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04/04/2019 | FRANCE | N°18/007151

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 04 avril 2019, 18/007151


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 04/04/2019
la SCP LAVISSE BOUAMRIRENE GAFTONIUC
la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES
ARRÊT du : 04 AVRIL 2019

No : 136 - 19
No RG : 18/00715 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FUXQ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance à compétence commerciale d'ORLEANS en date du 21 Février 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265213046642090
SARL KAIMEN
[...]

Ayant pour avocat Me Pascal LAVISSE

, membre de la SCP LAVISSE BOUAMRIRENE GAFTONIUC, avocat au barreau d'ORLEANS,

D'UNE PART

INTIMÉS : - Timbre fiscal déma...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 04/04/2019
la SCP LAVISSE BOUAMRIRENE GAFTONIUC
la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES
ARRÊT du : 04 AVRIL 2019

No : 136 - 19
No RG : 18/00715 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FUXQ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance à compétence commerciale d'ORLEANS en date du 21 Février 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265213046642090
SARL KAIMEN
[...]

Ayant pour avocat Me Pascal LAVISSE, membre de la SCP LAVISSE BOUAMRIRENE GAFTONIUC, avocat au barreau d'ORLEANS,

D'UNE PART

INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265224010226558
Madame E..., A..., V... S... veuve G...
née le [...] à ORLEANS (45) [...]
[...]

Ayant pour avocat Me Ladislas WEDRYCHOWSKI, membre de la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,

Madame C..., B..., E... G... épouse N...
née le [...] à ORLEANS (45) [...]
[...]

Ayant pour avocat Me Ladislas WEDRYCHOWSKI, membre de la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,

Monsieur P..., L..., J... N...
né le [...] à ILLE SUR TET (66) [...]
[...]

Ayant pour avocat Me Ladislas WEDRYCHOWSKI, membre de la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 05 Mars 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 6 décembre 2018 2019

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 24 JANVIER 2019, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, en son rapport, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :
Madame EL BOUDALI, Greffier lors des débats,
Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier lors du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé le 04 AVRIL 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte notarié en date du 30 septembre 1993, les consorts G... N... ont consenti à la société KAIMEN un bail à usage commercial portant sur des locaux situés [...] moyennant un loyer annuel de 108.000 francs hors taxes, soit 16.464.49 euros, révisé annuellement en fonction de l'indice trimestriel du coût de la construction.

Le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance d'Orléans saisi à la suite d'un congé délivré 18 janvier 2002 à la société KAIMEN par les consorts G... N... avec offre de renouvellement et déplafonnement du loyer, a fixé par jugement du 20 novembre 2006 le montant du loyer déplafonné du bail renouvelé à la somme de 39.134 euros.

Cette décision ayant été infirmée par arrêt du 8 novembre 2007 de cette cour au motif que le juge des loyers commerciaux avait été irrégulièrement saisi, le bail s'est poursuivi au prix du loyer du bail expiré jusqu'au 30 septembre 2011.

Le 21 mars 2011, les consorts G... N... ont signifié à la société KAIMEN un congé pour le 1er octobre 2011, avec offre de renouvellement du bail moyennant un loyer annuel déplafonné de 48.000 euros.

Par acte en date du 22 septembre 2011, la société KAIMEN a donné son accord sur le principe du renouvellement mais s'est opposée au montant du loyer.

Par assignation en date du 28 avril 2012, les consorts G... N... ont saisi le juge des loyers commerciaux aux fins de fixation du loyer du bail renouvelé à sa valeur locative au 1er octobre 2011.

Par jugement du 18 mars 2014, le juge des loyers commerciaux a ordonné une expertise avant dire droit.

L'expert a déposé son rapport le 26 février 2016 en retenant une valeur locative de 56.500 euros par an et un montant du loyer plafonné de 25.115 euros.

