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20/12/2018 | FRANCE | N°17/025101

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 20 décembre 2018, 17/025101


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 20/12/2018
la SCP X... F...
la SELARL Y...
ARRÊT du : 20 DECEMBRE 2018

No : 449 - 18
No RG 17/02510 - Z... Portalis
DBVN-V-B7B-FQVQ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de BLOIS en date du 07 Juillet 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SELARL AUTOMOBILES DE SOLOGNE
prise en la personne de son représentant légal domiciliée [...]

Ayant pour avocat Me Pierre X...,

membre de la SCP X... F..., avocat au barreau d'ORLEANS,

D'UNE PART

INTIMÉ : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Mons...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 20/12/2018
la SCP X... F...
la SELARL Y...
ARRÊT du : 20 DECEMBRE 2018

No : 449 - 18
No RG 17/02510 - Z... Portalis
DBVN-V-B7B-FQVQ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de BLOIS en date du 07 Juillet 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SELARL AUTOMOBILES DE SOLOGNE
prise en la personne de son représentant légal domiciliée [...]

Ayant pour avocat Me Pierre X..., membre de la SCP X... F..., avocat au barreau d'ORLEANS,

D'UNE PART

INTIMÉ : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Monsieur Erick A...
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Charlotte Y..., membre de la SELARL Y..., avocat au barreau de TOURS, et ayant pour avocat plaidant Me Pascal D..., avocat au barreau de PARIS,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 11 Août 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 28 juin 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 25 OCTOBRE 2018, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Président de la Collégialité, en son rapport, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Président de la Collégialité et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Elisabeth HOURS, Président de la Collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffiers :

Madame Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé lors du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé le 20 DECEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur Erick A..., qui exerce à la fois la profession de commercial navigant et une activité de négociant international d'automobiles de collection sous l'enseigne "Old Jaguy" a entretenu des relations d'affaires suivies avec la société Automobiles de Sologne à laquelle il a vendu des véhicules pendant plus de 20 ans.

Faisant valoir que cette société lui est redevable d'une somme de 249.600 dollars correspondant à 219.420 euros, Monsieur A... l'a assignée le 21 juillet 2016 devant le tribunal de commerce de Blois en réclamant sa condamnation à lui verser cette somme due au titre de quatre factures impayées libellées en dollars et converties en euros selon le taux de change de juillet 2016.

Par jugement en date du 7 juillet 2017, le tribunal, statuant sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a condamné la société Automobiles de Sologne à payer à Monsieur A... la somme de 219.420 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 mai 2016 outre 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Automobiles de Sologne, aujourd'hui devenue Anciens dépôts Spécialisés (ADS) a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 11 août 2017.

Elle conclut à son infirmation et demande à titre principal à la cour de déclarer irrecevables les demandes formées à son encontre ou, à titre subsidiaire de débouter Monsieur A... de toutes ses prétentions. En tout état de cause, elle réclame 10.000 euros de dommages et intérêts et 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que condamnation de l'intimé à supporter les dépens.

Elle soutient qu'elle avait réglé les quatre factures litigieuses dès 2013 et qu'elle a en outre réglé trois véhicules qui ne lui ont jamais été livrés.
Bien qu'elle ait reconnu devant le tribunal que la convention de Vienne était applicable au litige l'opposant à un vendeur américain, elle prétend désormais qu'est applicable la convention de la Haye et qu'il doit être retenu, en application de l'article 8 de cette convention, que la loi applicable au litige est celle des Etats Unis puisque si les parties n'en ont pas décidé autrement, la vente est régie par la loi de l'état dans laquelle le vendeur a son principal établissement ; qu'en l'espèce Monsieur A... demeure aux Etats Unis, dans l'état de Géorgie, que les factures étaient libellées en dollars et ne mentionnent aucune TVA et elle affirme que l'intimé ne respecte pas la loi de l'état de Géorgie. Elle sollicite le rejet des pièces en langue étrangère communiquées sans traduction et demande à la cour de "se déclarer incompétente au profit de la loi étrangère".

