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13/12/2018 | FRANCE | N°17/020751

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 13 décembre 2018, 17/020751


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 13/12/2018
Me Blaise X...
la SCP LEROYARRÊT du : 13 DECEMBRE 2018

No : 431 - 18
No RG 17/02075 - No Portalis
DBVN-V-B7B-FPZ2

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 01 Juin 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265198533037654

Monsieur Christophe Z...
né le [...] à CHOLET (49000)
[...]
[...]

Ayant pour avocat Me Blaise X..., avocat au barreau

de TOURS,

Madame Nathalie A... épouse Z...
née le [...] à SAINT CHAMOND (42000)
[...]
[...]

Ayant pour avocat Me Blaise X......

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 13/12/2018
Me Blaise X...
la SCP LEROYARRÊT du : 13 DECEMBRE 2018

No : 431 - 18
No RG 17/02075 - No Portalis
DBVN-V-B7B-FPZ2

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 01 Juin 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265198533037654

Monsieur Christophe Z...
né le [...] à CHOLET (49000)
[...]
[...]

Ayant pour avocat Me Blaise X..., avocat au barreau de TOURS,

Madame Nathalie A... épouse Z...
née le [...] à SAINT CHAMOND (42000)
[...]
[...]

Ayant pour avocat Me Blaise X..., avocat au barreau de TOURS,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265199218666440

SA CAISSE D'EPARGNE LOIRE CENTRE Société coopérative à forme anonyme, directoire et conseil de surveillance au capital de 392 219 900 €,
prise en la personne de son représentant légal
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Hugues B..., membre de la SCP B... , avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant Me Fabrice D..., membre de LAWFIELDS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS,
D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 06 Juillet 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 14 juin 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 11 OCTOBRE 2018, à 14 heures, Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président, en son rapport, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Après délibéré au cours duquel Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de :

Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé lors du prononcé,

ARRÊT :

Prononcé le 13 DECEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 13 mai 2009, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Loire Centre (la Caisse d'Epargne) a consenti à Monsieur Christophe Z... et à son épouse, Madame Nathalie A..., deux prêts immobiliers :
- l'un d'un montant de 40 350 euros remboursable en 228 mensualités au taux zéro,
- l'autre de 146.450 euros remboursable en 360 mensualités au taux nominal de 5,15% et au taux effectif global (TEG) de 5,25%.

En raison de la baisse du taux des intérêts, les parties ont conclu un premier avenant en date du 16 mars 2011 ramenant le taux d'intérêt nominal à 4,51 % et le TEG à 4,51 % sur 324 mois et le 12 mars 2013 un second avenant faisant état d'un taux d'intérêt de 3,74% et d'un TEG de 3,901%.

Le 7 juillet 2015, Monsieur et Madame Z... ont assigné la Caisse d'Épargne devant le tribunal de grande instance de Tours en sollicitant la substitution du taux d'intérêt conventionnel par le taux d'intérêt légal en faisant valoir que les avenants précisaient que "durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours.», ce qui contreviendrait aux dispositions du code de la consommation interdisant l'utilisation d'une année lombarde.

Par jugement en date du premier juin 2017, le tribunal a prononcé la déchéance partielle du droit aux intérêts de la Caisse d'Epargne, fait application à compter du premier mai 2011 d'un taux d'intérêt unique réduit à 2,050%, enjoint à la banque de produire un nouveau tableau d'amortissement et dit qu'elle sera tenue de restituer aux époux Z... la différence entre les intérêts effectivement payés par eux et ceux recalculés sur la base du taux réduit de 2,50 %. Il a condamné la Caisse d'Epargne, qu'il a déboutée du surplus de ses demandes, à verser à Monsieur et Madame Z... une indemnité de procédure de 1.500 euros ainsi qu'à supporter les dépens.

Monsieur et Madame Z... ont relevé appel de cette décision par déclaration en date du 6 juillet 2017.

Ils en sollicitent l'infirmation uniquement en ce qu'elle a fait application, à compter du premier mai 2011, d'un taux d'intérêt unique réduit à 2,5 % au lieu du taux légal, et demandent à la cour de substituer ce dernier aux taux d'intérêts figurant dans l'offre de crédit et les avenants, de condamner la banque à produire un nouveau tableau d'amortissement appliquant les substitutions des taux d'intérêts légaux au taux d'intérêt conventionnel pour les périodes considérées ainsi qu'à leur restituer la différence entre les intérêts effectivement payés par eux et ceux recalculés sur la base du taux légal applicable en 2011 et 2013, à leur verser 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens, dont distraction au profit de Maître X....

La Caisse d'Epargne sollicite également à titre principal l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour de débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes. A titre subsidiaire, elle réclame l'infirmation partielle de la décision attaquée en ce qui concerne la substitution du taux d'intérêts prévus par le second avenant. En tout état de cause, elle sollicite paiement de 3.000 euros pour procédure abusive et de 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que condamnation des appelants à supporter les dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître B....

Elle fait valoir que, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, le calcul du TEG auquel elle a procédé ne contrevient pas aux dispositions d'ordre public du code de la consommation. Elle reconnaît une erreur affectant le TEG du premier avenant mais soutient qu'il n'est pas démontré que cette erreur affecte le taux au-delà d'une décimale.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que Monsieur et Madame Z... font état de l'absence de prise en compte de l'intégralité des frais dans le calcul des TEG des deux avenants ;

Que, si le montant des frais du premier avenant a été intégré dans le capital restant dû, ce qui n'aurait pas dû être puisqu'il aurait dû être pris en compte dans le calcul du TEG, les appelants prétendent uniquement que le montant du TEG du premier avenant serait supérieur de 0,07% à celui qui aurait dû être appliqué par la banque ;

Que, pour obtenir la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel, l'emprunteur doit démontrer que l'erreur aurait conduit à modifier le résultat du calcul stipulé à l'acte de prêt au-delà du seuil légal fixé par l'article R.313-1 du code de la consommation à une décimale (cf Cass. Com., 18 mai 2017, pourvoi no 16-11.147) ;

Que tel n'étant pas le cas en l'espèce, le moyen tiré d'une irrégularité du TEG prévu au titre du premier avenant résultant de l'absence d'intégration des frais de renégociation ne pouvait pas être retenu par le premier juge pour opérer substitution du taux légal au taux conventionnel ;

Attendu qu'en ce qui concerne le second avenant, le montant des frais de 2.504,99 euros a bien été pris en compte dans le calcul du TEG et qu'aucune erreur du TEG ne peut résulter de l'absence de prise en considération des frais de renégociation ;

Attendu que l'objection des appelants porte principalement devant la cour sur les éléments utilisés, non pour le calcul du TEG, mais pour le calcul du taux nominal ;

Attendu que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile ;

Que si, en l'espèce, l'offre de prêt retient une période de 360 jours au lieu de 365 jours, ce qu'un emprunteur non averti peut a priori considérer comme une irrégularité affectant le taux d'intérêt nominal, il convient cependant de rechercher, si, comme le soutient la banque, le taux nominal du prêt est exactement le même que s'il avait été calculé en fonction d'un mois normalisé de 30,41666 jours rapporté à la durée de l'année civile et si le TEG est ou non affecté d'une irrégularité ;

Qu'est exclusivement interdite en effet l'utilisation d'une « année lombarde », dans laquelle le montant des intérêts journaliers est calculé sur la base d'une année de 360 jours, puis appliqué pour chaque mois pour sa durée réelle (soit 31, 30, 29 ou 28 jours) ce qui conduit à comptabiliser 365 jours d'intérêts par an selon un taux journalier déterminé sur la base d'une année de 360 jours, un tel calcul étant défavorable à l'emprunteur ;

Que les appelants prétendent uniquement démontrer, en appliquant une règle de trois, que les mêmes intérêts, selon qu'ils soient rapportés à 360 ou 365 jours ne peuvent donner le même taux, ce qui est une évidence, mais ne justifient aucunement de l'inexactitude du taux qu'ils divisent, alors qu'il leur appartient précisément d'apporter la preuve d'une erreur affectant ce taux ;

Qu'ils oublient que le calcul du taux d'intérêt nominal ne se fait pas seulement en retenant une durée d'année de 365 jours ou de 360 jours mais provient d'une division entre un nombre de jours par mois et un nombre de jours par année ;

Que le fait que le dénominateur (nombre de jours par année) ne soit pas le même est indifférent si le numérateur (nombre de jours par mois) n'est pas non plus le même, puisque l'on peut, selon le principe de l'égalité de fractions, obtenir le même résultat en opérant deux divisions comportant des chiffres différents ;

Attendu que l'annexe de l'article R. 313-1 du code de la consommation dispose en son paragraphe c) que l'écart entre les dates utilisées pour le calcul est exprimé en années ou en fraction d'années ; qu'une année compte 365 jours ; ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines, ou 12 mois normalisés ; qu'un mois normalisé compte 30,41666 jours (c'est-à-dire 365/12), que l'année soit bissextile ou non ;

Que lorsque les dates d'échéance sont fixées au même jour de chaque mois, comme c'est le cas en l'espèce, le prêteur peut recourir au mois normalisé, ce qui aboutit en réalité à appliquer une fraction du taux annuel mentionné au contrat et donc à calculer les intérêts sur la base de 1/12ème de l'année civile (30,41666/ 365 = 0,08333 = 1/12ème ) sans tenir compte du nombre exact de jours ayant couru entre deux échéances, que les mois de l'année soient de 28, 29, 30 ou 31 jours ;

Que le résultat du calcul des intérêts mensuels est le même que l'on utilise le rapport 30,41666 / 365 (mois normalisé / nombre de jours de l'année) prévu par l'annexe de l'article R 313-1 du code de la consommation ou le rapport 30 / 360 (nombre de jours du mois /360 jours) appliqué en l'espèce par la banque ;

Qu'en effet 30/360 = 0,08333 et que 30,41666/ 365 = également 0,08333 ;

Que la formule :
(capital restant dû x taux nominal) x 30/360
aboutit à un résultat strictement identique à
(capital restant dû x taux nominal) x 30,41666 /365
et que le taux obtenu par l'intimée est donc conforme aux dispositions légales et n'est entaché d'aucune erreur ;

Que le résultat mathématique de ces deux rapports étant identique, la critique formulée par les appelants quant à l'irrégularité du calcul du TEG n'est pas fondée ;

Qu'il sera au surplus à nouveau relevé que, pour obtenir la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel, l'emprunteur doit démontrer que l'erreur aurait conduit à modifier le résultat du calcul stipulé à l'acte de prêt au-delà du seuil légal fixé par l'article R.313-1 du code de la consommation à une décimale ;

Que Monsieur et Madame Z... n'apportent pas cette preuve et soutiennent même, aux termes des calculs qu'ils opèrent en page 6 de leurs écritures, que le TEG du premier avenant serait supérieur de 0,07% au taux appliqué, ainsi qu'il a déjà été rappelé, tandis que le TEG du second avenant est supérieur de 0,05% au taux appliqué ;

Que le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a accueilli les époux Z... dans leurs prétentions ;

Attendu que la Caisse d'Epargne ne fait état d'aucun élément caractérisant l'abus de procédure qu'elle reproche aux appelants, même si ceux-ci, comme de nombreux emprunteurs, ont pu croire dans les affirmations de sites Internet peu sérieux ou incomplets ;

Que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;

Attendu que Monsieur et Madame Z..., succombant entièrement dans leurs prétentions, supporteront les dépens de l'instance et qu'il sera fait application au profit de l'intimée des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME la décision entreprise, hormis en ce qu'elle a débouté la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Loire Centre de sa demande en paiement de dommages et intérêts

STATUANT À NOUVEAU,

DÉBOUTE Monsieur Christophe Z... et son épouse, Madame Nathalie A..., de l'ensemble de leurs demandes,

CONDAMNE Monsieur Christophe Z... et Madame Nathalie A... à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Loire Centre la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur Christophe Z... et Madame Nathalie A... aux dépens de première instance et d'appel,

ACCORDE à Maître B..., avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/020751
Date de la décision : 13/12/2018
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-12-13;17.020751 ?
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