 2019

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte authentique du 5 avril 1990, la société JSM I a consenti un bail à construction pour une durée de 30 ans à la société AUXICOMI portant sur une parcelle sise [...] aux fins d'y faire édifier un ensemble immobilier à usage industriel et de bureaux.

Par acte authentique du même jour, la société AUXICOMI a accordé un crédit bail immobilier à la société JSM II pour lui permettre de réaliser ce projet immobilier.

Suivant acte notarié du 7 juillet 1997, la société AUXICOMI a accordé un financement complémentaire à la société JSM II pour procéder à une extension de l'immeuble.

La société JSM II a levé l'option d'achat à l'expiration du crédit bail le 16 janvier 2006.

Suivant acte sous-seing privé du 22 octobre 2003, la société JSM II a renouvelé pour une durée de 9 ans à compter du 1er septembre 2003 la sous-location commerciale consentie au profit de la société JSM PERRIN sur ces locaux par acte du 1er août 1990, et ce moyennant un loyer annuel de 142.035,52 euros payable trimestriellement à terme échu.

Par acte d'huissier de justice du 26 juin 2012, la société JSM II a fait délivrer un congé à la société JSM PERRIN avec offre de renouvellement à compter du 1er janvier 2013 pour une durée de 7 années et 3 mois soit jusqu'au 31 mars 2020 correspondant au terme du bail à construction moyennant un loyer de 196.665,41 euros par an hors taxes et hors charges.

Par mémoire notifié le 28 août 2013 à la société JSM II, la société JSM PERRIN a sollicité la fixation du loyer révisé à la somme de 90.000 euros hors taxes et hors charges.

Aucun accord n'étant intervenu entre les parties, la société JSM PERRIN a fait assigner par acte du 31 octobre 2013 la société JSM II devant le juge des loyers commerciaux de Montargis à l'effet de voir fixer le loyer du bail renouvelé à la somme de 90.000 euros à compter du 1er janvier 2013.

Suivant jugement du 18 décembre 2014, le juge des loyers commerciaux a ordonné avant dire droit une expertise judiciaire et a fixé le loyer provisionnel à la somme de 142.035,52 euros annuels à compter du 1er janvier 2013 et pendant toute la durée de la procédure.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 10 août 2016 en estimant la valeur locative du bail renouvelé à la somme de 201.565 euros.

Par mémoire récapitulatif déposé le 7 septembre 2017, la société JSM PERRIN a souhaité voir, fixer le montant du loyer à la somme de 130.000 euros hors taxes et hors charges, voir condamner la société JSM II à rembourser les loyers trop perçus depuis le 1er janvier 2013 et à lui payer la somme de 5.000 euros pour frais de procédure.

Suivant mémoire déposé au greffe le 6 octobre 2017, la société JSM II a demandé au juge de fixer le loyer du bail renouvelé à la somme de 200.026,35 euros et a réclamé une somme de 8.000 euros pour frais de procédure.

Par jugement du 22 février 2018, le juge des loyers commerciaux a fixé le montant du loyer à la somme de 201.465 euros à compter du 1er janvier 2013 hors taxes et hors charge et a condamné la société JSM PERRIN à payer à la société JSM II la somme de 2.000 euros pour frais de procédure.

La société JSM PERRIN a relevé appel de la décision le 15 mars 2018.

Elle en poursuit l'infirmation et reprend devant la cour ses prétentions initiales auxquelles elle ajoute une demande d'indemnité de procédure de 5.000 euros.

Elle reproche au premier juge de s'être fondé uniquement sur le rapport de l'expert judiciaire Monsieur X... qui comporte de nombreuses erreurs qui le discréditent concernant notamment le schéma contractuel qu'il n'a pas appréhendé puisqu'il fait état d'un bail à construction conclu entre la société AUXICOMI et la société JSM II le 5 avril 1990, alors que ces deux sociétés étaient liées pas un contrat de crédit-bail, que la société JSM II lui a consenti une sous-location commerciale dans le cadre de ce crédit bail et que ces contrats sont de nature différente du bail à construction conclu entre la société JSM I et la société AUXICOMI. Et elle souligne que l'expert s'est contenté pour estimer la valeur locative de reprendre la démarche de l'expert du bailleur Monsieur L... sans explication ni démonstration notamment en ce qui concerne la valorisation distincte selon la nature des surfaces qu'il a appliquée sans préciser les bases unitaires ni fournir d'éléments de comparaison.

