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13/12/2018 | FRANCE | N°17/021221

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 13 décembre 2018, 17/021221


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 13/12/2018
Me Céline X...
la Y... du : 13 DECEMBRE 2018

No : 433 - 18
No RG 17/02122 - No Portalis
DBVN-V-B7B-FP4Y

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 01 Juin 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Madame Alexandra A... épouse B...
née le [...] [...]
[...]

Ayant pour avocat Me Céline X..., avocat au barreau de BLOIS,

Monsieur Fra

nck B...
né le [...] [...]
[...]

Ayant pour avocat Me Céline X..., avocat au barreau de BLOIS,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fis...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 13/12/2018
Me Céline X...
la Y... du : 13 DECEMBRE 2018

No : 433 - 18
No RG 17/02122 - No Portalis
DBVN-V-B7B-FP4Y

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de BLOIS en date du 01 Juin 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Madame Alexandra A... épouse B...
née le [...] [...]
[...]

Ayant pour avocat Me Céline X..., avocat au barreau de BLOIS,

Monsieur Franck B...
né le [...] [...]
[...]

Ayant pour avocat Me Céline X..., avocat au barreau de BLOIS,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SA CREATIS
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié [...]

Ayant pour avocat postulant Me Pierre C..., membre de la D... , avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant la SELARL HAUSSMANN-KAINIC-HASCOËT-HÉLAIN, avocats au barreau de l'ESSONNE,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 10 Juillet 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 28 juin 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 18 OCTOBRE 2018, à 9 heures 30, devant Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de la Collégialité, Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :

Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de la Collégialité, qui en a rendu compte à la Collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé lors du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé le 13 DECEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 14 avril 2008, la société CREATIS a consenti à Monsieur Franck B... et à son épouse, Madame Alexandra A..., un crédit d'un montant de 76.000 euros remboursable en 120 mensualités au taux de 7,41 %.

Diverses échéances étant demeurées impayées, la SA CREATIS après les avoir en vain mis en demeure de régulariser leur situation par lettre recommandée avec avis de réception en date du 24 juin 2015, a assigné les époux B... le premier octobre 2015 devant le tribunal de grande instance de Blois afin d'obtenir leur condamnation à lui payer la somme de 61.432,37 euros avec intérêts au taux contractuel majoré de 11,410% à compter de la mise en demeure outre 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du premier juin 2017, le tribunal a écarté les contestations des époux B... qu'il a condamnés à payer à CREATIS la somme de 61.432,37 euros avec intérêts à compter du 19 septembre 2015 au taux de 11,41% l'an sur la somme de 57.509,38 euros et au taux légal sur la somme de 3.922,99 euros.

Monsieur et Madame B... ont relevé appel de cette décision par déclaration en date du 10 juillet 2017.
Ils en poursuivent l'infirmation en demandant à la cour de juger prescrite et donc irrecevable l'action en paiement diligentée à leur encontre, ou, à titre subsidiaire, de dire que la créance de CREATIS ne saurait être supérieure à une somme de 35.349,65 euros ; encore plus subsidiairement de retenir que les mensualités échues impayées de juillet 2012 à septembre 2013 sont prescrites et que la créance de CREATIS ne saurait être supérieure à la somme de 45.485,64 euros ; à titre subsidiaire de dire que le prêteur a commis un manquement à son devoir de mise en garde, de le condamner à leur verser 62.000 euros à titre de dommages et intérêts et d'ordonner la compensation avec les sommes dont ils pourraient être déclarés redevables. En tout état de cause, de leur accorder des délais de paiement en précisant que les sommes reportées porteront intérêts à un taux réduit, de diminuer le montant de l'indemnité conventionnelle à un euro et de leur allouer une indemnité de procédure de 1.500 euros.
Ils soutiennent en substance qu'il doit être fait application du délai de prescription biennal et non du délai quinquennal appliqué par le premier juge.

CREATIS conclut à titre principal à la confirmation du jugement déféré. A titre subsidiaire et si la cour appliquait la prescription biennale, elle sollicite condamnation des appelants à lui verser 55.493,75 euros assortis des intérêts au taux contractuel de 11,41% à compter du 19 septembre 2015. En tout état de cause, elle réclame condamnation de Monsieur et Madame B... à lui verser une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'à supporter les dépens.
Elle fait valoir que les emprunteurs ont cessé de rembourser les échéances dues à compter du mois d'avril 2013 et non de juillet 2012 et que la prescription quinquennale est bien applicable au litige.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que les mensualités du prêt s'élevaient à 989,20 euros ;

Que le décompte produit par le prêteur sous le numéro 3 de ses pièces communiquées indique qu'était attendu le 4 mars 2013 paiement de la somme de 3.840,31 euros comprenant l'échéance de mars à hauteur de 989,20 euros ;

Que, quelles que soient les dates des échéances impayées, les règlements ensuite intervenus doivent s'imputer sur les échéances les plus anciennes ;

Qu'il en résulte que les paiements de 200 euros et de 900,30 euros opérés en mars 2013, de 944,17 euros et de 1.019,70 euros opérés en avril 2013, de 200 euros et de 944,17 euros opérés en mai 2013, soit un montant total de 4.008,34 euros, ont réglé les arriérés et le mois de mars 2013, laissant un solde de 168,03 euros ne permettant pas d'apurer l'échéance d'avril 2013 ;

Que le premier impayé est donc en date d'avril 2013 comme le soutient le prêteur et non en date de juillet 2012 comme l'affirment les emprunteurs qui ne contestent pourtant pas cet historique ;

Attendu que les parties s'accordent pour retenir que le point de départ du délai de prescription de l'action en paiement engagée par le prêteur est la date du premier incident de paiement non régularisé ;

Que CREATIS prétend cependant que, s'agissant d'un prêt d'un montant supérieur à 21.500 euros souscrit avant le premier mai 2011, les dispositions du code de la consommation ne lui sont pas applicables, notamment celles issues de la loi du premier juillet 2010 et que la prescription quinquennale est applicable tandis que les époux B... prétendent que le prêt est soumis à la prescription biennale prévue par l'article L 137-2 du code de la consommation;

Attendu que les époux B... ont souscrit un prêt de restructuration ;

Qu'un tel prêt constitue un service financier accordé à un consommateur par un professionnel ;

Qu'il était soumis, avant le 19 juin 2018, date de l'entrée en vigueur de la loi du 18 juin 2018 réformant la prescription, à un délai de prescription quinquennal ;

Que la loi du 18 juin 2018 a introduit, dans l'article L 137-2 devenu aujourd'hui L 218-2 du code de la consommation un délai de prescription abrégé de deux années pour les services financiers accordés à un consommateur par un professionnel ;

Qu'en conséquence, il doit être fait application de l'article 2222 du code civil, régissant l'application de cette loi dans le temps, aux termes duquel, en cas de réduction de la durée du délai de prescription, le nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ;

Qu'il en résulte que la prescription biennale édictée par l'ancien article L. 137-2 du code de la consommation est applicable à l'action engagée par la banque, le premier octobre 2015, en exécution d'un contrat conclu le 14 avril 2008 ;

Attendu qu'à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ;

Que si, au regard de son assignation délivrée le premier octobre 2015, l'intimé est prescrit, au regard de ce qui vient d'être exposé, à réclamer paiement des échéances antérieures au 31 septembre 2013, la déchéance du terme a été prononcée le 18 août 2015 et il n'est donc pas prescrit à réclamer paiement du capital restant dû à cette date ;

Attendu que le décompte de créance arrêté par CREATIS au 7 décembre 2017 ne peut être pris en compte puisque l'appelante y comptabilise notamment des frais d'assurance postérieurs à la date de déchéance du terme ;

Que la créance de la société CREATIS est ainsi ventilée au 18 août 2015, date cette déchéance :