Sur le fond, elle fait valoir qu'en 23 ans elle a acquis de nombreux véhicules auprès de Monsieur A..., lequel a cessé sans préavis les livraisons alors qu'elle avait toujours payé ses achats sans nécessairement attendre la livraison et elle souligne que les factures produites mentionnent "payé par virement bancaire" ce qui démontre qu'elles étaient émises après les paiements. Elle détaille tous ceux qu'elle aurait opérés au titre des factures litigieuses et ce pour un total de 182.548,83 euros. Elle affirme avoir en outre versé en juillet 2013 la somme de 41.259,92 euros pour des véhicules qui ne lui ont jamais été livrés et soutient que cette somme doit donc s'imputer sur la créance de l'intimé. Elle précise que le jugement déféré a omis de tenir compte de ce que le taux de change a varié entre 2013 et 2016 et elle conteste la fiabilité du décompte de Monsieur A... qui lui facture des véhicules commandés à titre personnel par son gérant, Monsieur E..., et des voitures qui lui ont été directement payées par des clients.

Elle précise qu'elle a constaté, à compter de l'année 2012, une baisse notable de qualité des véhicules qui lui avaient été livrés, ce qui avait fini par lui donner la réputation de "marchand de ferraille", et qui l'a obligée à trouver un autre fournisseur et à passer des annonces dans la presse. Elle indique enfin que la modification des taxes sur l'importation des véhicules anciens a impacté son activité.

Monsieur A... sollicite au contraire la confirmation du jugement entrepris et demande à la cour d'y ajouter condamnation de l'appelante à lui verser une indemnité de procédure de 10.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens, dont distraction au profit de Maître Y....
Il fait valoir que, quelle que soit la loi applicable, ses demandes sont recevables en application de la convention de Vienne applicable au litige ainsi que l'a reconnu l'appelante devant les premiers juges.
Il précise que les seules pièces en langue anglaise sont celles concernant la dénomination des véhicules et les chiffres de vente et qu'il n'existe donc aucun intérêt à les traduire.

Il explique qu'il avançait les fonds pour acquérir les véhicules tandis que l'appelante avançait les frais de transport et effectuait les formalités douanières ; qu'il a accepté de consentir des délais de paiement à sa cocontractante, ce qui démontre que les véhicules n'étaient pas payés à l'avance, la mention "payée par virement" étant portée sur la facture à la demande d'AUTOMOBILES de SOLOGNE pour rendre plus aisées les formalités administratives. Il souligne que les paiements réalisés par l'appelante ne précisent jamais les véhicules auxquels il s'appliquaient et il indique que les relations contractuelles se sont dégradées en mars 2013, l'appelante se prévalant faussement d'une augmentation des taxes douanières qui n'a duré qu'un mois pour soutenir qu'elle ne pouvait plus dégager de marge suffisante. Il soutient que c'est sa cocontractante qui a décidé de se fournir ailleurs et non lui qui a décidé de ne plus la livrer. Il rappelle par ailleurs que la contre valeur en euros d'une dette libellée en monnaie étrangère doit être fixée au jour du paiement ; que sa créance est liquide certaine et exigible et que les intérêts sont dus depuis la mise en demeure du 13 mai 2016. Il souligne que ce n'est que le premier avril 2016 qu'AUTOMOBILES de SOLOGNE lui a indiqué qu'il serait redevable d'indemnités en raison du mauvais état des véhicules vendus et il fait observer que les véhicules étaient tous vendus en l'état et sans garantie, qu'il adressait des photos avant la vente et a toujours proposé des avoirs lorsque sa cocontractante découvrait des vices qu'il ne connaissait pas ; qu'ainsi il a établi deux avoirs le 31 décembre 2012 l'un de 10.800 dollars sur une Mercedes 1971 l'autre de 2.300 dollars sur une Chevrolet corvette de 1969, ces deux avoirs devant s'imputer sur les prochaines commandes.
Par écritures en date du 3 octobre 2018, Monsieur A... a réclamé le rabat de l'ordonnance de clôture en faisant valoir que l'appelante avait déposé le 25 juin 2015 de nouvelles écritures et 5 nouvelles pièces et qu'il n'avait pas été en mesure d'y répondre avant le prononcé de l'ordonnance de clôture intervenue le 28 juin 2018. Si la révocation de l'ordonnance de clôture n'était pas ordonnée, il demande à la cour d'écarter des débats les conclusions et les pièces tardivement communiquées.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que Monsieur A... se borne à soutenir que l'appelante a communiqué de nouvelles conclusions le 25 juin 2018 et 5 nouvelles pièces, soit trois jours avant la date prévue pour la signature de l'ordonnance de clôture ;

Qu'il ne précise pas en quoi ces conclusions nécessitaient une réponse et portent ainsi atteinte aux droits de la défense ;

Que la demande tendant à les voir écarter ou voir ordonner la réouverture des débats ne peut être accueillie;

Qu'au contraire, les 5 nouvelles pièces produites aux débats qui comprennent 14 justificatifs de virements opérés entre le 3 février et le 25 juin 2010 ne peuvent qu'être écartées des débats, Monsieur A... n'ayant pas eu matériellement le temps de les examiner et de vérifier, dans sa propre comptabilité, si elles correspondent effectivement à des paiements reçus ;

Que l'ancienneté de ces pièces qui figuraient de plus dans les documents comptables de l'appelante exclut que cette dernière n'ait pu les communiquer avant le 25 juin 2018 et que ces pièces, qui n'offrent pas d'intérêt pour la solution du litige qui porte sur quatre factures en date de 2012 et 2013 seront donc écartées des débats ;

Attendu que la convention dite de Vienne est en réalité la convention sur la vente internationale de marchandises ( a CVIM) ; qu'elle édicte des règles uniformes applicables au commerce international de marchandises tandis que la Convention de la Haye indique la solution devant être retenue en cas de conflit de lois;

Que l'article 23 de la Convention de la Haye énonce qu'elle-même "ne porte pas atteinte à l'application de la Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises (Vienne, 11 avril 1980);".

Que, dès lors, si les conditions d'application de la CVIM sont remplies, c'est elle qui doit être appliquée ;

Attendu que la CVIM précise qu'elle est appliquée aux contrats de vente de marchandises:
a) lorsque les parties ont leur établissement dans des Etats différents;
b) dans tous les autres cas où la situation donne lieu à un conflit entre les lois de différents Etats, à moins qu'un tel conflit ne résulte du seul choix par les parties de la loi applicable, même associé à la désignation d'un juge ou d'un arbitre.

Qu'elle indique ensuite qu'elle ne s'applique pas :
a) aux ventes sur saisie ou par autorité de justice;
b) aux ventes de valeurs mobilières, d'effets de commerce ou de monnaies; elle s'applique néanmoins aux ventes de marchandises sur documents;
c) aux ventes de marchandises achetées pour un usage personnel, familial ou domestique;

Attendu que le litige concerne la vente de marchandises, en l'espèce des véhicules de collection, entre des parties dont l'une avait son établissement en France et l'autre aux Etats Unis ;

Que c'est par une erreur d'interprétation du mot "contrat" que le tribunal a retenu qu'il "y avait absence de contrat entre les parties" alors que l'absence d'écrit n'équivaut pas à une absence de contrat ;

Qu'en effet, les parties s'accordent à reconnaître qu'elles ont passé de nombreux contrats de vente dont la preuve est rapportée par les factures émises, les sommes versées, et les courriers échangés entre elles ;

Que la demande en paiement formée par Monsieur A... repose exclusivement sur un fondement contractuel et que le tribunal a d'ailleurs prononcé condamnation sur ce fondement et qu'il existe donc bien des contrats rendant applicable la convention de Vienne;

Attendu que l'article 7 de la CVIM prévoit que la vente est régie par la loi choisie par les parties, un tel accord devant être exprès ou résulter clairement des termes du contrat et du comportement des parties, envisagés dans leur ensemble ;

Qu'il n'est pas contesté que les parties ne se sont pas accordées pour déterminer la loi applicable ;

Que s'appliquent donc au litige les dispositions de l'article 8 de la CVIM qui énoncent que dans la mesure où la loi applicable à la vente n'a pas été choisie par les parties conformément aux dispositions de l'article 7, la vente est régie par la loi de l'Etat dans lequel le vendeur a son établissement au moment de la conclusion du contrat ;

Que toutefois la vente est régie par la loi de l'Etat dans lequel l'acheteur a son établissement au moment de la conclusion du contrat, si:
a) des négociations ont été menées et le contrat a été conclu par les parties présentes dans cet Etat
ou
b) le contrat prévoit expressément que le vendeur doit exécuter son obligation de livraison des marchandises dans cet Etat
ou
c) la vente a été conclue aux conditions fixées principalement par l'acheteur et en réponse à une invitation qu'il a adressée à plusieurs personnes mises en concurrence (appel d'offres).
Que ce même article précise qu'à titre exceptionnel, si, en raison de l'ensemble des circonstances, par exemple de relations d'affaires entre les parties, la vente présente des liens manifestement plus étroits avec une loi autre que celle qui serait applicable au contrat selon les paragraphes 1 ou 2, la vente est régie par cette autre loi ;

