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21/02/2019 | FRANCE | N°18/014101

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 21 février 2019, 18/014101


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 21/02/2019

Me Estelle GARNIER

Me Alexis DEVAUCHELLE

ARRÊT du : 21 FEVRIER 2019

No : 60 - 19

No RG 18/01410 - No Portalis

DBVN-V-B7C-FWEZ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de SAINTES en date du 7 octobre 2014, confirmé par un arrêt de la Cour d'Appel de POITIERS en date du 16 Décembre 2015, cassé par un arrêt de la Cour de Cassation en date du 8 novembre 2017.

PARTIES EN CAUSE

APPELANT

:

ADMINISTRATION DES FINANCES PUBLIQUES

agissant poursuites et diligences du directeur des Finances publiques de Provence-...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 21/02/2019

Me Estelle GARNIER

Me Alexis DEVAUCHELLE

ARRÊT du : 21 FEVRIER 2019

No : 60 - 19

No RG 18/01410 - No Portalis

DBVN-V-B7C-FWEZ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de SAINTES en date du 7 octobre 2014, confirmé par un arrêt de la Cour d'Appel de POITIERS en date du 16 Décembre 2015, cassé par un arrêt de la Cour de Cassation en date du 8 novembre 2017.

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :

ADMINISTRATION DES FINANCES PUBLIQUES

agissant poursuites et diligences du directeur des Finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du depart. des Bouches du Rhône, élisant domicile en ses bureaux

Immeuble L'ATRIUM

[...]

[...]

Ayant pour avocat Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d'ORLEANS,

D'UNE PART

INTIMÉS :

Monsieur D... G...

né le [...] [...]

[...]

Ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant Me Nicolas GOIMIER, membre de la SCP AVOCATS TEN FRANCE, avocat au barreau de POITIERS,

Madame I... K... épouse G...

née le [...] [...]

[...]

Ayant pour avocat postulant Me Alexis DEVAUCHELLE, avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant Me Nicolas GOIMIER, membre de la SCP AVOCATS TEN FRANCE, avocat au barreau de POITIERS,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 27 Avril 2018

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 8 novembre 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 13 DECEMBRE 2018, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, en son rapport, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,

Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,

Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé lors des débats et du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé le 21 FEVRIER 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur D... G... et son épouse, Madame I... K..., ont souscrit en 2008, 2009, 2010 et 2011, des déclarations d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en indiquant sur chacune d'elles bénéficier d'une réduction d'ISF pour des investissements directs dans une PME à hauteur de 75% pour les trois premières années et de 50% pour l'année 2011, et ce en application de l'article 885 -O V bis I-1, a, du code général des impôts (CGI).

Par courrier du 7 novembre 2011, la quinzième brigade de vérification de la direction du contrôle fiscal sud-ouest de la Rochelle a demandé aux époux G... de préciser, pour chacune des années considérées, la raison sociale et l'adresse de la (ou des) société(s) dans lesquelles ils ont réalisé ces investissements et de fournir tout document de nature à justifier de leurs dates et de leur réalité.

En l'absence de réponse, l'administration a adressé à Monsieur et Madame G... deux propositions de rectification no2120 des 22 décembre 2011 et 17 février 2012 en leur faisant connaître que, faute de justificatifs, aucune réduction d'impôt sur la fortune ne pouvait s'appliquer au titre des années 2008 à 2011 et en procédant à des rappels d'impôt de :

- 50.000 euros au titre de l'année 2008,

- 43.339 euros au titre de l'année 2009

- 47.991 euros au titre de l'année 2010

- 44.988 euros au titre de l'année 2011.

Monsieur et Madame G... ont contesté l'intégralité de ces rappels par courriers des 20 janvier 2012 en précisant avoir, selon procès-verbaux des 7 juin 2008 et 31 août 2011, souscrit à deux augmentations de capital de la société CLAMAX, et ce pour des montants respectifs de 219.472 euros et 90.000 euros, et avoir libéré en trois fois la première souscription. Ils ont précisé que la société CLAMAX est une PME au sens du droit communautaire, qu'il s'agit d'une holding animatrice de son groupe, et qu'elle répond à l'intégralité des conditions visées à l'article 885-0 V bis du CGI pour bénéficier de la réduction d'impôts.

Considérant que la société CLAMAX détient des participations et des droits de vote supérieurs à 50% dans différentes sociétés, l'administration a retenu que ces sociétés étaient liées à elle au sens de l'article 3, paragraphe 3 a), de l'annexe I du règlement (CE) no800/2008, et a donc ajouté aux données propres de CLAMAX l'intégralité des données des entreprises qu'elle estimait lui être liées (AUDIS DISROCH, SODISROY, LECAF et GDANSKDIS). Concluant, au regard de ces additions, que les conditions de seuils visées aux articles 885-0Vbis du CGI n'étaient pas remplies et que les époux G... ne pouvaient bénéficier du régime de faveur, elle a maintenu ses rappels pour un montant total de 204.272 euros.