Elle explique que les sociétés JSM II et JSM PERRIN ayant à l'époque le même actionnaire majoritaire Monsieur S..., le montant du loyer a été fixé sans tenir compte de la valeur locative de l'immeuble mais en fonction du coût du crédit bail souscrit par la société JSM II pour financer la construction de l'usine qui a été mis ainsi à la charge du preneur et que le loyer a été surévalué au regard de la faible activité économique sur le Montargois.

Elle soutient que les rapports d'expertises amiables qu'elle a fait réaliser par Monsieur F... et Monsieur V... qui concluent pour le premier à une valeur locative de 90.000 euros et de 130.000 euros pour le second ont force probante puisqu'ils ont été soumis à la discussion contradictoire des parties.

Vantant le sérieux de ces expertises, elle fait valoir :
- que Monsieur F... a relevé que l'aspect extérieur des bâtiments qui datent de 1989 et 1997 est ancien, que le parking ne comprend pas d'aire réservée aux poids lourds, que la valeur de 30 euros le m² qu'il a retenue prend notamment en compte la situation des locaux, leur consistance physique, leur bon état d'entretien, leur fonctionnalité limitée et le fait qu'il s'agit d'un bail limité à 7 ans et 3 mois non renouvelable et qu'il n'existait pas d'éléments de comparaison pertinents du fait de l'étroitesse du marché montargois des locaux industriels,
- que Monsieur V... a quant à lui pris soin de rappeler l'historique de l'opération ayant conduit à la sous-location commerciale, qu'il a souligné que le loyer correspondait en réalité au montant du remboursement du crédit-bail que celui-ci ayant été remboursé en 2005 un tel calcul ne pouvait plus se justifier, qu'il a précisément décrit l'immeuble et sa conception intérieure, que son estimation tient compte de la configuration étriquée du terrain, de ce qu'il n'existe pas de références pertinentes dans le secteur et du caractère précaire de la sous-location qui n'est pas renouvelable.

Elle critique le rapport établi par Monsieur L... à la demande du bailleur qui est destiné, selon elle, à justifier le montant du loyer réclamé et reprend les observations de Monsieur F... qui liste les erreurs et contradictions de ce rapport concernant les surfaces et la date de renouvellement du bail, le descriptif et les caractéristiques des locaux, l'étude de marché et les références citées et la valeur de 50 euros le m² qui ne correspond pas au marché des grands locaux d'activités de l'agglomération montargoise.

Elle répond aux arguments de son adversaire que l'évolution de son chiffre d'affaires n'est pas un critère de fixation du loyer, que la faiblesse de l'offre locative et de l'activité économique sur le Montargois ne peut pas justifier une surévaluation du loyer, qu'il importe de prendre en considération l'historique des relations contractuelles dès lors que conformément à l'article R 145-8 du code de commerce, il doit être tenu compte des modalités selon lesquelles le prix antérieurement applicable a été originairement fixé et qu'en l'espèce le loyer initial était déconnecté de la valeur locative puisque destiné à permettre au bailleur de rembourser le crédit-bail ce qui n'est plus d'actualité et qu'il est faux de prétendre que la prise en charge par le preneur des grosses réparations de l'article 606 du code civil soit un usage en matière de location d'ensemble immobilier et elle estime que c'est à juste titre que Monsieur V... a appliqué à ce titre un abattement de 10 %.