Attendu qu'il est constant que Monsieur A... avait son établissement aux Etats Unis ;

Qu'il indique lui-même que c'est l'appelante qui réglait les frais de transport et effectuait les formalités douanières et qu'il ne procédait donc pas lui-même à la livraison des véhicules sur le territoire français ;

Qu'il convient en conséquence d'appliquer au litige la loi de l'Etat de Géorgie dans lequel est situé l'établissement de Monsieur A..., domicilié [...] ;

Mais attendu qu'Anciens dépôts Spécialisés se contente de soutenir que l'intimé ne respecte pas les lois de l'Etat de Géorgie au motif qu'il n'aurait pas sollicité de licence pour procéder au commerce, ce qui est parfaitement indifférent à la solution du litige puisqu'il n'est pas soutenu qu'en l'absence d'une telle licence, Monsieur A... ne serait pas autorisé à obtenir paiement de véhicules que l'appelante reconnaît avoir reçus ;

Qu'Anciens dépôts Spécialisés n'ayant pas la charge de faire respecter la loi de l'Etat de Georgie, cette argumentation est dépourvue d'intérêt ;

Que sont tout aussi dépourvus de fondement les dires d'Anciens dépôts Spécialisés qui fait valoir que " Monsieur A... ne respecte pas davantage la réglementation en matière de mentions obligatoires sur la facturation et contrevient aux articles R 123-237 et R 123-238 du code de commerce" puisqu'après avoir soutenu que seule la loi de l'Etat de Georgie est applicable au litige, l'appelante ne peut sérieusement invoquer la violation de dispositions du droit français ;

Qu'enfin, l'exposé d'Anciens dépôts Spécialisés des motifs pour lesquels Monsieur A... tenterait par fraude de se soustraire aux dispositions du droit américain ne saurait convaincre, l'appelante confondant manifestement le droit applicable au litige et la juridiction compétente pour l'appliquer ;

Que la juridiction compétente étant celle du domicile du défendeur, Monsieur A... a, à raison, saisi le tribunal de commerce de Blois de sa demande en paiement formée à l'encontre d'Anciens dépôts Spécialisés et qu'il ne peut en conséquence être sérieusement prétendu que l'intimé souhaite éviter "l'introduction d'une action aux USA qui impliquerait de lourdes sanctions", puisque les juridictions américaines ne sont pas exclusivement territorialement compétentes pour connaître du litige, ce que ne manquerait d'ailleurs pas de soutenir l'appelante si elle devait se présenter devant les juges de l'Etat de Géorgie et exposer les frais nécessaires pour assurer sa défense aux Etats Unis ;

Qu'il sera donc retenu que la loi de l'Etat de Géorgie est applicable au litige lequel relève de la compétence territoriale du tribunal de commerce de Blois et de cette cour ;

Que l'exception d'irrecevabilité des demandes présentée par l'appelante sera dès lors rejetée, étant au surplus relevé que la compétence des tribunaux américains n'auraient pas rendu irrecevables les demandes mais incompétents les tribunaux français ;

Attendu que les seules pièces rédigées en langue anglaise sont celles qui rappellent la marque et l'année de mise en circulation des véhicules vendus et que l'appelante n'expose pas en quoi leur traduction serait indispensable à la solution du litige puisqu'elle-même ne fait aucune référence à ces pièces et que leur contenu n'est pas contesté ;

Attendu qu'Anciens dépôts Spécialisés, qui exige l'application de la loi de l'Etat de Géorgie, ne produit aucun texte de loi de cet Etat à l'appui de ses contestations ;

Que Monsieur A... fait quant à lui valoir que la loi de l'Etat de Géorgie prévoit, comme la loi française, le paiement des factures correspondant à la vente de marchandises, ce qui n'est pas contesté par l'appelante ;

Que faute d'indication, par l'une ou l'autre des parties, de dispositions légales particulières devant être appliquées par la cour pour vérifier les documents produits par les parties, il convient simplement de rechercher si Anciens dépôts Spécialisés démontre avoir payé toutes les sommes dont elle était redevable envers l'intimé ;