Monsieur et Madame G... ont contesté ces impositions et, leur réclamation ayant fait l'objet d'une décision de rejet des 10 janvier et 5 mars 2014, ils ont, le 10 mars 2014, assigné l'administration devant le tribunal de grande instance de Saintes en sollicitant la décharge des impositions supplémentaires émises et des intérêts y afférents ainsi que la condamnation de la défenderesse à leur verser une indemnité de procédure.

Par jugement du 7 octobre 2014, le tribunal a annulé la décision de rejet du 5 mars 2014 et condamné l'administration à rembourser aux époux G... la somme de 204.272 euros augmentée des intérêts de retard à compter respectivement des années 2008 à 2011, dit n'y avoir lieu à assortir sa décision du prononcé de l'exécution provisoire, et alloué aux demandeurs une indemnité de procédure de 2.000 euros. Pour statuer ainsi, il a retenu que la société CLAMAX ne détient pas la majorité des votes au sein de ses deux filiales AUDIS DISROCH et SODISROY ; que les résolutions de l'assemblée générale des associés de la société GDANSKDIS dont elle détient 95% du capital devant être adoptées à l'unanimité, à l'exception de certaines résolutions limitativement énumérées, CLAMAX et GDANSKDIS sont donc également deux entités autonomes au sens européen du terme. Et il a considéré que les effectifs en personnel et bilans n'avaient donc pas à être additionnés à ceux de la société CLAMAX, laquelle était une PME autonome au sens du droit communautaire.

Cette décision a été confirmée par arrêt de la cour d'appel de Poitiers en date du 16 décembre 2015.

Saisie d'un pourvoi de l'administration, la Cour de cassation, aux termes d'un arrêt en date du 8 novembre 2017, a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la cour d'appel de Poitiers et renvoyé l'affaire devant cette cour.

La Haute Cour a retenu qu'en faisant droit aux contestations des époux G... , alors que l'article 3, paragraphe 3 a), de l'annexe I du règlement (CE) no70/2001 de la Commission du 12 janvier 2001, modifié par le règlement (CE) no364/2004 du 25 février 2004, et l'article 3, paragraphe 3 a), de l'annexe I du règlement (CE) no800/2008, auxquels se réfère, dans ses versions successivement applicables l'article 885 -O V bis I-1, a, du CGI, prévoient que sont des entreprises liées les entreprises dont l'une a la majorité des droits de vote des actionnaires ou des associés d'une autre, la cour d'appel avait violé les textes susvisés.

L'administration des finances publiques a saisi la cour de renvoi par déclaration en date du 27 avril 2018.

Elle conclut à l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour de débouter les intimés de l'ensemble de leurs contestations. A titre subsidiaire, elle sollicite la rectification de l'erreur matérielle affectant le jugement attaqué en ce qu'il l'a condamnée à verser aux intimés la somme de 204.272 euros augmentée des intérêts de retard respectifs à compter des années 2008 à 2011 alors que les droits notifiés s'élèvent à 186.318 euros augmentés des intérêts de retard d'un montant de 17.954 euros et que n'était dès lors due que la somme 186.318 euros augmentée des intérêts de retard respectifs à compter des années 2008 à 2011. En tout état de cause, elle réclame condamnation in solidum de Monsieur et Madame G... à lui verser une indemnité de procédure de 3.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de Maître GARNIER.

Elle fait valoir qu'en application de l'article 1844 du code civil, tout associé a le droit de participer aux décisions collectives sans qu'une stipulation statutaire ne puisse y déroger ; que les droits attachés à chaque action sont égaux et confèrent notamment un droit de vote et un droit aux dividendes, sous réserve des stipulations particulières relatives aux actions de préférence (actions à dividendes prioritaires avec ou sans droit de vote ou assortis de droits particuliers) définis dans les statuts ; qu'en l'espèce les époux G... ne démontrent pas l'existence d'actions de préférence.

Elle précise que des entreprises sont liées lorsque l'une a la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés de l'autre, rappelle les dispositions européennes et nationales applicables au litige et soutient qu'il résulte notamment des définitions données par l'annexe I au règlement (CE) no 800/2008 que la société CLAMAX était une société liée aux sociétés AUDIS DISROCH, SODISROY, LECAF et GDANSKDIS, ce qui doit conduire à additionner l'intégralité de leurs données de salariés et de bilans. Et elle conclut que les chiffres obtenus conduisent à exclure les dispositions de l'article 885-O V bis du code général des impôts.