Elle insiste sur les particularités de la sous-location commerciale qui lui a été consentie et sur la précarité de sa situation qui n'a pas été prise en compte par les experts Messieurs L... et X... pour l'évaluation du loyer. Et elle souligne que le bail prenant fin le 31 mars 2020 sans possibilité de renouvellement du fait de l'expiration à cette date du bail à construction conclu entre la société JSM I et AUXICOMI, elle se trouve privée de son droit de propriété commerciale puisqu'elle ne peut obtenir ni renouvellement du bail ni indemnité d'éviction, la société JSM I propriétaire du terrain qui deviendra propriétaire des locaux à l'issue du bail à construction n'étant pas tenue de lui verser une indemnité d'éviction et son engagement de renouveler le bail étant sans incidence sur cette situation.

La société JSM II demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, sauf à fixer le loyer du bail renouvelé par application de la règle du plafonnement, au 1er janvier 2013, à la somme annuelle en principal de 200.026,35 euros HT et hors charges. Elle souhaite, voir fixer le point de départ des intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 31 octobre 2013, voir ordonner la capitalisation des intérêts et voir condamner la société JSM PERRIN à lui payer la somme de 5.000 euros pour frais de procédure.

Elle indique à titre liminaire que le premier juge a fixé par erreur le loyer provisionnel au montant du loyer initial alors qu'en application de l'article L 145-57 du code de commerce, il doit correspondre au loyer acquitté à la date d'effet du congé.

Elle soutient que les rapports de Messieurs F... et V... qui constituent des avis amiables ne peuvent en vertu de la jurisprudence constante fonder une décision de fixation du loyer renouvelé et qu'ils sont contredits par le rapport qu'elle a fait établir par Monsieur L... et par celui de l'expert judiciaire qui sont concordants.

Elle relève que le rapport de Monsieur F... comporte de nombreuses erreurs concernant notamment la contenance du terrain, la date d'édification des bâtiments qui laissent à penser qu'il n'a pas visité les locaux et souligne que son estimation de la valeur locative ne repose sur aucun élément de référence en méconnaissance des dispositions de l'article L 145-3 du code de commerce.

Elle estime s'agissant du rapport de Monsieur V... que les critiques qu'il émet concernant la fonctionnalité des locaux ne sont pas fondées puisqu'ils ont été édifiés pour répondre spécifiquement aux besoins du preneur. Et rappelant qu'en application de l'article R 145-3 du code de commerce, les caractéristiques du local s'apprécient notamment en fonction de ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée, elle affirme que la parfaite fonctionnalité des locaux est un facteur de majoration par rapport à de simples locaux à usage d'entrepôts.

Elle reproche encore à Monsieur V... d'avoir exclu, sans explication, des locaux sociaux et techniques d'une surface de 71,25 m² dont l'existence n'est pourtant pas contestée, d'avoir minoré la surface réelle des locaux et de retenir arbitrairement une valeur de 40 euros le m² sans se fonder sur des termes de référence comparables.

Elle souligne que l'appelante omet de préciser que le contrat de sous-location commerciale prévoyait que le preneur respecterait les charges et conditions du crédit-bail de sorte que la levée d'option par la société JSM II n'a rien modifié à ses obligations locatives. Et elle soutient que l'historique des relations contractuelles n'a aucun intérêt pour déterminer la valeur locative sauf à considérer que le loyer doit être déplafonné de plein droit, qu'il n'est pas prouvé que le montant du loyer qui a été contractuellement fixé à l'origine n'était pas conforme à la valeur locative qu'il a été repris d'un commun accord en 2003 et n'a jamais été discuté, que l'expertise judiciaire a établi que le loyer résultant de l'évolution indiciaire correspondait bien à la valeur locative, qu'elle n'a jamais entendu contester le droit à la propriété commerciale de la société JSM PERRIN ni davantage la société JSM I qui s'est engagée à l'expiration du bail à construction à renouveler le bail commercial.

Elle fait valoir s'agissant de la détermination de la valeur locative, que sur la base des plans communiqués corroborés par les relevés de l'expert la superficie à retenir est de 3.871,70 m², que s'agissant d'une usine, il est d'usage ne pas pondérer les surfaces mais de les valoriser en fonction de leur nature comme l'a fait l'expert conformément aux dispositions des articles L 145-33 et R 145-3 du code de commerce et que les valeurs retenues par l'expert sont des minima par rapport aux termes de référence communiqués par Monsieur L....

Insistant sur la bonne qualité des bâtiments et leur adaptation à l'activité spécifique de la société JSM PERRIN, elle réplique qu'il n'y a pas lieu d'appliquer un abattement de 10% comme retenu par Monsieur V... dès lors que la prise en charge par le preneur des travaux relevant de l'article 606 du code civil est un usage en matière de location portant sur un ensemble immobilier et ce d'autant que le preneur n'a fait aucune dépense à ce titre.

Elle sollicite la fixation du loyer par application de la règle du plafonnement à la somme de 200.026,35 euros calculée en fonction de l'évolution indiciaire qui est légèrement inférieure à la valeur locative retenue par l'expert et s'oppose à une diminution du loyer.

SUR CE

Attendu que selon l'article L 145-34 du code de commerce, le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative, à défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après :
1o Les caractéristiques du local considéré ;
2o La destination des lieux ;
3o Les obligations respectives des parties ;
4o Les facteurs locaux de commercialité ;
5o Les prix couramment pratiqués dans le voisinage.

Attendu que l'article R 145-3 du code de commerce, prévoit que les caractéristiques propres au local s'apprécient en considération :
1o De sa situation dans l'immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public ;
2o De l'importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l'exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux ;
3o De ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d'activité qui y est exercée ;
4o De l'état d'entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail ;
5o De la nature et de l'état des équipements et des moyens d'exploitation mis à la disposition du locataire.

Attendu que l'expert judiciaire a estimé la valeur locative des locaux objets du bail renouvelé à la somme de 201.564 euros pour une superficie de 3.871,25 euros compte tenu notamment du bon emplacement pour le secteur, de la proximité des autoroutes pour les livraisons et les visites clients, de sa capacité de stationnement interne et externe, de la destination des locaux et de sa structure adaptée à son utilisation ;

Attendu que la société JSM PERRIN, qui critique les conclusions de l'expert, souhaite voir fixer la valeur locative des locaux à 130.000 euros ;

Attendu que l'appelante peut se prévaloir pour argumenter ses critiques à l'encontre de l'expertise judiciaire sur les expertises non contradictoires régulièrement communiquées et qui ont pu être discutées contradictoirement ; qu'il est produit par la société JSM PERRIN deux rapports l'un établi par Monsieur F... le 18 janvier 2013 qui retient une valeur locative de 90.000 euros et l'autre postérieur à l'expertise judiciaire émanant de Monsieur V... en date du 28 février 2017 qui évalue le montant du loyer à 130.000 euros et par la société JSM II un rapport du 7 avril 2014 de Monsieur L... qui mentionne une valeur de 202.000 euros ;

Attendu que c'est sans pertinence que la société JSM PERRIN fait valoir que le loyer initial n'a pas été calculé en fonction de la valeur locative mais pour mettre à la charge du preneur le coût du crédit ; qu'en effet, outre qu'elle ne fournit aucun élément établissant que le montant du loyer même calculé sur la base des échéances du crédit bail ne soit conforme à la valeur locative à l'époque de la souscription du bail, cette question est sans intérêt pour la solution du litige dès lors que le prix du bail à renouveler s'apprécie à la date du renouvellement ;

Attendu que l'appelante soutient que les nombreuses erreurs commises par l'expert dans son rapport concernant la qualité des personnes et la nature juridique des contrats en cause permettent de douter de ses analyses ;

Attendu toutefois que de simples erreurs de plumes n'affectent en rien la qualité du travail de l'expert qui a complètement et précisément répondu à sa mission ;

Attendu que l'expert judiciaire a relevé l'intérêt de l'emplacement dans lequel sont situés les locaux qui bénéficient d'une accessibilité rapide par le train (gare de Montargis qui relie Nevers à Paris) et par voie routière (échangeur A 77 Paris-Nevers et A 19 Artenay-Sens) ; qu'il a fourni une description détaillée des bâtiments à usage de bureaux, salles de réunion et d'ateliers ainsi que des abords comprenant des aires de parkings et des modalités d'accès composées d'une entrée piétons de 2.50 mètres d'une entrée camions de 4 mètres et d'une sortie sur la rue de la Forêt par une porte métallique sur rail de 8 mètres, qu'il a précisé que la construction date de 1990 avec une extension en 1997, qu'elle a été spécialement édifiée pour l'activité de pièces mécaniques de hautes précisions, que les locaux présentent un état normal d'usure, qu'un camion peut entrer dans l'atelier principal qui est équipé d'un pont roulant ;