Attendu que ce dernier réclame paiement de quatre factures :
- no 313 émise le 7 novembre 2012 pour un montant de 88.500 dollars US
- no 314 émise le 26 février 2013 pour un montant de 96.300 dollars US
-no 318 émise le 9 avril 2013 pour un montant de 48.500 dollars US
- no 319 émise le 14 août 2013 pour un montant de 16.300 dollars US ;

Que, pour résister à ces demandes, l'appelante qui ne conteste pas que ces factures correspondent à des véhicules qui lui ont effectivement été livrés, soutient qu'elle a payé les sommes dues et qu'elle a passé commande de trois véhicules qu'elle a payés mais qui ne lui ont pas été livrés ;

Mais attendu que la preuve du paiement auquel elle prétend avoir procédé ne saurait résulter de ses explications complexes faisant état de 19 virements effectués entre le 30 octobre 2012 et le premier juillet 2013

Qu'en effet, ces paiements ont été réalisés sans aucune indication des factures sur lesquelles elles devaient être imputées ;

Que le fait que l'appelante ait versé 299.707,06 euros en une année ne saurait justifier le paiement des quatre factures litigieuses puisque les parties étaient en relations d'affaires depuis 23 ans ;

Qu'Anciens Dépôts Spécialisés ne produit aucune pièce démontrant que trois véhicules commandés et payés ne lui auraient pas été livrés et qu'elle ne peut sérieusement soutenir que le fait que les documents douaniers mentionnent "payé par virement" démonterait qu'elle payait toujours les véhicules à l'avance alors même qu'elle soutient avoir réglé es véhicules livrés objets des quatre factures litigieuse qu'ensuite de la réception de ces voitures ;

Que ses propres contradictions ne peuvent en conséquence permettre de retenir une valeur probante aux documents douaniers quant aux paiements intervenus ;

Que son argumentation de ce qu'il "n'était pas rare qu'elle verse des sommes en espèces aux membres de la famille de Monsieur A..." est tout aussi inopérante puisque ces versements et leurs montants ne sont pas justifiés et qu'à supposer même qu'ils soient intervenus, ne sauraient démontrer que les sommes ainsi remises sans reçu visaient à régler des factures émises par l'intimé ;

Qu'est de même inopérant le fait que ce dernier aurait "occulté de sa comptabilité l'ensemble de 14 virements" intervenus en 2010 puisqu'il n'est pas exposé en quoi ces virements pourraient concerner des factures émises deux ou trois ans plus tard, l'appelante n'ayant jamais adressé de courrier à son vendeur pour faire état d'avoirs ou de sommes à lui restituer ;

Qu'en réalité, l'appelante qui reprend des comptes depuis l'année 2010, entend imputer des paiements réalisés durant les années précédentes sur des factures plus récentes ;

Qu'il ressort pourtant de ses propres bilans (pièce 46 de l'intimé) qu'étaient portés au titre de l'exercice 2012 une créance A... d'un montant de 380.035 euros et au titre de l'exercice 2013 une créance A... d'un montant de 208.033 euros ;

Qu'Anciens Dépôts Spécialisés ne s'explique pas sur ces écritures comptables qui démontrent qu'il existait des impayés en 2012, soit avant l'émission de trois des factures litigieuses, la facture de novembre 2012 étant quant à elle très inférieure à la créance de l'appelant d'un montant total de 380.035 euros ;

Qu'elle ne conteste pas avoir reçu les 16 véhicules objets des factures litigieuses et qu'il lui revient de justifier les avoir payés ;

Que Monsieur A... produit l'intégralité de ses relevés bancaires de la Bank of América, compte sur lequel l'appelante indique elle-même avoir opéré des virements en paiement des véhicules reçus au cours des relations contractuelles ;

Qu'il n'est pas sérieux pour Anciens Dépôts Spécialisés de réclamer production par Monsieur A... de l'intégralité de ses relevés de comptes ouverts dans une ou des banques françaises alors qu'elle-même ne justifie d'aucun paiement opéré sur un compte de l'intimé ouvert en France ;

Attendu qu'il résulte des pièces ainsi produites que l'appelante était déjà en retard dans ses paiements en octobre 2012 ;

Que les versements dont elle fait état à hauteur de 299.000 euros entre novembre 2012 et décembre 2013 ont été à raison imputés par l'intimé sur les impayés les plus anciens d'un montant de plus de 380.000 euros, ce qui a laissé impayée la dernière facture de 2012 et les trois factures de 2013 ainsi que le démontrent les propres bilans de l'appelante ;

Que les dires de cette dernière d'un paiement complet des sommes dont elle était redevable seront donc écartés ;

Attendu qu'Anciens Dépôts Spécialisés fait ensuite valoir que le taux de change applicable est celui de la date d'émission de la facture et elle reproche au tribunal d'avoir appliqué le taux de change de 2016 ;

Que sa demande de ce chef est partiellement fondée et que Monsieur A... ne saurait se prévaloir de la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle la contre-valeur en euros d'une dette déterminée en dollars US doit être fixée au jour du paiement puisque, d'une part cette jurisprudence ne s'applique pas à un litige régi par le droit de l'Etat de Géorgie et que, d'autre part, il en fait, comme le tribunal, une lecture erronée, la Cour de cassation n'ayant aucunement retenu que la contre-valeur en euros doit être fixée à la date à laquelle intervient la décision de condamnation mais uniquement à la date du paiement effectif ;

Que l'appelante est en effet débitrice, non d'une somme fixée à la date à laquelle la cour statue, mais d'une somme déterminée par les factures émises, la conversion en euros ne devant être opérée qu'au jour du paiement ;

Attendu qu'Anciens Dépôts Spécialisés sera donc, par infirmation du jugement déféré, condamnée à payer à Monsieur A... la contre-valeur, à la date du paiement effectif, de la somme de 249.600 dollars US assortie, en application de l'article 78 de la CVIM, des intérêts au taux légal français à compter de la mise en demeure reçue par l'appelante le 13 mai 2016 ;

Attendu enfin qu'Anciens Dépôts Spécialisés ne saurait démontrer des manquements contractuels de son vendeur en faisant valoir que son chiffre d'affaires a été impacté par la modification des taxes douanières, ce qui n'est pas de la responsabilité de Monsieur A... ;

Qu'elle produit sous sa pièce 22 son propre courriel en date du 17 juin 2015 dans lequel elle marque son étonnement de la réclamation en paiement formée par l'intimée et indique " Le préjudice principal d'ADS est estimé à 226.800 euros pour rupture abusive, injustifiée et soudaine du contrat tacite d'approvisionnement exclusif de 60 à 100 véhicules l'an" ce qui est pour le moins contraire à l'indication donnée dans ses conclusions de ce que les véhicules vendus présentaient de nombreux défauts, qu'ils étaient invendables et qu'elle a été contrainte de rechercher un nouveau fournisseur ;

Que l'appelante ne communiquant aucune pièce comptable, ne justifie d'aucun préjudice, et sera donc déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts "en application de l'article 1147 du code civil et pour procédure abusive" ;

Attendu qu'Anciens Dépôts Spécialisés, succombant à l'instance d'appel, en supportera les dépens et qu'il sera fait application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'intimé en tenant compte de la somme de 8.000 euros qui lui a déjà été accordée en première instance ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

DIT n'y avoir lieu à révoquer l'ordonnance de clôture ou à écarter des débats les dernières écritures de l'appelante,

ECARTE des débats les 5 pièces communiquées par elle le 25 juin 2018,

DECLARE recevables les demandes formées par Monsieur Erick A...,

CONFIRME la décision entreprise, hormis en ce qu'elle a condamné la société AUTOMOBILES de SOLOGNE, à payer à Monsieur A... la somme de 219.420 euros avec intérêts légaux à compter du 28 mai 2016,

STATUANT À NOUVEAU de ce seul chef,

CONDAMNE la société Anciens Dépôts Spécialisés, venant aux droits de la société AUTOMOBILES de SOLOGNE, à payer à Monsieur Erick A... la contre-valeur, à la date du paiement effectif, de la somme de 249.600 dollars US, cette somme étant assortie des intérêts au taux légal français à compter du 13 mai 2016 ;

Y AJOUTANT

CONDAMNE la société Anciens Dépôts Spécialisés, venant aux droits de la société AUTOMOBILES de SOLOGNE à payer à Monsieur Erick A... la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

CONDAMNE la société Anciens Dépôts Spécialisés, venant aux droits de la société AUTOMOBILES de SOLOGNE, aux dépens d'appel,

ACCORDE à Maître Y..., avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Président de la Collégialité et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/025101
Date de la décision : 20/12/2018
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-12-20;17.025101 ?
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