Monsieur et Madame G... concluent à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation de l'appelante à leur verser une indemnité de procédure de 5.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens.

Ils rappellent que la société CLAMAX est une société holding animatrice d'un groupe constitué de plusieurs sociétés appartenant à la grande distribution, membres du mouvement E. LECLERC à savoir SODISROY à Royan, AUDIS DISROCH à Rochefort et GDANSKDIS à Gdansk en Pologne et détient des participations dans des sociétés aux activités complémentaires, notamment, la société LECAF (restauration) à Royan. Ils précisent avoir souscrit à I'augmentation de capital de CLAMAX alors que cette augmentation de capital aurait pu être libérée au niveau de chaque société filiale éligible au régime de la réduction d'impôt ; qu'en tout état de cause CLAMAX répondait aux définitions exigées pour recevoir des fonds permettant une réduction d'ISF.

Ils ne contestent pas l'erreur matérielle affectant le jugement déféré.

Sur le fond, ils font valoir que la qualification de PME communautaire découle de deux critères cumulatifs : l'effectif salarié de l'entreprise doit être inférieur à 250 personnes et son chiffre d'affaires annuel ne doit pas excéder 50 millions d'euros ou son total du bilan annuel ne doit pas excéder 43 millions d'euros et ils reconnaissent que ces critères s'apprécient selon des modalités différentes selon que l'entreprise en cause est considérée comme autonome ou qu'il s'agit d'une entreprise partenaire ou liée à d'autres sociétés ; que, pour vérifier si une entreprise est liée à d'autres, il convient d'appliquer les stipulations de l'annexe I du Règlement (CE) de la Commission du 6 août 2008 no800/2008 qui énonce notamment que des entreprises sont liées lorsque l'une a la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés d'une autre, entreprise. Ils soutiennent cependant que la majorité des droits de vote ne doit pas se confondre avec la majorité des droits en capital ; que, si dans la plupart des sociétés, un titre en capital donne droit à une voix, dans d'autres, et notamment dans les sociétés par actions simplifiées, les statuts peuvent y déroger. Ils font valoir que, si les statuts d'une société prévoient que les décisions collectives sont prises à la majorité en nombre d'associés, la quote part de capital détenue par chacun d'eux est sans incidence sur la majorité applicable pour adopter des décisions collectives ; que l'article 1844 du code civil n'impose pas que chaque action donne droit à une voix ainsi que le démontre l'article L.228 11 du code de commerce régit les dispositions concernant les actions de préférence ; qu'en tout état de cause, il est possible qu'un associé, tout en détenant la majorité du capital social d'une société, ne dispose pas pour autant de la majorité des droits de vote, et ce quand bien même les autres associés ne seraient pas titulaires d'actions de préférence.

Ils précisent que les statuts des sociétés AUDIS DISROCH et SODISROY, rédigés de la même manière, prévoient que chaque actionnaire a le droit de participer aux décisions (ordinaires) par lui-même ou par mandataire ; que chaque action donne droit à une voix ; que le droit de vote attaché aux actions est proportionnel au capital qu'elles représentent ; que, toutefois, lors d'un vote sur la révocation du président ou du directeur général, chaque actionnaire dispose d'une voix quelle que soit sa part dans le capital social ; que les décisions extraordinaires sont prises à la majorité qualifiée des deux tiers des voix dont disposent les actionnaires présents ou représentés et des deux tiers en nombre des actionnaires ; qu'en conséquence CLAMAX, qui vient en concurrence de 9 autres actionnaires, ne détient par la majorité des droits de vote pour révoquer un dirigeant et prendre la plupart des décisions extraordinaires et ne détient donc pas la majorité des droits de vote au sens du règlement communautaire ; que de la même manière les statuts de GDANSKDIS prévoient que les résolutions de l'assemblée générale des associés sont adoptées à l'unanimité, à l'exception des résolutions relatives à l'examen et l'approbation du rapport de la gérance, des états financiers de l'exercice écoulé, la distribution du bénéfice ou la couverture des pertes, le quitus aux membres des organes sociaux, ces résolutions étant adoptées à la majorité absolue des voix ; que CLAMAX ne saurait donc être considérée comme une société liée à GDANSKDIS au sens du droit communautaire ; que le fonctionnement du groupe LECLERC exclut en tout état de cause que CLAMAX puisse disposer d'un pouvoir de décision sur les autres sociétés.