Attendu que l'expert a relevé que les locaux se trouvent à proximité d'une zone affectée à l'habitation ; que toutefois cette situation n'emporte aucun effet négatif ou inconvénient pour l'exploitation des locaux comme cela ressort de l'attestation du maire de Chalette sur Loing du 19 septembre 2013 communiquée par l'expert aux parties en réponse à un dire du preneur, puisque cet élu mentionne que les locaux sont situés dans une zone à vocation économique où les entreprises sont implantées depuis plus de 30 ans le long d'un axe routier structurant et où les parkings publics ont permis aux entreprises existantes de répondre à l'évolution de leurs besoins en matière de stationnement tout en préservant un cheminement piétonnier sécurisé, et que les habitants du secteur pavillonnaire jouxtant cette zone à vocation économique n'ont jamais signalé de dysfonctionnements liés à l'utilisation des stationnements ; qu'au demeurant, il n'est pas justifié en quoi la proximité d'une zone pavillonnaire constituerait un handicap pour l'usage des locaux donnés à bail alors que les poids lourds peuvent y accéder et y stationner ;

Attendu que l'expert a retenu une surface de 3.871,70 m² calculée selon les critères de la dernière chartre de l'expertise à partir des plans communiqués par le bailleur ; qu'il mentionne dans sa réponse au dire du conseil du preneur que ces plans ont été communiqués contradictoirement et qu'il les a utilisés lors de la réunion d'expertise qui s'est tenue sur place sans que les parties ne formulent d'opposition ;

Attendu que les surfaces calculées par l'expert qui prennent en compte la totalité des superficies mentionnées dans les plans des bâtiments incluant les travaux d'extension et dont il n'est pas justifié par l'appelante qu'ils ne correspondraient pas à la réalité physique des locaux doivent par conséquent être retenues ;

Attendu que les locaux donnés à bail sont particulièrement adaptés à l'activité exercée par la société JSM PERRIN puisqu'ils ont été spécifiquement conçus et édifiés à cet effet ;

Attendu que l'expert a régulièrement classé les locaux par nature d'activité auxquels il a appliqué un prix du m² sur la base de leur surface réelle ; qu'il a retenu une valeur de 50 euros le m² pour les ateliers et bureaux d'accompagnement et a majoré ou minoré le prix du m² selon la nature des autres locaux ;

Attendu qu'une telle méthode qui ne constitue pas "une invention" comme l'écrit l'appelante, est conforme aux usages en matière de bâtiment industriel, qu'elle n'est par conséquent pas sérieusement critiquable ni davantage la valorisation qui a été appliquée en fonction de la nature des locaux qui est conforme à leur destination ;

Attendu que les critiques concernant l'état des locaux sont dépourvues de pertinence; qu'outre qu'elles sont contraires aux constatations de l'expert étayées par les photographies des lieux annexées au rapport, le preneur ayant la charge de l'entretien du local et des grosses réparations l'état d'entretien des locaux n'a pas à être pris en compte pour la fixation du loyer du bail renouvelé, le bailleur n'ayant pas à pâtir d'un éventuellement manquement du preneur à ses obligations ;

Attendu que l'expert a retenu 10 termes de comparaison ; que la valorisation par l'expert correspond à 52 euros le m² ; qu'elle est inférieure à celle retenue par l'expert Monsieur L... qui retient une valeur de 54 euros le m² et correspond à l'estimation de Monsieur V... expert mandaté par le preneur qui écrit que "les prix de location observés, toujours dans l'agglomération Orléanaise car les autres communes du département ne montre qu'un marché marginal sont compris dans une fourchette dont la grande moyenne ressort à 50 euros le m² (...)." ; qu'il s'ensuit que l'estimation de l'expert doit être retenue puisque conforme aux prix des locations du marché des locaux équivalents ;

