COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 31/01/2019
la SCP C... - FIRKOWSKI
la SELARL LUGUET
Me Estelle Y...
la SCP Z... & ASSOCIES
la SCP VALERIE K...
ARRÊT du : 31 JANVIER 2019
No : 49 - 19
No RG 17/02287 - No Portalis
DBVN-V-B7B-FQHP
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLÉANS en date du 06 Juillet 2017
PARTIES EN CAUSE
APPELANTES :
SARL LM ENERGIE
prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège
Timbre fiscal dématérialisé No: [...]
220 Rue de Villecante 45370 DRY
Ayant pour avocat postulant Me Olivier C..., membre de la SCP C... - FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant Me Valérie D..., membre de la SELAS E..., avocat au barreau de PARIS,
Société AIG EUROPE LIMITED venant aux droits de la Société CHARTIS EUROPE LIMITED, dont le siège social est sis The Chartis Building - 58 Fanchurch street - Ec3m 4ab LONDRES (Royaume-Uni),
prise en sa succursale néerlandaise AIG EUROPE NETHERLANDS NV situé Brainpart, KP van der Mandelelaan 50, 3062 MB Rotterdam NETHERLANDS (Pays-Bas) et agissant en la personne son représentant légal domicilié en cette qualité à cette même adresse
Timbre fiscal dématérialisé No: [...]
The Chartis Building - 58 Fanchurch street
Ec3m ab LONDRES
ROYAUME UNI
Ayant pour avocat postulant Me Arthur G... , membre de la SELARL LUGUET , avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant Me Florent H..., membre de la SELARL ADRIEN & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS,
Société ALLIANZ BENELUX N.V. ANCIENNEMENT LA SOCIÉTÉ DE DR OIT NÉERLANDAIS ALLIANZ NEDERLAND CORPORATE N.V. (Société de droit belge) agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège
Timbre fiscal dématérialisé No: [...]
Coolsingel 139
3012 AG ROTTERDAM - PAYS BAS
Ayant pour avocat postulant Me Estelle Y..., avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant Me Marinka I..., membre de la SELARL AMSTEL & SEINE, avocat au barreau de PARIS,
D'UNE PART
INTIMÉS :
Maître Christian J...
pris en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SAS REV'SOLAIRE
Timbre fiscal dématérialisé No:
[...]
défaillant,
Maître C... R.A.M.L
pris ès qualités de liquidateur de la Société ALRACK B.V.
Timbre fiscal dématérialisé No:
[...] - PAYS BAS
défaillant,
SA AXA FRANCE IARD
Timbre fiscal dématérialisé No: [...]
313 Terrasses de l'Arche
[...]
Ayant pour avocat Me Ladislas Z..., membre de la SCP Z... & ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS,
SA SMA - NOUVELLE DENOMINATION DE SAGENA
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Timbre fiscal dématérialisé No: [...]
[...]
Ayant pour avocat postulant Me Valérie K..., membre de la SCP VALERIE K... , et ayant pour avocat plaidant Me Marie M..., membre de la SCP RODIER & HODE, avocat au barreau de PARIS,
Société ALRACK B.V prise en la personne de son représentant légal domicilié en
cette qualité audit siège
Timbre fiscal dématérialisé No:
Eindhoven Zandven 10
5508 RN VELDHOVEN PAYS-BAS
défaillante,
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 21 Juillet 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 14 août 2018
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats à l'audience publique du 13 SEPTEMBRE 2018, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité, en son rapport, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,
Greffier :
Madame Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats, et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé lors du prononcé,
ARRÊT :
Prononcé le 31 JANVIER 2019 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE :
En 2011, la S.A.R.L. LM ENERGIE, qui a pour activité la production et la vente d'énergie électrique, a fait réaliser par la société REV'SOLAIRE, moyennant le prix de 1.963.553 euros H.T, soit 2.348.409,39 euros TTC, une installation photovoltaïque comportant deux centrales de production composées au total de 2275 panneaux fabriqués par la société SCHEUTEN SOLAR (SCHEUTEN), lesquels ont été posés sur la toiture de sept hangars agricoles situés à DRY (45).
L'étude technique réalisée par REV'SOLAIRE prévoyait que l'installation devait produire 483.736 kWh par an pour un chiffre d'affaires annuel estimé à 291.092 euros.
REV'SOLAIRE bénéficiait d'une assurance responsabilité civile accordée par SAGENA, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société anonyme SMA, tandis que LM ENERGIE avait souscrit auprès de AXA France IARD (AXA) une assurance bris de machine couvrant les centrales photovoltaïques.
A la suite d'une visite de contrôle, REV'SOLAIRE a, par courrier du 26 octobre 2012, informé LM ENERGIE de la nécessité de mettre les panneaux hors tension en raison d'un risque d'incendie causé par un vice du matériel.
Par ordonnance du 20 décembre 2012, le président du tribunal de commerce d'Orléans, statuant en référé sur saisine de LM ENERGIE, a ordonné une mesure d'expertise judiciaire au contradictoire de REV'SOLAIRE, SAGENA, AXA, et CHARTIS EUROPE, devenue AIG EUROPE NETHERLANDS (AIG), assureur de la société SCHEUTEN fabricant des panneaux. Cette expertise a ensuite été étendue à la société ALRACK B.V. (ALRACK), sous-traitante de SCHEUTEN pour la fabrication des boîtes de jonction équipant les modules, et à son assureur, ALLIANZ BENELUX N.V (ALLIANZ), ainsi qu'à Maître J..., désigné liquidateur judiciaire de la société REV'SOLAIRE par ordonnance en date du 9 juillet 2014.
REV'SOLAIRE a été placée en redressement judiciaire et cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Orléans en date du 9 juillet 2014 qui a désigné Maître Christian J... en qualité de liquidateur.
Monsieur O..., désigné en qualité d'expert, a déposé son rapport le 9 septembre 2015 après que des travaux de remplacement des panneaux soient intervenus sous sa supervision entre le 14 avril et le 16 mai 2014.
Il a conclu que les problèmes constatés provenaient des boîtes de jonction "SOLEXUS" fabriquées par ALRACK pour équiper les panneaux. Il a en effet relevé que l'intégralité des 2275 panneaux photovoltaïques SCHEUTEN mis en oeuvre sur l'ensemble des 7 bâtiments étaient dotés de boîtiers de connexion SOLEXUS montés en sous face des panneaux dont plusieurs ont été retrouvés détériorés suite à des échauffements internes, les liaisons mâles femelles, + et -, des cartes électroniques de ces ensembles étant, à plus ou moins brève échéance, génératrices de "fretting corrosion" dont l'évolution était à même d'initier des mises à feu. Il a souligné que les malfaçons dans la conception et la réalisation des boîtiers étaient sérielles, puisque constatées sur l'ensemble des boîtiers litigieux dont les défauts étaient démontrés tant par le laboratoire IC 2000 que par les conclusions unanimes de divers spécialistes saisis dans le cadre d'autres litiges. L'expert a préconisé le remplacement des panneaux et a analysé le préjudice subi par LM ENERGIE, y compris ses pertes d'exploitation.
Le 3 décembre 2015, LM ENERGIES a assigné AXA, Maître J..., ès qualités, et SAGENA devant le tribunal de commerce d'Orléans aux fins de les voir condamner à lui payer 438.150,27 euros au titre des frais de remplacement des modules, 210.000 euros au titre des pertes de recettes générées par les pertes de production, 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens comprenant les frais d'expertise d'un montant de 29.156,97 euros.
SMA a assigné AIG, ALRACK et ALLIANZ en intervention forcée et en garantie et, la liquidation judiciaire d'ALRACK ayant été prononcée le 12 avril 2016, a appelé en la cause le liquidateur de cette société Maître C....
Par jugement en date du 6 juillet 2017 le tribunal a dit que :
- LM ENERGIE est recevable en ses demandes formulées à l'encontre d'AXA,
- son action n'est pas prescrite et qu'elle a intérêt et qualité à agir,
-les conditions générales et particulières de la police d'assurance AXA remises à l'assurée doivent s'appliquer.
Et il a :
-condamné AXA à payer à LM ENERGIE 411.000 euros au titre du remplacement des panneaux défectueux, déduction faite de la franchise contractuelle et 43.328 euros au titre des dommages et pertes de recettes subis, déduction également faite de la franchise contractuelle,
-débouté LM ENERGIE de sa demande de remboursement des factures au titre des dommages immatériels et charges d'exploitation afférents au sinistre,
-dit que REV'SOLAIRE et son assureur SMA ont engagé leur responsabilité décennale et leur responsabilité contractuelle,
-jugé que SMA doit garantie à Maître Christian J... ès qualités,
-déclaré l'action subrogatoire d'AXA à l'encontre de la société SMA recevable et fondée pour le règlement de 411.000 euros et de 43.328 euros,
-jugé SCHEUTEN et ALRACK responsables in solidum des conséquences dommageables des vices de fabrication des panneaux,
-déclaré l'action subrogatoire de SMA à l'encontre de SCHEUTEN et AIG et d'ALRACK et ALLIANZ BENELUX N.V recevable et bien fondée,
- condamné solidairement AIG et ALLIANZ à payer à LM ENERGIE la somme de 411.000 euros, au titre du remplacement des panneaux défectueux et celle de 43.328 euros au titre des dommages et pertes de recettes subis, déduction faite des franchises contractuelles,
- écarté l'application du droit néerlandais et dit n'y avoir lieu en conséquence à surseoir à statuer dans l'attente de l'identification de l'ensemble des victimes concernées par le même sinistre couvert par les assureurs,
-dit que la question du droit à suspension du paiement de la somme due à LM ENERGIE par les assureurs des sociétés SCHEUTEN et ALRACK B.V. se posera éventuellement dans un deuxième temps dans le cadre de l'exécution du jugement, qu'il a déclaré commun à Maître C... ès qualités,
-condamné in solidum AIG et ALLIANZ à garantir AXA et SMA de l'ensemble des sommes auxquelles elles sont redevables en application de sa décision,
-débouté les parties de leurs autres demandes contraires ou supplémentaires,
-condamné AXA à payer à LM ENERGIE la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné SMA à payer à LM ENERGIE la somme de 3.000 euros sur ce même fondement,
-condamné AIG EUROPE et ALLIANZ à payer à LM ENERGIE 3.000 euros de ce même chef,
-dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire,
-condamné AIG et ALLIANZ aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise et les frais de greffe.
ALLIANZ a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 21 juillet 2017, LM ENERGIE par déclaration en date du 8 août 2017 et AIG par déclaration en date du 22 août 2017 et les procédures ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 25 septembre 2017.
Maître J... et Maître C... , tous deux assignés à la personne d'une employée habilitée à recevoir l'acte, n'ont pas constitué avocat. Le présent arrêt sera donc réputé contradictoire.
I/ ALLIANZ poursuit l'infirmation du jugement déféré en demandant à titre principal à la cour de débouter les sociétés SMA, LM ENERGIE, AXA et AIG de l'intégralité de leurs demandes formées à son encontre en sa qualité d'assureur d'ALRACK.
Si la cour retenait cependant la responsabilité -qui ne pourrait alors qu'être partagée- de SCHEUTEN et d'ALRACK, et sa couverture, elle lui demande de retenir que le droit applicable à la police d'assurance lui interdit en l'état tout paiement, de prononcer en conséquence le sursis à paiement dans l'attente de la fixation définitive des réclamations des victimes et demandeurs en garantie éligibles à la couverture de la police afin de pouvoir fixer définitivement le montant dû sur une base de prorata. Et elle rappelle ses plafonds de garantie contractuels opposables au tiers.
En tout état de cause, elle sollicite condamnation in solidum de SMA, AXA et AIG à lui payer 8.000 euros pour procédure abusive et 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de SMA ou toute autre partie succombante, in solidum en cas de pluralité, aux entiers dépens de première instance, comprenant les frais de référé et d'expertise judiciaire ainsi que d'appel, ainsi qu'à supporter les dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Y....
Après avoir tout d'abord rappelé qu'ALRACK est une société néerlandaise qui fournissait à SCHEUTEN, de façon exclusive, des boîtiers de jonction (ou boîtiers de raccordement ) pour équiper les modules solaires,
1/ elle fait tout d'abord valoir que sa garantie ne peut jouer qu'en cas de responsabilité de son assurée, laquelle n'est pas établie.
Elle soutient en effet que si l'expert conclut à des défauts de conception et de fabrication, cette conclusion ne peut être retenue puisqu'ALRACK :
a/ n'est pas le concepteur du produit défaillant : qu'en effet sa mission a été constamment limitée par SCHEUTEN, détentrice des brevets de fabrication, à une simple tâche de réalisation-exécution, sans possibilité d'initiative dans la conception ; que son assurée n'a bénéficié d'aucune autonomie dans la fabrication des boîtiers ; qu'elle a exécuté les directives de SCHEUTEN sous la surveillance et la supervision étroite de cette dernière ; que c'est bien la conception même du boîtier de jonction, avec la position des différents composants, qui est à l'origine des dysfonctionnements ; que le boîtier SOLEXUS en cause est la simple copie d'un boîtier précédemment conçu par SCHEUTEN, le boîtier KOSTAL, qui pose les mêmes problèmes lorsqu'il équipe les panneaux ; que SCHEUTEN, concepteur et fabricant de l'ensemble module/boîtier de jonction, était détentrice de son brevet. Et elle insiste sur le fait que les boîtiers SOLEXUS ne se trouvaient pas en vente libre sur le marché et étaient exclusivement montés à l'arrière des modules photovoltaïques de SCHEUTEN. Elle souligne que le contrat liant SCHEUTEN à ALRACK indique clairement que cette dernière est soumise aux instructions de sa cocontractante, ce qui est confirmé par l'exécution des relations contractuelles ainsi qu'en témoignent les nombreux échanges de courriels entre 2008 et 2010, lesquels établissent que SCHEUTEN donnait des directives précises à ALRACK et dirigeait tant la conception que la fabrication du boîtier ; que les parties avaient donc conclu un contrat d'entreprise dans lequel les travaux de réingénierie conduits par ALRACK étaient sous la supervision étroite de SCHEUTEN qui avait seule un pouvoir décisionnaire. Et elle précise que, dans un tel contrat, l'exécutant ne peut être tenu que de ses propres fautes dans l'exécution du travail qui lui a été confié et qu'il n'est aucunement démontré qu'ALRACK a commis une faute d'une telle nature.
b/ Elle prétend ensuite que la responsabilité du fait des produits défectueux prévue par les articles 1245 et suivants du code civil n'est pas applicable en l'espèce puisque l'article 1245-1 du même code précise qu'une telle responsabilité ne joue que pour la réparation du dommage qui résulte d'une atteinte à la personne ou pour celle du dommage, supérieur à un montant déterminé par décret, qui résulte d'une atteinte à un bien autre que le produit défectueux lui-même et qu'en l'espèce il n'est démontré aucun dommage causé à des biens autres que les biens fabriqués par ALRACK ;
c/ Elle soutient également que, contrairement à l'argumentation de SMA fondée sur les articles 1382 et 1383 du code civil, sans d'ailleurs expliciter les négligences et imprudences commises, ALRACK n'a commis aucune faute dans la fabrication des boîtiers, le seul reproche qui peut être adressé à l'entrepreneur étant en effet une mauvaise exécution des directives reçues de la part du donneur d'ordre, et non une conception défaillante ; que la responsabilité délictuelle d'ALRACK en raison de manquements à ses obligations contractuelles envers SCHEUTEN n'est dès lors pas engagée envers les tiers.
d/A titre infiniment subsidiaire, elle sollicite un partage de responsabilité entre SCHEUTEN et ALRACK.
2/ Elle prétend ensuite que la police d'assurance souscrite par ALRACK ne couvre pas le sinistre ; qu'il s'agit en effet d'une police responsabilité civile, soumise au droit néerlandais comme le précise son article 9, qui ne peut être mise en jeu en l'absence de dommages à des biens autres que les boîtiers SOLEXUS fabriqués par son assurée ; que cette police est limitée aux dommages aux personnes et aux biens – autres que les biens de l'assuré - causés par l'assuré à des tiers, ou du fait du produit de son assuré ; qu'elle ne couvre pas les pertes de production ni le dommage aux produits fabriqués par ALRACK ou le remplacement de ceux-ci ainsi que le précisent les articles 1.7, 2.1 et 3 des conditions générales. Et elle souligne que Monsieur O..., dans son rapport final, n'a, après examen attentif de l'installation, noté que des dommages à certains boîtiers Solexus ; que tant le juge néerlandais des référés que le juge du fond du tribunal d'Amsterdam que deux tribunaux français ont déjà retenu cette limitation de garantie ; que, s'il est indiqué que l'intégralité des panneaux a dû être changée, et non seulement les boîtiers SOLEXUS, rien ne démontre que les panneaux remplacés auraient été sinistrés. Elle affirme qu'AXA confond l'origine du dommage (la combinaison boîtier/panneau) et le dommage lui-même (subi pour quelques boîtiers SOLEXUS) et ne saurait sérieusement soutenir que la seule marque retrouvée sur le système de bac acier de la toiture constitue un dommage indemnisable, aucune autre trace n'ayant été découverte sur la toiture des 7 bâtiments, laquelle n'est par ailleurs pas devenue poreuse puisque le système bac acier assure une parfaite étanchéité et elle affirme que, si des dommages ont été causés à la toiture lors de travaux de réparation, ce sont ces travaux de réparation qui sont seuls en cause.
Elle fait valoir qu'il ne peut pas plus être soutenu que les frais de remplacement des panneaux photovoltaïques seraient des coûts de mesures de sauvegarde prévus par l'article 1.11.de sa police puisque cet article définit ces mesures comme étant celles prises par ou au nom du souscripteur ou d'un assuré qui s'imposent raisonnablement pour éviter tout risque de dommage imminent dont -s'il s'était produit- l'assuré serait responsable et qui serait couvert par l'assurance, ou comme celles prises pour limiter ce dommage ; qu'en effet les trois conditions cumulatives posées par ce texte ne sont pas réunies puisque le remplacement des panneaux photovoltaïques n'a pas été effectué par ALRACK et qu'il n'est pas démontré que le dommage imminent qui se serait éventuellement produit était couvert par l'assurance responsabilité civile de cette société. Elle souligne enfin que sa police d'assurance ne refuse pas toute couverture des préjudices immatériels mais la soumet à des conditions qui ne sont pas remplies en l'espèce.
3/ A titre infiniment subsidiaire elle affirme qu'en application du droit néerlandais interdisant en l'état tout paiement par l'assureur, la cour doit prononcer l'interdiction et le sursis de tout paiement dans l'attente de la fixation définitive des réclamations des victimes et demandeurs en garantie éligibles à la couverture de la police d'ALLIANZ afin de pouvoir fixer définitivement le montant dû sur une base de prorata et elle souligne que la cour d'appel de Limoges a ainsi statué dans deux arrêts en date du 6 février 2018.
II/ LM ENERGIE demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en ses dispositions lui faisant grief et le confirmer pour le surplus, d'évaluer en conséquence son préjudice aux sommes de 442.922,57 euros au titre des frais et coût de remplacement des modules, de 210.000 euros au titre de la perte de recettes générée par les pertes de production et de 51.136,90 euros correspondant aux charges d'exploitation afférentes au sinistre et de condamner :
- AXA à lui payer 442.922,57 euros au titre du remplacement des modules,
- SMA à lui verser cette même somme,
- AIG et ALLIANZ in solidum entre elles et avec SMA à lui payer cette même somme, - AXA à lui payer 210.000 euros correspondant à sa perte de recettes générée par les pertes de production,
- SMA à lui verser cette même somme,
- AIG et ALLIANZ in solidum entre elles et avec SMA à lui payer cette même somme,
- SMA à lui payer la somme de 51.136,90 euros HT correspondant à ses charges d'exploitation afférentes au sinistre,
- AIG et ALLIANZ in solidum entre elles et avec SMA à lui payer cette même somme,
et de dire qu'elle pourra recouvrer les condamnations prononcées contre chacun des assureurs sous la seule limite du montant de son préjudice évalué par la cour.
Elle sollicite en outre la capitalisation des intérêts et la condamnation d'AXA et de SMA à lui verser chacune la somme de 15.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel incluant les frais d'expertise.
Elle fait valoir que l'expertise judiciaire démontre que les désordres affectant la centrale proviennent des panneaux livrés par SCHEUTEN en raison des défectuosités des boîtes de jonction fabriquées par ALRACK. Elle soutient que la dangerosité de l'installation est parfaitement établie, ce qui nécessite la dépose des panneaux et leur remplacement et elle détaille ses préjudices matériels et immatériels.
1/En ce qui concerne ses demandes formées envers AXA, elle fait valoir que le sinistre est dû à la défaillance des modules intégrés dans ses toitures et que son assurance garantit les dommages pouvant résulter d'événements d'origine interne : défaut de conception, de construction, vice de la matière, et elle affirme que son assureur a produit des conditions générales différentes de celles qui lui ont été remises et qu'elle communique devant la cour.
a/ Sur la recevabilité de ces demandes : Elle soutient qu'aucune prescription ne peut lui être opposée puisqu'aux termes de l'article L.114-2 du code des assurances, la prescription est interrompue par l'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception adressée par l'assuré à l'assureur ; qu'elle a engagé son action le 3 décembre 2015 alors que l'ordonnance de référé organisant l'expertise avait été rendue le 20 décembre 2012 et qu'elle a adressé à AXA une lettre recommandée reçue par son assureur le 27 octobre 2014 qui rappelait expressément l'effet interruptif de ce courrier.
Elle précise également qu'elle a bien qualité à agir puisque, si la société OEUF 2000 était la signataire originelle des contrats de vente d'énergie à ERDF, ces conventions lui ont été transférées par avenants parfaitement valables du 7 décembre 2012, l'article 2 de ces avenants précisant qu'elle est substituée dans tous les droits et actions de l'ancien producteur d'énergie à compter du 7 septembre 2012. Et elle souligne que l'expert a évalué les pertes à compter du 8 septembre 2012 et qu'elle ne réclame donc aucunement l'indemnisation des pertes de recettes d'OEUF 2000. Elle affirme être d'une parfaite bonne foi, la signature des avenants ayant été retardée pour des raisons indépendantes de sa volonté qu'elle détaille et elle précise que c'est ERDF qui a fixé la date de la prise d'effet des avenants à la date anniversaire de la mise en service de l'installation. Elle rappelle enfin que l'intérêt à agir s'apprécie au jour de l'introduction de la demande en justice, soit le 3 décembre 2015.
b/ Sur l'étendue de la garantie due par son assureur :
* Elle affirme que la police d'assurance garantit globalement son installation solaire photovoltaïque contre toute détérioration ou destruction soudaine et accidentelle ainsi que le vol et elle fait valoir que cette installation est devenue inexploitable en raison des détériorations matérielles qui ont affecté les boîtiers intégrés aux panneaux ; que si seuls certains d'entre eux ont été examinés, c'est parce qu'il s'agissait d'un échantillonnage mais que tous les panneaux sont affectés du même désordre puisque tous sont pourvus des mêmes boîtiers sinistrés ; que le dommage est dès lors certain et non hypothétique et qu'elle n'a pas à attendre que l'intégralité de l'installation prenne feu pour solliciter réparation.