- échéances impayées : 24.890,98 euros comprenant 6.383,36 euros d'intérêts et 1.231,20 euros d'assurance,
- capital restant dû : 31.760,98 euros,
- intérêts : 309,62 euros,
- assurance courue : 72,59 euros,
- indemnité conventionnelle : 3.922,99 euros ;

Qu'il convient d'en déduire les 6 échéances prescrites entre avril et septembre 2013 soit la somme de 5.938,62 euros comprenant 273,60 euros d'assurance et 1.643,29 d'intérêts ;

Qu'au regard d'intérêts contractuels d'un taux très élevé de 7,41%, l'indemnité conventionnelle, qui a le caractère d'une clause pénale, apparaît manifestement excessive et sera réduite à un euro ;

Qu'il convient enfin de déduire de cette somme le virement de 400 euros opéré par les appelants après la déchéance du terme ;

Que Monsieur et Madame B... seront en conséquence condamnés à verser à CREATIS la somme de 51.096,55 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 7,41% sur 43.099,78 euros et au taux légal sur le solde à compter du 19 août 2015 et jusqu'à complet paiement ;

Attendu que les intimés reprochent enfin à COFIDIS un manquement à son devoir de mise en garde en faisant valoir qu'ils percevaient des revenus mensuels moyens de l'ordre de 3.320 euros, s'acquittaient d'un loyer de 487 euros, et que les mensualités d'emprunt de 989,77 euros portaient leur taux d'endettement à plus de 35% ;

Qu'ils soutiennent que CREATIS aurait dû les alerter sur les risques d'endettement liés au prêt ;

Mais attendu que le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité engagée à l'encontre de la banque doit être fixée, pour l'emprunteur, à la date de la conclusion du contrat de prêt ;

Que celle-ci étant le 14 avril 2008, les époux B... sont prescrits dans leur demande en paiement de dommages et intérêts formée après le premier octobre 2015 ;

Qu'il ne sera donc que surabondamment relevé que cette demande aurait été en tout état de cause rejetée comme non fondée puisque les intimés oublient qu'ils ont obtenu de CREATIS un prêt de restructuration qui diminuait à 989 euros les échéances mensuelles de 2.461,11 euros dont ils étaient jusqu'alors redevables ;

Que leur taux d'endettement réduit à 35,72% après ce prêt n'était pas excessif et qu'ils ont d'ailleurs pu s'acquitter des échéances pendant 5 années ;

Attendu que les époux B... sollicitent le report de deux ans des sommes dues, sans motiver leur demande sur ce point, sans communiquer devant la cour de pièces justifiant leurs ressources et charges actuelles, et sans indiquer, notamment, pour quel motif leur situation s'améliorerait à l'issue de ce délai de 24 mois et leur permettrait alors de régler l'intégralité de la somme due ;

Que les appelants ont déjà bénéficié, par le déroulement normal de la procédure et l'exercice des voies de recours, de délais de paiement sans commencer à apurer, même très partiellement, leur dette, et qu'il ne saurait, en l'absence de justificatif sur leur situation de débiteurs malheureux mais de bonne foi, leur en être accordé de nouveaux ;

Attendu que Monsieur et Madame B..., succombant à l'instance, en supporteront les dépens et qu'il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME la décision entreprise,

STATUANT À NOUVEAU,

DÉBOUTE Monsieur Franck B... et son épouse, Madame Alexandra A..., de l'ensemble de leurs demandes, hormis celle qui concerne l'irrecevabilité pour prescription de la demande en paiement formée par la société CREATIS au titre des échéances impayées d'avril à septembre 2013 inclus,

CONDAMNE solidairement Monsieur Franck B... et Madame Alexandra A... à payer à la société CREATIS la somme de 51.096,55 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 7,41% sur 43.099,78 euros et au taux légal sur le solde à compter du 19 août 2015 et jusqu'à complet paiement,

CONDAMNE solidairement Monsieur Franck B... et Madame Alexandra A..., à payer à la société CREATIS la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum Monsieur Franck B... et Madame Alexandra A... aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de la Collégialité et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/021221
Date de la décision : 13/12/2018
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-12-13;17.021221 ?
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