Attendu que contrairement à ce que soutient l'appelante, il est d'usage en matière de location d'un ensemble de locaux de type industriel de mettre à la charge du preneur les impôts fonciers et la charge des grosses réparations de l'article 606 du code civil de sorte qu'il n'y a pas lieu d'appliquer un coefficient de minoration ;

Attendu que le contrat de sous-location commerciale fait expressément référence au bail à construction passé entre la société JSM I et la société AUXICOMI et au contrat de crédit-bail accordé par la société AUXICOMI à la société JSM II ; qu'il est stipulé au contrat que la sous-location est consentie et acceptée sous les charges et conditions ordinaires et de droit en pareille matière, et notamment sous les charges et conditions du contrat de crédit-bail du 5 avril 1990 ;

Attendu qu'en consentant au renouvellement du bail commercial inclus dans le bail à construction pour une durée correspondant à l'expiration du bail à construction la société JSM PERRIN a nécessairement renoncé à son droit à renouvellement et à son droit à une indemnité d'éviction ; qu'elle ne saurait donc se prévaloir d'une situation à laquelle elle a consenti et qui était connue dès l'origine ;

Attendu que la société JSM II produit une lettre de Monsieur S... gérant de la société JSM I qui écrit : "Je vous confirme bien volontiers que dès lors qu'elle serait valablement titrée à l'expiration du bail à construction consenti à la société JSM II, la société JSM I renouvellera le bail commercial dont est titulaire la société JSM PERRIN sur les biens situés (...) Mon intention n'a jamais été de dénier tout droit au sous-locataire et ainsi de mettre au chômage ses salariés qui, pour certains, étaient mes employés avant que je ne cède l'entreprise JSM PERRIN" ;

Attendu que si ce courrier ne constitue pas un engagement susceptible d'être pris en compte dès lors qu'il exprime une simple intention, il n'en demeure pas moins que s'agissant de locaux construits spécifiquement pour l'activité exercée par l'entreprise JSM PERRIN, il apparaît effectivement de l'intérêt commun du propriétaire et du preneur de poursuivre le bail à l'issue de l'échéance du bail à construction de sorte que la précarité alléguée par la société JSM PERRIN est toute relative ;

Attendu que la valeur locative calculée par l'expert de 201.565 euros étant supérieure à celle du loyer plafonné de 200.026,35 euros dont les modalités de calcul ne sont pas critiquées, il convient par application de l'article L 145-34 du code de commerce de fixer le montant du loyer du bail renouvelé à cette somme hors taxe et hors charges et de réformer le jugement en conséquence, étant relevé que le faible écart entre le loyer plafonné et la valeur locative démontre que le loyer initial était conforme à la valeur locative des locaux ;

Attendu qu'il convient de fixer le point de départ des intérêts au taux légal à compter de l'assignation soit le 31 octobre 2013 ;

Attendu qu'aux termes des dispositions de l'article 1343-2 nouveau du code civil, applicable à la date à laquelle la cour statue puisque la loi nouvelle régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisés, la capitalisation des intérêts n'est pas de droit et ne sera pas ordonnée ;

Attendu que la société JSM PERRIN qui succombe sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel et à payer à la société JSM II une indemnité de procédure ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoire en dernier ressort :

CONFIRME la décision déférée sauf en ce qui concerne le montant du loyer du bail renouvelé ;

STATUANT À NOUVEAU

FIXE le montant du loyer du bail renouvelé au 1er janvier 2013 à la somme de 200.026,35 euros hors taxes et hors charge ;

Y AJOUTANT

FIXE le point de départ des intérêts au taux légal à compter de l'assignation le 31 octobre 2013

DIT n'y avoir lieu à capitalisation des intérêts ;

CONDAMNE la société JSM PERRIN à payer à la SCI JSM II la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société JSM PERRIN aux dépens de la procédure d'appel.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 18/00807
Date de la décision : 04/04/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-04;18.00807 ?
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