COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 21/02/2019
la SCP LAVILLAT-BOURGON
la I... du : 21 FEVRIER 2019
No : 59 - 19
No RG 18/01241 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FVZR
DÉCISION ENTREPRISE : Ordonnance de référé du Président du Président du TGI de MONTARGIS en date du 19 Avril 2018
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265222486530188
Madame Y... F...
née le [...] [...]
[...]
Ayant pour avocat Me Cécile BOURGON, membre de la SCP LAVILLAT-BOURGON, avocat au barreau de MONTARGIS,
D'UNE PART
INTIMÉES : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265221715400170
Madame Andréa S...
née le [...] [...]
[...]
Ayant pour avocat Me Julie D..., membre de la SCP MERLE-PION-ROUGELIN, avocat au barreau de MONTARGIS,
SARL L'ORCHIDEE SPA,
SARL au capital de 1.000 €, immatriculée au RCS d'ORLEANS sous le numéro 821 106 903, ayant son siège social [...] , prise en la personne de son liquidateur amiable M. V... T...
[...]
défaillante,
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 09 Mai 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 22 novembre 2018
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l'audience publique du 13 DECEMBRE 2018, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, en son rapport, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,
Greffier :
Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé lors des débats et du prononcé,
ARRÊT :
Prononcé le 21 FEVRIER 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE
Madame S... a consenti par acte sous seing privé du 15 décembre 2015 un bail commercial à la société L'ORCHIDÉE SPA.
Madame Y... F... s'est portée caution des engagements souscrits par la locataire en vertu du bail.
La locataire a donné un congé par lettre pour le 15 décembre 2017 qui a été refusé par la bailleresse aux motifs que le congé ne pouvait être donné qu'à l'issue d'une période triennale.
Le 27 juin 2017 Madame S... a fait délivrer à la société L'ORCHIDÉE SPA un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée dans le bail ainsi que les articles L 154-41 et L 145- 17 du code de commerce.
Le commandement a été dénoncé le 20 juillet 2017 à Madame F... qui a été sommée en sa qualité de caution de s'acquitter des sommes dues.
Par acte du 13 décembre 2017 Madame S... a fait assigner la société L'ORCHIDÉE SPA et Madame F... à l'effet de voir constater la résiliation du bail au 27 juillet 2017, voir fixer l'indemnité d'occupation à la somme de 2.000 euros par mois jusqu'à complète libération des lieux, voir condamner à titre provisionnel et solidairement la société L'ORCHIDÉE SPA et Madame F... à lui payer la somme de 24.582,06 euros arrêtée au 31 décembre 2017 outre celle de 2.000 euros pour frais de procédure.
Madame F... a demandé à titre principal de constater la nullité du cautionnement, de débouter Madame S... de l'ensemble de ses prétentions et à titre subsidiaire de constater l'existence d'une difficulté sérieuse et de dire n'y avoir lieu à référé.
Par ordonnance du 19 avril 2018, le juge des référés a constaté l'acquisition des effets de la clause résolutoire insérée dans le bail et la résiliation du bail à la date du 21 juillet 2017, a invité la société L'ORCHIDÉE SPA ainsi que tous occupants de son chef à libérer les locaux ainsi que de leurs biens dans le délai de deux mois suivant la signification de la décision, a prononcé à défaut son expulsion immédiate, a condamné solidairement la société L'ORCHIDÉE SPA et Madame F... à payer à Madame S... à titre de provision la somme de 11.950 euros, a fixé le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation à la somme de 2.000 euros jusqu'à la libération effective des lieux et a condamné solidairement à titre provisionnel la société L'ORCHIDÉE SPA et Madame F... à payer cette somme en tant que de besoin et les a condamnés à payer une indemnité de 700 euros pour frais de procédure.
Madame F... a relevé appel de la décision le 9 mai 2018.
Elle demande à la cour de constater l'existence d'une contestation sérieuse excluant la compétence du juge des référés, d'infirmer en conséquence la décision entreprise, de débouter Madame S... de toutes ses demandes et de la renvoyer à mieux se pourvoir. Elle souhaite subsidiairement voir juger que sa dette ne peut excéder 12.103 euros et réclame en tout état de cause la condamnation de Madame S... à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient qu'il existe une contestation sérieuse échappant à la compétence du juge des référés dans la mesure ou son engagement de caution est entaché de nullité faute de reproduire la mention manuscrite exigée par l'article L 341-2 du code de la consommation dans sa rédaction alors en vigueur qui s'applique dans les rapports entre la caution et le créancier professionnel dont la Cour de cassation a donné une définition extensive, en retenant que rentrait dans cette catégorie celui dont la créance est née dans l'exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l'une de ses activités professionnelles même si celle-ci n'est pas principale.
Elle affirme que Madame S... a la qualité de créancier professionnel, puisqu'elle est agent immobilier de profession qu'elle a géré pendant de nombreuses années une agence immobilière peu important que celle-ci ait fermé en 2014, dès lors que cela n'implique pas qu'elle ait mis un terme à son activité et que par ailleurs, le fait de donner en location des locaux commerciaux est en rapport direct avec cette activité d'agent immobilier.
Elle réplique qu'elle peut se prévaloir de la qualité de consommateur dès lors qu'elle n'était pas la gérante de la société L'ORCHIDÉE SPA et que l'associé même majoritaire d'une société n'a pas la qualité de commerçant ou de professionnel et qu'en tout état de cause, il s'agit d'une question de fond qui ne peut être tranchée par la cour qui, par l'effet dévolutif de l'appel, doit statuer dans la limite des pouvoirs du juge des référés.
Elle fait valoir subsidiairement que les clés ont été restituées en mars 2017 et que le bail se trouvant résilié par l'effet de la clause résolutoire le 27 juillet 2017, le montant de l'arriéré de loyer ne peut excéder 12.103 euros.