Par jugement du 21 février 2018, le juge des loyers commerciaux a dit qu'au cours du bail expiré (période 2002-2011) des modifications notables concernant les facteurs locaux de commercialité sont intervenues, a fixé le loyer du bail renouvelé à compter du 1er octobre 2011 à la valeur locative des locaux soit à la somme de 49.324 euros par an, a dit que, conformément aux clauses du bail, le loyer de 49.324 euros par an doit être réévalué sur la base de l'indice du coût de la construction publié par l'INSEE au 4ème trimestre de l'année antérieure (indice de référence initial : celui du 4ème trimestre 1992 soit 1.005 pour le bail du 30 septembre 1993 ayant commencé à courir le 1er octobre 1993), a condamné la société KAIMEN à payer conjointement à Mesdames E... S... Veuve G..., C... G... épouse N... et M. P... N..., le solde des loyers non payés depuis le 1er octobre 2011, en tenant compte de la variation annuelle du coût de la construction, a dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du présent jugement, a ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Par ordonnance du 19 septembre 2018, le premier président a prononcé l'arrêt de l'exécution provisoire.

La société KAIMEN a interjeté appel de la décision le 5 mars 2018.

Elle en poursuit l'infirmation sauf en ce qu'elle a débouté les consorts G... N... de leurs demandes de capitalisation des intérêts et pour frais de procédure. Elle demande à la cour de :
- juger irrecevables et à tout le moins non fondées les conclusions de l'expert retenant une modification notable des facteurs locaux de commercialité au regard de la mise en service de la ligne A de tramway et d'une prétendue hausse de fréquentation du tramway qui se situent hors période de référence lors de l'avant dernier bail expiré,
- juger que les conclusions de l'expert s'appuyant uniquement sur une hausse de fréquentation de la ligne A du tramway ne justifient pas un déplafonnement du loyer commercial,
- juger que l'expert n'a pas déterminé l'impact réel de l'augmentation du flux de passager de la ligne A du tramway sur le commerce étudié,
- juger que l'expert a violé les articles L.145-33 et R.145-7 du code de commerce lors de l'évaluation de la valeur locative et a violé le principe du contradictoire lors de l'évaluation de la valeur locative,
- dire n'y avoir lieu à déplafonnement du loyer et fixer le loyer plafonné du bail renouvelé à compter du 1er octobre 2011 à la somme de 25.115 euros par an,
- condamner les consorts G... N... à lui payer la somme de 5.000 euros pour frais de procédure ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP LAVISSE BOUAMRIRENE GAFTONIUC.

Critiquant le rapport d'expertise et le jugement déféré, elle fait valoir que c'est à tort que l'expert et le juge ont retenu que la mise en service de la ligne A du tramway constituait une modification des facteurs locaux de commercialité alors que seules peuvent être prises en compte les modifications survenues au cours du bail échu en application de l'article L 145-34 du code de commerce, que l'implantation du tramway est antérieure au renouvellement du bail, que le bailleur qui ne s'est pas prévalu des modifications survenues au cours de l'avant dernier bail est censé y avoir renoncé, que la cour ayant par arrêt du 8 novembre 2007 constaté l'extinction de l'instance en fixation du bail renouvelé en précisant qu'il se poursuivrait au prix du loyer du bail expiré jusqu'en septembre 2011, les bailleurs ne peuvent plus se prévaloir d'une cause de déplafonnement survenue au cours de l'avant dernière période de renouvellement du bail, une telle demande se heurtant au surplus à l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision.

Elle soutient que le seul fait que le nombre de passagers du tramway augmente ne peut constituer un facteur notoire de commercialité. Et elle fait observer que l'augmentation des voyageurs révèle au contraire les difficultés d'accès au centre ville et de stationnement qui sont préjudiciables pour les commerces situés à proximité des lignes du tramway qui sont nombreux à avoir fermé, que le premier juge ne pouvait fonder sa décision sur une situation historiquement favorable de la rue de la République, ce qui constitue une appréciation abstraite ne rendant pas compte de l'évolution des facteurs locaux de commercialité, que les voyageurs empruntant le tramway ne sont pas des clients du centre-ville qu'ils utilisent les correspondances entre les deux lignes pour leurs déplacements professionnels et pour se rendre à la périphérie, qu'il doit être tenu compte de la structure du commerce dans la mesure où les grandes enseignes peuvent supporter des charges plus élevées ce qui n'est pas le cas d'un commerce indépendant, qu'il n'a pas été réalisé d'étude d'impact de l'évolution des facteurs locaux de commercialité sur son activité comme l'exige pourtant l'article R 145-6 du code de commerce et que l'expert ne pouvait se fonder sur des données statistiques globales concernant la fréquentation du tramway sans mesurer celles des stations situées à proximité du commerce.