Ils prétendent que les conditions de l'Annexe I du Règlement CE du 6 août 2008 doivent être examinées les unes par rapport aux autres et qu'à ce titre, la condition concernant la majorité des droits de vote doit être appréciée par rapport aux autres conditions, lesquelles tiennent aux capacités de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, aux capacités d'exercer une influence dominante sur l'autre entreprise ou à la possibilité de contrôler seule la majorité des droits de vote des autres actionnaires, ce qui démontre de plus fort que les sociétés susvisées ne sont pas liées à CLAMAX.

Ils reconnaissent que LECAF est une société liée à cette dernière mais font valoir que l'addition des données de ces deux sociétés permet de vérifier que les seuils de l'article 885-O V bis du CGI ne sont pas dépassés.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que, dans sa version applicable aux années 2008, 2009 et 2010 l'article 885-O V bis du code général des impôts énonce que "Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75% des versements effectués au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières, ainsi qu'au titre de souscriptions dans les mêmes conditions de titres participatifs dans des sociétés coopératives ouvrières de production définies par la loi no 78-763 du 19 juillet 1978 ou dans d'autres sociétés coopératives régies par la loi no 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération. Cet avantage fiscal ne peut être supérieur à 50.000 euros. La société bénéficiaire des versements mentionnée au premier alinéa doit répondre à la définition des petites et moyennes entreprises figurant à l'annexe I au règlement (CE) no 70 / 2001 de la Commission, du 12 janvier 2001 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de l'Etat en faveur des petites et moyennes entreprises, modifié par le règlement (CE) no 364/ 2004 du 25 février 2004" ;

Que ce même article, dans sa version applicable à l'année 2011 prévoit que "Le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 50% des versements effectués au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières, ainsi qu'au titre de souscriptions dans les mêmes conditions de titres participatifs dans des sociétés coopératives ouvrières de production définies par la loi no 78-763 du 19 juillet 1978 ou dans d'autres sociétés coopératives régies par la loi no 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération. Cet avantage fiscal ne peut être supérieur à 45.000 €. La société bénéficiaire des versements mentionnée au premier alinéa doit être une petite et moyenne entreprise au sens de l'annexe I au règlement (CE) no800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d'exemption par catégorie)" ;

Attendu qu'au sens communautaire, les PME sont définies comme des entreprises :

-dont l'effectif est strictement inférieur à 250 personnes ;

-et dont, soit le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros, soit le total du bilan annuel n'excède pas 43 millions d'euros ;

Que l'effectif et les données financières (chiffres d'affaires et total de bilan) de l'entreprise sont appréciés, avant prise en compte de l'investissement éligible, ainsi qu'il est précisé dans l'annexe I du règlement (CE) no800/2008 ;

Qu'aux termes de l'article 3 de cette annexe I, sont des entreprises liées celles qui entretiennent, entre elles, l'une ou l'autre des relations suivantes :

a) une entreprise a la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés d'une autre entreprise ;

b) une entreprise a le droit de nommer ou de révoquer la majorité des membres de l'organe d'administration, de direction ou de surveillance d'une autre entreprise ;

c) une entreprise a le droit d'exercer une influence dominante sur une autre entreprise en vertu d'un contrat conclu avec celle-ci ou en vertu d'une clause contenue dans le statut de celle-ci ;

d) une entreprise actionnaire ou associée d'une autre entreprise contrôle a seule, en vertu d'un accord avec d'autres actionnaires ou associés de cette entreprise, la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés de celle-ci ;

Que, lorsque des entreprises sont liées, les seuils financiers et d'effectifs déterminés pour la qualification de PME sont calculés en ajoutant aux données propres de l'entreprise, l'intégralité des données des entreprises qui lui sont liées ;

Attendu qu'en l'espèce, la société CLAMAX détenait :

- en 2008 : 99,82% du capital de la société SODISROY, 99,99% du capital social de la société AUDIS DISROCH et 82% de la société LECAF,

- en 2009, 2010 et 2011 : 99,99% du capital social de la société AUDIS DISROCH, 80% de la société LECAF et 99,50% de la société GDANSKDIS ;

Attendu que Monsieur et Madame G... n'ont jamais prétendu que les actions détenues par CLAMAX dans le capital des sociétés AUDIS DISROCH, SODIROY et GDANSKDIS correspondent totalement ou pour partie à des actions de préférence ;

Qu'ils font cependant valoir qu'aux termes de l'article L.227- 9 du code de commerce, les statuts des sociétés par actions simplifiées déterminent les décisions qui doivent être prises collectivement par les associés dans les formes et conditions qu'ils prévoient ; que toutefois, les attributions dévolues aux assemblées générales extraordinaires et ordinaires des sociétés anonymes en matière d'augmentation, d'amortissement ou de réduction de capital, de fusion, de scission, de dissolution, de transformation en une société d'une autre forme, de nomination de commissaires aux comptes, de comptes annuels et de bénéfices sont dans les conditions prévues par les statuts, exercées collectivement par les associés ;

Que, pour ces sociétés par actions simplifiées, forme choisies par toutes les sociétés en cause dans le présent litige, la liberté statutaire permet donc de calculer, pour certains votes seulement, la majorité des droits de vote par tête d'associé, quel que soit leur taux de détention au capital ;

Que tel est le cas en l'espèce puisque CLAMAX, bien que majoritaire en capital, ne dispose pas de la majorité des voix pour les décisions les plus importantes dans les sociétés AUDIS DISROCH, SODIROY et GDANSKDIS ;

Mais attendu que c'est cependant sans pertinence que les intimés soutiennent que les dispositions communautaires concernant les PME doivent nécessairement s'apprécier au regard de tous les éléments précisés dans l'annexe 1, ou prétendent qu'il ne suffit pas, pour retenir qu'une entreprise est liée avec une autre, de retenir qu'elle détient la majorité des droits de vote et qu'il doit être recherché si ces droits de vote lui donnent un pouvoir sur les décisions les plus importantes prises par cette seconde société ;

Qu'en effet, il s'agit ici de déterminer si des entreprises sont liées, et non si l'une d'elles a un pouvoir total sur les décisions de la seconde ;

Que sont considérées comme entreprises liées celles qui répondent soit aux critères du a/, soit à ceux du b/ ou du c/ ou du d/ de l'article 3 de l'annexe I et non celles qui répondent cumulativement à ces critères qui n'ont pas à être appréciés les uns par rapport aux autres ;

Que les avantages accordés aux PME consistent le plus souvent en des exceptions aux règles générales, notamment dans le domaine des aides d'État ou des réductions d'impôts ;

Que l'octroi de tels avantages conduit à retenir que la définition d'une PME doit faire l'objet d'une interprétation stricte permettant d'exclure de cette qualification les groupes d'entreprises dont le pouvoir économique excède celui d'une petite ou moyenne entreprise et de réserver aux entreprises véritablement visées par la loi les bénéfices découlant de réglementations ou de mesures prises en la seule faveur des PME dont la taille constitue un handicap face aux entreprises appartenant à de grands groupes ;

Que la qualification de PME ne doit dès lors pas être donnée à une société pour des motifs purement formels tenant à des statuts rédigés de manière à contourner la définition communautaire de PME ;

Que la définition communautaire des entreprises liées visant expressément la détention des droits de vote et non les conditions d'exercice de ces droits, sont dès lors sans influence sur cette condition des dispositions statutaires particulières prises par certaines SAS visant à aménager ou à restreindre l'exercice du droit de vote concernant certaines décisions ;

Attendu qu'il ne peut dès lors qu'être retenu que CLAMAX a la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés des sociétés AUDIS DISROCH, SODIROY et GDANSKDIS et LECAF, ce qui, en application du a/ de l'article 3 de l'annexe 1 du règlement CE no800/2008, conduit à retenir que ces entreprises lui sont liées ;

Attendu que Monsieur et Madame G... ne discutent pas subsidiairement que l'addition de l'intégralité de leurs données de salariés et de bilan excède les seuils fixés par l'article 885-O V bis du code général des impôts ;

Que les investissements réalisés par les époux G... en 2008, 2009, 2010 et 2011 par souscription à l'augmentation de capital de la société CLAMAX, ne pouvaient donc leur ouvrir de droit à réduction d'impôt sur la fortune et que les deux propositions de rectification no2120 des 22 décembre 2011 et 17 février 2012 adressées par l'administration sont entièrement fondées ;

Que Monsieur et Madame G... seront en conséquence déboutés de toutes leurs demandes ;

Que, succombant à l'instance, ils en supporteront les dépens et qu'il sera fait application, au profit de l'appelante, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME la décision entreprise,

STATUANT À NOUVEAU,

DÉBOUTE Monsieur D... G... et son épouse, Madame I... K..., de l'ensemble de leurs prétentions,

CONDAMNE in solidum Monsieur D... G... et Madame I... K... à payer à l'administration des finances publiques la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum Monsieur D... G... et Madame I... K... aux dépens de première instance et d'appel, qui comprendront ceux de la procédure afférente à la décision cassée,

ACCORDE à Maître GARNIER, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 18/014101
Date de la décision : 21/02/2019
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2019-02-21;18.014101 ?
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