Madame S..., qui sollicite la confirmation de la décision déférée, réclame la condamnation de Madame F... à lui payer la somme de 5.000 euros pour frais de procédure ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de la SCP MERLE PION ROUGELIN;
Elle estime qu'en raison de l'effet dévolutif de l'appel, Madame F... ne peut maintenir devant la cour l'existence d'une contestation sérieuse rendant incompétent le juge des référés et répond que c'est à tort qu'elle invoque les dispositions de l'article L 341-2 du code de la consommation qui ne sont pas applicables en l'espèce puisque Madame F... qui s'est portée caution des engagements d'une société dont elle était associée majoritaire ne peut pas se prévaloir de la qualité de consommateur et que par ailleurs, elle-même n'a pas la qualité de professionnel puisqu'elle avait cessé son activité d'agent immobilier et qu'elle a loué les locaux commerciaux dont elle est propriétaire à titre privé.
La société L'ORCHIDÉE SPA à qui les conclusions d'appel ont été signifiées en l'étude de l'huissier de justice n'ayant pas constitué avocat, l'arrêt sera rendu par défaut.
SUR CE
Attendu que la cour est investie par l'effet de l'appel des mêmes pouvoirs que le juge des référés ;
Attendu qu'en application de l'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président peut accorder une provision au créancier ;
Attendu que Madame F... conteste la validité de son engagement de caution aux motifs qu'il ne contient pas la mention manuscrite prévue par l'article L 341-2 du code de la consommation ;
Attendu que selon l'article L 341-2 du code de la consommation, dans sa version alors applicable, toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : "En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n'y satisfait pas lui-même." ;
Attendu qu'est nul l'engagement de caution, souscrit sous seing privé par une personne physique envers un créancier professionnel qui ne comporte pas les mentions manuscrites exigées par ce texte ;
Attendu qu'au sens de l'article L 341-2 du code de la consommation, le créancier professionnel s'entend de celui dont la créance est née dans l'exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l'une de ses activités professionnelles, même si celle-ci n'est pas principale (Cass com 13 décembre 2017 pourvoi no 16-14.707) ;
Attendu que Madame S... a donné à bail à la société L'ORCHIDÉE SPA, suivant acte sous seing privé du 15 décembre 2015, en son nom personnel des locaux lui appartenant, et a fait souscrire, à cette occasion, pour avoir garantie du paiement régulier du loyer et de l'exécution des diverses charges et conditions du bail un engagement de caution à Madame F... ;
Attendu qu'il ressort de l'extrait K bis communiqué par Madame F... que la société ACTIF IMMOBILIER dont Madame S... était la gérante a été radiée du registre du commerce le 30 juillet 2014 à la suite de sa mise en liquidation judiciaire, soit avant la conclusion du bail ;
Attendu que la production par l'appelante d'une copie d'écran du site "copains d'avant", n'est pas de nature à établir la preuve que Madame S... a continué à exercer des fonctions de gestionnaire immobilier postérieurement à cette date et en particulier à celle à laquelle elle a fait souscrire à Madame F... l'engagement de caution alors qu'elle affirme avoir pris sa retraite et qu'elle est née [...] ;
Attendu que le fait que Madame S... ait exercé antérieurement à l'engagement de caution de Madame F... la profession d'agent immobilier ne lui confère pas la qualité de professionnel à la date à laquelle cette dernière s'est engagée puisqu'elle avait cessé son activité et que la créance n'est pas née dans l'exercice de ses fonctions d'agent immobilier et ne s'y rattache pas ;
Qu'il s'ensuit que c'est à juste titre que le juge des référés a retenu que la contestation soulevée par Madame F... tirée du non respect des dispositions de l'article L 341-2 du code de la consommation n'est pas sérieuse ;
Attendu que Madame F... soutient que le montant de l'arriéré de loyers ne peut excéder la somme 12.103 euros correspondant à l'arriéré locatif au 27 juin 2017 et au loyer de juillet 2017 ;
Attendu que l'ordonnance a fixé le montant de l'indemnité provisionnelle pour cette période à la somme de 11.950 euros au titre des loyers impayés soit à une somme inférieure à celle reconnue par Madame F... ;
Qu'il convient en conséquence le montant de l'arriéré locatif n'étant pas critiqué et l'obligation de Madame F... au paiement des loyers en sa qualité de caution des engagements du preneur n'étant pas sérieusement contestable, de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné solidairement Madame F... avec la société L'ORCHIDÉE SPA à payer cette somme à titre provisionnel à Madame S... ;
Attendu qu'aux termes de l'acte de cautionnement Madame F... s'est engagée à garantir outre le paiement des loyers, toutes charges se rapportant au bail, accessoires, intérêts, dommages et intérêts, indemnités dues au titre de la clause pénale, indemnité d'occupation et toutes les sommes dues en cas de condamnation judiciaire ;
Qu'il y a lieu de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné solidairement à titre provisionnel Madame F... à payer une indemnité d'occupation jusqu'à la date de libération effective des lieux en tant que de besoin, dès lors qu'il n'est pas justifié de la date à laquelle les locaux ont été restitués ;
Attendu que Madame F... qui succombe sera condamnée aux dépens de l'appel et à payer à Madame S... la somme de 1.000 euros pour frais de procédure ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant dans les limites de l'appel, par arrêt mis à disposition au greffe, par arrêt rendu par défaut,
CONFIRME l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
CONDAMNE Madame Y... F... à payer à Madame Andréa S... la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Madame Y... F... aux dépens de l'appel ;
ACCORDE à la SCP MERLE PION ROUGELIN avocats le droit prévu à l'article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT