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21/02/2019 | FRANCE | N°17/032281

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 21 février 2019, 17/032281


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 21/02/2019
la SARL ARCOLE
Me David ATHENOUR
ARRÊT du : 21 FEVRIER 2019

No : 50 - 19
No RG 17/03228 - No Portalis
DBVN-V-B7B-FSFY

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 15 Septembre 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265208093600057

Monsieur M... L...
Agent commercial, inscrit au RSAC de MELUN sous le numéro 339 622 813
né le [...] à AUBERVILLIERS (9330

0) [...]
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Antoine BRILLATZ, membre de la SARL ARCOLE, avocat au barreau de TOURS, et ...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 21/02/2019
la SARL ARCOLE
Me David ATHENOUR
ARRÊT du : 21 FEVRIER 2019

No : 50 - 19
No RG 17/03228 - No Portalis
DBVN-V-B7B-FSFY

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de TOURS en date du 15 Septembre 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265208093600057

Monsieur M... L...
Agent commercial, inscrit au RSAC de MELUN sous le numéro 339 622 813
né le [...] à AUBERVILLIERS (93300) [...]
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Antoine BRILLATZ, membre de la SARL ARCOLE, avocat au barreau de TOURS, et ayant pour avocat plaidant Me François KLEIN, membre de KGA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265206569571947

SAS SANITEC INDUSTRIE
[...]

Ayant pour avocat Me David ATHENOUR, membre de la SELARL RABY-ATHENOUR, avocat au barreau de TOURS,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 27 Octobre 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 25 octobre 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 13 DECEMBRE 2018, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, en son rapport, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé lors des débats et du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé le 21 FEVRIER 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur M... L... a conclu, le 13 mai 2013, un contrat d'agent commercial
avec la société SANITEC qu'il devait représenter auprès de la clientèle, de manière exclusive dans les départements 78 -91- 92 -94 et de manière non exclusive dans les départements 75 -77- 93 et 95 pour commercialiser des articles de sanitaires et de douches.

Le 7 janvier 2015, le tribunal de commerce d'Orléans a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de SANITEC et, par jugement en date du 27 avril 2015, il a ordonné la cession des actifs de cette société au profit de la société ABEO. Ce jugement excluait expressément du périmètre des contrats repris par le cessionnaire le contrat d'agent commercial conclu avec Monsieur L....

ABEO s'est substituée, dans ses droits et obligations de cessionnaire, la société SANITEC INDUSTRIE créée pour l'occasion et détenue à 100% par l'une de ses filiales.
SANITEC INDUSTRIE a poursuivi la collaboration avec Monsieur L... et lui a proposé de signer un nouveau contrat.

Cependant, aucun accord n'est intervenu entre les parties sur le contenu de ce nouveau contrat d'agent commercial, Monsieur L... ayant refusé celui proposé par SANITEC INDUSTRIE qui a cessé toute collaboration avec lui le 15 juin 2015.

Soutenant que les quelques semaines au cours desquelles il avait poursuivi son activité auprès de SANITEC INDUSTRIE valaient reprise du contrat antérieur, Monsieur L... a saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Tours en réclamant condamnation de cette société à lui verser 15.889,64 euros HT au titre de diverses commissions dont certaines antérieures à la cession des actifs de SANITEC.

Faisant valoir qu'elle se reconnaissait redevable des commissions dont le fait générateur est survenu entre le 27 avril et le 16 juin 2015, mais non de celles antérieures au jugement de liquidation qui devaient selon elle faire l'objet d'une déclaration au passif de SANITEC, SANITEC INDUSTRIE a offert de régler la somme de 1.432,46 euros, ce dont le juge des référés lui a donné acte en retenant comme sérieuse sa contestation sur les autres sommes réclamées.

Le 4 mars 2016, Monsieur L... a assigné SANITEC INDUSTRIE devant le tribunal de commerce d'Orléans en lui demandant de juger que la défenderesse est seule responsable de la rupture du contrat d'agent commercial et est, par conséquent, débitrice des indemnités de fin de contrat ainsi que d'une somme à titre de dommages et intérêts pour l'important préjudice qu'il a subi du fait de la rupture brutale de son contrat.

Par jugement en date du 15 septembre 2017, le tribunal a condamné la société SANITEC INDUSTRIE à payer à Monsieur L... la somme de 1.518, 48 euros HT au titre de l'indemnité compensatrice, celle de 1.518, 48 euros HT au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, celle de 86,02 euros HT au titre du solde de commissions dues, débouté les parties du surplus de leurs demandes, et condamné SANITEC INDUSTRIES aux dépens ainsi qu'à verser au demandeur une indemnité de procédure de 1.000 euros.

Monsieur L... a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 21 octobre 2017.

Il en poursuit l'infirmation en demandant à la cour de condamner SANITEC INDUSTRIE à lui payer la somme de 103.040, 80 euros TTC, équivalent à 8,5% de son chiffre d'affaires à titre d'indemnité compensatrice, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2015, de désigner un expert ayant pour mission d'évaluer le chiffre d'affaires des contrats conclus directement par SANITEC sur la zone géographique attachée au contrat d'agent commercial, et ce à compter de la signature de son contrat d'agent commercial, le 13 mai 2013, jusqu'à sa rupture par SANITEC INDUSTRIE le 16 juin 2015, de condamner SANITEC INDUSTRIE à lui payer la somme équivalente à 2 années de commissions brutes sur la base du chiffre d'affaires évalué par I'expert à titre d'indemnité compensatrice complémentaire, 12. 880 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2015 au titre du préavis dû et non payé, 51.520 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, 14.385, 09 euros HT avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2015 en paiement des commissions dues, 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les entiers dépens.

Il affirme qu'à la suite de la cession de SANITEC à la société ABEO intervenue le 27 avril 2015, les relations professionnelles sont demeurées inchangées entre lui-même et la société SANITEC INDUSTRIE. Et il détaille les très nombreuses pièces qui établissent que son activité s'est poursuivie, soutenant qu'il en résulte la démonstration claire et non équivoque que SANITEC INDUSTRIE l'a intégré dans sa nouvelle organisation et a donc repris son contrat d'agent commercial dans les mêmes termes, la volonté de l'intimée exprimée dans son offre d'achat ne pas reprendre son contrat n'étant en conséquence ni dépourvue d'ambiguïté, ni parfaitement claire.

Il soutient qu'il n'y avait aucune distinction entre les clients et qu'il s'occupait de l'ensemble de la clientèle de son périmètre géographique ; qu'ayant appris fin 2014, que des contrats avaient été conclus directement par le siège de SANITEC sur son périmètre d'activités sans qu'il en soit informé ni mis à contribution, il avait fait part de son mécontentement par courrier du 7 janvier 2015 demeuré sans réponse ; que le nouveau contrat qui lui était proposé excluait de son périmètre d'importants clients réservés au siège, et ce sans aucune compensation ; que, même s'il ne bénéficiait pas d'une exclusivité sur tous les secteurs de son portefeuille, il était en réalité le seul agent sur tous ces secteurs et bénéficiait d'une exclusivité de fait. Il précise qu'il s'était vu attribuer petit à petit, et de manière définitive au mois de mars 2015, le domaine du panneau et du bois à la suite du départ de I'agent commercial de SANIDIS liquidée en février 2015. Il fait donc valoir que, contrairement à ce que prétend l'intimée, le contrat qu'elle lui proposait et qui intégrait ce secteur de représentation n'était pas plus avantageux pour lui et il affirme que SANITEC INDUSTRIE a essayé de lui imposer de nouvelles conditions contractuelles pour s'affranchir des conditions toujours en cours et parfaitement acceptées par elle.

Il insiste sur le fait que l'intimée a reconnu lui devoir des commissions, ce qui démontre selon lui, puisqu'un nouveau contrat n'a pas été signé, qu'elle entendait reprendre l'ancien.

Il fait valoir que SANITEC INDUSTRIE a décidé le 16 juin 2015 de mettre un terme sans préavis à la relation contractuelle, sans lui verser les commissions qui lui étaient dues au titre des nombreux contrats conclus pour son compte et sans lui verser l'indemnité qui lui était due au titre de son contrat d'agent commercial.

