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20/12/2018 | FRANCE | N°18/010591

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 20 décembre 2018, 18/010591


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 20/12/2018
la SCP LAVAL-X...
la SCP SCP CROS- Y...

ARRÊT du : 20 DECEMBRE 2018

No : 454 - 18
No RG 18/01059 - Z... Portalis
DBVN-V-B7C-FVNT

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 15 Mars 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT
agissant en la personne de son représentant légal domicilié [...]

Ayant pour avocat postulant Me Joanna X..., membre de la SCP LAVAL-X..., avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaid...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 20/12/2018
la SCP LAVAL-X...
la SCP SCP CROS- Y...

ARRÊT du : 20 DECEMBRE 2018

No : 454 - 18
No RG 18/01059 - Z... Portalis
DBVN-V-B7C-FVNT

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 15 Mars 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT
agissant en la personne de son représentant légal domicilié [...]

Ayant pour avocat postulant Me Joanna X..., membre de la SCP LAVAL-X..., avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant Me Frédéric A..., membre de la SCP HERVOUET-A...-C..., avocat au barreau de BLOIS,

D'UNE PART

INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Monsieur Jean B...
né le [...] [...]
[...]

Ayant pour avocat Me Jean-François Y..., membre de la SCP CROS-Y..., avocat au barreau de BLOIS,

Madame Marie-Isabelle D... épouse B...
née le [...] [...]
[...]

Ayant pour avocat Me Jean-François Y..., membre de la SCP CROS-Y..., avocat au barreau de BLOIS,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 17 Avril 2018
ORDONNANCE D'AUTORISATION A ASSIGNER A JOUR FIXE en date du : 02 mai 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 25 OCTOBRE 2018, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Président de la Collégialité, en son rapport, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Président de la Collégialité et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Elisabeth HOURS, Président de la Collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffiers :

Madame Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé lors du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé le 20 DECEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon acte notarié en date du 3 octobre 2003, le CRÉDIT IMMOBILIER DE FRANCE CENTRE LOIRE, aux droits duquel vient désormais le CRÉDIT IMMOBILIER FRANCE DÉVELOPPEMENT ( CIFD), a consenti à Monsieur Jean B... et à son épouse, Madame Maria E... , deux prêts immobiliers garantis par une inscription de privilège de prêteur de deniers et une hypothèque conventionnelle valable jusqu'au 31 juillet 2027.

Diverses échéances étant demeurées impayées, le prêteur a adressé, le 22 décembre 2015, une lettre de mise en demeure aux époux B... qui n'ont pas régularisé leur situation.

Il a alors fait délivrer aux emprunteurs, le 26 juillet 2016, commandement de payer valant saisie immobilière .

Les époux B... ayant contesté cette procédure devant le juge de l'exécution de Blois et la banque les ayant elle aussi assignés devant ce même juge, ce dernier, par jugement en date du 15 mars 2018, a ordonné la jonction des procédures, déclaré irrecevable comme étant forclose l'action du CIFD, ordonné en conséquence la radiation du commandement de payer, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et laissé ses dépens à la charge de chacune des parties.

Le CIFD a relevé appel de cette décision et a assigné Monsieur et Madame B... à jour fixe.

Il conclut à l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour de le déclarer recevable, de débouter les époux B... de toutes leurs demandes, d'ordonner la poursuite de la procédure de saisie immobilière et le renvoi des parties devant le juge de l'exécution de Blois et de condamner les intimés aux dépens, qui comprendront les frais et honoraires de l'huissier de justice chargé de l'exécution forcée.

Il fait valoir que, contrairement à ce que prétendent les époux B..., il existe bien un titre exécutoire fondant sa créance ; que le premier titre exécutoire est l'acte notarié du 3 octobre 2003 qui comporte la formule exécutoire ; que le second titre est l'ordonnance d'admission au passif des intimés pour la somme de 126.096,08 euros puisque, les époux B... ayant fait l'objet d'une procédure collective, il a déclaré sa créance qui a été admise. Il fait valoir qu'une décision d'admission est revêtue de l'autorité de la chose jugée et il affirme que les époux B... ne peuvent prétendre, qu'à partir du moment où ils ont fait l'objet d'une liquidation judiciaire, il n'aurait pas recouvré l'exercice individuel de son action puisqu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation que l'immeuble insaisissable par le liquidateur échappe à l'effet réel de la procédure collective ; que cela signifie, qu'à partir du moment où l'immeuble ne fait pas partie du périmètre des biens saisis par la procédure collective, le créancier n'a pas besoin d'une autorisation du juge commissaire, pour agir à l'encontre du bien en vertu de sa garantie.

Il soutient que Monsieur et Madame B... ne peuvent invoquer la prescription de son action ; que le délai de deux ans pour agir ne commençait pas à courir à compter du 22 avril 2010, date de la décision ayant statué sur la demande d'admission de sa créance dans le cadre de la procédure collective , puisque du fait de la procédure collective ouverte contre les époux B..., la règle de la suspension des poursuites d'un créancier à l'encontre d'un (ou de) débiteur(s) en liquidation judiciaire s'appliquait jusqu'au jugement prononçant la clôture de la procédure collective, soit le 21 avril 2015.

Il affirme que le commandement n'est pas caduc contrairement à ce que prétendent les époux B... puisque l'assignation à comparaître à l'audience d'orientation leur a été signifiée le 15 novembre 2016 pour une audience d'orientation du 15 décembre ; que l'article R 322-4 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que l'assignation est délivrée dans un délai compris entre un et trois mois avant la date de l'audience et que l'assignation a donc bien été délivrée dans ces délais ; qu'en tout état de cause la violation de ce délai constituerait une fin de non-recevoir qui pourrait être régularisée par un renvoi de l'affaire, conformément à l'article 126 du code de procédure civile mais que les époux B... ont bénéficié d'un temps suffisant pour préparer leur défense puisqu'avant même l'audience d'orientation, ils avaient saisi le juge de l'exécution d'une opposition à commandement de saisie immobilière.

Il s'en rapporte enfin à justice sur la vente amiable du bien saisi, sauf à vérifier le prix qui apparaît manifestement trop élevé par rapport à la valeur réelle du bien.

Monsieur et Madame B... forment un appel incident en demandant à la cour de déclarer irrecevable le CIFD en l'absence de titre exécutoire. A titre subsidiaire, ils sollicitent la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé l'appelant prescrit en son action et demandent à la cour de déclarer caduc le commandement et de leur allouer 10.000 euros à titre de dommages et intérêts. A titre infiniment subsidiaire ils demandent à être autorisés à procéder à la vente aimable de leur bien moyennant le prix minimum de 150.000 euros et ce dans un délai de quatre mois et en tout état de cause sollicitent versement d'une indemnité de procédure de 2.500 euros.

Ils font valoir que Monsieur B... a fait l'objet d'une liquidation judiciaire étendue à son épouse ; que la liquidation a été clôturée pour insuffisance d'actif le 21 avril 2015 et que les poursuites sont donc définitivement suspendues en application de l'article L643-11 du code de commerce. Ils font observer que le premier incident de paiement ne peut avoir été postérieur à la date de la déclaration de créance; que la déchéance du terme avait rendu la créance exigible et que la banque aurait dû engager la procédure de saisie dans le délai de deux ans, les règlements opérés ensuite de l'ouverture de la procédure collective ne pouvant pas avoir d'effet interruptif de la prescription.

Ils soulignent par ailleurs que le commandement de payer doit préciser le titre exécutoire fondant la créance ; que les seuls titres exécutoires mentionnés dans le commandement qui leur a été délivré sont les actes notariés alors que le CIFD se fonde aujourd'hui sur la décision d'admission de sa créance.

Enfin ils font état de la caducité de l'assignation qui leur a été délivrée le 15 novembre 2017 pour l'audience du 15 décembre 2017 et indiquent avoir mis en vente leur immeuble par l'intermédiaire de l'agence Century 21 en réclamant un délai pour procéder à une vente amiable;

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que la créance du CIFD résulte, en l'espèce, d'un acte notarié qui constitue un titre exécutoire l'autorisant à exercer des voies d'exécution, mais dont l'exécution n'est pas soumise au délai de l'article L.111-4 du code des procédures civiles d'exécution, c'est à dire dix ans, puisqu'un tel délai de prescription n'est applicable qu'aux décisions de justice ;

Qu'il en résulte d'une part que le CIFD disposait d'un titre exécutoire, d'autre part que ce titre était soumis au délai de prescription attachée à la créance, c'est à dire au délai biennal édicté à l'article L.137-2 du code de la consommation, puisque que l'action en paiement fondée sur un contrat de crédit immobilier consenti par un organisme de crédit à un consommateur est soumise à cette prescription ( Cass. civ 1ère 11 février 2016 no 14-28.383 et 14-29.539 ) ;

Que l'action en paiement des échéances impayées se prescrit à compter de leurs dates d'exigibilité successives tandis que l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme ;

Attendu qu'en l'espèce la déchéance du terme est intervenue à la date du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire, lequel rend exigible les créances non échues (article L.641-3 du code de commerce);

Que le délai de prescription concernant le capital restant dû a donc commencé à courir le 9 avril 2013 date de la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire ;

Que ce délai de prescription concernant les échéances impayées a commencé à courir à la date d'exigibilité de chacune des échéances et a été interrompu par la déclaration de créance à laquelle le prêteur a procédé ;

Qu'il a recommencé à courir à compter de l'admission de la créance par dépôt au greffe de l'état des créances non contestées intervenu le 22 avril 2010 ;

Qu'à compter de la déchéance du terme, aucune échéance n'était plus due et que la dernière échéance impayée est dès lors au plus tard celle due le 9 avril 2013, les autres mensualités impayées étant antérieures à cette date ;

Attendu que le prêteur a fait délivrer le 26 juillet 2016 commandement valant saisie-immobilière en exécution de l'acte notarié qui constate le contrat de crédit, et non en se prévalant de la décision d'admission de la créance ;

Que cette dernière, contrairement à ce qu'il soutient aujourd'hui, n'est pas un titre exécutoire, même si elle a effectivement l'autorité de la chose jugée ;

Qu'en effet, en cas de poursuite individuelle en cas de clôture de la procédure pour insuffisance d'actif, l'article L.643-11 du code de commerce impose aux créanciers d'obtenir un titre exécutoire délivré par le président du tribunal et qu'ils ne peuvent agir en recouvrement de leur créance directement sur le fondement de la décision d'admission, ce qui démontre que celle-ci n'est pas un titre exécutoire ;

Attendu que, lorsque le créancier exerce son droit de poursuite individuelle sur un bien hors procédure, et donc en dehors de l'article L643-2 du code de commerce, le prix de vente ne sera pas ni appréhendé ni distribué par le liquidateur judiciaire, mais selon les règles de droit commun et a au profit des seuls créanciers inscrits auxquels la déclaration d'insaisissabilité n'est pas opposable ;

Attendu que le CIFD, qui n'était pas soumis à la discipline de la procédure collective en ce qui concerne l'exercice de ses droits sur l'immeuble, ne saurait en conséquence se prévaloir, pour échapper aux conséquences de son inertie, des règles applicables à la procédure collective ;

Qu'en effet, dès lors qu'il n'était pas dans l'impossibilité d'agir sur l'immeuble, au sens de l'article 2234 du code civil, il ne peut bénéficier de la prolongation de l'effet interruptif de prescription de sa déclaration jusqu'à la clôture de la procédure collective ( Cass. Com. 12 juillet 2016, no 15-17.321) ;

Que, n'ayant effectué aucun acte interruptif de prescription depuis le 9 avril 2013 et jusqu'au 26 juillet 2016, date de la délivrance du commandement de payer, il est donc, non pas forclos en son action comme l'a décidé le jugement déféré, mais prescrit en celle-ci, ce qui conduit, sous réserve de cette correction de terme, à confirmer la décision entreprise ;

Attendu que Monsieur et Madame B..., qui ne rembourseront pas, du fait de la prescription opposable à leur créancier, l'intégralité les sommes empruntées pour acquérir leur immeuble, ne font état d'aucun préjudice indemnisable qui leur aurait été causé par le CIFD en engageant la procédure de saisie immobilière et, pour les motifs complets et pertinents du premier juge entièrement adoptés par la cour, seront déboutés de leur demande en paiement de dommages et intérêts ;

Que l'appelant, succombant en ses prétentions, supportera les dépens de la procédure d'appel et qu'il sera fait application, au profit de Monsieur et Madame B..., de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise, sauf à préciser que le CRÉDIT IMMOBILIER FRANCE DÉVELOPPEMENT n'est pas forclos mais prescrit en son action,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE le CRÉDIT IMMOBILIER FRANCE DÉVELOPPEMENT à payer à Monsieur Jean B... et à son épouse, Madame Maria E... , la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE le CRÉDIT IMMOBILIER FRANCE DÉVELOPPEMENT aux dépens d'appel.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Président de la Collégialité et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 18/010591
Date de la décision : 20/12/2018
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-12-20;18.010591 ?
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