*Elle fait ensuite valoir que les conditions de garantie n'exigent pas un dommage soudain mais un fait générateur soudain ; qu'en l'espèce, si le dommage de perte d'exploitation s'est aggravé progressivement, les panneaux ont bien fait l'objet d'une dégradation soudaine ; que les dommages existaient à la date de déclaration du sinistre intervenue le 30 octobre 2012, l'expert ayant relevé le premier mars 2013 que la production était impactée à la baisse depuis août 2012, ce qui était révélateur de la destruction de plusieurs boîtiers, et ayant répondu en ce sens à un dire d'AXA ; que cette dernière opère une confusion constante entre le dommage, qui était bien réalisé, et ses conséquences possibles, qui ne sont pas toutes survenues grâce à l'arrêt de l'installation.
* Elle soutient qu'AXA ne peut invoquer les exclusions de garantie prévues au contrat et relatives :
- aux frais destinés à remédier à des dysfonctionnements puisque l'article L. 112-4 du code des assurances prévoit que"les clauses des polices édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents" ; qu'en l'espèce, cette exclusion n'est aucunement visible et ne figure pas dans le chapitre intitulé "exclusions générales"; qu'elle n'a pas un caractère formel et limité puisqu'elle vise "les dysfonctionnements" sans autre précision.
- aux dommages dus à l'incendie puisque cette exclusion est prévue dans un avenant du 14 novembre 2012 unilatéralement imposé par AXA postérieurement à sa déclaration de sinistre et à la survenance de celui-ci. Elle souligne en outre que les conditions générales de la police d'assurance visent les effets du courant électrique (échauffement, court circuit, surtension ou chute de tension, surintensité, formation d'arc, défaillance d'isolement) ; que le sinistre est en l'espèce dû à un échauffement et non à un incendie.
*Elle fait par ailleurs valoir qu'il ne peut lui être reproché d'avoir manqué à l'obligation de conservation du bien en continuant à faire fonctionner l'installation malgré les préconisations de l'expert puisque d'une part et contrairement à ce que soutient AXA, les dégradations étaient antérieures à ces préconisations, d'autre part les panneaux étaient atteints d'un vice résultant de leur conception même et que leur remplacement total était en tout état de cause inévitable, le maintien de l'installation en service pendant quelques mois ne modifiant pas cette situation mais diminuant au contraire le préjudice de perte d'exploitation et permettant d'éviter un dépôt de bilan.
c/ Sur son indemnisation :
Elle fait valoir que la seule solution propre à remédier au dommage est le remplacement de la totalité des panneaux pour assurer la pérennité de l'exploitation sans compromettre sa sécurité ; qu'AXA en a d'ailleurs parfaitement conscience puisqu'elle n'a accepté de maintenir sa garantie qu'à la condition de justifier d'une remise en conformité de l'installation ;
* Elle soutient être fondée à réclamer l'intégralité des frais exposés lors de cette mise en conformité et reproche au tribunal d'avoir écarté les frais relatifs aux factures de son maître d'oeuvre, Monsieur Q..., en retenant qu'elle n'aurait pas souscrit la garantie "frais supplémentaires" alors que les frais supplémentaires sont définis par AXA comme ceux au-delà des charges qui auraient existé en l'absence de dommage, qui sont engagés d'un commun accord avec elle, pour poursuivre l'activité en cas d'interruption de fonctionnement de l'installation pendant la période d'indemnisation nécessaire à sa réparation ou à son remplacement, tandis que les frais concernant Monsieur Q... sont nécessaires au remplacement de l'installation sinistrée ; que ce prestataire, personnel qualifié, avait une parfaite connaissance de l'installation puisqu'il avait pris part à toutes les étapes de sa construction et qu'il n'a jamais été son salarié ;
* Elle prétend également que les conditions particulières de la police n'indiquent pas que ne sont pris en compte que les 12 premiers mois de perte de recettes mais se bornent à préciser que la durée maximale de prise en charge de ces pertes est de 12 mois ; que les pertes ont perduré 21 mois et qu'il convient de faire un prorata sur 12 mois de l'intégralité de la perte de 210.000 euros subie et de lui allouer en conséquence de ce chef 120.000 euros et non 43.328 euros. Elle rappelle que les conditions particulières définissent les pertes de recettes comme « le montant de la rémunération qui aurait été facturée au distributeur d'électricité si [l']installation solaire n'avait pas été sinistrée" et affirme que la méthode de calcul retenue par l'expert correspond parfaitement à cette définition.
2/ En ce qui concerne ses demandes formées envers SMA, elle fait valoir qu'elle dispose d'une action directe envers cet assureur ;
a/ Que REV'SOLAIRE a engagé sa responsabilité décennale et qu'en application des dispositions de l'article 1792 du code civil, elle est responsable de plein droit des dommages affectant l'installation ; que l'article 1792-2 du même code étend cette responsabilité aux éléments d'équipement qui font indissociablement corps avec l'ouvrage ; que si l'obligation d'assurance est exclue pour les installations photovoltaïques, les constructeurs de ces centrales peuvent néanmoins souscrire une assurance facultative, ce qu'a fait Rev'Solaire. Elle prétend que la centrale photovoltaïque est un ouvrage en soi ; qu'elle a nécessité des travaux lourds et que les désordres compromettent sa solidité et la rendent impropre à sa destination ; que les pouvoirs publics ont retenu que la pose sur toiture d'une telle installation est couverte par la garantie décennale ; que l'installation est intégrée au bâti et en assure la couverture et que SMA a d'ailleurs accepté de couvrir les travaux par une assurance de garantie décennale, laquelle ne distingue pas entre les dommages matériels et immatériels.
b/ En ce qui concerne les dommages immatériels, elle fait valoir que le tribunal a appliqué à SMA des stipulations du contrat conclu entre LM ENERGIE et AXA, notamment en ce qui concerne la franchise et la limitation dans le temps de l'indemnisation, et indique que, conformément aux écritures de SMA, elle inclut désormais dans les dommages matériels les frais de facturation de SOLEIL EN TÊTE, ce qui doit conduire à retenir que l'ensemble des dommages matériels s'élève à la somme de 442.922,57 euros. Elle souligne que SMA ne conteste pas les montants retenus par l'expert au titre des pertes de production pour 208.538 euros et soutient que le poste de préjudice relatif à ses charges d'exploitation s'élève à 51.136,90 euros. Elle fait valoir qu'elle n'a bénéficié d'aucune réduction ou défiscalisation particulière ; que les frais d'assurance pour le chantier de remplacement des modules entrent dans le préjudice indemnisable au titre des dommages immatériels puisqu'ils sont directement liés au sinistre ; qu'elle a été contrainte de souscrire une nouvelle assurance en couverture des risques d'incendie et d'explosion suite à la décision unilatérale d'AXA d'exclure ces sinistres par avenant du 14 novembre 2012 ; que ses frais de conseil se justifient enfin par la nécessité d'avoir la certitude que les travaux de remplacement sont conformes aux exigences contractuelles imposées par EDF pour maintenir le contrat d'achat.
c/ Elle soutient que, contrairement à ce que prétend SMA, les travaux de REV'SOLAIRE ne sortent pas de l'activité qu'elle avait déclarée et que les indemnités dues ne doivent dès lors pas être l'objet d'une réduction proportionnelle en vertu de l'article 113-9 du code des assurances pour tenir compte du taux des cotisations qui auraient été dues si les risques avaient été complètement et exactement déclarés, l'assureur invoquant en outre l'application d'un coefficient réducteur de 0.6008/0.666 aux indemnités à allouer sans justifier d'un tel taux ; qu'il ne peut être soutenu que les travaux réalisés par REV'SOLAIRE ont concerné une surface de 3.367 m2 alors que la surface de travaux assurée était de 1.000 m2 puisque, par surface de 1.000 m2, on entend la surface de chaque toiture équipée ; qu'en l'espèce, il n'existe pas une toiture de 3.367 m2 mais sept toitures de surface chacune inférieure à 1.000m2 ; qu'il n'y a donc pas de modification des activités ni de modification de l'appréciation du risque ; que de même il ne peut être prétendu que le procédé d'intégration ne visait pas expressément les modules SCHEUTEN puisque les activités déclarées sur l'attestation comme dans les conditions particulières de la police ne visent aucune marque de module particulier.
d/ A titre subsidiaire elle demande à la cour de constater que SMA reconnaît l'application de l'assurance spécifique intercalaire pour les dommages matériels et de l'assurance responsabilité civile professionnelle pour les dommages immatériels.
e/ Elle reproche également au tribunal d'avoir déclaré recevable et fondé le recours subrogatoire d'AXA à l'encontre de SMA mais de n'avoir pas statué sur son action directe envers cet assureur alors que cette dernière prime sur le recours subrogatoire des assureurs entre eux.
3/ En ce qui concerne ses demandes formées envers AIG et ALLIANZ : Elle rappelle qu'elle a agi à l'origine contre AXA et SMA et que AIG et ALLIANZ ont été appelées en cause par cette dernière à titre récursoire et elle soutient que ce recours récursoire ne peut en rien affecter ses droits contre AXA, SMA et AIG qui ne pourront exercer leurs propres recours récursoires qu'une fois qu'elle sera elle-même indemnisée. Elle fait également valoir que le sursis à paiement sollicité par ALLIANZ ne lui est pas opposable dans ses rapports avec AXA et SMA.
Elle prétend enfin que SMA ayant fait le choix d'assigner AIG et ALLIANZ, elle est elle-même fondée à demander la condamnation solidaire de ces deux assureurs.
III / AIG conclut à l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a prononcé condamnation à son encontre. Elle demande à titre principal à la cour de débouter LM ENERGIES, AXA et SMA de toute demande d'indemnisation formulée à son encontre et de la mettre hors de cause. A titre subsidiaire, elle lui demande de retenir que la police d'assurance limite le montant de la garantie des préjudices financiers à la somme de 1.000.000 euros pour l'ensemble des réclamations relatives au sinistre sériel SCHEUTEN ; qu'en l'état, le montant global du «sinistre sériel SCHEUTEN » n'est pas établi ; qu'au regard de la loi néerlandaise, elle se trouve contrainte de suspendre le paiement des indemnités pouvant être réclamées par des tiers au titre des frais de montage et d'installation des panneaux ainsi qu'au titre des préjudices financiers jusqu'à ce que la part proportionnelle de chaque tiers lésé ait pu être établie, et demande en conséquence à être autorisée à suspendre le paiement de l'indemnité au titre des préjudices allégués par la société SMA jusqu'à ce que la part proportionnelle de chaque victime du sinistre sériel soit fixée. Encore subsidiairement elle se prévaut du plafond de garantie stipulé par la police. A titre encore plus subsidiaire, elle sollicite la condamnation d'ALLIANZ à la relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre au profit de SMA et de LM ENERGIE. En tout état de cause, elle réclame paiement, par tout succombant, d'une indemnité de procédure de 15.000 euros.
Elle reproche au tribunal de n'avoir pas fait application des limites et exclusions de garantie prévues par la police souscrite auprès d'elle ainsi que des conditions d'application de la police selon la loi néerlandaise qui la gouverne (1) et d'avoir omis de statuer sur l'appel en garantie qu'elle avait formé à l'encontre d'ALLIANZ, ès qualités d'assureur d'ALRACK, concepteur et fabricant des boîtiers de jonction défectueux (2).
1/ Elle fait valoir que la police d'assurance a été souscrite par SCHEUTEN aux Pays Bas, auprès d'une société de droit néerlandais par une société elle aussi de droit néerlandais et que l'article 14 des conditions générales de la police précise que"Le droit des Pays Bas s'applique à la présente assurance" ;
a/ Elle soutient que la loi du for (loi interne de la juridiction saisie) est applicable à la procédure tandis que la loi du contrat régit les problématiques de prescription, résiliation et de résolution du contrat ; que la loi applicable au contrat d'assurance, même dans le cadre d'une action directe d'un tiers non partie au contrat, est dès lors la loi néerlandaise.
Elle relève que plusieurs tribunaux saisis du même litige sériel ont jugé en ce sens et souligne qu'elle produit une note du cabinet NAUTADUTHIL, avocat à Rotterdam, constituant un certificat de coutume.
b/ Elle demande à la cour de faire l'application des exclusions de garantie de la police et
-Prétend qu'est exclue la garantie du produit livré, et que ne peut donc lui être réclamé le coût des panneaux photovoltaïques en application des articles 4.4.1 des conditions générales qui ne prévoient pas la couverture des dommages à des biens livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité et de l'article 4.4.2.1 des mêmes conditions générales qui exclut le remplacement, la correction, la réparation ou le rappel de biens livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité ;
Que cette exclusion concerne les dommages subis par les biens livrés par l'assuré, à savoir le coût de remplacement des panneaux photovoltaïques endommagés mais que sont garantis les dommages causés par les produits livrés, en l'espèce les frais de démontage des anciens panneaux et d'installation des panneaux de remplacement.
Et, bien qu'elle sollicite l'application de la loi néerlandaise, elle souligne que la jurisprudence française confirme la validité de ces clauses d'exclusion.
-Elle soutient en réponse que le coût de remplacement des panneaux ne correspond ni à des frais exposés en vue de prévenir ou limiter un préjudice au sens de l'article 1.7 de la police ni à des frais de sauvetage au sens de l'article 7:957 du code civil néerlandais ; qu'en effet la première mesure préconisée par l'ensemble des experts judiciaires commis pour les désordres sériels n'était pas le remplacement des panneaux, mais l'arrêt de l'installation photovoltaïque ; que le remplacement des panneaux n'est donc qu'une mesure réparatoire qui est intervenue après la mise à l'arrêt de l'installation, et elle souligne que l'article 1.7.2 de la police précise que ne sont pas comptés au titre des frais exposés en vue de prévenir ou de limiter un préjudice les frais afférents à des mesures prises par l'assuré ou en son nom après que le danger imminent de préjudice a disparu et ceux qui ont été exclus de la couverture en un autre endroit de la police, ce qui est le cas des biens livrés par l'assuré, qui sont expressément exclus à l'article 4.4.1 ;
-Elle rappelle l'argumentation de SMA et AXA qui prétendent que cette exclusion n'est pas applicable lorsque les frais de rappel peuvent être considérés comme des frais au sens visé à l'article 1.7 de la police qui dispose que « seront considérés comme des frais exposés en vue de prévenir ou limiter un préjudice les frais supplémentaires afférents à des mesures plus ou moins spéciales prises par un assuré ou en son nom et qui ont été proposées de manière raisonnable tant relativement à leur portée que relativement à la nécessité correspondante afin de prévenir ou de limiter le danger imminent de préjudice et qui n'auraient pas été prises si le danger imminent de préjudice ne s'était pas concrétisé ». Et qui font valoir que l'article 3.2.3.3. des conditions générales de la police couvrent les frais exposés en vue de prévenir ou de limiter un préjudice tels que définis à l'article 1.7, dont les dommages aux biens également en jeu. » . Mais elle souligne que ne sont couverts dans ce cas que les frais de rappel, lesquels n'ont pas été exposés en l'espèce.
- Elle soutient que l'application de l'article 7:957 § 5 du code civil néerlandais, dont se prévaut la société SMA, est conditionnée par la jurisprudence et la doctrine néerlandaise à cinq conditions parmi lesquelles celles :
* que les frais de sauvetage engagés concernent un risque imminent, ce qui n'était pas le cas puisqu'il suffisait de mettre à l'arrêt l'installation pour supprimer tout risque et elle souligne que les frais de remplacement des panneaux pour lesquels sa garantie est recherchée ont été engagés deux ans après la découverte du sinistre, ce qui suffit pour démontrer qu'il ne s'agissait pas de prévenir un risque imminent,
* que ces mesures soient prises par l'assuré ou le souscripteur mais qu'en l'espèce, elles ont été décidées par des tiers au contrat,
Et elle s'en rapporte à la note du cabinet néerlandais NAUTHADUTHIL en date du 15 décembre 2016 quant à l'application de l'article 7:957 du code civil néerlandais.
- Elle affirme que l'article C.9 de la police ne garantit pas plus le coût des panneaux photovoltaïques puisqu'il concerne les seuls frais de « montage et d'installation » en des termes qu'elle détaille et qui excluent tout frais de remplacement. Elle précise que le d) de cet article qui garantit la fourniture renouvelée des matériaux en remplacement des matériaux précédemment éliminés concerne les matériaux éliminés lors de la dépose et de la repose puisque l'article C9 précise clairement qu'il ne vise que les frais relatifs à cette dépose et à cette pose, et qu'il rappelle expressément, dans son paragraphe 7, que sont exclus de cette garantie les produits livrés ; que l'article C9 ne déroge donc pas aux dispositions de l'article 4.2.1 des conditions générales de la police qui excluent le coût du produit livré lui-même.
- Elle fait ensuite valoir que les frais de montage et d'installation ne sont plus garantis après un délai de 2 ans ainsi que le prévoit le paragraphe 5 de l'article C9 aux termes duquel la demande d'indemnisation doit se rapporter à des produits fabriqués et livrés après la date d'entrée en vigueur de la couverture et pour lesquels les frais correspondants ont été exposés dans un délai de 2 ans après que ces produits ont été livrés ; qu'en l'espèce l'installation a été mise en service le 7 septembre 2011 et que les nouveaux panneaux ont été posés entre le 14 avril 2014 et le 16 mai 2014, soit nécessairement plus de deux années après la date de livraison et de pose.
Elle soutient que ce délai, étant contractuel, n'a pu être interrompu ou suspendu par la procédure de référé-expertise et qu'il n'est pas contraire aux dispositions d'ordre public du code civil néerlandais relatives à la garantie des frais de sauvetage puisqu'elle a démontré que les frais de montage et d'installation ne sauraient être assimilés à des frais de sauvetage au sens du droit néerlandais, ce qui prive de portée l'avis donné par Maître R... S... à la demande de SMA.
-Elle prétend que ce délai ne prive pas plus anormalement la victime du dommage de son droit à indemnisation, en faisant courir, à compter de la livraison du produit, un délai de forclusion biennal puisqu'en l'espèce LM ENERGIE a été informée dès le 26 octobre 2012 par REV'SOLAIRE que les panneaux étaient exposés à un risque et donc de la nécessité de procéder à leur remplacement avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la livraison des panneaux ou de leur réception, laquelle était intervenue 7 septembre 2011, et que la propriétaire des panneaux n'avait aucune obligation d'attendre le rapport d'expertise pour procéder à ce changement.
- Elle soutient également que les pertes de production sont exclues de sa garantie en application de la clause G. 24 des conditions particulières de la police qui ne couvre pas la responsabilité au titre d'un préjudice et/ou de frais – ainsi que le préjudice en découlant – du fait de l'absence de transport ou du transport insuffisant d'énergie solaire par des produits en verre/des panneaux solaires livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité ainsi que par l'article 4.4.3 des conditions générales qui exclut les dommages et les frais procédant de l'impossibilité d'utiliser (de façon adéquate) les biens livrés et également par l'article C.15 qui dispose que ne sont pas couvertes les demandes d'indemnisation au titre de dommages affectant le seul patrimoine en conséquence de la perte d'argent ou d'effets mobiliers de quelque façon que ce soit.
Et elle affirme que ces clauses sont opposables aux tiers, soulignant que le tribunal n'a pas motivé sa décision de les écarter.
c/ A titre subsidiaire, elle demande à la cour d'approuver le tribunal en ce qu'il a rejeté les demandes concernant les charges afférentes à l'exploitation pour un montant réclamé de 55.909,50 euros en soutenant que ces postes de préjudice ne sont pas justifiés ou ne sont pas indemnisables. Et elle fait siens les développements de SMA sur les frais d'intervention de SOLEIL en TÊTE, sur les frais du financement du remplacement des panneaux, sur les frais d'assurance de l'installation nouvelle; ainsi que sur les frais de conseil.
d/ Encore subsidiairement elle se prévaut du plafond de garantie stipulé par la police.
*Elle fait valoir que le plafond de garantie applicable en l'espèce est le plafond relatif à la garantie responsabilité produit étendue (clauses C9) de 5.000.000 euros par réclamation ; Qu'en effet la police prévoit un plafond de 50.000.000 d'euros par année d'assurance dans la limite de :
- 25.000.000 euros par événement au titre de la responsabilité civile générale,
- 5.000.000 euros par réclamation au titre de la garantie responsabilité produit élargie et rappel de produit détaillée en clause C9,
- 1.000.000 euros par réclamation au titre du préjudice financier.
* Elle fait également valoir que l'article 3 des conditions générales prévoit que l'indemnisation se fait par événement jusqu'à concurrence du montant assuré mentionné dans la police. ; que l'article 1.9 de ces mêmes conditions précise que l'indemnisation est due au titre d'un événement ou une série d'événements en relation les uns avec les autres en conséquence desquels un préjudice est constitué ; que les événements sont donc globalisés lorsqu'ils sont sériels ; que la clause d'unicité et de globalisation de sinistre a pour objet de permettre d'appliquer les plafonds de garantie prévus par sinistre et par an à des sinistres dits « sériels», en les considérant comme un seul comme un seul sinistre se rattachant à une même année d'assurance, fondant cette argumentation sur un arrêt de la Cour de cassation (Cass.civ 2ème 28 février 2013 RCA 2013 no197).
* Elle précise que les sinistres successifs survenus sur les installations photovoltaïques équipées de panneaux solaires SCHEUTEN produits en 2009 et 2010 trouvent leur origine dans le même fait générateur, à savoir l'échauffement subi par des boîtiers de connexion défectueux placés en sous-face des panneaux ; que ce même fait générateur constitue l'événement au sens de l'article 1.9 précité ; que toutes ces réclamations se rattachant dès lors au même événement, il convient de les considérer comme une seule et même réclamation et de les rattacher à la même année d'assurance ; que tous ces sinistres ne peuvent être indemnisés que dans la limite du plafond de garantie de 5.000.000 euros, ce même raisonnement devant être appliqué pour les préjudices de perte de recettes dont l'indemnisation est plafonnée au montant de 1.000.000 euros.
*Elle prétend que cette argumentation est confirmée par le fait que si, comme le soutient à tort AXA, le plafond de 5.000.000 euros devait s'appliquer pour chacune des réclamations concernées par le sinistre sériel SCHEUTEN, il devrait alors être fait application de la franchise contractuelle prévue au titre de la garantie produit élargie, d'un montant de 100.000 euros par réclamation et de la même franchise applicable aux pertes de recettes, ce qui priverait les demandeurs, dont LM ENERGIE, de toute indemnisation. puisque le montant de leur préjudice est le plus souvent inférieur au montant de ces franchises.
e/ Elle se prévaut également, comme ALLIANZ, des règles néerlandaises de répartition de l'indemnité d'assurance, notamment de la règle de suspension des paiements issue de l'article 7:954 du code civil néerlandais qu'elle produit dans son intégralité et elle appuie son argumentation sur les deux consultations délivrées par le cabinet NAUTHA DUTHIL.
* Elle fait valoir que cette disposition prévoit qu'en cas de plafonds insuffisants, tous les demandeurs tiers n'ont droit qu'à une part proportionnelle du montant assuré, laquelle doit être calculée par rapport au préjudice global subi par l'ensemble des tiers lésés et elle souligne que l'action directe néerlandaise ne donne aux demandeurs aucune priorité sur les fonds versés par l'assurance ; que, si l'assureur n'est pas en mesure de déterminer le nombre de demandeurs ou le montant global du préjudice subi par ces derniers, il peut suspendre le paiement jusqu'à ce que la part proportionnelle de chaque demandeur soit connue.
* Elle affirme que cette suspension n'empêche pas le calcul du droit à indemnisation des demanderesses, puisque la cour pourra se prononcer sur les garanties d'assurance susceptibles de s'appliquer et précise que ne pas prononcer la suspension reviendrait en revanche à léser les autres victimes, qui perdraient leur droit à indemnisation en raison de l'épuisement de la garantie.
*Elle précise que le montant global du sinistre sériel SCHEUTEN n'est pas à ce jour établi et sera en tout état de cause supérieur au plafond de garantie de 5.000.000 euros puisque les deux instances introduites à son encontre au titre du sinistre CERISE TECHNIQUE devant le tribunal de grande instance de Périgueux et au titre du sinistre SYSTÈMES SOLAIRES devant le tribunal de grande instance de Clermont Ferrand conduisent à elles seules à retenir un montant réclamé de 8.200.000 euros, tous préjudices confondus.
*Elle fait valoir qu'il ne peut être soutenu qu'elle connaîtrait le nombre exact de réclamations relatives au sinistre sériel puisque de nouvelles réclamations ont récemment été portées à sa connaissance et qu'en sus des assignations délivrées en 2016 et 2017, une assignation en référé expertise lui a été délivrée en février 2018.
* Elle soutient que, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal sans motivation, la suspension des paiements ne relève pas de la compétence du juge de l'exécution que le débiteur ne peut d'ailleurs saisir avant toute tentative d'exécution ; qu'en effet, si le juge de l'exécution peut se prononcer sur le fond du droit lorsqu'il est amené à trancher une difficulté relative à l'exécution d'une décision, l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution lui interdit de modifier le dispositif de la décision qui sert de fondement à l'exécution forcée dont il est saisi ou d'en suspendre l'exécution ; qu'il ne pourrait en conséquence ordonner la suspension de l'exécution des décisions la condamnant à verser certaines sommes aux victimes en retenant qu'elle n'est pas redevable de l'intégralité du montant auquel elle a été condamnée puisqu'une telle décision aboutirait à modifier le dispositif du jugement dont l'exécution est demandée.
* Elle fait également valoir que la règle de la suspension des paiements de l'indemnité d'assurance en cas d'insuffisance du montant du plafond de garantie est applicable même en l'absence de dommages corporels ; que l'article 9.3 de la police ne fait que retranscrire le principe de droit néerlandais consacrant le droit des victimes de préjudices corporels à être directement indemnisées par l'assureur du responsable, contrairement aux victimes de préjudices matériels qui, elles, n'ont pas d'action directe à l'encontre de l'assureur mais que cette disposition n'est pas exclusive de l'article 7:954 du code civil néerlandais applicable en cas d'insuffisance du plafond de garantie et auxquelles l'article 9.3 de la police renvoie expressément. Elle précise qu'il ressort d'ailleurs de la note du cabinet d'avocats néerlandais NAUTHADUTHIL, qui vaut certificat de coutume, que la règle de suspension des paiements s'applique, indistinctement, aux dommages matériels et corporels.
* Enfin elle soutient que la règle néerlandaise de la suspension des paiements n'est pas contraire à l'ordre public international, la note établie par Maître YY... qui est fournie sur ce point par SMA étant formellement combattue par l'avis de Me MUNIER-APAIRE, avocat à la Cour de cassation qu'elle-même communique.
2/ Sur la garantie d'ALLIANZ qu'elle sollicite subsidiairement :
a/ Elle fait valoir que les experts judiciaires saisis de ce sinistre sériel, dans le cadre des opérations d'expertise qui ont été menées à ce jour, confirment que la responsabilité des dysfonctionnements du boîtier de connexion incombe à ALRACK ; qu'ALLIANZ prétend sans fondement que la conception du boîtier de raccordement SOLEXUS aurait incombé à SCHEUTEN qui aurait dirigé la fabrication de cette pièce puisque l'article 2.1 du contrat signé entre ces parties prévoit que "ALRACK assurera la conception, la construction et la production du système à titre exclusif comme prévu et défini par le présent contrat" et que l'article 2.2 précise que « L'obligation de SCHEUTEN consiste en la fourniture de la documentation du connecteur mâle et femelle 8 points" (qui constitue une partie essentielle du système) et de toutes les informations le concernant à ALRACK" ; qu'il en résulte donc que, si SCHEUTEN a mis à disposition de la Société ALRACK le connecteur mâle et femelle 8 points pour lequel elle bénéficiait d'un brevet, ALRACK avait quant à elle en charge la conception, le développement, l'ingénierie, la construction et la production des autres éléments de la carte qu'elle devait concevoir autour de ce connecteur, et qu'elle avait donc la responsabilité de la définition et du choix des composants. Elle prétend que les courriels communiqués par ALLIANZ ne démontrent aucunement que SCHEUTEN serait le concepteur du boîtier de raccordement et elle fait état de conclusions rendues sur ce point par d'autres experts dans le cadre d'autres litiges concernant ce dommage sériel.
b/ Elle fait valoir que c'est également sans pertinence qu' ALLIANZ prétend que la police dont bénéficie ALRACK est une assurance responsabilité civile, limitée aux dommages aux biens, autres que les boîtiers SOLEXUS, et aux dommages aux personnes, causés par l'assuré à des tiers ou du fait du produit de son assuré puisque l'endommagement des boîtiers SOLEXUS ne constitue pas le seul dommage aux biens à déplorer dans le cadre du présent sinistre mais rend le panneau photovoltaïque défectueux lui-même dans la mesure où le boîtier est un élément indispensable au fonctionnement de l'installation photovoltaïque et sans lequel il ne peut y avoir de production d'électricité photovoltaïque.
c/ Elle admet en conséquence que, si l'application de l'exclusion de la garantie du produit livré prévue par la clause 3.5 de la police permettrait, le cas échéant mais ce qui n'est pas demandé, de déduire le coût des boîtiers SOLEXUS du montant de l'indemnité due par ALLIANZ, la garantie de cette dernière est due au titre des dommages matériels subis par la société LM ENERGIE ; que le dommage matériel défini par la clause 1.7.2 de la police ALLIANZ comprenant l'endommagement, la destruction ou la perte de biens appartenant à des tiers, y compris le dommage en découlant, les pertes immatérielles alléguées par la société LM ENERGIE découlant directement de la défectuosité des boîtiers de jonction ont également vocation à être couvertes par ALLIANZ et elle fait siennes sur ce point les conclusions de SMA. Enfin elle précise qu'aucune décision ayant autorité de la chose jugée concernant la garantie d'ALLIANZ n'a, à ce jour, été rendue et que les décisions de justice produites par cette dernière n'ont pas la portée que lui donne l'appelante.
IV/ AXA sollicite la confirmation du jugement déféré, hormis en ce qu'il a dit que la société LM ENERGIE est recevable en ses demandes formulées à l'encontre de la compagnie AXA FRANCE IARD, et l'a condamnée à payer des sommes à LM ENERGIE. Elle sollicite pour le surplus qu'il soit ajouté à la décision déférée la condamnation de SMA à la garantir de toutes les condamnations qui pourraient être mises à sa charge. A titre subsidiaire, elle sollicite condamnation de LM ENERGIE à lui verser à une indemnité égale au montant de l'indemnité d'assurance qui lui serait due par cette dernière et demande à la cour d'ordonner la compensation des créances, de rejeter en tout état de cause les demandes formées au titre de la perte de recettes et des frais. A titre infiniment subsidiaire, de retenir que l'indemnisation doit être limitée aux 11 panneaux effectivement détériorés soit à la somme de 996,92 euros, et réduite à 12 mois comme le prévoit le contrat, ce qui conduit à retenir 213,12 euros au titre des pertes de recettes. Elle demande que la franchise contractuelle soit imputée et réclame en tout état de cause condamnation de LM ENERGIE ou de tout autre partie perdante à lui verser la somme de 12.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.
1/ En cas de condamnation à paiement prononcée au profit de son assurée, elle soutient être subrogée dans ses droits et action pour le montant de l'indemnité versée :
a/ sur les demandes formées envers SMA :
*Elle précise que si SMA souligne qu'aucune condamnation ne serait intervenue à son encontre, le jugement entrepris précise néanmoins qu'est recevable et bien fondée l'action subrogatoire de la société AXA à son encontre, ce qui implique nécessairement une condamnation de SMA à la garantir de toutes les condamnations qui avaient été mises à sa charge en première instance. Et elle demande à la cour d'ajouter cette condamnation au dispositif de son arrêt.
* Elle fait valoir que Rev'Solaire a fourni et installé les panneaux affectés du désordre ; que sa prestation constitue un ouvrage, lequel a été déclaré impropre à sa destination par l'expert judiciaire ; que SMA soutient sans pertinence que la fonction de couvert et d'étanchéité ne serait pas affectée alors que les modalités de pose ont été décrites par l'expert; que la toiture des hangars a été retirée et remplacée par les bacs acier sur lesquels ont été posés les panneaux solaires défectueux ; que les bacs sur lesquels sont posés les panneaux étant perforés, ce n'est qu'une fois le panneau fixé que l'étanchéité est assurée.
*Elle soutient par ailleurs que l'article 1792-7 du code civil exige une vocation exclusivement professionnelle de l'équipement en cause pour aboutir à une exclusion du régime de la garantie décennale, ce qui n'est pas le cas en l'espèce et qu'en tout état de cause, la prestation n'est pas un équipement et n'a pas une vocation exclusivement professionnelle puisqu'elle assure également le couvert ; qu'elle répond donc à la définition d'ouvrage dans sa globalité ou à tout le moins d'élément indissociable de l'article 1792-2 du code civil ; que la garantie décennale joue donc et que ce sont les limites et plafonds de garantie applicables à cette garantie qui doivent s'appliquer.
*Elle souligne que SMA reconnaît la mise en jeu de la garantie intercalaire et de la garantie responsabilité professionnelle tout en opposant les limites de ces dernières. Et elle soutient que SMA n'est pas fondée dans son argumentation sur la réduction de l'indemnité due à raison de la règle proportionnelle du fait de la taille de l'installation posée outrepassant les limites fixées aux conditions particulières du contrat d'assurance et du fait de travaux sortant du périmètre de l'activité déclarée puisque l'installation est composée de 7 centrales distinctes et qu'aucune d'entre elles ne dépasse la limite de 1.000 m2 fixée par les conditions particulières ; que le risque est assuré pour chacune des intégrations en toiture par hangar, lesquels sont séparés les uns des autres, et elle reprend pour le surplus les arguments de LM ENERGIE exposés ci-dessus.
b/ Sur les demandes formées envers AIG :
Elle rappelle que les panneaux solaires ont été produits et commercialisés par la société SCHEUTEN et qu'il ressort du rapport d'expertise ainsi que de l'ensemble des éléments du dossier qu'ils sont affectés de défauts.
* Elle affirme que la responsabilité de la société SCHEUTEN est engagée du fait des produits défectueux (article 1386-1 et suivants) et rappelle que cette responsabilité n'empêche pas la victime d'un dommage de se prévaloir du droit de la responsabilité contractuelle ou extra contractuelle ou d'un régime spécial de responsabilité et elle affirme que la responsabilité de SCHEUTEN est engagée sur l'ensemble de ces fondements.
* Elle soutient que ce n'est qu'au vu de l'ensemble des expertises en sa possession, ce dont ne disposaient pas toutes les parties à la présente instance et dont ne disposait pas l'expert judiciaire, que SMA prétend que des mesures d'isolement des conducteurs des panneaux étaient suffisantes, ce qui n'était aucunement démontré en 2014 lorsque l'expert a préconisé le remplacement des panneaux, et elle souligne qu'en tout état de cause, ces mesures d'isolement n'auraient pas permis de limiter le dommage résultant des pertes financières et que leur coût n'a pas été chiffré.
* Elle souligne que SMA garantit un maximum de 50 millions d'euros, et non de 5 millions d'euros, par année d'assurance, la somme de 5 millions d'euros étant stipulée par réclamation; que la réclamation de LM ENERGIE est bien inférieure à ce montant.
* Concernant la limitation par année d'assurance, elle affirme que doit être prise en compte la seule année d'assurance au cours de laquelle la demande d'indemnisation est survenue.
* Elle prétend que l'invocation des dispositions du droit néerlandais concernant la répartition proportionnelle du plafond d'indemnité d'assurance entre tous les débiteurs n'a pour vocation que de voir réduire l'assiette des droits de la victime de l'assuré par un procédé artificiel ; que cette disposition datant de plus de 10 ans n'a jamais fait l'objet d'une décision des juridictions néerlandaises, ce qui tend à indiquer que ses conditions de mise en oeuvre sont très délicates et qu'AIG ne rapporte pas la preuve de ce que ces conditions sont remplies ; que la proportionnalité de l'indemnité par rapport aux dommages subis par chacune des personnes lésées suppose qu'il y ait dépassement du montant assuré et que cette preuve n'est absolument pas rapportée en l'espèce puisqu'il n'est aucunement justifié que le plafond de 50 millions d'euros par année d'assurance serait insuffisant pour dédommager l'ensemble des victimes des produits défectueux de SCHEUTEN sur la seule année concernant le dommage de la société LM ENERGIE à savoir sur l'année 2012. Et elle souligne que les nouvelles pièces produites par AIG démontrent l'existence de demandes à hauteur de 8,2 millions d'euros, soit moins d'un cinquième du plafond de 50 millions par année d'assurance, et qu'elles ne précisent pas quelle année le sinistre est survenu.
Elle rappelle également que SCHEUTEN a cessé toute activité le 30 mars 2012, de sorte qu'à ce jour les prescriptions ont commencé à courir et que toutes les réclamations doivent être connues au regard du délai de 6 ans qui s'est écoulé. Elle fait de plus valoir qu'aux termes de l'article 7:954 du code civil néerlandais, la suspension du règlement des personnes lésées est une simple faculté dont l'exercice aurait pour conséquence de priver la victime de toute indemnisation et de priver d'effectivité la décision à intervenir, ce qui est contraire au principe fondamental du droit français de réparation intégrale du préjudice ; qu'elle serait donc contraire à l'ordre public français.
* En ce qui concerne la franchise, elle fait valoir qu'il ressort de l'analyse de la note du cabinet NAUTHADUTHIL (pièce AIG no5) que la franchise auto-assuré n'est due qu'une seule fois par an ; que, sauf à démontrer qu'elle n'a pas été appliquée à une autre demande d'indemnisation que celle de LM ENERGIE, la franchise n'est donc pas opposable par la société AIG.
c/ sur les demandes formées par ALLIANZ. Elle soutient que c'est de mauvaise foi que celle-ci a formulé une demande de condamnation des autres parties pour procédure abusive.
* Elle fait valoir que ALRACK était bien la fabricante des produits litigieux ; qu'il ressort en effet de l'expertise que : "la lecture du contrat permet d'établir que la conception et la fabrication du boîtier de jonction SOLEXUS était de la seule responsabilité d'ALRACK et que c'est bien la languette de sortie positive du circuit imprimé située dans le boîtier, et son raccordement à la broche du câble, qui sont le siège de l'échauffement anormal qui est à l'origine du désordre ; qu'il n'y a aucun lien de causalité entre la conception du raccordement du boîtier vers le panneau, basé sur le brevet 8 points SCHEUTEN, et la survenance des échauffements au droit de la jonction positive en sortie du boîtier vers le câble+ extérieur au panneau" ; qu'ALLIANZ prétend que les défaillances ne se seraient pas produites au niveau des boîtiers de connexion mais proviendraient de la combinaison boîtier-panneau sans produire le moindre élément au soutien de ces allégations et alors même qu'il résulte des constatations opérées par l'expert que la fretting corrosion et la mise à feu de certains des panneaux est intervenue au sein des boîtiers de connexions.
* Elle affirme qu'en tout état de cause, et même si la cour suivait le raisonnement d'ALLIANZ selon lequel ALRACK n'aurait été qu'une exécutante, elle retiendrait cependant que cette société a commis une faute en recopiant purement et simplement un boîtier qu'on lui aurait transmis sans aucune proposition alors qu'elle avait à charge la conception du produit, en ne conseillant et n'informant pas son cocontractant sur les nécessités de celui-ci, les risques, et son adéquation aux nécessités de SCHEUTEN, et en livrant un produit dangereux pour la sécurité des personnes et des biens.
* Elle rappelle ensuite le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux et fait valoir que, si une exclusion de garantie est prévue pour les biens livrés par l'assuré, ALRACK n'a livré que les boîtiers de connexion et que le reste des panneaux solaires n'a pas été livré et produit par ses soins et n'est donc pas sous sa responsabilité. Elle affirme qu' ALLIANZ fait un amalgame entre le panneau et le boîtier alors que le boîtier est le produit défectueux dont son assuré a à répondre et le panneau est un bien appartenant à un tiers et endommagé par le produit défectueux ; qu'il y a donc nécessairement un dommage aux biens autres que le produit fabriqué par l'assuré ; qu'en effet, sans boîtier de connexion, le panneau solaire ne peut plus fonctionner ce qui doit conduire à retenir que le panneau amputé de son boîtier défectueux est endommagé ; qu'il existe par ailleurs un autre dommage causé à un bien autre que le boîtier, à savoir la dégradation des bacs acier posés en toiture puisque l'échauffement des boîtiers y a laissé des marques.
* Elle affirme que le démontage des panneaux a entraîné une toiture poreuse, ce qui a causé un dommage au bâtiment et à l'immeuble puisque la fonction de couvert n'était plus assurée. Et elle souligne que la décision du tribunal d'Amsterdam du 2 mars 2016, est une décision de référé ne statuant pas au fond, dont il n'est pas démontré qu'elle soit définitive et qui ne lui est pas opposable.
2/ En ce qui concerne ses rapports avec LM ENERGIE :
a/ Elle prétend tout d'abord que LM ENERGIE est prescrite en son action puisqu'elle ne l'a pas engagée dans le délai de deux années suivant l'ordonnance d'expertise et qu'elle n'a ni intérêt ni qualité à agir au titre des pertes de recettes et du préjudice financier, seule la société OEUF 2000 ayant émis des factures de production d'énergie avant la déclaration de sinistre du 30 octobre 2012, et ce alors même que LM ENERGIE était en exercice et propriétaire de l'installation depuis son origine. Et elle affirme que le montage opéré ensuite par LM ENERGIE, qui a fait transférer les contrats de revente d'énergie à son nom, ne suffit pas pour lui conférer qualité à agir puisqu'il avait pour seul but de tenter de régulariser la déclaration de sinistre au moyen d'une transmission rétroactive du contrat conclu avec ERDF. Elle souligne que son assurée n'a jamais produit ses comptes qui permettraient de vérifier l'encaissement de revente d'énergie et affirme que sa pièce 45 produite pour la première fois en cause d'appel n'est en rien un justificatif comptable.
b/ Elle fait ensuite valoir que les conditions de garantie ne sont pas remplies puisque, pour mettre en jeu la garantie de son assureur, l'assuré notamment démontrer :
-l'existence d'un sinistre et sa date,
- un dommage survenu de manière soudaine ayant entraîné les dommages dont est demandé réparation ;
* en ce qui concerne la première condition :
-Elle fait valoir qu'en l'espèce il n'y a pas eu de sinistre, lequel est contractuellement défini comme étant la réalisation d'un dommage matériel susceptible de mettre en jeu les garanties du contrat puisque LM ENERGIE a fait changer les panneaux par précaution, ce qui est en contradiction avec la réalisation d'un dommage ; que son assurée qualifie d'ailleurs elle-même les conséquences du désordre de « risque d'incendie», ce qui démontre que le désordre n'a pas consisté en des dommages aux biens entrant dans le cadre de la garantie ;
- Elle soutient par ailleurs que la date du prétendu sinistre n'est pas connue ainsi que le reconnaît LM ENERGIE et qu'il résulte des termes dubitatifs employés par l'expert ; que la perte de production dont fait état son assurée pour justifier que le dommage est survenu avant 2012 n'a été établie qu'au regard d'estimations de rendement données par REV'SOLAIRE et est donc incertaine ; que l'installateur a procédé au contrôle de la centrale en octobre 2012 et n'a constaté aucun dommage ; qu'il n'en a pas été plus relevé lors de la première réunion d'expertise en mars 2013 et que ce n'est donc qu'à compter d'octobre 2013 que SOLEIL en TÊTE a constaté l'existence de boîtiers brûlés ; que la déclaration de son assurée du 30 octobre 2012 ne peut constituer une déclaration de sinistre mais était uniquement une déclaration d'aggravation du risque et que les dommages survenus entre mars et octobre 2013 n'étaient plus couverts au regard des modifications contractuelles apportées par les avenants.
* En ce qui concerne la deuxième condition :
Elle souligne que les désordres sont survenus de manière progressive alors que la garantie bris de machine exige que le dommage soit soudain et accidentel et elle conclut que, soit la fretting corrosion est le fait générateur du dommage et celui-ci est progressif et évolutif de sorte qu'il n'est pas garanti, soit la fretting corrosion n'est pas un fait générateur mais un facteur de mise à feu comme le soutient la société LM ENERGIE et alors seuls les panneaux ayant subi une mise à feu doivent être considérés comme endommagés et peuvent être indemnisés.
* En ce qui concerne la troisième condition elle soutient que des dommages n'ont été constatés que sur 11 panneaux et qu'elle pourrait donc tout au plus être tenue de leur réparation.
c/ Elle se prévaut subsidiairement du manquement de l'assurée à l'obligation de conservation du bien en cas de sinistre, moyen auquel elle indique que le tribunal n'a pas répondu, et elle fait valoir que le contrat prévoit qu'en cas de sinistre l'assuré doit « prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires pour limiter l'importance du sinistre et sauvegarder les biens garantis». Elle affirme que LM ENERGIE a manqué à cette obligation en continuant à faire fonctionner l'installation alors même qu'il lui était préconisé de l'arrêter afin de prévenir tout risque. Et elle souligne que les détériorations par échauffement et incendies n'ont pu intervenir qu'entre novembre 2012 et novembre 2013.
d/ Elle fait également état d'une faute contractuelle résidant dans une exécution de mauvaise foi du contrat qui confine à la fraude et priverait l'assurée de la garantie, en soutenant que cette mauvaise foi résulte de ce que LM ENERGIE a :
- sollicité l'indemnisation des recettes d'une autre personne morale,
- mis en place un montage contractuel a posteriori à effet rétroactif afin de faire passer ces recettes comme siennes,
- laissé son installation en fonctionnement post déclaration afin que des dommages effectifs soient constatés,
- éludé volontairement les clauses du contrat d'assurance en sollicitant des éléments correspondant à des garanties non souscrites et bien plus que les clauses de garantie,
- refusé de déclarer ses recettes et de produire ses comptes.
e/ si sa garantie était retenue elle conteste les sommes réclamées par LM ENERGIE en faisant valoir que :
* seuls 11 panneaux ont été identifiés comme défectueux, que les 2275 panneaux ne constituent pas une seule et unique machine à prendre dans son ensemble puisqu'il résulte des déclarations de son assurée que l'installation était composée de deux centrales installées sur 7 bâtiments isolés et comprenant 2275 panneaux différents.
* qu'une franchise de 2.000 euros doit être appliquée sur les dommages matériels ainsi que l'a retenu le tribunal,
* que l'indemnisation au titre des pertes de recettes formée par l'assurée n'est pas sérieuse en raison de :
- l'absence de perte de recettes au sens des stipulations contractuelles et elle précise qu'elle n'a pas contesté les modalités de calcul établies par l'expert judiciaire parce qu'elle estimait ne pas devoir sa garantie mais que le contrat prévoyait des conditions précises et des modalités spécifiques de calcul des indemnités pour pertes de recettes ; que le capital assuré au titre de cette perte doit correspondre au montant de la marge brute du dernier exercice comptable affecté d'un coefficient de tendance générale de l'entreprise pour l'année en cours et l'année future et multiplié par la durée maximum de la période d'indemnisation et que ce même capital est actualisé chaque année en fonction du montant de la marge brute que l'assuré s'engage à déclarer dans les 7 mois suivant l'échéance principale du contrat. Elle souligne que cette déclaration de l'assurée est évidemment en lien direct avec l'établissement du montant de la cotisation d'assurance et que LM ENERGIE n'a pas procédé à cette déclaration pour la marge brute de l'année 2011 puisque c'était OEUF 2000, non assurée, qui a perçu les recettes.
- la limitation temporelle des pertes de recettes puisque l'indemnité pour perte de recettes était limitée à 12 mois et qu'il ne saurait être fait application du prorata réclamé par LM ENERGIE, la police d'assurance indiquant expressément que la période d'indemnisation est celle commençant le jour du sinistre et ayant la durée maximale précisée aux conditions particulières.
Elle prétend au surplus que les pertes sont limitées à l'absence de production des 11 panneaux présentant une boîte brûlée et que doit être appliquée une franchise de garantie de 750 euros.
f/ Elle expose enfin pourquoi les frais supplémentaires sont exclus de la garantie puisque LM ENERGIE n'a pas souscrit la garantie « pertes d'exploitation » et « frais supplémentaires» et que le contrat d'assurance ne garantit notamment pas : « les frais destinés à remédier à des pannes, à des dysfonctionnements ou des défauts de réglage » et elle détaille en quoi ces frais sont, selon elle, injustifiés et présentés abusivement par son assurée.
V/ SMA demande à la cour d'infirmer le jugement du déféré en ce qu'il a condamné REV'SOLAIRE sur le fondement de la responsabilité décennale et sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, sollicite le rejet des demandes formées à son encontre sur ces fondements par LM ENERGIE, et demande à la cour de dire, au cas où la responsabilité contractuelle de Maître Christian J..., ès qualités, serait retenue, que toute condamnation prononcée à son encontre au titre des dommages matériels aux équipements professionnels interviendra dans les limites de la garantie intercalaire assortie d'un plafond de 458.000 euros par année d'assurance et d'une franchise opposable de 10 % du montant (avec un minimum de 825 euros et un maximum de 8.250 euros). A titre subsidiaire, de débouter LM ENERGIE de toute demande supérieure à 208.538 euros au titre des pertes d'exploitation, de dire qu'elle n'est tenue au titre de ces pertes que dans les limites de son plafond et de la franchise de 1.485 euros ; de juger que les frais d'intervention de la société SOLEIL EN TÊTE (4.772,30 euros) et ceux de "Financement projet de rééquipement"(39.43l,20 euros) constituent, par nature, des dommages matériels ; de débouter LM ENERGIE de sa demande relative aux intérêts d'emprunts et de toutes ses demandes plus amples. Elle demande par ailleurs à la cour de retenir qu'en raison du dépassement d'activité commis par son assurée, elle est fondée à appliquer la règle proportionnelle, suivant le ratio 0.6008/0.666, au montant des condamnations principales qui seraient mises à sa charge au profit de LM ENERGIE. Très subsidiairement, elle demande qu'il soit jugé qu'AIG et ALLIANZ seront tenus de la relever indemne et a minima de la garantir au titre des frais de dépose et de repose à hauteur de 78.784,95 euros et de juger que la demande de suspension des paiements ne peut relever que de la compétence exclusive du juge de l'exécution. En tout état de cause, elle sollicite condamnation de tout succombant à lui payer la somme de 20.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Elle souligne tout d'abord que le tribunal n'a pas prononcé expressément de condamnation pécuniaire à son encontre.
1/ sur la garantie apportée à REV'SOLAIRE :
Elle fait ensuite valoir que l'objet du contrat d'assurance conclu auprès d'elle par REV'SOLAIRE est, dans la limite des activités garanties, d'apporter une couverture permettant de répondre à l'obligation légale d'assurance des travaux de construction pour les dommages affectant, après réception, les ouvrages immobiliers réalisés par l'assurée qui engagent sa responsabilité décennale, d'apporter à l'assurée une garantie de même nature pour les dommages affectant, après réception, les ouvrages immobiliers qui ne relèvent pas de l'obligation d'assurance et de garantir les dommages extérieurs à l'ouvrage vis-à-vis des tiers à raison de dommages corporels, matériels et immatériels dans les conditions qui sont renseignées. Et elle précise que REV'SOLAIRE a souscrit, à titre complémentaire, la garantie facultative intercalaire concernant la fourniture et l'installation dans le cadre de travaux d'éléments d'équipement à vocation professionnelle.
Elle prétend que la responsabilité décennale ne peut trouver à s'appliquer puisque les panneaux photovoltaïques, objets de défectuosités, sont des éléments dissociables et constituent un équipement industriel à vocation exclusivement professionnelle de production d'électricité en vue de sa revente à ERDF, lequel est exclu légalement du champ d'application de la responsabilité bienno-décennale. Elle soutient que le fait que les panneaux soient intégrés au bâti ne suffit pas à leur conférer la nature d'immeuble désigné par l'article 1792 du code civil ; que la réponse gouvernementale à la question de l'application de la garantie décennale d'une installation photovoltaïque ne vaut pas droit et ne peut concerner toutes ces installations et qu'il convient de vérifier si les panneaux ont une fonction de couvert et assurent l'étanchéité de la couverture sans laquelle la solidité ou la destination de l'ouvrage se trouverait compromise. Elle prétend que l'expert n'a jamais indiqué que l'installation photovoltaïque était intégrée par incorporation physique et indivisible au bâtiment existant ; que le terme intégration, qui a en l'espèce une signification fiscale, n'est pas synonyme d'incorporation ; que les modules photovoltaïques ont été fixés par la société Rev'Solaire sur des bacs aciers rapportés sur la charpente conformément au système Solarsit conçu spécifiquement pour l'intégration de modules photovoltaïques ; que la fonction de couverture est donc uniquement assurée par ces bacs aciers, qui sont incontestablement un ouvrage, et non par les modules photovoltaïques, lesquels sont de simples équipements dont la dépose n'affecte en rien l'efficacité de la couverture, le percement d'une patte sur le bac acier n'affectant pas l'étanchéité de ce bac.
Et elle souligne que chaque panneau est un élément dissociable de l'ensemble puisqu'il peut être retiré et changé et que l'expert a d'ailleurs conclu que "les éléments d'équipement de la production d'énergie étaient devenus impropres à leur destination. Elle précise qu'elle ne conteste pas que, dans les décisions citées par ses adversaires, des installations photovoltaïques aient pu faire partie intégrante de l'ouvrage qu'ils couvraient mais conteste que tel soit le cas en l'espèce.
Elle rappelle par ailleurs les dispositions de l'article 1792-7 du code civil, aux termes duquel ne sont pas considérés comme des éléments d'équipement d'un ouvrage au sens des articles 1792, 1 792-2, I792-3 et 1792 les éléments d'équipement, y compris leurs accessoires, dont la fonction exclusive est de permettre I'exercice d'une activité professionnelle dans I'ouvrage, et elle soutient que l'unique finalité des modules photovoltaïques est de permettre à LM ENERGIE, créée à cette fin, d'exercer l'activité de producteur d'électricité et de lui apporter des revenus par la revente de sa production à EDF ; que l'impropriété à l'usage auquel était destiné ce générateur ne porte nullement atteinte à la destination du bâtiment qui ne devait pas être alimenté par l'énergie produite et elle prétend donc que la responsabilité de l'installateur ne peut être recherchée sur un fondement de garantie décennale.
Elle reconnaît au contraire qu'a vocation à s'appliquer la garantie intercalaire souscrite par REV'SOLAIRE qui a pour objet d'apporter une assurance lorsque la responsabilité de l'assurée est engagée sur le fondement contractuel ; que cette garantie prévoit en effet l'extension du contrat aux dommages matériels affectant les éléments d'équipement, ainsi que leurs accessoires dont la fonction est de permettre l'exercice d'une activité professionnelle dans l'ouvrage, au sens de l'article 1792-7 du code civil.
Elle fait valoir que cette garantie doit conduire à retenir que le contrat n'est pas vidé de sa substance et rappelle qu'elle est accordée dans le délai de deux ans suivant la réception, dans les limites d'un plafond de 458.000 euros par année d'assurance et d'une franchise opposable de 10 % du montant avec un minimum de 825 euros et un maximum de 8.250 euros dont il conviendra de tenir compte.
Elle prétend que la responsabilité de produits défectueux ne peut être mise en jeu puisque l'article 1245-5 du code civil énonce que ne sont pas considérés comme producteurs, les personnes dont la responsabilité peut être recherchée sur le fondement des articles 1792 à 1792-6 et 1646-1 du code civil ; qu'au surplus, à la supposer même retenue, une telle responsabilité exclut la prise en charge du produit défectueux lui-même, comme en dispose l'article 1386-2 du code civil et qu'aucune condamnation ne pourrait être prononcée à son encontre au titre du remplacement des panneaux photovoltaïques.
2/ Sur le quantum des demandes :
Elle prétend être fondée à opposer la règle proportionnelle et demande que les différents postes de préjudices soient rapportés à de plus justes proportions.
a/ Elle fait valoir que l'installation outrepasse les limites fixées aux conditions particulières et sortent de l'activité déclarée.
Elle précise que l'activité couverte est celle d'installations photovoltaïques par intégration ou surimposition en couverture et en étanchéité, en silicium mono ou polycristallin ou amorphe, et travaux de câblages et raccordements, avec sous-traitance des travaux de couverture et d'étanchéité et souligne que les surfaces installées sont limitées à 1000 m2 par opération ; que les procédés mis en oeuvre devaient bénéficier notamment "d'un pass innovation feu vert";
Qu'en l'espèce, il s'agit d'une installation photovoltaïque au silicium polycristallin, équipée de modules SCHEUTEN qui totalise une surface de 3367 m2 dont le procédé d'intégration Solarist faisait l'objet d'un pass innovation feu vert du CSTB qui ne visait pas expressément les modules SCHEUTEN ; qu'elle n'était donc pas une opération courante garantie.
Elle rappelle que la déclaration inexacte de la part de l'assuré dont la mauvaise foi n'est pas établie, ce qui est le cas en l'espèce, entraîne, dans le cas où sa constatation n'a lieu qu'après un sinistre, une réduction de l'indemnité en proportion du taux de primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, conformément à l'article 113-9 du code des assurances, ce qui doit conduire à appliquer un coefficient réducteur de 0.6008/0.666.
Elle fait valoir que la surface de l'installation assurée ne doit aucunement s'apprécier toiture par toiture, puisque l'article 3 du contrat concernant les activités garanties précise que "Les surfaces installées par opération sont limitées à 1.000 m2" ; que l'opération est la construction réalisée par l'assuré aux termes de son marché et que REV'SOLAIRE n'a pas contracté un marché de travaux pour chaque bâtiment. Elle précise enfin justifier du ratio appliqué.
b/ elle détaille en conséquence les calculs opérés au titre des dommages après application du ratio susvisé et elle soutient qu'il n'y a pas lieu de prendre en considération les charges relatives à l'exploitation qui sont indissociables de la réparation du dommage matériel et doivent être intégrées dans l'indemnité du coût de remplacement des équipements professionnels, ce que la société LM ENERGIE ne conteste plus. Elle fait valoir que les intérêts d'emprunts ont été défiscalisés dans le bilan de la société LM ENERGIE, s'agissant de prêts affectés à l'objet social de la société, de sorte qu'il ne saurait y avoir une double indemnisation par le paiement à la société des intérêts que celle-ci n'est pas appelée à supporter comptablement de façon définitive.
Elle fait valoir que les frais d'assurance réclamés correspondent à des dépenses qui procèdent du choix de LM ENERGIE de souscrire une assurance facultative «Tous risques›› pour le chantier de remplacement, ce qui est sans relation directe avec un fait imputable à sa propre assurée et que les frais de conseil pour consultations diverses n'ont pas plus de relation directe avec le sinistre.
3/ Sur son recours formé à l'encontre d'AIG et d'ALLIANZ :
Elle sollicite la confirmation du jugement entrepris qui a retenu la responsabilité des sociétés SCHEUTEN et ALRACK et prétend qu'en droit, ces responsabilités sont encourues sur le fondement de la responsabilité des produits défectueux ou/et celui de la garantie des vices cachés du vendeur pour ce qui concerne SCHEUTEN ou/et sur un fondement délictuel en ce qui concerne ALRACK qui a procédé au traitement des languettes mâles des cartes électroniques qui sont à l'origine des défaillances et des mises à feu. Et elle affirme disposer d'une action directe contre les assureurs des responsables et être fondée à réclamer la condamnation in solidum d'AIG et d'ALLIANZ à la relever et garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, précisant que le tribunal a à tort écarté la garantie des vices cachés pour ne retenir que celle des produits défectueux alors que ces garanties ne sont pas exclusives l'une de l'autre.
Elle affirme que les assureurs de SCHEUTEN et ALRACK ne sauraient prétendre que ces dernières n'étaient pas producteurs au sens de la garantie des produits défectueux alors qu'un producteur est défini, pour l'application de cette garantie, comme toute personne agissant à titre professionnel qui se présente comme producteur en apposant sur le produit son nom, sa marque ou un autre signe distinctif ; qu'ALRACK a fabriqué la carte équipant les modules photovoltaïques sur laquelle elle a apposé le sigle SOLEXUS ; que le produit est dangereux comme pouvant générer des incendies ; que l'assureur d'ALRACK entretient une confusion volontaire entre la mise sur le marché de sa carte qui a incombé à SCHEUTEN et la mise en circulation dont ALRACK est responsable pour avoir fabriqué et fourni ce produit ; qu'il importe peu que ce soit la combinaison de cette carte et des panneaux qui rende l'installation dangereuse puisqu'il appartenait à ALRACK de vérifier que l'incorporation de la carte dans les panneaux serait sans danger ; qu'ALRACK n'est aucunement un simple exécutant de SCHEUTEN ainsi que le démontrent les nombreuses expertises réalisées pour ce dommage sériel. Elle soutient en conséquence que la responsabilité d'ALRACK est également engagée sur un fondement délictuel puisqu'elle a commis une faute en ne fabriquant pas une carte permettant d'être attachée sans danger aux panneaux et pour avoir livré un produit présentant de graves défauts.
Elle fait par ailleurs valoir qu'en droit français, l'action directe contre l'assureur de responsabilité est expressément prévue à l'article L.124-3 du code des assurances et est soumise à la loi du lieu du dommage et non à la loi du contrat d'assurance.
Elle rappelle enfin le principe général selon lequel, en cas de contradiction entre les conditions générales et les conditions spéciales, les conditions spéciales priment sur les conditions générales.
a/ en ce qui concerne son recours à l'encontre d'AIG :
Elle soutient que l'argumentation présentée par AIG revient à dénier toute garantie pour la défectuosité du produit lui-même et les préjudices immatériels qui en sont la conséquence directe ; que l'exclusion de garantie prévue pour les biens livrés par l'article 4.4 des conditions générales du contrat vide ce dernier de sa portée qui vise à indemniser les tiers des dommages subis ; qu'elle ne remplit ni les conditions de fond, ni les conditions de forme permettant de la retenir puisque contrairement aux dispositions de l'article L. ll3-l du code des assurances, elle n'est ni formelle ni limitée et n'est pas rédigée en caractères particulièrement apparents.
Elle affirme qu'au surplus, les conditions générales n'excluent pas, de façon catégorique et définitive toute prise en charge du produit puisque l'article 1.7 prévoit expressément la prise en charge par l'assureur des "frais exposés en vue de prévenir ou de limiter un préjudice" et elle affirme que ce préjudice peut être matériel ou immatériel.
Elle prétend qu'AIG ne peut opposer à cette argumentation les dispositions de l'article 1.7.2 de sa police, puisqu'il faudrait aller d'un article à l'autre pour comprendre une exclusion qui n'est ni claire ni compréhensible pour l'assuré ou les tiers. Et elle souligne que l'arrêt de l'installation ne suffisait pas à empêcher tout préjudice comme en témoigne une autre affaire similaire dans laquelle un début d'incendie s'est déclaré alors que l'installation était arrêtée.
Elle affirme par ailleurs qu'AIG fait une interprétation erronée des dispositions de l'article 7:957 du code civil néerlandais puisque le responsable du sinistre n'est tenu de procéder lui-même aux réparations de sauvegarde nécessaires que lorsqu'il en a l'occasion, ce qui n'était pas le cas en l'espèce où la liquidation judiciaire de SCHEUTEN ne lui permettait pas d'intervenir. Elle souligne que ces dispositions légales n'empêchent pas l'intervention d'autres entités pour prévenir le dommage et que l'article 7: 957, qui a pour objectif de limiter la survenance des sinistres graves ayant pour effet de porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens, perdrait tout son sens si lui était donnée la portée indiquée par AIG. Elle fait par ailleurs valoir que cet article ne fait aucunement état de conditions cumulatives.
Elle soutient également que la clause C.9 déroge aux conditions générales déclinées aux articles 1 à 15 et apporte spécifiquement une garantie du produit à hauteur de 5.000.000 euros par réclamation, étant rappelé que le plafond de la responsabilité civile générale mobilisable pour les frais engagés est de 25.000.000 euros par événement avec un maximum de 50.000.000 euros par année d'assurance ; que le terme «frais ›› s'entend aussi bien des dépenses de montage que de celles d'installation du produit lui-même, ainsi que l'énonce l'article 1.1 de la clause C.9 et que les termes de cette clause doivent conduire à retenir que la couverture d'assurance concerne la garantie du produit défectueux lui-même qui est défini par l'article 2 de la même clause.
Elle affirme que l'article 7 de la clause C.9 est en totale contradiction avec ce qui précède et n'est pas valable puisque le contrat vient retirer en son article 7 ce qu'il offrait en son article 1, et ce de façon quasi illisible pour l'assuré ;
Que de même la limitation dans le temps de la garantie de la clause C9 est contraire aux dispositions de l'article 7:963 § 5 du code civil néerlandais, lequel prévoit qu'il ne peut être dérogé de l'article 7:957 § 2 au détriment du détenteur de la police ou de l'assuré, l'indemnisation des frais de sauvetage par l'assureur étant, en droit néerlandais, d'ordre public ; qu'au surplus, une telle limitation prive anormalement la victime de son droit à réparation en faisant courir un délai biennal à compter de la livraison du produit, trop court dans de trop nombreux cas pour démontrer un caractère défectueux ; qu'en l'espèce, les frais de remplacement de produits n'ont pu être engagés qu'une fois établi le caractère défectueux par l'expertise.
Elle fait valoir que les pertes d'exploitation ne correspondent pas aux «pertes d'argent›› exclues de la garantie prévue à la clause C.l5 ; que le jugement rendu par le tribunal de grande instance de CLERMONT-FERRAND sur ce point est critiquable et non définitif et que la clause C15 serait par une telle interprétation privée de toute substance.
Elle prétend que l'exclusion prévue par la clause G24 est limitée à l'absence de transport ou au transport insuffisant d'énergie par des panneaux solaires livrés par l'assuré mais qu'en l'espèce, les pertes de production sont la conséquence non pas d'une moindre production mais du débranchement préventif de l'installation.
Elle affirme que trois volets et trois plafonds peuvent être mobilisés de façon conjointe et cumulative :
- le Volet A «responsabilité générale ››, à hauteur d"un plafond de 25.000.000 euros par événement, dans la limite d'un montant de 50.000.000 euros par année d'assurance,
- le Volet B « responsabilité produit étendue ››, à hauteur d'un plafond de 5.000.000 euros par réclamation, dans la limite d"un montant de 50.000.000 euros par année d'assurance,
- le Volet D «préjudice financier››, à hauteur d'un plafond de 1.000.000 euros par réclamation, dans la limite d'un montant de 50.000.000 euros par année d'assurance.