Il souligne qu'alors même qu'il échangeait très régulièrement avec elle et qu'aucun reproche n'avait été formulé à I'égard de son travail, l'intimée a pris I'initiative de suspendre sa connexion au réseau de la société et celle de son téléphone portable, et ce, sans I'en informer préalablement ; qu'à compter du 15 juin 2015, l'intimée l'a laissé dans le doute le plus complet sur sa situation et n'a plus payé ses commissions, et il mentionne que la Cour de cassation a retenu que l'absence de paiement des commissions est une cause de rupture imputable au mandant. Il reproche donc au tribunal d'avoir retenu que la rupture était imputable aux deux parties et demande à la cour de juger que, les relations contractuelles s'étant poursuivies sur la base du contrat précédent, c'est SANITEC INDUSTRIE qui a seule été à l'origine de la rupture en essayant de lui imposer la signature d'un contrat contenant des conditions défavorables.

Il soutient qu'une expertise est nécessaire pour évaluer le chiffre d'affaires des contrats conclus directement par SANITEC sur son périmètre d'activité, et ce à compter de la signature de son contrat d'agent commercial, le 13 mai 2013, jusqu'à sa rupture par SANITEC INDUSTRIE le 16 juin 2015, ce montant devant être pris en compte pour le paiement total de l'indemnité qui devra être équivalente à 2 années de commissions brutes sur la base du chiffre d'affaires évalué par I'expert aux termes de sa mission.

Il affirme également être créancier d'une indemnité de préavis de trois mois.

Il prétend que le comportement trompeur de SANITEC INDUSTRIE lui a causé un préjudice puisqu'il ne pouvait que comprendre que son contrat était effectivement repris et qu'il n'avait ni à en signer un nouveau, ni à effectuer une déclaration de créance qui, en tout état de cause, se serait révélée vaine. Il indique avoir subi un stress important en étant privé de situation du jour au lendemain alors qu'il a la charge de 5 enfants et était débiteur d'échéances d'emprunt immobilier, que son état de santé s'est dégradé et qu'il ne peut plus se rendre à ses entraînements de football, et qu'il a subi un important préjudice financier puisqu'il n'a pu retrouver qu'un emploi temporaire de salarié qui n'est pas allé au-delà de la période d'essai et est depuis sans activité.

SANITEC INDUSTRIES, qui conclut à la confirmation du jugement déféré, demande à la cour de lui donner acte de son offre de payer à Monsieur L... la somme de 86,02 euros au titre d'une solde de commissions, de débouter l'appelant de toutes ses demandes plus amples ou contraires et de le condamner à lui payer la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.

Elle affirme qu'elle n'a pas repris le contrat d'agent commercial de Monsieur L... et souligne qu'elle est une entité juridique entièrement distincte de SANITEC ce qui fait qu'il n'y a eu ni poursuite de la personne morale ni transfert universel de patrimoine d'une société à l'autre mais un simple transfert d'actifs dont le périmètre est strictement délimité par le jugement arrêtant le plan de cession. Elle rappelle que les contrats en cours ne sont pas des actifs et n'ont donc pas été automatiquement cédés, son offre de cession précisant expressément les contrats qu'elle souhaitait voir poursuivis parmi lesquels ne figurait pas le contrat d'agent commercial de Monsieur L... ; que le jugement de cession ne s'est pas contenté de retenir l'exclusion de tous les contrats d'agents commerciaux mais a pris acte de l'exclusion de chaque contrat individuel du périmètre de la reprise et a cédé les actifs en tenant compte de cette exclusion.

Elle fait valoir que l'arrêt de la Cour de cassation communiqué par Monsieur L... à l'appui de son argumentation d'une poursuite de son contrat est inapplicable au litige comme concernant une espèce dans laquelle le liquidateur avait poursuivi l'exécution d'un contrat d'agent commercial. Elle souligne qu'en l'espèce elle ne s'est acquittée envers l'appelant d'aucune commission due au titre de son activité au profit de la société cédée et affirme qu'il revient donc à Monsieur L... de produire au passif de cette dernière ses éventuelles créances au titre d'une indemnité de rupture, d'une indemnité de préavis et de commissions antérieures à l'ouverture de la liquidation judiciaire de SANITEC intervenue le 27 avril 2015. Elle souligne que le fait générateur de la commission, tant dans les stipulations de l'ancien contrat que dans celles du projet de nouveau contrat, est la prise de commande par le client et non la transmission de celle-ci au mandant par Monsieur L... et affirme que ce dernier retient à tort comme « date de commande » celle à laquelle il a transmis la commande à la société SANITEC et non la date de prise de commande par le client, laquelle correspond au bon de commande signé par ce dernier.

Elle ne conteste ni avoir repris le carnet de commande au jour de la cession des actifs, ni qu'il s'y trouvait des commandes en cours au jour de la cession pour lesquelles des obligations étaient déjà nées au bénéfice de Monsieur L... au titre de commissions mais fait valoir que le fait générateur de la créance et l'exigibilité de celle-ci ne sont pas concomitants ; qu'elle s'est quant à elle trouvée dans l'obligation d'honorer les commandes sans bénéficier de l'acompte de 30% versé à SANITEC lors de la signature du bon de commande puisque la société cédée a été placée en liquidation judiciaire et n'a pu lui transférer ces acomptes.

Elle précise qu'elle ne souhaitait pas reprendre le contrat d'agent commercial de Monsieur L... mais, ne refusant pas de travailler avec lui sur d'autres bases, a accepté qu'il continue son activité en soumettant à sa signature un nouveau contrat. Elle ne conteste aucunement l'existence de relations commerciales entre le 28 avril et le 16 juin 2015 mais ne les qualifie pas de reprise du contrat antérieur. Elle souligne en effet avoir, dès le 12 mai 2015, transmis à Monsieur L... un nouveau projet de contrat, ce qui établit de plus fort sa volonté de ne pas poursuivre l'ancien, et indique que l'appelant a refusé en estimant qu'il lui était moins favorable que celui dont il bénéficiait auparavant et en n'acceptant pas de devenir agent commercial multicartes.
Si elle admet avoir été quelque peu imprudente en n'attendant pas que l'appelant signe le contrat qui lui était proposé, elle fait état de sa totale bonne foi et affirme que la rupture de ces relations commerciales nouvelles après le 27 avril 2015 est entièrement imputable à Monsieur L.... Elle fait en effet valoir que le nouveau contrat était équilibré et protecteur des intérêts des deux parties, voire même plus avantageux pour Monsieur L... que son précédent contrat puisqu'il lui apportait une nouvelle clientèle constituée des plus gros distributeurs négociants dans le domaine du panneau et du bois, Monsieur L... ayant ainsi la possibilité de réaliser un chiffre d'affaires supplémentaire non négligeable. Et elle prétend que l'appelant le conteste sans fondement ; qu'il n'avait pas auparavant accès à cette clientèle malgré l'attestation d'un ancien commercial qui ne reflète pas la réalité, elle-même produisant deux attestations contraires qui établissent que cette importante clientèle était auparavant exclusivement gérée par la société SANIDIS ; que les pièces communiquées par l'appelant lui-même démontrent qu'il n'avait pas accès à cette clientèle avant le 20 février 2015, date de la liquidation de la société SANIDIS, et elle soutient qu'il a réalisé une transaction avec PANOFRANCE en octobre 2014 en violation de la politique intra-groupe. Elle précise que, si Monsieur L... a eu accès à compter du 20 février 2015 à cette clientèle du panneau et du bois, c'est uniquement parce que la société SANITEC était elle-même sur le point d'être liquidée et qu'elle n'était donc pas en capacité de procéder à l'embauche d'un commercial pour reprendre ce secteur. Et elle en conclut que sa proposition de contrat était dès lors avantageuse.

Elle fait par ailleurs valoir que l'affirmation de l'appelant de ce que les périmètres qui lui étaient accordés étaient considérablement restreints sans qu'il n'y ait aucune compensation est fausse puisque tous les grands comptes cités par Monsieur L... se situaient dans des secteurs où il n'était pas exclusif et que ces clients importants ont toujours été gérés par le service «Grands Comptes» de SANITEC, depuis leur démarchage jusqu'au suivi des commandes, la mission de Monsieur L... étant de trouver de nouveaux clients et non pas de gérer ces comptes qui étaient déjà dans la clientèle de SANITEC avant même qu'il devienne agent commercial. Elle souligne que, s'agissant des secteurs exclusifs de Monsieur L..., elle respectait l'exclusivité en laissant à Monsieur L... la prise de commandes émanant des grands comptes pouvant s'y trouver. Et elle en conclut que le nouveau contrat ne faisait que rappeler et poser par écrit une règle qui avait jusqu'alors trouvé son application dans les faits. Elle fait valoir que la demande de l'appelant tendant à la désignation d'un expert pour "évaluer le chiffre d'affaires des contrats conclus directement par SANITEC sur la zone géographique attachée au contrat d'agent commercial de Monsieur L..." est sans fondement, l'appelant ne pouvant obtenir une indemnisation au titre de contrats conclus directement par SANITEC INDUSTRIE avec des clients présents dans l'une de ses zones non exclusives.

Elle expose que le véritable motif de Monsieur L... du refus du contrat offert était son exigence qu'il possède au moins une autre carte. Et elle affirme que cette exigence était légitime dès lors que la multiplicité de mandants renforce l'indépendance de l'agent commercial et réduit sensiblement tout risque, pour le mandant, de voir requalifier le contrat d'agent commercial en contrat de travail.

Elle fait valoir que ses négociations avec l'appelant se sont poursuivies jusqu'à la mi-juin mais que, lorsqu'il est devenu évident qu'aucun accord ne pouvait être trouvé avec Monsieur L... qui avait changé de ton et qui pris un conseil, il lui a été demandé de restituer les moyens mis à sa disposition puisqu'aucun engagement n'avait été pris à son égard.
Elle précise que c'est pour éviter tout litige qu'elle a accepté de payer l'ensemble des commissions nées au cours de ces relations éphémères sur la base du taux de commissionnement de l'ancien contrat de l'appelant.
Elle indique que, même si elle avait soutenu devant les premiers juges qu'elle n'était redevable d'aucune indemnité compensatrice puisque la rupture ne résultait que du refus sans fondement de Monsieur L... de contracter avec elle, elle accepte la condamnation mise à sa charge de régler de ce chef la somme de 1.518,48 euros et celle du même montant au titre de l'indemnité de préavis puisque ces sommes tiennent compte de la durée des relations contractuelles mais refuse de prendre en considération la durée du contrat conclu entre SANITEC et l'appelant.

Elle prétend que Monsieur L... ne saurait obtenir versement de dommages et intérêts en faisant valoir que la rupture brutale dont il aurait été victime l'aurait privé de ressources et qu'il serait toujours sans emploi alors qu'il ne communique que des pièces rapportant ses seules déclaration sur son état de stress, qu'elle-même n'a commis aucune faute et que l'appelant a retrouvé un emploi auprès de l'un de ses concurrents, la société AQUADIP, ce qui démontre d'ailleurs qu'il ne considérait pas lui-même comme étant applicables les dispositions de son ancien contrat d'agent commercial, dont il revendique pourtant l'application, puisqu'elles lui interdisaient pendant une année de contracter avec l'un des concurrents de SANITEC.

Enfin elle reconnaît avoir omis une commission de l'offre de paiement présentée devant le juge des référés, à savoir celle due au titre du contrat DERICHEBOURG pour un montant de 86,02 euros, l'assignation de Monsieur L... indiquant à tort que la date de cette commande était le 6 mars 2015, ce qui excluait tout paiement, alors que la commande est du 6 mai 2015, ce qui ouvre un droit à commissionnement de Monsieur L... par elle-même et non par SANITEC.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu qu'il est constant que :
- l'offre de reprise d'ABEO excluait expressément le contrat d'agent commercial conclu entre l'appelant et SANITEC
- ce contrat a été expressément exclu des actifs cédés à SANITEC INDUSTRIES par le jugement opérant la cession ;

Que Monsieur L... s'est personnellement vu notifier (sa pièce no4) le jugement de cession des actifs de SANITEC et a été très clairement informé que son contrat n'y figurait pas ;

Qu'il importe peu qu'il ait travaillé pour le compte de SANITEC INDUSTRIES pendant quelques semaines après la cession et produise des courriels qui démontrent son activité puisque celle-ci n'est aucunement contestée par l'appelante qui se borne à rappeler que cette activité n'a pu être exercée dans l'ancien cadre contractuel qu'elle avait dénoncé ;

Qu'il est en effet tout aussi constant qu'il a été proposé à Monsieur L... de continuer à travailler avec SANITEC INDUSTRIES mais que l'appelant ne pouvait nourrir aucun doute sur sa situation et n'a d'ailleurs pas été surpris de recevoir, dès le 12 mai 2015, soit 7 jours ouvrables après la cession d'actifs, une proposition de nouveau contrat d'agent commercial;

Que c'est dès lors sans vraisemblance qu'il soutient qu'il n'a pas compris que son ancien contrat n'était pas poursuivi et qu'il n'a pas signé le nouveau contrat qui lui était proposé parce qu'il pensait ne pas avoir à le faire ;

Qu'il résulte d'ailleurs des courriers échangés entre les parties que Monsieur L... a refusé de signer le contrat proposé parce qu'il estimait qu'il ne lui était pas aussi favorable que l'ancien et non parce qu'il pensait continuer son précédent contrat de travail ;

Attendu que la décision de la chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 22 juin 1982 ( no de pourvoi 78-11.362) produite par l'appelant a été prise au visa de l'article 38 alinéa 1er de la loi du 13 juillet 1967 qui n'est pas applicable au présent litige ; Qu'en tout état de cause, elle n'est pas transposable à l'espèce puisque la Haute juridiction était saisie de la question de la poursuite d'un contrat d'agent commercial alors que le syndic s'était, postérieurement à l'ouverture de la procédure de règlement judiciaire, acquitté de commissions afférentes à une période postérieure à la date d'ouverture de la procédure collective sans avoir fait connaître à l'agent commercial sa décision de poursuivre le contrat ou de le résilier ;

Qu'ABEO, à laquelle s'est substituée SANITEC INDUSTRIES a quant à elle refusé expressément de reprendre le contrat de Monsieur L... et que ce dernier ne peut prétendre avoir cru que ce contrat était continué et avoir été trompé par l'intimée ;

Attendu qu'il ne peut dès lors qu'être jugé que les parties n'étaient pas liées par le contrat d'agent commercial signé par Monsieur L... le 13 mai 2013 ;

Que c'est en conséquence sans fondement que l'appelant entend faire supporter par SANITEC INDUSTRIES des sommes qui lui étaient exclusivement dues par SANITEC antérieurement à la cession d'actifs puisque son contrat d'agent commercial avait pris fin du fait de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de SANITEC et de la cession des actifs prononcée par jugement du 29 avril 2015 ;

Que c'est à raison que le tribunal a retenu que ses prétentions formées envers SANITEC INDUSTRIES, alors que leur fait générateur se situe dans la relation contractuelle qu'il entretenait SANITEC, ne sont pas fondées et qu'il ne peut solliciter qu'auprès du liquidateur à la liquidation judiciaire, après avoir régularisé une déclaration de créance, paiement d'une indemnité compensatrice du fait de la rupture du contrat du 13 mai 2013, d'un préavis au titre de ce même contrat et de commissions dues avant l'ouverture de la procédure collective ;

Attendu que c'est en faisant une exacte appréciation des faits qui leur étaient soumis que les premiers juges ont retenu qu'un contrat d'agent commercial avait été verbalement conclu entre SANITEC INDUSTRIES et Monsieur L... à compter du 30 avril 2015 et jusqu'au 15 juin 2015, bien que les parties ne se soient pas accordées sur le périmètre exact de ce contrat;

Que c'est encore une fois à raison qu'ils ont retenu qu'en l'absence d'accord précis sur le montant des commissions dues, devait être retenu un montant de 8,5% correspondant à celui proposé à Monsieur L... par SANITEC INDUSTRIES dans le projet de contrat refusé et d'ailleurs équivalent à celui antérieurement perçu par l'appelant ;

Que, pour réclamer paiement d'un préjudice moral, Monsieur L... prétend principalement que la rupture brutale par SANITEC INDUSTRIES de son contrat d'agent commercial conclu en 2013 et toujours en cours est fautive ;

Que, pour les motifs sus exposés de l'absence de poursuite de ce contrat, cette argumentation ne peut qu'être écartée ;

Que, pour les mêmes motifs, il ne peut être retenu que SANITEC INDUSTRIES aurait tenté de faire pression sur Monsieur L... pour qu'il renonce à son ancien contrat, puisque celui-ci n'était plus en vigueur ;

Que, sans avoir à entrer en détail dans la discussion de l'argumentation des parties sur le caractère avantageux ou désavantageux du nouveau contrat proposé à Monsieur L..., il ne peut qu'être relevé que les dispositions du nouveau contrat qui étaient proposées à l'appelant ne différaient pas sensiblement des anciennes puisque :
- Monsieur L... reproche sans pertinence à l'intimée d'avoir indiqué, dans sa proposition de contrat, qu'elle pourrait directement conclure des contrats avec les "grands comptes" qui ne se trouvaient pas sur son territoire exclusif, SANITEC INDUSTRIES n'ayant pas modifié les secteurs géographiques exclusifs et non exclusifs de Monsieur L... et s'étant bornée à rappeler qu'elle pouvait directement intervenir dans son secteur non exclusif sans avoir à lui verser de commissions, ce qui était la règle entre les parties auparavant, même si SANITEC n'avait usé que ponctuellement du droit contractuel dont elle disposait de conclure directement certains marchés et que Monsieur L... l'avait contesté sans pertinence ;
- le montant des commissions demeurait inchangé ;

Qu'en l'absence d'éléments démontrant que l'appelant ne pouvait que refuser un contrat qui lui aurait été très désavantageux, ce qui n'apparaît pas être le cas, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu que la rupture des relations contractuelles est imputable par moitié aux deux parties ; qu'en effet SANITEC INDUSTRIES a commis une imprudence en confiant un mandat à Monsieur L... sans conclure auparavant un contrat d'agent commercial et que ce dernier a quant à lui sans fondement entendu imposer à sa nouvelle cocontractante des dispositions contractuelles qui n'étaient plus en vigueur et qui étaient même au-delà de celles de son précédent contrat ;

Qu'il ne peut pas plus être retenu que ce serait l'absence de paiement de commissions qui serait à l'origine de la rupture contractuelle puisque ce n'est qu'ensuite de cette rupture que SANITEC INDUSTRIES a omis de payer ces commissions avant de reconnaître en être redevable devant le juge des référés,

Que, pour ces motifs d'une responsabilité partagée de la rupture, Monsieur L... ne peut réclamer l'indemnisation d'un préjudice moral ;

Qu'il ne peut enfin qu'être relevé que ce n'est pas la rupture d'un contrat de cinq semaines qui a entraîné les préjudices de perte de revenus dont fait état l'appelant mais, comme il l'indique d'ailleurs lui-même, la rupture de son contrat conclu avec SANITEC en 2013 ;

Attendu qu'au regard de la courte durée des relations contractuelles, l'absence de préavis a été entièrement indemnisée par l'octroi d'une somme correspondant à un mois de chiffre d'affaires et que l'indemnité de rupture a été à bon droit fixée à ce même montant ;

Que Monsieur L... a été ainsi entièrement rempli de ses droits par le jugement déféré qui sera entièrement confirmé ;

Attendu qu'il convient d'y ajouter en donnant acte à l'intimée de ce qu'elle se reconnaît redevable de la somme de 86,02 euros au titre d'une commission non versée ;

Attendu que l'appelant, succombant à l'instance d'appel, en supportera les dépens sans qu'il y ait lieu de faire application cependant des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise,

Y AJOUTANT,

DONNE ACTE à la société SANITEC INDUSTRIES de ce qu'elle se reconnaît redevable envers Monsieur M... L... d'une commission de 86,02 euros et LA CONDAMNE en tant que de besoin à la lui payer,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur M... L... aux dépens d'appel.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/032281
Date de la décision : 21/02/2019
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2019-02-21;17.032281 ?
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