Elle affirme qu'il n'y a pas eu de modification notable des facteurs de commercialité pouvant justifier le déplafonnement du loyer, comme le prouvent ses chiffres d'activité et qu'elle subit au contraire la concurrence des centres commerciaux et notamment de Cap SARAN qui s'est agrandi en octobre 2077 et du commerce en ligne.

Elle critique l'estimation de la valeur locative retenue par l'expert qui selon elle procède de l'arbitraire et méconnaît le principe du contradictoire, dans la mesure où elle ne repose sur aucun terme de comparaison pratiqué dans le voisinage et qu'il a appliqué des coefficients de minoration et de majoration sans s'expliquer sur sa démarche. Elle relève que l'expert Monsieur Q..., à l'issue d'une démarche transparente et objective, a chiffré le montant du loyer à la somme de 44.986 euros.

Les consorts G... N..., qui sollicitent la confirmation du jugement dont appel sauf en ce qui concerne la capitalisation des intérêts et l'article 700 du code de procédure, demandent à la cour d'ordonner la capitalisation des intérêts sur les sommes dues au moins pour une année entière, à compter du 8 novembre 2017, date du mémoire contenant cette demande, de condamner la société KAIMEN à leur payer 5.000 euros au titre des frais de procédure exposés en première instance et 3.000 euros pour les frais exposés en appel.

Contestant avoir renoncé à se prévaloir de la modification des facteurs locaux de commercialité, ils répliquent que l'expert ne s'est pas fondé sur la création de la ligne de tramway pour retenir une telle modification pendant la période du bail expiré de 2002-2011comme le prétend l'appelante mais sur l'évolution du trafic au cours de cette période qui a progressé de 30% et sur le flux des voyageurs des 2 stations de la rue de la République qui sont classées en 6ème position par rapport aux 24 stations de la ligne, qu'il a en outre retenu que la vente d'articles de luxe avait quasiment disparu de cette rue de sorte que la clientèle avait évolué qu'elle correspondait davantage à celle du magasin exploité par la société KAIMEN qui bénéficiait ainsi d'une augmentation du nombre de chalands et qu'il a donc procédé à une analyse concrète des facteurs locaux de commercialité pour justifier le déplafonnement du loyer.

Ils soulignent que le juge a retenu que la situation de la rue de la République ne pouvait être comparée à celle de la rue Royale dont la configuration et la fréquentation différaient, qu'il ne pouvait être tenu compte de la baisse du chiffre d'affaires de la société KAIMEN qui n'avait pas de valeur probante alors qu'elle pouvait résulter des conditions d'exploitation du commerce et qu'il a justement retenu, après avoir constaté que la valeur proposée par l'expert judiciaire n'était pas suffisamment explicitée, l'estimation de Monsieur Q....

Ils estiment que le juge ne pouvait pas rejeter la demande de capitalisation qui est de droit dès lors qu'elle est demandée.

SUR CE :

I - Sur le déplafonnement :

Attendu qu'en application de l'article L 145-34 du code de commerce le plafonnement du loyer est écarté s'il existe une des causes de déplafonnement énumérées à l'article L 145-33 du même code ;

Attendu qu'en vertu de l'article L 145-33 du code de commerce, le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative, à défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après :
1o les caractéristiques du local considéré,
2o la destination des lieux,
3o les obligations respectives des parties,
4o les facteurs locaux de commercialité,
5o les prix couramment pratiqués dans le voisinage.

Attendu que selon l'article R 145-6 du code de commerce, les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire ;

Attendu que le déplafonnement du loyer ne peut être accordé qu'en cas de modification notable d'un des éléments visés au 1o à 4o de l'article L 145-33 survenue au cours du bail ;

Attendu qu'il ressort du rapport de l'expert Monsieur R... que les locaux sont implantés sur l'axe du Martroi et la Place d'Arc avec son centre commercial où sont installées d'importantes enseignes nationales renforçant la fréquentation de cette voie par une très large clientèle locale et régionale, sur la partie haute de la rue de la République qui est bordée de commerces en ordre continu et qui constitue l'une des voies les plus commerçantes d'Orléans, à proximité, soit à environ 25 mètres axe nord/ sud et à 100 mètres axe sud/nord des arrêts de la première ligne A du tramway mis en service en 2000 ; que l'expert indique que la mise en place de ce nouveau mode de transport permet d'amener en centre ville et plus particulièrement dans le secteur étudié un flux soutenu et régulier de chalands, qu'au cours de la période de référence de 2002 à 2011 la fréquentation du tramway a progressé de 30% et que les stations située à proximité des locaux ont enregistré en 2006 : 4.121 mouvements journaliers les classant en 6ème position sur un panel de 24 stations ; qu'il relève que les ventes d'articles de luxe ont quasiment disparu de la rue de la République que la clientèle est tombée en gamme correspondant plus au coeur de cible de la clientèle de l'enseigne exploitée par le preneur qui propose des produits de maroquinerie à des prix plutôt maîtrisés ; qu'il conclut que l'augmentation du nombre de chalands et la tendance au repositionnement de la clientèle du secteur sur le segment plutôt grand public paraissent significatives au regard de l'activité de vente d'articles de maroquinerie exercée dans les lieux, puisque susceptible de permettre au locataire de capter une clientèle plus importante en phase avec le positionnement de ses articles et en déduit qu'au cours du bail expiré sont intervenues des modifications susceptibles d'être qualifiées de notables pour l'activité considérée concernant les facteurs locaux de commercialité ;

Attendu que la discussion introduite par les appelants concernant la date de création de la ligne de tramway en 2000 hors période de référence est sans intérêt puisque l'expert se base pour retenir une modification notable des facteurs de commercialité sur l'augmentation du trafic de la ligne au cours de la période du bail écoulé ;

Attendu que les données statistiques relatives à l'évolution de la fréquentation du tramway retenues par l'expert provenant du bilan de la loi d'orientation des transports intérieur et de l'étude de l'opérateur Kéolis ne sont pas sérieusement critiquées par l'appelant qui ne fournit aucune données chiffrées venant les contredire ;

Attendu que le constat opéré par l'expert concernant l'évolution de la clientèle de la rue de la République et la disparition des enseignes de luxe rejoint l'analyse de la presse locale, qui dans l'article communiqué par l'appelant, mentionne que la rue de la République est jugée trop populaire par les franchises moyennes et haut de gamme;

Attendu que l'augmentation significative de 30% des personnes transportées sur la ligne desservant les arrêts situés à proximité des locaux commerciaux et le flux des passagers montant et descendant à ces arrêts qui les classe au 6ème rang des stations du réseau, entraîne une augmentation en proportion de chalands, étant relevé qu'il n'existe pas de correspondance au niveau de la rue de la République avec d'autres transports publics de sorte que les passagers qui descendent à ces arrêts circulent nécessairement dans cette rue ce qui prive de pertinence les observations des appelants sur le fait que ces passagers seraient en transit ;

Attendu que c'est sans davantage de pertinence que l'appelant évoque la concurrence des centres commerciaux situés à la périphérie qui ne sont pas desservis par le tramway et n'attirent pas le même public que celui du centre ville ainsi que l'absence de places de stationnement à proximité de la rue de République alors que la société KAIMEN commercialise des articles de maroquinerie qui ne nécessitent pas l'utilisation d'un véhicule pour en assurer le transport ;

Attendu que l'accroissement significatif du nombre de passagers se rendant rue de la République et l'augmentation corrélative de sa fréquentation par une clientèle populaire en phase avec l'activité exploitée dans les locaux pris à bail de vente d'articles de maroquinerie bon marché entraîne une modification notable des facteurs de commercialité qui a un intérêt objectif pour le commerce exploité par la société KAIMEN ; qu'en effet cet accroissement du nombre de chalands fréquentant la rue de la République est de nature à favoriser objectivement le développement de son activité, la prétendu stagnation du chiffre d'affaires qui dépend notamment des choix de gestion et de la qualité des produits vendus n'étant pas de nature à remettre en cause la modification notable des facteurs de commercialité et son intérêt objectif pour l'activité exercée, étant relevé que le chiffre d'affaires de la société est passé de 493.669 euros en 2002 à 583.059 en 2013 ce qui relève une progression et non une stagnation ;

Attendu enfin que le rapport d'expertise amiable réalisée à la demande de la société KAIMEN n'est pas susceptible de remettre en cause les conclusions de l'expert judiciaire, dès lors que l'expert mandaté par l'appelante n'a pas analysé l'augmentation de la fréquentation de la rue de la République liée à l'accroissement du nombre de personnes ni n'a appréhendé l'évolution de la clientèle ;

Qu'il s'ensuit que c'est à juste titre que le tribunal a retenu qu'il existait un motif de déplafonnement du loyer du bail renouvelé en raison de la modification notable des facteur de commercialité ayant un intérêt pour l'activité exercée par le preneur;

II - Sur le montant du loyer :

Attendu que l'expert judiciaire a indiqué qu'après étude du marché, il situait la valeur locative des locaux étudiés dans une fourchette moyenne de 360-400 à 450-480 euros le m² par an et a retenu une valeur médiane de 420 euros le m² ;

Que toutefois, il n'a pas communiqué ni mentionné les termes de références de sorte que les parties n'ont pas été en mesure d'en discuter ;

Attendu que le tribunal en a tenu compte dans sa décision puisqu'il a retenu la valeur locative de 400 euros le m² mentionnée dans son rapport par Monsieur Q... expert mandaté par la société KAIMEN qui précise les termes de référence qu'il a recensé dans le voisinage de sorte que la discussion introduite par l'appelant concernant la violation par l'expert judiciaire du principe du contradictoire et des article L 145-33 et R 145-7 du code de commerce est sans intérêt pour la solution du litige ;

Attendu que rien ne justifie de remettre en cause le calcul de la surface pondérée effectué par l'expert qui ressort à 118 m², l'expertise de Monsieur Q... qui chiffre la surface pondérée à 107 m² en procédant à une majoration des coefficients de pondération ne pouvant être admis ;

Attendu que l'expert judiciaire a retenu un coefficient de majoration de 20% pour tenir compte de la clause du bail permettant au preneur d'exercer quasiment tous commerces et de la faculté de sous-louer les locaux du premier étage pour une activité tertiaire à usage exclusif de bureaux ; que Monsieur Q... a pour les même motif calculé un coefficient de miniration de 12% ; que le tribunal a quant à lui appliqué un coefficient de 10% ;

Attendu que la faculté prévue dans le bail de pouvoir sous louer une partie des locaux constitue un avantage non discutable justifiant la majoration du loyer ; qu'il convient en conséquent de retenir le taux de 10% non critiqué par le bailleur et favorable au preneur ;

Attendu que l'expert judiciaire retient une minoration de 5% de la valeur locative du fait de l'obligation pour le preneur de rembourser au bailleur l'impôt foncier ;

Attendu que ce taux a été justement pris en compte par le tribunal étant observé qu'il aboutit à un résultat plus favorable pour le preneur que la somme retenue par Monsieur Q... ;

Qu'il convient en conséquence de ce qui précède de confirmer le jugement déféré qui a fixé le montant du loyer renouvelé à la somme de 49.324 euros [(118 m² x 400 euros) x 0,95) x 1,1) ;

Attendu que le bail contenant une clause d'échelle mobile, la décision doit être confirmée pour le surplus en ce que le tribunal a dit que conformément aux clauses du bail le loyer devait être réévalué chaque année ;

Attendu qu'aux termes des dispositions de l'article 1343-2 nouveau du code civil, applicable à la date à laquelle la cour statue puisque la loi nouvelle régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisés, la capitalisation des intérêts n'est pas de droit ;

Qu'il convient de confirmer le jugement qui a rejeté la demande capitalisation que rien ne justifie ;

Attendu que c'est à juste titre que le tribunal n'a pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour des considération d'équité dès lors qu'au stade de la première instance le différend devait être tranché et qu'il a été adopté une solution retenant partiellement les arguments du preneur;

Attendu que la société KAIMEN qui succombe en son appel sera condamnée aux dépens ainsi qu'à payer une indemnité de procédure aux intimés dans la mesure où son appel les a contraints à exposer des frais pour assurer leur défense que l'équité à ce stade ne saurait justifier qu'il soient laissés à leur charge ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort :

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

DÉBOUTE les parties de leurs plus amples demandes ou contraires ;

CONDAMNE la société KAIMEN à payer aux consorts G... la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société KAIMEN aux dépens ;

ACCORDE à la SCP WEDRYCHOWSKI le droit prévu à l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 18/007151
Date de la décision : 04/04/2019
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2019-04-04;18.007151 ?
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