Elle prétend que la clause C.l5 déroge elle aussi aux conditions générales déclinées aux articles 1 à 15 et apporte une garantie pour le préjudice financier à hauteur de 1.000.000 euros par réclamation, dans la limite de 50.000.000 euros par année d'assurance.
Elle souligne enfin que c'est pour la première fois en cause d'appel qu'AIG se prévaut d'une franchise d'un montant de 100.000 euros, ce qui ne correspond pas à la lettre du contrat d'assurance qui mentionne différents montants de franchise en fonction des volets de garantie mobilisés; et qu'elle ne justifie nullement de ce que les franchises puissent être opposées aux tiers lésés, ce qui ne ressort d'aucune stipulation du contrat.
b/ Sur les demandes formées envers ALLIANZ :
Elle précise que le contrat d'ALLIANZ a bien vocation à d'appliquer puisque le dommage matériel a été caractérisé par l'endommagement du boîtier de connexion et que les pertes d'exploitation correspondent au dommage découlant du dommage matériel.
Elle rappelle qu'ALLIANZ invoque les exclusions de garantie de l'article 3 des conditions générales au motif que les seuls biens livrés sont les boîtiers de connexion qu'elle a fabriqués et non pas les panneaux mais souligne qu'il a été nécessaire de procéder au remplacement des panneaux dans leur ensemble, la preuve d'un dommage à un bien autre que le boîtier ALRACK, à savoir au panneau SCHEUTEN dans son ensemble étant ainsi rapportée, précisant que la mise à feu des boîtiers ALRACK a en outre porté atteinte au bac acier sous-jacent et qu'aucune réparation du seul boîtier ne peut être réalisée en cas d'échauffement.
Si la cour ne retenait pas qu'ALLIANZ doit être condamnée à garantir les panneaux, elle prétend qu'elle doit à tout le moins garantir les frais de dépose et de repose nécessaires pour éviter tout risque de dommage imminent qui serait couvert par l'assurance de responsabilité civile. Et elle affirme que la condition que la mesure de remplacement soit prise par le souscripteur ou l'assuré est abusive, car il suffirait de ne rien entreprendre pour paralyser la mise en jeu de la garantie.
Elle fait également valoir que la décision rendue par le tribunal d'Amsterdam dont se prévaut ALLIANZ est isolée, provisoire et circonscrite aux faits de la procédure soumise à cette juridiction.
Elle soutient qu'aucune suspension des paiements ne peut être ordonnée par la cour puisque :
- ainsi qu'il résulte de la consultation de Maître YY... , avocat au Conseil, le droit néerlandais, qui admet l'exercice d'une action directe contre l'assureur de responsabilité, est inapplicable à l'action directe, le dommage s'étant produit sur le territoire français et le juge français devant appliquer ses propres règles aux modalités de règlement du litige, lesquelles ne prévoient aucunement la suspension des règlements jusqu'à ce que l'intégralité du dommage soit connue de l'assureur dans le cas d'un sinistre sériel,
- l'article 7:954 du code civil néerlandais qui prévoit la suspension des paiements la limite aux cas de dommages corporels et de décès,
- à supposer même que le droit à suspension des paiements ait vocation à s'appliquer, deux conditions doivent être réunies : des plafonds insuffisants et un nombre de demandeurs à l'indemnisation indéterminé, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque AIG a un plafond de 50 millions d'euros par année ; que la réclamation correspond à la demande d'indemnisation, distincte de la notion d'événement et que plusieurs réclamations inférieures à 5.000.000 euros pourront se cumuler pour atteindre la limite maximale de 50.000.0000 euros et les plafonds venant s'ajouter ainsi qu'il a été exposé ci-dessus dans la limite de 50.000.000 euros par année d'assurance.
Et elle affirme qu'AIG a désormais connaissance du nombre de sinistres pour lesquels elle a été mise en cause et qui lui ont été déclarés depuis 2012.
Elle précise que, comme le rappelle Maître YY... , en droit français le phénomène des sinistres sériels est appréhendé au travers de la notion de « globalisation des sinistres ›› et est régi par l'article L. 124-1-1 du code des assurances ; que chacun des sinistres vient amputer la garantie prévue pour l'année au cours de laquelle le premier survient jusqu 'à épuisement du plafond de garantie. Et elle conclut que l'application de la règle de droit néerlandais méconnaîtrait le droit propre de la victime à obtenir son indemnisation auprès de l'assureur de responsabilité, serait contraire à l'ordre public international, et permettrait à l'assureur de fixer unilatéralement le terme de la suspension des paiements.
Elle soutient enfin que la suspension des paiements est un moyen de défense portant sur l'exécution d'une décision de justice et donc de la compétence du juge de l'exécution.
CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :
I/ Sur l'existence, l'origine et la réparation du sinistre ainsi que sur les responsabilités dans sa survenue :
Sur son existence :
Attendu que certains des assureurs soutiennent qu'il n'y a pas eu de "sinistre" au sens des dispositions contractuelles qui prévoient un dommage matériel et prétendent que LM ENERGIE a procédé à des travaux préventifs ;
Mais attendu que le dommage matériel est caractérisé par l'existence d'un vice caché affectant l'installation, lequel empêche tout usage de la chose vendue en raison d'importants risques d'incendie, ainsi qu'il est démontré par les expertises produites aux débats ;
Que le sinistre constitué par l'impropriété des boîtiers cause dès lors des dommages aux biens de leurs acquéreurs qui ne peuvent les conserver pour l'usage qu'ils doivent remplir alors qu'ils ont pour fonction de permettre le fonctionnement d'une centrale de production d'énergie photovoltaïque ;
Qu'il ne saurait sérieusement être prétendu qu'il faudrait attendre qu'un incendie se déclare pour solliciter la garantie de l'assureur ;
Que le seul fait de ne pas pouvoir user des panneaux photovoltaïques caractérise bien le dommage matériel exigé pour entraîner une garantie, l'impropriété de l'objet vendu à sa destination et sa dangerosité en cas d'usage suffisant pour démontrer un tel dommage sans qu'il soit nécessaire que le bien ou les ouvrages qu'ils recouvrent soient entièrement détruits ;
Sur son origine :
Attendu que l'origine du sinistre n'est ni contestée ni contestable ;
Qu'il résulte en effet des conclusions de l'expertise judiciaire que tous les panneaux étaient équipés de boîtiers de connexion de marque SOLEXUS fabriqués par ALRACK;
Que l'expert a constaté, lors du démontage des panneaux, que l'enveloppe en matière plastique Xyron 644Z de plusieurs d'entre eux présentait d'importantes traces d'échauffement et que plusieurs boîtiers et panneaux, identifiés comme étant en défaut, avaient d'ailleurs été shuntés préalablement à son intervention ;
Qu'il a relevé que certains boîtiers des panneaux avaient été détériorés à la suite d'une mise à feu incidente interne ;
Qu'il résulte de l'analyse des composants à laquelle a procédé le laboratoire IC 2000 que les contacts semi permanents connecteur femelle languette mâle des cartes SOLEXUS sont le siège de vieillissement par corrosion sèche, relaxation et croissance d'intermétalliques en raison principalement de la température et d'une corrosion par micro déplacements -ou fretting corrosion- en raison des cycles thermiques ; que sous des conditions de fonctionnement habituelles les échauffements peuvent atteindre 110 à 120o ;
Que le laboratoire a précisé que les dégradations de résistances de contact les plus spectaculaires ont été relevées sur les contacts semi permanents des pôles positifs de cartes SOLEXUS et que pour certains, ces échauffements dégénèrent en emballement thermique avec fusion du cuivre et destruction du contact ;
Qu'il a conclu que le vieillissement en service des contacts semi permanents est sensible à la relaxation et aux phénomènes de fretting corrosion ; que la relaxation diminue la force de contact, ce qui aggrave la fretting corrosion, cette dernière pouvant également être augmentée par la présence de lacunes au sein de l'étamage des cartes SOLEXUS, ces lacunes favorisant la fragmentation et donc affaiblissant la tenue du revêtement au fretting corrosion ;
Que compte tendu des constats réalisés il a relevé qu'apparaît un fort risque de panne ou de sinistre par départ de feu au niveau des modules équipés de boîtiers SOLEXUS et il a indiqué que "Pour l'estimation éventuelle de durées de vie on pourra s'appuyer sur les nombreux travaux réalisés sur les vieillissements de contacts à base de cuivreux étamés sous l'effet de cycles thermiques" ;
Attendu que s'appuyant tant sur ses propres constatations que sur les travaux de ce laboratoire, l'expert judiciaire conclut, sans être contredit par d'autres analyses ou avis techniques, qu'à plus ou moins brève échéance les composants des boîtiers présentent des risques potentiels de mise à feu dont il est impossible de prédire l'évolution et que l'installation était donc atteinte de désordres à caractère sériel puisque tous les boîtiers SOLEXUS en sont atteints ;
Que ces conclusions sont confirmées par le rapport INES (Institut National de l'Energie Solaire) en date du 10 décembre 2014 qui retient que les dégradations du contact des boîtiers sont inéluctables de par la conception même du type de connecteurs placés dans ce type de boîte de jonction ; qu'en effet le contact ponctuel et glissant du connecteur femelle sur le connecteur mâle ne peut être empêché ; que par suite, les effets de "fretting corrosion" (micro-mouvements) résultant de ce glissement mécanique ne pourront pas plus être conjurés ;
Que l'INES indique que les essais de fretting corrosion ont démontré qu'il y a une dégradation rapide des zones ponctuelles de contact électrique et que la résistance limite est dépassée en quelques milliers de cycles ;
Qu'il a précisé qu'il existe probablement des phénomènes aggravants tels que la corrosion humide et la température, ce qui impactera alors plus le pôle positif et qu'il sera relevé que cet impact plus important sur ce pôle a bien été observé par l'expert judiciaire dans les boîtiers équipant l'installation de LM ENERGIE ;
sur les mesures à mettre en oeuvre pour faire cesser le sinistre :
Attendu que l'expert a retenu que les 2275 panneaux devaient être remplacés pour un montant total de 438.150,27 euros HT et que ne pouvaient être conservés que les onduleurs et armoires de protection ;
Qu'interrogé sur la possibilité de ne pas remplacer les panneaux mais de procéder uniquement à la réparation des boîtiers de connexion, il n'a pas entièrement exclu cette possibilité mais a cependant fait observer qu'aucun rapport d'essai ne lui avait été communiqué et il a attiré l'attention sur l'extrême rigueur que nécessiterait un tel remplacement, s'interrogeant sur un contrôle d'état électrique et mécanique du module, le simple examen visuel ne permettant pas de vérifier que les panneaux n'ont pas subi des contraintes electrothermiques anormales ;
Qu'il s'est également interrogé sur la pérennité de l'indice IP 65 du boîtier en précisant qu'il avait constaté par expérience la pénétration d'humidité et de poussières dans ces boîtiers et en indiquant que l'usage d'un tournevis pour dissocier le couvercle du socle sera, malgré toutes les précautions prises par le technicien intervenant, source de lésions au niveau du joint d'étanchéité et que ces dégradations seront génératrices de difficultés à plus ou moins brève échéance ;
Qu'il a en outre rappelé que tous les connecteurs devraient être alors contrôlés, ce qui imposerait la reprise de la totalité des câblages et que de telles modifications de l'existant devraient être validées par un contrôleur technique indépendant ;
Attendu que ces explications et conclusions techniques sont d'autant plus convaincantes qu'il est constant qu'en avril 2014 les solutions réparatoires des boîtiers n'avaient pas obtenu de certification acceptable ;
Que l'argumentation de certaines parties de ce qu'il était suffisant de procéder à la réparation des boîtiers sera dès lors écartée en ce qu'elle repose sur des expertises techniques intervenues après l'expertise effectuée dans le présent litige sans qu'il soit justifié, devant la cour, que la mise en oeuvre de ces solutions a été validée par des essais ou contrôles effectués par des laboratoires indépendants ou même qu'elle soit effectivement intervenue sans survenance de nouveaux sinistres ;
Qu'à la date de dépose des panneaux litigieux et au regard de la nécessité d'une réparation rapide pour réduire les pertes de recettes subies par la société LM ENERGIE, la seule solution technique sûre permettant d'éviter tout risque de sinistre était bien la dépose et le remplacement de tous les panneaux et de leurs boîtiers ;
Que le préjudice matériel subi par LM ENERGIE est donc celui résultant d'une telle obligation ;
Sur les responsabilités dans la survenue du sinistre :
Attendu que les conclusions techniques qui viennent d'être détaillées et qui retiennent des dysfonctionnements du boîtier de connexion ne sont pas contestées par les assureurs de SCHEUTEN et d'ALRACK ou par celui de REV'SOLAIRE, lequel ne dénie par ailleurs pas que la responsabilité de son assurée est engagée au titre de la garantie des vices cachés envers LM ENERGIE ; qu'elle conteste cependant que la venderesse soit tenue d'une garantie décennale et qu'il sera statué ci-après sur cette seconde garantie ;
Qu'envers REV'SOLAIRE et LM ENERGIE, la responsabilité sur ce même fondement de SCHEUTEN, qui fournit un panneau photovoltaïque manufacturé comprenant le verre, les cellules, le boîtier, et les connecteurs, n'est pas discutable et n'est pas plus déniée ;
Qu'AIG et ALLIANZ s'opposent cependant sur les responsabilités respectives de leurs assurées, ALLIANZ soutenant que la conception du boîtier de raccordement SOLEXUS aurait entièrement incombé à SCHEUTEN qui aurait dirigé la fabrication de cette pièce tandis que AIG affirme qu'ALRACK n'est pas le concepteur du produit défaillant, seule SCHEUTEN, détentrice des brevets de fabrication, lui ayant donné des directives et ayant supervisé ses travaux ;
Mais attendu que l'assureur d'ALRACK entretient une confusion permanente entre la conception du raccordement du boîtier aux cellules photovoltaïques du panneau, lequel relève du système 8 points breveté par SCHEUTEN, et la conception du boîtier SOLEXUS lui-même, et en particulier le choix, la nature et l'assemblage de ses composants comprenant les broches de sorties vers les câbles qui permettent le raccordement du panneau vers la série de panneaux voisins ;
Que c'est la languette de sortie positive du circuit imprimé situé dans le boîtier et son raccordement à la broche du câble qui sont le siège d'un échauffement anormal et qu'il n'existe, ainsi que l'a retenu l'expert T... désigné dans un autre litige sans être démenti par le rapport d'expertise déposé dans la présente instance, aucun lien de causalité entre la conception du raccordement du boîtier vers le panneau relevant du brevet SCHEUTEN et les échauffements au droit de la jonction positive en sortie du boîtier vers le câble extérieur au panneau ;
Qu'il ne peut donc être contesté que le système 8 points breveté par SCHEUTEN n'est pas impliqué dans la survenue des désordres qui ont été causés par les connecteurs à languette acquis par ALRACK seule auprès de société tierces ou fabriquées par elle dans un matériau non adapté à l'usage auquel il était destiné puisqu'il résulte tant des conclusions du laboratoire IC 2000 rapportées ci-dessus que de l'expertise de Monsieur T... produite par AIG sous le numéro 13 des pièces communiquées que c'est la languette de sortie du circuit imprimé et son raccordement à la broche du câble qui sont le siège de l'échauffement anormal ;
Attendu qu'il est indifférent que les boîtiers SOLEXUS ne puissent se trouver en vente libre sur le marché et aient été exclusivement montés à l'arrière des modules photovoltaïques de SCHEUTEN puisqu'ALRACK a apposé sa propre marque sur ces boîtiers à la conception desquels elle a participé ;
Attendu en effet qu'il résulte des pièces communiquées et des explications concordantes des parties que les panneaux SCHEUTEN étaient auparavant équipés de boîtiers KOSTAL ;
Que SCHEUTEN, manifestement désireuse de faire des économies sur le coût de ces boîtiers, a pris contact avec ALRACK pour en obtenir de nouveaux ;
Que, contrairement à ce que prétend ALRACK, le contrat conclu entre les parties ne permet pas de retenir qu'elle était entièrement soumise aux instructions de sa cocontractante, puisque :
- l'article 2.1 prévoit que "ALRACK assurera la conception, la construction et la production du système à titre exclusif comme prévu et défini par le présent contrat" ;
- l'article 2.2 de cette même convention précise que "l'obligation de SCHEUTEN consiste en la fourniture de la documentation du connecteur mâle et femelle 8 points" (qui constitue une partie essentielle du système) et de toutes les informations le concernant à ALRACK" ;
- l'article 4.1 prévoit que "tous les droits de propriété (intellectuelle et/ ou industrielle ex: brevets) associés au connecteur mâle et femelle 8 points reviennent exclusivement à SCHEUTEN" ;
- l'article 4.2 du contrat indique qu'ALRACK "a droit à l'ensemble des droits titres et intérêts actuels et futurs associés au système SOLEXUS, aux résultats de la conception, de la construction et de la production du système ainsi qu'à tout le savoir-faire", hormis, précise l'article 4.4 "les droits de propriété intellectuelle ou industrielle";
Que l'article 4.5 mentionne quant à lui que, dans le cas où la construction du connecteur peut résulter en une invention liée à ce connecteur susceptible d'être brevetable, toute demande de brevet se fera sous la direction de SCHEUTEN ;
Qu'enfin, dans l'article 7.1, ALRACK déclare et garantit à SCHEUTEN que ses salariés et ses sous-traitants présenteront "les qualifications techniques suffisantes pour assurer la conception, le développement l'ingénierie la construction et la production dans le cadre du présent contrat" ;
Que ces dispositions contractuelles rappellent à plusieurs reprises qu'ALRACK est chargée de la conception du boîtier dans lequel elle est uniquement tenue d'intégrer le système 8 points de SCHEUTEN mis à sa disposition et breveté par SCHEUTEN, ce qui l'empêchait de faire breveter le système SOLEXUS sans passer par elle ;
Qu'ALRACK avait en charge la conception, le développement, l'ingénierie et la mise en place des autres éléments de la carte qu'elle devait construire autour de ce connecteur en définissant les composants nécessaires ;
Attendu que ces conditions contractuelles sont confirmées par l'exécution du contrat dont témoignent les nombreux échanges de courriels intervenus entre les parties entre 2008 et 2010 ;
Que, contrairement à ce que soutient l'assureur d'ALRACK, ces courriers n'établissent pas que SCHEUTEN donnait des directives précises à ALRACK et dirigeait tant la conception que la fabrication du boîtier mais démontrent au contraire qu'ALRACK et SCHEUTEN ont travaillé de conserve de la phase de conception jusqu'à celle de fabrication et de diffusion des boîtiers ;
Qu'ALRACK n'était donc pas un simple exécutant ainsi que le soutient son assureur mais a développé son propre produit en étroite collaboration avec SCHEUTEN, qui est intervenue activement dans les différents échanges techniques, le nouveau boîtier devant en effet, pour des raisons d'interchangeabilité, être une copie du boîtier KOSTAL auparavant utilisé par SCHEUTEN qui a imposé à sa cocontractante des prix la contraignant à des économies ayant eu une incidence technique défavorable (expertise COTTAREL pièce 5 de SMA) mais ALRACK ayant validé et accepté les indications de mise en oeuvre qui lui étaient transmises ;
Attendu que SCHEUTEN et ALRACK sont bien tous deux fabricants du produit SOLEXUS et comme tels producteurs de ce produit ;
Que, certes, la responsabilité du fait des produits dangereux ne joue que pour la réparation du dommage qui résulte d'une atteinte à la personne ou pour celle du dommage, supérieur à un montant déterminé par décret (500 euros) qui résulte d'une atteinte à un bien autre que le produit défectueux lui-même mais qu'en l'espèce, et contrairement à ce que soutient AIG, il est bien démontré un dommage causé à des biens autres que les biens fabriqués par ALRACK ;
Qu'en effet d'une part les panneaux photovoltaïques équipés par ces boîtiers sont détruits ou très détériorés en cas de départ de feu ainsi qu'il est démontré par l'expertise LEMERLE (pièce 16 de SMA), d'autre part les supports de ces panneaux, à savoir les bacs aciers situés en sous face sont également dégradés par ces départs de feu, enfin les bâtiments supportant ces panneaux sont eux-mêmes soumis à des risques d'incendie ainsi que le démontrent plusieurs sinistres survenus dans des immeubles d'habitation équipés par les panneaux SCHEUTEN-SOLEXUS ;
Que, dans son arrêt du 4 juin 2009, Moteurs Leroy U... (C-285/08), la Cour de justice de l'Union européenne, saisie par la Cour de cassation française, a dit pour droit que "La directive 85/374/CEE du Conseil, du 25 juillet 1985, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux, doit être interprétée en ce sens qu'elle ne s'oppose pas à l'interprétation d'un droit national ou à l'application d'une jurisprudence interne établie selon lesquelles la victime peut demander réparation du dommage causé à une chose destinée à l'usage professionnel et utilisée pour cet usage, dès lors que cette victime rapporte seulement la preuve du dommage, du défaut du produit et du lien de causalité entre ce défaut et le dommage" ;
Attendu qu'est défectueux le produit qui n'apporte pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, ce qui est le cas en l'espèce puisque les boîtiers litigieux peuvent causer un incendie ;
Que la responsabilité de SCHEUTEN et d'ALRACK est en conséquence engagée sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux prévue par les articles 1245 et suivants du code civil ;
Qu'elle l'est également sur le fondement des vices cachés puisqu'il est constant que les boîtiers sont affectés de défauts de conception et de fabrication et que le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux exclut l'application d'autres régimes de responsabilité uniquement lorsqu'ils sont fondés sur le défaut d'un produit qui n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, ce qui n'est pas le cas de la garantie du vendeur et du fabricant à raison d'un vice caché affectant le bien vendu ou fabriqué ;
Qu'au regard de ce qui vient d'être exposé sur son rôle de conception et sa liberté de choix dans les matériaux utilisés, la responsabilité délictuelle d'ALRACK en raison de manquements à ses obligations contractuelles envers SCHEUTEN est également engagée envers les tiers, contrairement à ce que prétend son assureur ;
Qu'il sera en conséquence retenu que SCHEUTEN et ALRACK ont, envers les tiers, une responsabilité entière commune dans la survenue des désordres affectant les boîtiers à l'origine du sinistre litigieux et qu'il n'y a pas lieu à procéder vis à vis à un partage de responsabilité ;
Que ce n'est que dans les rapports entre elles, et au regard de ce qui vient d'être exposé, qu'elles seront déclarées responsables chacune à hauteur de 50% des sinistres survenus ;
II/ Sur les demandes formées par LM ENERGIE :
En ce qui concerne les demandes formées envers AXA :
1 / sur leur recevabilité
a/ sur la prescription :
Attendu qu'AXA soutient tout d'abord que LM ENERGIE serait prescrite en ses demandes formées à son encontre ;
Qu'elle fait en effet valoir que la prescription a été interrompue par l'assignation en référé, que le délai pour agir n'a été suspendu que pendant la durée de l'instance à laquelle il a été mis fin une première fois le 12 décembre 2012, une nouvelle instance aux fins d'extension de la mission d'expertise à d'autres parties ayant été close par l'ordonnance du 26 juin 2013 faisant droit à cette demande ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article L 114-2 du code des assurances la prescription est interrompue par l'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception adressée par l'assuré à son assureur ;
Qu'en l'espèce, le délai de prescription avait commencé à courir, ainsi qu'en conviennent les parties, à compter du 12 décembre 2012, voire du 27 juin 2013, date de la dernière ordonnance de référé étendant les opérations d'expertise ;
Qu'en tout état de cause, LM ENERGIE a adressé le 27 octobre 2014 à son assureur un courrier recommandé avec avis de réception qui conteste le refus de garantie qui lui est opposé et rappelle expressément l'effet interruptif de cette lettre ;
Qu'elle a assigné AXA devant le tribunal de commerce le 3 décembre 2015, date à laquelle, au regard de ces éléments, elle n'était pas prescrite en son action ;
b/- sur l'absence de qualité et d'intérêt à agir :
Attendu qu'AXA fait valoir que seule la société OEUF 2000 a signé un contrat de revente d'électricité avec EDF avant la déclaration de sinistre du 30 octobre 2012 et ce alors que LM ÉNERGIE était propriétaire de l'installation depuis l'origine ; que le montage opéré par LM ENERGIE pour se substituer à OEUF 2000 dans ses rapports avec EDF ne suffit pas pour lui conférer qualité et intérêt à agir puisqu'il s'agit en réalité d'une manoeuvre frauduleuse ayant pour seul but de régulariser la déclaration de sinistre, cet avenant ayant été signé en décembre 2012, soit postérieurement à la découverte des vices affectant les boîtiers ALRACK et prenant effet par malice à compter de septembre 2012 ;
Qu'elle insiste sur le fait que son assurée n'a jamais produit de comptes permettant de vérifier l'encaissement de la revente d'énergie et que sa pièce 45 produite pour la première fois devant cette cour n'est en rien un justificatif comptable ;
Mais attendu que c'est bien LM ENERGIE qui s'est assurée au titre d'une perte de recettes et que l'argument d'une fraude commise par elle en obtenant transfert à son profit du contrat de vente de l'électricité initialement conclu entre OEUF 2000 et EDF est dépourvue de toute pertinence ;
Qu'en effet OEUF 2000 et LM ENERGIE, qui avaient les mêmes dirigeants, ont pu ne pas prêter attention à l'identité du revendeur d'énergie, mais qu'il est constant que ce dernier était bien LM ENERGIE, seule à avoir une activité de production d'énergie, qui n'a pas agi en fraude d'AXA en se déclarant revendeur lors de la survenue du sinistre ;
Que si cette substitution de producteurs peut poser difficultés pour déterminer le montant de l'indemnisation éventuelle de l'assurée, elle ne peut caractériser une fraude;
Qu'il résulte en effet de la pièce no12 d'AXA que, si l'avenant substituant LM ENERGIE à OEUF 2000 en qualité de revendeur d'énergie a été signé le 7 décembre 2012, il y est expressément mentionné que " par courrier du 21 juin 2012 l'ancien titulaire producteur a informé l'acheteur que l'installation était transférée au producteur LM ENERGIE", ce qui explique que l'avenant prenne effet le 7 septembre 2012, date anniversaire de la réception de l'installation ;
Qu'il en résulte qu'OEUF 2000 n'est restée exploitante de l'installation que du mois de février au mois de septembre 2012 et que le transfert entre elle-même et LM ENERGIE, sollicité avant la connaissance du sinistre, est dépourvu de toute fraude et opposable à l'assureur ;
Qu'à la date du sinistre LM ENERGIE était seul revendeur de l'énergie produite et avait qualité et intérêt à agir ;
Que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action qu'elle a engagée à l'encontre d'AXA ;
2/ sur les conditions de garantie :
Attendu que LM ENERGIE fait valoir de manière exacte mais sans pertinence que son assureur a produit en justice des conditions générales différentes de celles qui lui ont été remises et qu'elle communique devant la cour ;
Qu'en effet, la comparaison attentive de ces deux documents permet de vérifier que, si leur graphisme a changé et si certaines informations complémentaires, concernant notamment la médiation ou des définitions ajoutées en annexe, figurent uniquement dans l'exemplaire remis par AXA au tribunal et à la cour, les conditions générales d'assurance décrites dans ces deux exemplaires sont strictement identiques ;
Attendu qu'il résulte des conditions particulières et générales concordantes communiquées par les parties que LM ENERGIE a souscrit, le 6 juin 2011, une assurance "Bris de machines" auprès de la société AXA FRANCE IARD ;
Que le contrat indique que LM ENERGIE exerce une activité de production d'électricité par panneaux photovoltaïques sur les hangars 1,2,3,4,5,6,7 de la ferme avicole de VILLECANTE et qu'AXA garantit une installation solaire photovoltaïque avec pertes de recettes au titre de 2275 modules SCHEUTEN type P6-54 d'une valeur de remplacement à neuf de 1.911.000 euros (franchise 7.228 euros); que les panneaux sont intégrés au bâti ; que le bâtiment sur lequel ils se trouvent est à usage de remise agricole ;
Qu'il est précisé que la garantie "bris de machines" souscrite par LM ENERGIE est composée d'une garantie de base "dommage aux biens" et de garanties facultatives, notamment celle de "frais supplémentaires" dont les conditions particulières indiquent expressément qu'elle n'a pas été souscrite par LM ENERGIE et celle de "pertes de recettes" qui a, au contraire, été souscrite par l'assurée ;
Que les biens et dommages garantis par AXA sont ainsi décrits : " Nous garantissons les machines énumérées à l'inventaire contre toute détérioration, destruction soudaine et accidentelle ainsi que le vol" (..) "A titre d'exemple, les dommages peuvent résulter (...) d'événements d'origine interne : défaut de conception, de construction, vice de la matière" ;
Qu'il est précisé par les conditions générales qu'en cas de sinistre, AXA doit être informée dès que l'assurée aurait connaissance du dommage et au plus tard dans les 5 jours ouvrés et que LM ENERGIE devra prendre toutes les mesures nécessaires pour limiter l'importance du sinistre et sauvegarder les biens garantis et réduire au minimum l'arrêt total ou partiel du fonctionnement des installations en cas de souscription de la garantie pertes d'exploitation ;
Que l'assurée devait également déclarer dans un délai de 15 jours à partir du moment où elle en avait connaissance les circonstances nouvelles qui avaient pour conséquence soit d'aggraver les risques soit d'en créer de nouveaux et rendaient de ce fait inexactes ou caduques les réponses faites lors de la souscription du contrat ou de la dernière déclaration ;
Attendu qu'AXA fait valoir qu'elle n'est pas tenue à garantie puisque :
- l'assurée ne lui a pas déclaré le dommage mais a seulement signalé une aggravation du risque,
- l'assurée n'a pas respecté ses obligations contractuelles en maintenant en service l'installation alors qu'elle aurait dû, aux termes du contrat, prendre toutes les mesures pour éviter le sinistre,
- il n'y a pas eu de détérioration brusque et soudaine de l'installation,
- il n'y a pas eu de dommage matériel, LM ENERGIE ayant procédé à des travaux préventifs,
- la date du sinistre n'est pas connue et les dégradations constatées sur les panneaux sont nécessairement postérieures au mois d'octobre 2012, date de vérification de l'installation par REV'SOLAIRE qui n'a pas constaté de dégâts,
- son assurée a agi de mauvaise foi en se substituant au revendeur d'énergie pour permettre la prise en charge du sinistre, en ne stoppant pas la production d'énergie, en formant des demandes au titre de garanties non souscrites ou en refusant de déclarer ses recettes et de produire ses comptes ;
Attendu qu'il convient ici de rappeler que la ferme avicole de VILLECANTE a reçu, le 3 octobre 2012, un courrier de REV'SOLAIRE l'avisant de ce que le fournisseur des panneaux avait cessé son activité en mars 2012 et avait fait état d'une série de panneaux photovoltaïques défectueux et de ce qu'en vue de prévenir tout risque, la venderesse allait procéder à la vérification de l'ensemble de l'installation ;
Qu'après cette visite, la prestataire a fait connaître à la ferme avicole de VILLECANTE que ses panneaux étaient concernés par la déclaration de défectuosité de SCHEUTEN avec un risque de combustion et d'incendie et qu'elle lui demandait donc de stopper son installation afin d'anticiper tout accident et de se rapprocher de son assureur ;
Attendu que, par courrier en date du 30 octobre 2012, le conseil de LM ENERGIES a adressé à AXA un courrier ainsi rédigé :
"Par courrier dont vous trouverez copie en annexe, l'installateur, la société REV SOLAIRE :
-l'informe en date du 3 octobre 2012 que le fournisseur de modules PV SCHEUTEN SOLAIRE leurs a fait part d'une série de modules défectueux
- l'informe en date du 26 octobre 2012 que ses panneaux sont concernés par la série de modules déclarés défectueux par son fabricant et lui demande de couper la centrale afin d'anticiper tout accident.
Je suis donc amené à vous déclarer ce sinistre au nom et pour le compte de ma cliente." ;
Qu'il résulte des termes dépourvus de toute ambiguïté de ce courrier que LM ENERGIE a bien déclaré un sinistre et n'a pas, contrairement à ce que prétend AXA, fait connaître un nouveau risque modifiant les conditions de garantie ;
Qu'il n'existait d'ailleurs aucun nouveau risque, le risque d'incendie étant présent dès l'origine mais étant simplement ignoré de LM ENERGIE lors de la souscription de l'assurance ;
Attendu que le conseil de LM ENERGIE, conscient de la contradiction affectant les obligations contractuelles de sa cliente envers son assureur, puisque LM ENERGIE devait, d'une part prendre toutes mesures pour éviter un sinistre mais, d'autre part, réduire au minimum la durée d'interruption de l'activité de production, sollicitait dans ce même courrier l'avis d'AXA sur la conduite à tenir et lui demandait de prendre position dans les plus brefs délais ;
Que l'assureur n'a donné aucun avis mais qu'il a été informé de la décision de son assurée de poursuivre l'exploitation, ce qui se déduit très clairement de l'avenant qu'il lui a imposé le 19 novembre 2012, lequel excluait à compter de cette date les dommages dus à l'incendie, et/ou à l'explosion ainsi que les dommages consécutifs à ces événements tels qu'extinction, démolition ou déblaiement ;
Que cet avenant précisait que ces garanties seraient de nouveau acquises à l'assurée lorsque cette dernière aurait remis à AXA une attestation de remise en conformité de l'installation concernant les panneaux photovoltaïques défectueux de marque SCHEUTEN SOLAR ;
Que cet avenant démontre que l'assureur savait bénéficier du maintien en fonctionnement de l'installation évitant ou à tout le moins réduisant le préjudice de pertes de recettes, tout en ne garantissant plus les risques d'incendie dont il était informé puisqu'il avait été rendu destinataire des courriers de REV' SOLAIRE ;
Que c'est donc sans bonne foi qu'AXA soutient aujourd'hui que LM ENERGIE n'aurait pas pris toutes les mesures de sécurité nécessaires pour réduire les risques alors qu'elle ne s'est pas opposée au maintien de la production photovoltaïque sur lequel son avis lui avait été expressément demandé et qu'elle ne peut reprocher à son assurée d'avoir dû choisir entre deux obligations contractuelles antinomiques ;
Attendu que les définitions annexées au contrat "bris de machine" ne font état d'aucune explication sur ce qu'est un tel"bris" mais que les conditions générales d'assurance explicitent cette notion en indiquant qu'il s'agit d'une "détérioration ou d'une destruction soudaine et accidentelle subie par les biens assurés" ;
Que l'assureur fait valoir qu'il n'y a pas eu de détérioration soudaine puisque les vices inhérents aux boîtiers n'entraînaient pas de rupture brutale et ne se découvraient qu'à la suite d'un usage prolongé ;
Que l'assurée prétend quant à elle que les conditions de garantie n'exigent pas un dommage soudain mais un fait générateur soudain ; qu'en l'espèce, si le dommage de perte d'exploitation s'est aggravé progressivement, les panneaux ont bien fait l'objet d'une dégradation soudaine ;
Qu'elle affirme que la garantie lui serait acquise au motif que le sinistre est dû à la défaillance des modules intégrés dans ses toitures et que son assurance garantit les dommages pouvant résulter d'événements d'origine interne : défaut de conception, de construction, vice de la matière ;
Mais attendu qu'il résulte des termes clairs du contrat qu'AXA ne garantit les défauts de conception, de construction, vice de la matière dont se prévaut LM ENERGIE qu'en cas de détérioration soudaine et accidentelle ;
Qu'au regard de la définition précise du risque garanti, LM ENERGIE n'est pas fondée à prétendre que les conditions de garantie n'exigent pas un dommage soudain mais un fait générateur soudain puisqu'il est clairement précisé que c'est la détérioration qui doit être soudaine, c'est à dire intervenue dans l'instant, et accidentelle, c'est à dire due à un cas fortuit ;
Que LM ENERGIE ne peut convaincre en faisant valoir que, si le dommage de perte d'exploitation s'est aggravé progressivement, les panneaux ont bien fait l'objet d'une dégradation soudaine ;
Qu'en effet, il résulte des conclusions de l'expertise, ci-dessus rappelées, et du rapport du laboratoire IC 2000 que les boîtiers ont subi un phénomène de fretting corrosion pour les raisons exposées ci-dessus ;
Que le laboratoire explique très clairement que c'est "le vieillissement en service des contacts semi permanents" qui est accéléré par la relaxation et les phénomènes de fretting corrosion ; que la relaxation diminue la force de contact, ce qui aggrave la fretting corrosion, cette dernière pouvant également être augmentée par la présence de lacunes de l'étamage des cartes;
Qu'il résulte de ces explications sans équivoque correspondant aux observations effectuées dans les autres dommages sériels que la détérioration des boîtiers entraînant celle des panneaux survient certes de manière accidentelle mais non de manière soudaine ;
Qu'elle évolue en effet plus ou moins lentement en fonction des conditions climatiques subies, la détérioration résultant non d'un événement soudain mais d'une corrosion par nature évolutive ;
Que les composants des boîtiers ont donc été progressivement corrodés, c'est à dire rongés sous l'action du milieu ambiant, en raison d'une usure de contact ;
Que le terme "fretting" est d'ailleurs utilisé en physique pour décrire la corrosion d'un matériau lorsque ses deux surfaces, qui ne devraient pas être soumises à des mouvements, présentent en fait des déplacements microscopiques entre elles, ce qui génère un mécanisme d'usure par abrasion ;
Que la seule utilisation du terme "fretting corrosion" suffit pour établir l'existence d'un phénomène d'usure et l'absence d'une détérioration soudaine des boîtiers et des panneaux qu'ils équipaient ;
Que LM ENERGIE ne l'ignorait pas puisqu'elle a choisi de continuer l'exploitation de son installation quasi neuve en pariant sur l'absence de corrosion immédiate ;
Qu'il ne peut dès lors qu'être constaté que, le sinistre dont fait état LM ENERGIE n'étant pas dû à une détérioration soudaine des boîtiers SOLEXUS mais à leur vieillissement progressif prématuré dû à une erreur de conception entraînant une fretting corrosion, ni le dommage matériel ni le dommage immatériels ne sont garantis par l'assurance "bris de machine" souscrite ;
Que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres arguments (par ailleurs dépourvus de pertinence puisque le dommage matériel est caractérisé par l'existence d'un vice caché affectant l'installation et que la date du sinistre est celle de l'annonce de l'existence de ce vice), présentés par l'assureur pour dénier sa garantie, LM ENERGIE sera déboutée de l'intégralité de ses demandes formées envers AXA et sera condamnée à lui verser une indemnité de procédure ;
En ce qui concerne les demandes formées envers SMA, assureur de REV'SOLAIRE:
Attendu qu'il n'est pas contesté que LM ENERGIE dispose d'une action directe envers cet assureur ;
Que c'est à raison que SMA fait valoir que son assurée REV'SOLAIRE, qui n'est pas producteur des boîtiers, ne peut être tenue au titre de la garantie des produits défectueux, le vendeur étant exclu, par les dispositions européennes transposées en droit français, d'une telle garantie qui n'incombe qu'aux producteurs ;
Qu'il est vrai que le jugement déféré est affecté d'une omission de statuer puisqu'il n'a pas prononcé de condamnation de SMA et a simplement retenu qu'elle devait garantie à Maître J..., ès qualité de liquidateur de REV'SOLAIRE, qu'il n'a pas condamné à paiement ;
Qu'il conviendra donc de réparer éventuellement cette omission de statuer ;
1/ sur l'application de l'article 1792 du code civil :
Attendu que LM ENERGIE fait valoir qu'en application des dispositions de l'article 1792 du code civil, REV'SOLAIRE est responsable de plein droit des dommages affectant l'installation et souligne que l'article 1792-2 du même code étend cette responsabilité aux éléments d'équipement qui font indissociablement corps avec l'ouvrage ; qu'elle fait également valoir que la centrale photovoltaïque est un ouvrage en soi ; qu'elle a nécessité des travaux lourds et que les désordres compromettent sa solidité et la rendent impropre à sa destination ;
Qu'au contraire, SMA prétend que la responsabilité décennale ne peut trouver à s'appliquer puisque les panneaux photovoltaïques sont des éléments dissociables et constituent un équipement industriel à vocation exclusivement professionnelle exclu légalement du champ d'application de la responsabilité bienno-décennale en application de l'article 1792-7 du même code ;
Attendu qu'aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ;
Qu'un "ouvrage" au sens de cet article n'est pas nécessairement une construction ;
Attendu que SMA fait valoir que le fait que les panneaux soient intégrés au bâti ne suffit pas à leur conférer la nature d'immeuble désigné par l'article 1792 du code civil; que l'expert n'a jamais indiqué que l'installation photovoltaïque était intégrée par incorporation physique et indivisible au bâtiment existant ; que les modules photovoltaïques ont été changés sans toucher au couvert du bâtiment ;
Mais attendu qu'un tel raisonnement ne peut être tenu par SMA qu'en dissociant artificiellement les travaux confiés à REV'SOLAIRE alors que ces derniers constituaient un tout ;
Qu'en effet REV'SOLAIRE s'est vu confier par LM ENERGIE l'intégralité de l'étude et des travaux concernant l'installation litigieuse, laquelle comprenait non seulement la pose de panneaux photovoltaïques, mais également la fourniture et la pose des bacs aciers permettant d'assurer l'étanchéité et la couverture des 7 hangars sur lesquels ont été installés les panneaux ;
Que le contrat conclu avec REV'SOLAIRE prévoyait d'ailleurs expressément, ainsi qu'il a été ci-dessus rappelé, des travaux de couverture et d'étanchéité ;
Que, même si ces travaux ont été sous-traités, REV'SOLAIRE en assumait la responsabilité vis à vis du maître de l'ouvrage et que l'installation de la centrale photovoltaïque a dès lors été réalisée grâce à des travaux constituant un tout, dans le cadre du remplacement total d'une toiture et de la pose d'un complexe d'étanchéité adapté aux panneaux photovoltaïques, l'installation des bacs aciers n'ayant pas de sens sans la pose des panneaux et cette pose ne pouvant intervenir sans ces bacs ;
Que les panneaux étaient installés sur des hangars avicoles et qu'il ne s'agissait donc pas d'éléments d'équipements dont la fonction exclusive était d'assurer l'exercice d'une activité professionnelle dans l'ouvrage qu'ils recouvraient mais que l'installation photovoltaïque était un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil puisqu'elle permettait, dans son ensemble qui ne peut être dissocié, d'assurer le clos et le couvert de sept immeubles tout en produisant de l'énergie ;
Qu'il importe donc peu qu'une partie seulement de l'ouvrage soit affectée par des désordres puisque la garantie décennale due par la prestataire doit s'appliquer à l'ensemble de cet ouvrage ;
Que la responsabilité de REV SOLAIRE étant engagée sur le fondement de la garantie décennale il n'y a pas lieu d'examiner les arguments des parties sur les garanties offertes par l'assurance intercalaire ;
2/ sur la garantie de SMA :
a/ sur l'étendue de la garantie :
Attendu que REV'SOLAIRE a notamment souscrit auprès de SMA une assurance professionnelle des entreprises du bâtiment et des travaux publics CA 2000 garantissant les dommages affectant les ouvrages après réception ;
Que les montants de garantie sont indiqués comme étant "à hauteur du coût des travaux de réparation de l'ouvrage, (les travaux de réparation, notamment en cas de remplacement des ouvrages comprennent également les travaux de démolition, déblaiement, dépose ou démontage éventuellement nécessaires) avec une franchise de 10% des dommages et un maximum de franchise de 8.250 euros" ;
Que SMA soutient sans fondement que le procédé d'intégration autorisé par l'assureur ne visait pas expressément les modules SCHEUTEN puisque l'attestation d'assurance comme les conditions particulières de la police ne font état d'aucune marque de module particulier imposée pour la validité du contrat ;
Attendu cependant que les conditions particulières précisent que le contrat prend effet le premier janvier 2010 et que les activités garanties sont celles ensuite énoncées à savoir : "Installations photovoltaïques par intégration ou surimposition en couverture et en étanchéité en silicium mono ou polycristallin ou amorphes avec sous-traitance des travaux de couverture et d'étanchéité. Les surfaces installées par opération sont limitées à 1.000 m2 ;
Que LM ENERGIES soutient que, contrairement à ce que prétend SMA, les travaux de REV'SOLAIRE ne sortent pas de l'activité qu'elle avait déclarée puisque chaque toiture équipée était inférieure à 1.000 m2, et que seule la superficie totale des 7 hangars était de 3.367 m2 ;
Que cette affirmation est exacte puisqu'il résulte de l'expertise que le bâtiment 1 a une superficie de 37,50 x 15 mètres, les bâtiments 2 et 3 de 80 x 13 mètres, les bâtiments 4 et 5 de 90 x 13 mètres, le bâtiment 6 de 90 x 13 mètres et le bâtiment 7 de 56,45 x 7,50 mètres + 50 x 7,50 mètres ;
Mais attendu qu'il sera relevé, qu'au gré de ses intérêts, LM ENERGIE prétend parfois que l'installation litigieuse est un tout lui permettant de bénéficier de l'assurance souscrite pour une unique installation photovoltaïque auprès d'AXA, parfois qu'il s'agit de deux installations puisqu'elle a conclu deux contrats de revente avec EDF, parfois qu'il s'agit de sept installations distinctes puisque les panneaux se situent sur sept bâtiments différents ;
Qu'il vient d'être retenu que l'installation constitue un tout au regard de la prestation unique confiée à REV'SOLAIRE moyennant un prix qui ne distingue pas les travaux bâtiment par bâtiment mais est un prix global de 2.348.409,39 euros TTC ;
Que cette unité est d'ailleurs confirmée par les demandes formées globalement par LM ENERGIE qui ne sollicite pas des indemnisations distinctes pour les préjudices matériels et immatériels concernant chacun des 7 hangars mais bien une indemnisation unique pour l'ensemble de son exploitation ;
Qu'au vu de ces éléments, il est donc inopérant de soutenir que chacun des bâtiments avait une superficie inférieure à la superficie de travaux déclarés par REV'SOLAIRE à son assureur et qu'il sera retenu que les travaux effectués ont porté sur une surface supérieure à 1.000 m2 ;
Qu'en application des conditions générales d'assurance, REV'SOLAIRE devait dès lors déclarer spécialement à son assureur ce chantier excédant les surfaces garanties et qu'une telle déclaration entraînait paiement de cotisations supplémentaires ;
Attendu qu'il en résulte que les indemnités dues à LM ENERGIES par SMA doivent, en application de l'article L.113-9 du code des assurances, faire l'objet d'une réduction proportionnelle pour tenir compte du taux des cotisations qui auraient été versées par l'assuré si les risques avaient été complètement et exactement déclarés ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que le taux de cotisations applicables était de 0,6008% hors catastrophes naturelles et que l'assiette des cotisations était de 1.911.000 euros ;
Que la prime appliquée a été de 11.481,28 euros (1.911.000 x 0,6088%) ;
Que le coefficient d'aggravation pour un dépassement de surface étant de 1,25, la prime qui aurait dû être versée était de 14.351,61 euros et que la règle proportionnelle conduit à l'application du calcul suivant :
coût du sinistre x prime payée
prime qui aurait dû être payée
Que, cependant, ce calcul est moins favorable que le ratio 0.6008/ 0.666 retenu par l'assureur ;
Qu'ainsi pour un sinistre de 1.000 euros, la règle proportionnelle serait la suivante:
1.000 x 11.481,28
14.351,61
ce qui conduirait à allouer une somme de 799,99 euros tandis que l'application du ratio de l'assureur par l'opération :
1000 x (0.6008/0.666) conduirait à l'octroi de 902,10 euros ;
Que le ratio 0.6008/ 0.666 retenu par SMA correspondant à l'offre d'indemnisation qu'elle forme subsidiairement sera donc appliqué au montant des condamnations principales qui seront mises à sa charge au profit de LM ENERGIE ;
b/ sur les sommes réclamées par LM ENERGIE :
Attendu que LM ENERGIE fait à raison valoir que le tribunal a appliqué par erreur à SMA des stipulations du contrat conclu entre LM ENERGIE et AXA, notamment en ce qui concerne la franchise et la limitation dans le temps de l'indemnisation ;
* sur les dommages matériels aux équipements :
Attendu qu'il a été retenu que le changement intégral des panneaux était nécessaire;
Que le coût de ces travaux a été évalué par l'expert à la somme de 438.150,27 euros HT à laquelle LM ENERGIE ajoute, conformément aux demandes de SMA, celle de 4.412,30 euros au titre des factures de SOLEIL EN TÊTE, entreprise diligentée pour vérifier l'installation en 2013 ;
Que se trouve ainsi justifiée la demande en paiement formée par LM ENERGIE, sur le fondement de la garantie décennale, à hauteur de 442.922,57 euros TTC;
Qu'au regard de la réduction devant appliquée, par SMA, celle-ci sera condamnée à lui verser la somme de 399.561,38 euros TTC (442.922,57 x 0.6008/0.666 )
Que la garantie étant souscrite dans le cadre d'une assurance décennale non obligatoire, s'appliquera à cette condamnation la franchise contractuelle de 10% avec un minimum de 825 euros et un maximum de 8.250 euros ;
* sur les pertes de recettes :
Attendu que SMA ne conteste pas le chiffre réclamé au titre de la perte d'exploitation et demande uniquement à la cour d'appliquer à cette demande le ratio susvisé et de dire qu'elle n'est tenue au titre de ces pertes que dans les limites de son plafond et de la franchise de 1.485 euros ;
Qu'il convient donc d'appliquer le même ratio et d'allouer à LM ENERGIE la somme de 188.122,56 euros (208.538 x 0.6008/0.666 ) ;
* sur les charges d'exploitation afférentes au sinistre :
Attendu que LM ENERGIE sollicite paiement de :
- 39.431,20 euros au titre des intérêts d'emprunt ayant servi au financement du remplacement des panneaux ;
Que cependant elle peut déduire ces intérêts de ses charges sociales et, bien qu'affirmant qu'elle ne l'a pas fait, ne produit aucun document comptable permettant de le vérifier ;
Que sa demande de ce chef sera donc rejetée ;
- 9.003,33 euros au titre de l'assurance souscrite pendant le chantier de remplacement; que contrairement à ce que prétend SMA, cette somme est justifiée puisque LM ENERGIE ne pouvait, au regard de sa situation périlleuse née de l'arrêt de l'installation dont la production finançait ses emprunts, prendre le risque d'un nouveau sinistre pendant le chantier et qu'elle a été contrainte de souscrire une assurance complémentaire au titre du risque incendie ;
- 774,62 euros qui correspondent à des frais de conseil et de consultations diverses dont la nécessité n'est pas démontrée, s'agissant notamment des honoraires versés à Monsieur Q... présenté comme un consultant de LM ENERGIE sans que sa qualité pour occuper une telle situation et son rôle ne soient clairement définis ;
Que SMA devra donc verser à LM ENERGIE la somme de 8.121,92 euros (9.003,33x0.6008/0.666) ;
En ce qui concerne les demandes formées envers ALLIANZ :
Attendu que, dans l'article 1 des conditions générales d'assurance, le dommage matériel est défini comme l'endommagement, la destruction, ou la perte de biens appartenant à des tiers y compris le dommage en découlant ;
Qu'ALLIANZ fait valoir que la police souscrite par ALRACK est une police responsabilité civile, soumise au droit néerlandais, qui ne peut dès lors être mise en jeu qu'en cas de dommages à des biens autres que les boîtiers fabriqués par son assurée ;
Qu'elle soutient que l'expert n'a, après examen attentif de l'installation, noté que des dommages à certains boîtiers SOLEXUS et qu'elle ne garantit dès lors ni le dommage qui n'affecte que les produits fabriqués par ALRACK, ni le remplacement de ces derniers ;
Mais attendu qu'ainsi qu'il a été ci-dessus retenu, les défauts affectant les boîtiers SOLEXUS causent des dommages matériels tant aux panneaux qu'ils équipent, lesquels sont détériorés par la combustion des boîtiers, qu'aux éléments et immeubles sur lesquels sont posés les panneaux, ainsi qu'en témoignent les traces de combustion découvertes sur les bacs acier de la toiture après dépose des panneaux ;
Qu'ils entraînent également d'importants risques d'incendie, ainsi qu'il est démontré par les autres expertises produites aux débats, et qu'il a été jugé précédemment que ce risque constitue un dommage matériel dans la mesure où il empêche de faire le moindre usage du bien acquis et de faire fonctionner la centrale photovoltaïque ;
Qu'ils entraînent enfin un préjudice résultant de l'impossibilité de faire usage de l'installation puisque le bien vendu a pour fonction de permettre le fonctionnement des panneaux photovoltaïques ;
Que le sinistre constitué par l'impropriété des boîtiers cause dès lors des dommages aux biens de leurs acquéreurs qui ne peuvent les conserver pour l'usage qu'ils doivent remplir et que, contrairement à ce que prétend ALLIANZ, l'existence de dommages causés aux tiers est démontrée ;
Attendu que les mêmes conditions générales prévoient que l'assureur indemnisera, "si nécessaire et en plus du montant assuré par demande d'indemnisation ou par année d'assurance", les frais de sauvegarde tels que décrits à l'article 1.11 ;
Que celui-ci précise que sont des mesures de sauvegarde "celles qui s'imposent raisonnablement pour éviter tout risque de dommage imminent dont, s'il s'était produit, l'assurée serait responsable et lequel serait couvert par l'assurance ou pour limiter ce dommage";
Que le dommage garanti étant notamment tout dommage découlant de l'endommagement, la destruction, ou la perte de biens appartenant à des tiers, la nécessaire mise à l'arrêt de l'installation pour éviter tout incendie démontre que seul le remplacement des panneaux défectueux permettait d'éviter le risque de dommage imminent résultant en l'espèce de l'absence de revente de l'énergie produite ;
Qu'il sera en conséquence retenu que le remplacement des panneaux est intervenu pour éviter un risque de dommage imminent et entre donc dans les mesures de sauvegarde, et que le coût de remplacement des panneaux répond aux conditions de l'article 1.11 qui prévoient la garantie des mesures de sauvegarde ;
Que le remboursement des mesures de sauvegarde est garanti en plus du montant assuré par demande d'indemnisation ou par année d'assurance en application de l'article 1.11 des conditions générales susvisées, ce qui conduit à ne pas examiner, en ce qui concerne ce remboursement, la demande de suspension des paiements formée subsidiairement par ALLIANZ puisque ce coût n'entre pas dans les sommes allouées en réponse à une demande d'indemnisation ;
Qu'ALLIANZ, qui ne conteste pas subsidiairement le coût du remplacement des panneaux, sera donc condamnée à verser à LM ENERGIE la somme de 442.922,57 euros TTC au titre des mesures de sauvegarde, étant précisé que cette condamnation interviendra in solidum avec les autres parties condamnées à procéder à l'indemnisation du remplacement des panneaux photovoltaïques dans les limites mises à la charge de chacune d'entre elles ;
Qu'il sera précisé que s'appliqueront à cette condamnation le plafond de garantie et la franchise contractuels prévus pour les mesures de sauvegarde ;
Attendu qu'ALLIANZ soutient par ailleurs que les pertes de production sont exclues de sa garantie par les articles 1.7, 2.1 et 3 des conditions générales ;
Mais attendu qu'ainsi qu'il a été ci-dessus rapporté, le dommage matériel est défini comme l'endommagement, la destruction, ou la perte de biens appartenant à des tiers y compris le dommage en découlant (souligné par la cour) ;
Que la perte de production entraînant une perte de recettes est bien un dommage découlant du dommage matériel causé par les vices affectant les panneaux ;
Qu'ALLIANZ précise par ailleurs dans ses écritures qu'elle ne refuse pas de couvrir un dommage immatériel à condition qu'il découle de dommages subis par des biens autres que les biens de l'assuré ;
Qu'il a été ci-dessus retenu que tel était le cas et qu'aux termes de ces dispositions, ALLIANZ était tenue d'indemniser les pertes de recettes subies par LM ENERGIE ;
Attendu qu'ALLIANZ ne conteste pas le montant des pertes de production et fait siens les dires des autres parties sur les charges d'exploitation afférentes au sinistre ;
Qu'elle sera dès lors condamnée à payer à LM ENERGIE la somme de 208.538 euros au titre des pertes de production dont le montant est établi par les opérations d'expertise qui ne sont pas utilement critiquées, et celle de 9.003,33 euros, seule retenue ci-dessus, au titre des charges d'exploitation afférentes au sinistre ;
Attendu que doit cependant être examinée, au titre de la garantie de ces dommages immatériels l'argumentation subsidiaire d'ALLIANZ de ce que la cour doit prononcer le sursis à paiement ;
Attendu que la police d'ALLIANZ prévoit en effet expressément le cas de dommages sériels puisqu'à l'article premier de ses conditions générales relatif aux définitions des termes employés dans le contrat, il est mentionné que le terme "demande d'indemnisation" désigne une demande d'indemnisation introduite par un tiers à l'encontre de l'assuré aux fins d'indemnisation d'un dommage résultant d'un acte ou d'un manquement ;
Que ce même article précise que "les demandes d'indemnisation introduites seront considérées comme une demande d'indemnisation unique lorsqu'elles sont liées ou résultent l'une de l'autre ou bien résultent d'un même acte ou d'un même manquement ou d'actes ou de manquements consécutifs ayant une même cause et seront considérées comme déclarées aux assureurs au moment de la déclaration de la première réclamation" ;
Que l'argumentation de certaines des parties de ce que les dommages sériels doivent être considérés année par année ne peut qu'être écartée au regard de cette clause claire, opposable aux tiers, qui retient que tous les sinistres résultant de la même cause sont réputés être déclarés à la même date que le premier d'entre eux ;
Attendu que, quoi qu'en disent les consultations en sens contraire produites par l'une ou l'autre des parties, il est constant que, si l'action directe de la victime contre l'assureur du responsable est régie, en matière de responsabilité contractuelle comme en matière de responsabilité quasi délictuelle, par la loi du lieu du dommage, le régime de l'assurance est quant à lui soumis à la loi du contrat (cf notamment Cass civ 1ère 20 décembre 2000, no 98-15.546 ) ;
Qu'il en résulte que si l'assureur néerlandais ne peut opposer à une victime française l'absence, dans le droit néerlandais, d'action directe pour des dommages aux biens, il peut parfaitement lui opposer les dispositions du droit néerlandais relatives aux conditions de réparation du dommage et à l'étendue de sa garantie ;
Qu'ALLIANZ fait valoir que, selon le droit néerlandais, et en application de l'article 7:954 du code civil néerlandais, en cas de plafonds insuffisants tous les demandeurs tiers n'ont droit qu'à une part du montant maximum garanti par l'assureur ;
Qu'elle se prévaut de son plafond de garantie de 5.000.000 euros par sinistre et par année et soutient qu'elle ne peut aujourd'hui connaître le montant total des sommes qui lui seront réclamées ;
Que la question de la suspension des paiements n'est pas aujourd'hui de la compétence du juge de l'exécution mais bien de celle de cette cour qui doit décider si et éventuellement dans quelles conditions doit être prononcée la suspension du paiement des condamnations qu'elle vient de prononcer à l'encontre d'ALLIANZ en réparation des préjudices immatériels subis par LM ENERGIE, le juge de l'exécution ne pouvant qu'ensuite vérifier si ces conditions demeurent ou non remplies ;
Attendu que l'article 7:954 susvisé dispose, en son alinéa 5 que " Si, dans la mesure où l'assureur verse un montant inférieur au montant dont l'assuré est redevable et que ce dernier montant est supérieur à la somme assurée, le montant dû est proportionné au préjudice subi par chacune des personnes lésées et dans la mesure où il y a des personnes lésées dont le préjudice résulte d'un décès d'un dommage corporel ou de tout autre dommage. Néanmoins s'il n'est pas en mesure de déterminer en se basant sur des motifs raisonnables combien de demandeurs il y a et en quoi consiste le dommage global et donc quelle part proportionnelle doit être versée à chacun des demandeurs l'assureur a le droit de suspendre le paiement jusqu'à ce que la part proportionnelle de chaque demandeur soit clairement connue ;
Attendu que l'article 7:954 du code civil néerlandais s'applique en cas d'action directe de victimes pour décider que, lorsque ces dernières viennent en concurrence avec des victimes de dommages aux biens, doit s'appliquer la règle proportionnelle qui permet aux victimes ne disposant pas d'un droit d'action direct leur permettant de pouvoir elles aussi être indemnisées, ne serait-ce que partiellement ;
Qu'il a été rappelé que le droit néerlandais limite l'action directe des victimes aux cas de décès ou de dommage corporel ;
Que les références faites par les consultants d'ALLIANZ ou AIG quant aux articles de doctrine et aux travaux préparatoires ne permettent pas d'ignorer dans quel cadre s'inscrit ce texte qui ne vise que l'action directe autorisée en droit néerlandais, à savoir celle relatives aux dommages corporels ;
Qu'en effet, dans toutes les consultations produites par AIG et ALRACK, il est clairement indiqué que l'article 7:954 ne s'applique qu'en cas de dommages corporels et que ce sont les consultants et eux seuls, à l'exclusion de tout texte de loi et de toute jurisprudence de la Cour de cassation néerlandaise, qui considèrent que "l'application par analogie de ces dispositions aux dommages matériels et/ ou aux pertes financières est la plus probable" ;
Que cependant, ces consultations unanimes ne sont pas démenties par des avis contraires et qu'elles apparaissent conformes à l'esprit de la loi néerlandaise d'une indemnisation proportionnelle des victimes en fonction du plafond de garantie, aucune autre disposition du droit néerlandais ne retenant une indemnisation en fonction de la date de présentation de la demande en paiement ;
Que, contrairement à ce que soutiennent certaines des parties ces dispositions ne sont pas contraires au droit international ou à l'ordre public français ;
Qu'elles ne sont en effet pas plus iniques que les dispositions de la loi française, lesquelles permettent, dans le cadre d'un litige sériel, l'indemnisation des seules victimes les plus rapides, puisque celles qui arrivent ensuite peuvent se voir refuser toute indemnisation si le plafond de garantie est atteint ;
Mais attendu que, si le principe d'une indemnisation au prorata doit être retenu, en application des dispositions du droit néerlandais, il n'entraîne pas automatiquement la suspension des paiements mis à la charge de l'assureur ;
Qu'en application de l'article susvisé, ce n'est que si ce dernier n'est pas en mesure de déterminer, en se basant sur des motifs raisonnables, combien de demandeurs il y a et en quoi consiste le dommage global, et donc quelle part proportionnelle doit être versée à chacun des demandeurs, qu'il est en droit de suspendre le paiement jusqu'à ce que la part proportionnelle de chaque demandeur soit clairement connue ;
Attendu qu'en l'espèce, il résulte des pièces communiquées qu'environ 600.000 boîtiers ont été fabriqués par ALRACK de septembre 2009 jusqu'à la fin de l'année 2011 ;
Que de très nombreux litiges sont en cours et qu'il ressort des pièces communiquées par AIG que des assignations ont encore été délivrées en 2016, 2017 et en février 2018;
Qu'il est ainsi suffisamment démontré que les conditions de l'article 7:954 permettant la suspension du paiement des indemnités par ALLIANZ sont remplies en ce qui concerne l'indemnisation des préjudices immatériels de LM ENERGIE ;
Attendu cependant que l'incertitude du droit néerlandais concernant la date à laquelle interviendra l'indemnisation, puisqu'il laisse l'assureur décider du moment auquel il estime connaître le montant global d'indemnisation qui lui sera réclamé, heurte le principe d'ordre public français selon lequel le juge doit trancher l'entier litige qui lui est soumis ;
Que la suspension des paiements ne peut donc être ordonnée jusqu'à ce qu'il sied à l'assureur néerlandais de procéder à l'indemnisation des victimes et que, pour respecter la loi néerlandaise applicable et l'ordre public français, la suspension des paiements dus par ALLIANZ à LM ENERGIE au titre de la réparation de ses préjudices immatériels sera ordonnée pendant un délai maximum de deux années, qui pourra être réduit si l'assureur néerlandais est en mesure de déterminer avant son expiration le montant des sommes qui lui est réclamé ;
Qu'à l'issue de ce délai si l'indemnisation n'est pas intervenue, il appartiendra à toute partie intéressée de saisir le juge de l'exécution qui pourra exiger d'ALLIANZ les pièces démontrant qu'elle ne peut encore évaluer les sommes qui lui sont réclamées et décider en conséquence de leur examen, soit que les conditions de la suspension du paiement sont toujours réunies, soit qu'elles ne le sont plus et que le paiement doit intervenir ;
En ce qui concerne les demandes formées par LM ENERGIE envers AIG :
Attendu que celle-ci a conclu avec SCHEUTEN un contrat de droit néerlandais "assurance responsabilité pour les entreprises" aux termes duquel elle garantit son assurée en sa qualité de fabricant pour un préjudice subi par un tiers en rapport avec des activités relevant de la qualité assurée telle que mentionnée dans la police sous réserve que le préjudice soit constitué pendant la durée de l'assurance ;
Qu'elle soutient que ses garanties ne sont pas mobilisables au-delà des frais de montage et de démontage des panneaux en application des clauses d'exclusion des articles 4.4 et C.9 du contrat et que les pertes de production sont exclues de toute indemnisation en application de la clause G.24 du contrat ;
Attendu qu'AIG soutient tout d'abord que s'applique l'article 4.4.1 des conditions générales de la police qui exclut toute garantie aux seuls dommages subis par les biens livrés par l'assuré et l'article 4.4.2.1 de ces mêmes conditions générales aux termes desquelles sont exclus le remplacement, la correction ou le rappel des biens livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité ;
Que la référence à l'article 4.4.1 excluant les dommages à des biens livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité n'est cependant pas pertinente, la garantie d'AIG n'étant pas recherchée au titre des dommages subis par les panneaux photovoltaïques mais au titre de ceux pouvant être subis par le bâtiment sur lequel ils sont installés, lequel est exposé à un risque d'incendie, et par le tiers propriétaire de ces panneaux en raison de la perte de production résultant de leur impropriété et de la mise à l'arrêt de l'installation ;
Que l'article 4.4.2.1 exclut de l'assurance "les dommages et frais en rapport avec le remplacement, la correction, la réparation ou le rappel de biens livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité, sauf à ce que les frais de rappel puissent être considérés comme des frais au sens visé à l'article 1.7" ;
Que ce sont donc exclusivement les frais de rappel qui sont considérés comme des frais de sauvegarde et sont alors pris en charge par l'assurance ;
Qu'aucune procédure de rappel n'ayant été mise en oeuvre, cette clause, qui n'est pas contraire aux dispositions d'ordre public du droit néerlandais qui ne fait bénéficier que l'assuré de l'indemnisation totale des frais de sauvegarde, rend sans objet les développements visant à voir retenir que les frais de remplacement des panneaux seraient de frais de sauvegarde ;
Attendu qu'AIG prétend que la cour devrait faire application de l'article C.9.5 des conditions générales qui prévoit que "la demande d'indemnisation devra se rapporter à des produits fabriqués et livrés après la date d'entrée en vigueur de la couverture et pour lesquels les frais correspondants ont été exposés dans un délai de deux ans après que ces produits ont été livrés" ;
Que, cependant, ce moyen sera écarté, la garantie d'AIG ayant été recherchée dans le délai de deux ans après que les produits ont été livrés puisqu'elle a été appelée à participer aux opérations d'expertise par ordonnance en date du 20 décembre 2012 ;
Que seule cette mesure pouvait permettre de connaître le montant des frais devant être exposés ;
Que le délai de deux années prévu par le contrat n'était donc pas expiré lorsque la garantie été mise en oeuvre puisque l'installation a été réceptionnée en septembre 2011, la garantie recherchée en 2012, le montant des frais devant être exposés connu en juillet 2013 et les travaux réalisés en avril et mai 2014 ;
Qu'au surplus et en tout état de cause, le délai biennal prévu par cet article est inopposable à LM ENERGIE, acquéreur d'un produit défectueux, puisqu'il n'a jamais été porté à sa connaissance ;
Qu'AIG soutient sans pertinence que l'information donnée par REV'SOLAIRE du caractère défectueux des panneaux démontrerait que LM ENERGIE était informée de la nécessité de procéder au remplacement de l'installation avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la réception ;
Qu'en effet s'il est constant que LM ENERGIE a bien été informée le 26 octobre 2012 du caractère défectueux des panneaux acquis, elle ne l'a pas été d'un délai de deux années pour obtenir paiement, ce délai étant d'ailleurs ignoré de REV'SOLAIRE elle-même, laquelle n'était pas l'assurée d'AIG ;
Que ce n'est qu'à compter du 20 décembre 2012, date à laquelle AIG a été appelée à participer aux opérations d'expertise et qu'elle a été alors conduite à communiquer ses conditions d'assurance jusqu'alors ignorées des autres parties, que le délai biennal visé par cet article a pu commencer à courir à leur égard ;
Qu'il n'était donc pas plus expiré lorsque les travaux ont été réalisés en avril et en mai 2014 ;
Qu'enfin, il sera surabondamment rappelé qu'en application de la directive européenne relative aux produits défectueux, dont les parties ont débattu, la victime dispose d'un délai de trois ans, qui débute à la date à laquelle elle a eu connaissance du dommage, du défaut et de l'identité du producteur, pour demander réparation ;
Attendu qu'aux termes de l'article 1 de la clause C9 intitulé "couverture responsabilité produit énergie" il est précisé : " En complément des dispositions de l'article 1.6.2 (dommages aux biens) et par dérogation partielle aux dispositions de l'article 4.4.2 des conditions générales de la police, la présente assurance couvre - en tenant compte des dispositions arrêtées dans la présente clause- la responsabilité de l'assuré au titre des frais exposés ou appelés à être exposés par des tiers qui ne sont pas l'une des parties assurées en conséquence de produits défectueux (souligné par la cour) livrés par l'assuré consistant en :
1.1 frais de montage et d'installation (..) dans la mesure où ces frais sont afférents à:
a/ L'élimination de matériaux liés ou attachés aux produits livrés par l'assuré ou qui leur sont unis de toute autre façon
b/ L'élimination des produits livrés par l'assuré
c/ La fourniture et/ ou l'installation des produits de remplacement livrés par l'assuré
d/ (..)
Qu'à la lecture de cette clause il apparaît que LM ENERGIE est bien un tiers au contrat puisqu'elle n'est pas l'une des parties assurées ;
Attendu que SMA fait valoir que l'article 7 de la clause C.9 est incompréhensible comme étant en totale contradiction avec ce qui précède puisqu'il indique sous la rubrique "exclusions" qu'en complément des conditions générales de la police, "l'assurance ne couvre aucune responsabilité pour les frais exposés au titre :
a/ des produits devant être à nouveau livrés eux-mêmes, ce qui inclut une diminution de prix, une correction, une livraison supplémentaire ou un remplacement en tout ou partie, dont les frais de transports y afférents"(..) ;
Que cette observation est parfaitement fondée puisque cette disposition retire le bénéfice de la garantie accordée par l'article 1 de la même clause ;
Qu'en présence de deux articles contraires d'un contrat d'assurance et sans indication de ce que le droit néerlandais serait contraire à cette règle, doit jouer la disposition qui est la plus favorable à l'assuré, soit l'article 1 de la clause C9 garantissant la fourniture et/ ou l'installation des produits remplaçant les produits défectueux ;
Qu'AIG prétend sans pertinence que le c/ de cet article ne vise que la fourniture des matériaux remplaçant les matériaux éliminés alors même que le texte ne parle pas de matériaux mais de "produits", lesquels doivent être livrés par l'assuré et que les matériaux remplaçant ceux qui ont été éliminés n'ont pas à être livrés par l'assuré qui ne fabrique que les produits enlevés ;
Qu'il en résulte que, contrairement à ce que soutient AIG, elle était bien tenue, par cet article qui déroge expressément aux conditions générales, de prendre en charge la fourniture et l'installation des produits au titre du remplacement de ceux qui étaient défectueux, soit en l'espèce de prendre en charge le remplacement des panneaux photovoltaïques ;
Que les conventions devant être exécutées de bonne foi, AIG ne saurait prétendre qu'elle ne garantissait le coût de remplacement des panneaux qu'à condition qu'ils soient livrés par son seul assuré, la liquidation judiciaire de ce dernier étant une cause de force majeure empêchant une telle livraison et l'assureur devant en conséquence assumer le coût des panneaux livrés par l'entreprise que le tiers a été contraint de substituer à son assuré sans pouvoir se prévaloir du non respect de cette condition ;
Qu'elle sera donc condamnée à verser la somme de 442.922,57 euros au titre de l'indemnisation du remplacement des panneaux photovoltaïques ;
Attendu qu'AIG prétend par ailleurs sans fondement qu'en application de la clause G24 des conditions particulières du contrat, elle ne garantirait pas les pertes de recettes subies par un tiers puisque cette clause, qui exclut toute assurance du fait de l'absence de transport ou du transport insuffisant d'énergie solaire, ne peut être comprise qu'au regard des dispositions de l'article C15 de ces mêmes conditions générales, intitulé "Préjudice financier", lequel indique quant à lui : "En complément de l'article 1.6 des conditions générales d'assurance, la présente assurance couvre également la responsabilité des assurés pour des dommages affectant le seul patrimoine subi par des tiers. Par "dommages affectant le seul patrimoine" on entend un préjudice autre qu'un préjudice en conséquence de dommages aux biens ou de dommages aux personnes, dans le cas où les produits livrés par l'assuré ne peuvent pas être utilisés convenablement, sous réserve que les produits livrés puissent être considérés comme défectueux (souligné dans le texte) ;
Qu'il résulte de la lecture combinée de ces deux textes que l'article C15 des conditions générales prévoit expressément la réparation du préjudice financier résultant du caractère défectueux des produits tandis que l'article G24 de ces mêmes conditions exclut la réparation des préjudices financiers résultant des insuffisances ou absences de production nées d'autres causes telles que malfaçons ou non façons lors de la pose des panneaux ;
Qu'AIG ne peut sérieusement soutenir que la clause de cet article qui exclut "les dommages affectant le seul patrimoine en conséquence de la perte d'argent ou d'effets mobiliers causée de quelque façon que ce soit" viserait le préjudice financier subi par le tiers alors qu'une telle exclusion, sous peine de vider entièrement de son sens une clause précisément relative à l'indemnisation d'un préjudice financier, ne peut s'entendre que comme visant la perte "d'argent liquide et d'effets mobiliers" lors d'un sinistre ;
Qu'au surplus le contrat prévoit que l'indemnisation du préjudice de perte de recettes est plafonnée au montant de 1.000.000 euros, ce qui prive de pertinence l'argumentation d'AIG de toute absence de garantie à ce titre ;
Qu'au regard de ces développements, il sera jugé qu'AIG est tenue de payer à LM ENERGIE les sommes de 208.538 euros correspondant à la perte de production et de 9.003,33 euros au titre des charges d'exploitation dues au sinistre ;
Attendu qu'AIG soutient subsidiairement être fondée à se prévaloir des plafonds de garantie prévus par la police ;
Qu'elle fait valoir que le plafond applicable aux dommages garantis en dehors du préjudice financier est celui de la clause C 9.3 des conditions particulières qui prévoit 5.000.000 euros par réclamation ;
Qu'elle soutient qu'il existe un sinistre sériel dû au même fait générateur qui constitue un événement unique et que les réclamations constituent elles aussi une seule et même réclamation rattachée à la même année d'assurance ;
Qu'elle applique ce même raisonnement aux préjudices de perte de recettes dont l'indemnisation est plafonnée au montant de 1.000.000 euros ;
Qu'elle prétend que cette argumentation est confirmée par le fait que, si le plafond de 5.000.000 euros devait s'appliquer pour chacune des réclamations concernées par le sinistre sériel SCHEUTEN, il devrait être fait application de la franchise de 100.000 euros par réclamation et de la même franchise applicable aux pertes de recette, ce qui priverait les demandeurs, dont LM ENERGIE, de toute indemnisation, le montant de leur préjudice étant le plus souvent inférieur au montant de ces franchises ;
Qu'elle prétend qu'en raison de l'absence de détermination du nombre de victimes et du montant total des demandes en réparation formées à son encontre, les paiements dont elle pourrait être tenue doivent être suspendus en application de l'article 7: 954 du code civil néerlandais ci-dessus rappelées lors de l'examen des demandes formées à l'encontre d'ALLIANZ ;
Mais attendu qu'en page 1 de la police et à la rubrique "MONTANT ASSURE" il est prévu une limite de :
- 25.000.000 euros par événement au titre de la responsabilité civile générale et 50.000.000 euros par année d'assurance,
- 5.000.000 euros par réclamation au titre de la garantie responsabilité produit élargie et rappel de produit détaillée en clause C9, avec le même maximum par année d'assurance
- 1.000.000 euros par réclamation au titre du préjudice financier avec le même maximum par année d'assurance ;
Que l'article 3 des conditions générales prévoit que l'indemnisation se fait par événement jusqu'à concurrence du montant assuré mentionné dans la police ;
Qu'il est enfin indiqué dans l'article 9 des conditions générales que l'assureur paiera par événement après déduction de la franchise mentionnée dans la police le montant de la réparation que l'assuré est tenu de payer et ce jusqu'à concurrence du montant assuré mentionné dans la police ;
Que l'article 1.9 du contrat n'indique pas que les événements sont globalisés lorsqu'ils sont sériels mais précise uniquement que le mot événement "se rapporte à un événement ou une série d'événements en relation les uns avec les autres en conséquence duquel ou desquels un préjudice est constitué" ;
Qu'il ne mentionne pas plus que lorsque plusieurs sinistres trouvent leur origine dans le même fait générateur, celui-ci constitue l'événement au sens de l'article 1.9 précité ni que les réclamations les concernant constituent une seule et même réclamation rattachée à la même année d'assurance ;
Attendu que la consultation de NAUTA DUTHIL, communiquée par AIG en pièce 5 indique expressément "qu'en droit néerlandais, il n'existe aucune disposition légale ni jurisprudentielle concernant la couverture d'une clause relative aux sinistres sériels";
Que si cette consultation précise que "toute clause relative aux demandes d'indemnisation résultant d'un seul et même sinistre qui régit la garantie en montant ne peut étendre par nature la garantie au-delà de la période assurée de la police", il en résulte cependant clairement que l'assureur néerlandais ne peut se prévaloir de dispositions spécifiques à des dommages sériels qu'à la condition que sa police d'assurance les prévoie ;
Attendu qu'AIG, qui revendique l'application au contrat de la loi néerlandaise, raisonne devant cette cour en se fondant... sur la jurisprudence française ;
Qu'au contraire de la loi néerlandaise, la loi française prévoit en effet expressément, dans l'article L 124-1-1 du code des assurances, une globalisation des sinistres qui consiste à considérer fictivement comme uniques, en raison de leur origine commune, des sinistres qui sont objectivement distants les uns des autres et que, pour soutenir que les sinistres dits « sériels», sont considérés comme un seul sinistre se rattachant à une même année d'assurance, AIG fait état d'une décision de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (28 février 2013 RCA 2013 no197) rendue en vertu du droit français;
Que ce droit et cette jurisprudence étant manifestement inapplicables à un contrat de droit néerlandais, cette argumentation sera écartée ;
Attendu dès lors que, pour obtenir l'application de dispositions relatives à la globalisation des sinistres, il appartient à AIG de justifier que, dans la police d'assurance concernant SCHEUTEN, sont insérées une ou plusieurs clauses concernant un sinistre sériel, c'est à dire des sinistres successifs caractérisés par une pluralité de faits dommageables étalés dans le temps mais reliés à une même cause ;
Mais attendu qu'elle ne vise dans ses écritures aucun article ni aucune clause du contrat prévoyant qu'une application particulière du contrat devra être faite en cas de survenance d'un tel dommage sériel ;
Que tant la lecture des définitions du "dommage" et de "l'événement" données dans l'article 1 des conditions générales et dont les termes ont été rappelés ci-dessus, que la lecture complète des conditions particulières et générales de la police permettent de se convaincre que son contrat ne contient aucune clause relative aux demandes d'indemnisation résultant d'une série d'événements liés définie comme un seul et même sinistre, et qu'il n'est pas prévu qu'en ce cas s'applique en commun, à tous ces sinistres liés, le plafond prévu par sinistre ;
Que la comparaison avec la police d'ALLIANZ, qui précise quant à elle clairement la définition d'un sinistre sériel ainsi qu'il a été ci-dessus rappelé, confirme cette lecture;
Que les conditions d'assurance d'AIG s'appliquant ainsi à chaque sinistre et non à un sinistre sériel, elle est tenue, en application de l'article 9.3, qui autorise expressément l'action directe du tiers, d'indemniser LM ENERGIE à hauteur d'un maximum de 5.000.000 euros pour les dommages matériels et de 1.000.000 euros pour le préjudice financier ;
Que cet article précise que" les demandes d'indemnisations de dommages aux personnes (souligné par la cour) formées par des parties lésées seront traitées et réglées en tenant compte des dispositions de l'article 7:954 du code civil néerlandais", ce qui signifie a contrario que les dommages causés aux biens ne sont pas régis par ces dispositions ;
Que la demande d'AIG d'une suspension des paiements mis à sa charge en application des dispositions de l'article 7:954 du code civil néerlandais sera donc rejetée puisqu'il ne lui est pas demandé d'indemnisation au titre de dommages causés aux personnes et qu'aucune clause de sa police ne déroge aux conditions ordinaires d'application du contrat en cas de dommage sériel ;
Attendu qu'AIG fait subsidiairement valoir que s'appliquent à l'indemnisation de LM ENERGIE une franchise de 100.000 euros par réclamation pour les dommages matériels et de 100.000 euros pour les dommages financiers ;
Que les autres parties n'exposent pas en quoi ces franchises, expressément et clairement portées à la connaissance de l'assuré en page 1 des conditions particulières d'une police d'assurance non obligatoire, ne seraient pas opposables aux tiers et qu'il convient dès lors d'en faire application ;
III/ Sur les demandes réciproques de garantie formées par les assureurs :
Attendu qu'aucune des parties ne soutient que le droit néerlandais ne connaît pas la subrogation et qu'il n'est pas contesté que l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur ;
Que ce recours subrogatoire permet à SMA d'être entièrement relevée indemne par ALLIANZ et AIG, in solidum entre elles, en leur qualité d'assureurs des auteurs du dommage, et ce y compris des condamnations prononcées à son encontre sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Que les responsabilités de SCHEUTEN et d'ALRACK ayant été retenues à hauteur de 50% chacune dans la survenance du dommage, il ne sera pas fait droit à la demande d'ALLIANZ tendant à être intégralement garantie par AIG des condamnations prononcées à son encontre ni à celle d'AIG tendant à être entièrement relevée indemne par ALLIANZ, mais qu'il sera jugé que, dans leurs rapports entre elles, chacune sera redevable de la moitié des sommes qu'elles seront amenées à payer au titre des condamnations prononcées in solidum à leur encontre ;
IV/ Sur les autres demandes formées par les parties :
Attendu qu'en application des dispositions de l'article 1343-2 nouveau du code civil, applicable à la date à laquelle la cour statue puisque la loi nouvelle régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisés, et au regard du préjudice subi par LM ENERGIE, il convient d'ordonner la capitalisation des intérêts à compter du 3 décembre 2015, date à laquelle LM ENERGIE en a pour la première fois formé la demande ;
Attendu que condamnation étant prononcée à l'encontre d'ALLIANZ, cette partie ne peut qu'être déboutée de sa demande tendant au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Attendu qu'AIG et ALLIANZ, succombant à l'instance d'appel, en supporteront les dépens et qu'il sera fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit des autres parties selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision, étant relevé que LM ENERGIE n'a sollicité paiement de ce chef qu'à l'encontre de SMA et d'AXA ;
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME la décision entreprise hormis en ce qu'elle a :
- déclaré recevable l'action de la société LM ENERGIE à l'encontre de la société AXA France IARD,
- dit que REV'SOLAIRE a engagé sa responsabilité décennale,
- jugé les sociétés SCHEUTEN et ALRACK responsables in solidum des vices de fabrication,
-condamné d'une part la société SMA, d'autre part la société AIG EUROPE NETHERLANDS , enfin la société ALLIANZ BENELUX N.V à payer chacune à la société LM ENERGIE une indemnité de procédure de première instance de 3.000 euros,
- condamné les sociétés AIG EUROPE NETHERLANDS et ALLIANZ BENELUX aux dépens de première instance,
STATUANT À NOUVEAU sur ses autres chefs,
DÉBOUTE la société LM ENERGIE de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de la société AXA France IARD,
CONDAMNE la société LM ENERGIE à payer à la société AXA France IARD la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société SMA à payer à la société LM ENERGIE les sommes de :
- 399.561,38 euros TTC au titre du remplacement des panneaux photovoltaïques, en précisant que s'applique à cette condamnation le plafond de garantie des dommages matériels et la franchise contractuelle de 10% avec un minimum de 825 euros et un maximum de 8.250 euros,
- 188.122,56 euros TTC au titre de la perte de recettes,
- 8.121,92 euros TTC au titre des charges d'exploitation afférentes au sinistre,
ces deux dernières condamnations étant prononcées dans les limites du plafond de garantie des dommages immatériels et de la franchise contractuelle de 1.485 euros,
CONDAMNE la société ALLIANZ BENELUX N.V à payer à la société LM ENERGIE les sommes de :
- 442.922,57 euros au titre des mesures de sauvegarde constituées par le remplacement des panneaux photovoltaïques en précisant que s'appliquent à cette condamnation le plafond de garantie des mesures de sauvegarde et la franchise contractuelle concernant les mesures de sauvegarde,
- 208.538 euros au titre des pertes de production,
- 9.003,33 euros au titre des charges d'exploitation afférentes au sinistre, en précisant que s'appliquent à ces deux dernières condamnations le plafond de garantie et la franchise contractuelle concernant la réparation des préjudices immatériels découlant de dommages matériels garantis,
SUSPEND cependant le paiement des sommes de 208.538 euros et de 9.003,33 euros pendant une durée maximum de deux années qui pourra être réduite si l'assureur est à même de déterminer avant sa fin le montant de toutes les réparations qui lui sont réclamées au titre de ce dommage sériel et de procéder aux paiements mis à sa charge,
DIT qu'à l'issue de ce délai et si le paiement n'est pas intervenu, il appartiendra à toute partie intéressée, que ce soit LM ENERGIE ou l'un des assureurs condamné in solidum avec la société ALLIANZ BENELUX N.V, de saisir le juge de l'exécution qui décidera si les conditions de cette suspension sont toujours réunies ou si le nombre de sinistres et les montants dus sont connus et permettent de lever la mesure de suspension pour permettre une exécution de la condamnation, le cas échéant, au marc l'euro,
CONDAMNE la société AIG EUROPE NETHERLANDS à payer à la société LM ENERGIE les sommes de :
- 442.922,57 euros au titre du remplacement des panneaux photovoltaïques en précisant que s'applique à cette condamnation la franchise contractuelle de 100.000 euros concernant la réparation des préjudices matériels,
- 208.538 euros au titre des pertes de production,
- 9.003,33 euros au titre des charges d'exploitation afférentes au sinistre, en précisant que s'appliquent à ces deux condamnations la franchise contractuelle de 100.000 euros concernant la réparation des préjudices immatériels,
DÉBOUTE la société AIG EUROPE NETHERLANDS de sa demande tendant à voir ordonner la suspension du paiement des condamnations ainsi prononcées à son égard,
DIT que les condamnations prononcées à l'encontre de la société SMA, la société ALLIANZ BENELUX N.V, la société AIG EUROPE NETHERLANDS le sont au profit de la société LM ENERGIES in solidum entre ces trois assureurs dans la limite des sommes mises à la charge de chacun d'eux, de leurs plafonds de garantie et de leurs franchises contractuelles,
DIT que les intérêts échus des sommes principales et dus au moins pour une année entière à la société LM ENERGIE produiront eux-mêmes, à compter du 3 décembre 2015 et par périodes annuelles, intérêts au taux légal,
CONDAMNE la société SMA à payer à la société LM ENERGIE la somme de 15.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE in solidum les sociétés ALLIANZ BENELUX N.V et AIG EUROPE NETHERLANDS à relever indemne la société SMA de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre au profit de la société LM ENERGIE,
CONDAMNE in solidum les sociétés ALLIANZ BENELUX N.V et AIG EUROPE NETHERLANDS à payer à la société SMA la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
DIT que dans leurs rapports entre elles, les sociétés ALLIANZ BENELUX N.V et AIG EUROPE NETHERLANDS supporteront chacune 50% des condamnations ainsi mises à leur charge,
DÉBOUTE les sociétés ALLIANZ BENELUX N.V et AIG EUROPE NETHERLANDS de leurs demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE in solidum les sociétés ALLIANZ BENELUX N.V et AIG EUROPE NETHERLANDS aux dépens d'appel, qui, en sus des frais d'expertise mis à leur charge par le jugement déféré, comprendront ceux des procédures de référé,
ACCORDE aux avocats de la cause, hormis ceux des sociétés ALLIANZ BENELUX N.V et AIG EUROPE NETHERLANDS , le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller présidant la collégialité et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT