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06/12/2018 | FRANCE | N°18/004251

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 06 décembre 2018, 18/004251


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 06/12/2018
la SELARL X...
la SCP Y... - FIRKOWSKI
ARRÊT du : 06 DECEMBRE 2018

No : 423 - 18
No RG 18/00425 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FUEB

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 12 Décembre 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265213557658654

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la société SYGMA BANQUE,
agissant poursuites et diligence

s de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...]

Ayant pour avocat postulant Me Pascal A......

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 06/12/2018
la SELARL X...
la SCP Y... - FIRKOWSKI
ARRÊT du : 06 DECEMBRE 2018

No : 423 - 18
No RG 18/00425 - No Portalis
DBVN-V-B7C-FUEB

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 12 Décembre 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265213557658654

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la société SYGMA BANQUE,
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [...]

Ayant pour avocat postulant Me Pascal A..., membre de la SELARL X... , avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant comme avocat plaidant Me Sébastien I..., membre de la SELARL B... , avocat au barreau de PARIS,

D'UNE PART

INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265222902984653

Monsieur Aurélien C...
né le [...] à CHAMPIGNY SUR MARNE (94500) [...]
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Olivier D..., membre de la SCP... , avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant, Me Julie F..., membre de la SAS F... ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOURS,

Madame Virginie G... épouse C...
née le [...] à FONTENAY AUX ROSES (92260) [...]
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Olivier D..., membre de la SCP E... , avocat au barreau d'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant, Me Julie F..., membre de la SAS F...ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOURS,

SELARL EMJ
prise en la personne de Maître Didier H... ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS SUNBOX, [...] , RCS PARIS 522752294
[...]

défaillante,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 12 Février 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 11 octobre 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 08 NOVEMBRE 2018, à 9 heures 30, devant Madame Elisabeth HOURS, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :

Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame Irène ASCAR, Greffier placé, lors des débats, et Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé, lors du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 06 DECEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur Aurélien C... et son épouse, Madame Virginie G..., ont, le 22 mai 2012, conclu avec la société SUNBOX, moyennant le prix de 25.800 euros, un contrat de fourniture et de pose d'une éolienne et de panneaux photovoltaïques qui devait être, selon eux, entièrement financé par la société SOLFEA et a été en réalité financé au moyen d'un crédit souscrit auprès de la société SYGMA BANQUE aujourd'hui devenue BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE (la BNP).

SUNBOX a été placée en liquidation judiciaire et la Selarl EMJ a été désignée liquidateur.

Le 8 juin 2015, Monsieur et Madame C... ont assigné le liquidateur judiciaire et SYGMA BANQUE devant le tribunal de grande instance de Tours en sollicitant qu'il prononce la nullité des contrats de vente et de prêt.

Par jugement en date du 12 décembre 2017 le tribunal a :
- déclaré les époux C... irrecevables en leurs demandes tendant à la fixation de créances au passif de la liquidation de SUNBOX mais recevables en leur action en nullité et en résolution du contrat de vente du 25 mai 2012
- prononcé la nullité du contrat de vente et celle du contrat de crédit affecté
- dit que SYGMA BANQUE a commis une faute en ne s'assurant pas de la régularité du contrat portant sur la prestation qu'elle finançait,
- déchargé en conséquence les emprunteurs de la restitution du capital emprunté,
- débouté les époux C... de leur demande de remboursement d'échéances réglées, de leur demande de remise en état de leur toiture, de leur demande de dommages et intérêts
- condamné in solidum la BNP et SUNBOX à payer à Monsieur et Madame C... 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.

La BNP a relevé appel de cette décision le 12 décembre 2018.

Par ordonnance statuant sur incident en date du 5 juillet 2017, le conseiller de la mise en état a ordonné la suspension de l'exécution du contrat de prêt jusqu'au prononcé du présent arrêt.

La BNP demande à la cour de déclarer irrecevable ou non fondée la demande de Monsieur et Madame C... tendant à voir prononcer la nullité des contrats sur le fondement du dol et de rejeter la demande des intimés tendant à sa condamnation à leur verser 5.000 euros de dommages et intérêts, à reprendre l'installation et à remettre en état de la toiture sous astreinte. Elle demande également à la Cour de dire qu'elle n'a commis aucune faute et de condamner en conséquence Monsieur et Madame C... à lui verser la somme de 25.800 euro en restitution du capital prêté ou, subsidiairement, de limiter le montant des sommes qui ne lui seront pas restituées au préjudice réellement subi par les emprunteurs A titre infiniment subsidiaire et si la cour n'ordonnait pas restitution du capital elle réclame condamnation des époux C... à lui verser 25.800 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable et demande qu'il leur soit enjoint de restituer, à leurs frais, l'installation à la SELARL EMJ, es-qualité de liquidateur Judiciaire de la société SUNBOX. En tout état de cause, elle sollicite condamnation des intimés à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de la SELARL X... .
Elle fait valoir que la nullité des contrats a d'ores et déjà été prononcée et qu'elle ne remet pas en cause ce chef de jugement mais qu'aucun dol n'est en tout état de cause démontré.
Elle soutient ensuite qu'il n'existe ni preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre eux pouvant fonder les demandes en paiement au titre de malfaçons, elle-même n'étant pas partie au contrat de vente.
Elle prétend que l'établissement de crédit n'est pas juge du contrat et ne peut donc se substituer au juge dans l'examen de sa régularité ; qu'au surplus, l'exemplaire du bon de commande qui lui a été remis ne comportait aucune irrégularité et qu'elle ne pouvait donc constater son éventuelle nullité.
Elle fait valoir que les époux C... n'établissent pas le préjudice qu'ils auraient subi en lien avec l'éventuelle irrégularité alléguée du bon de commande, et donc avec la faute alléguée à l'encontre de la banque. Elle souligne que les intimés ne contestent pas que l'installation est bien achevée, fonctionnelle et qu'elle permet la revente d'électricité à ERDF et qu'ils allèguent uniquement qu'elle n'aurait pas le rendement convenu, mais ne l'établissent pas, ne produisant qu'une expertise non contradictoire qui ne saurait constituer à elle seule un élément suffisant de preuve, et n'établissant pas davantage en quoi cela aurait un lien de causalité avec une faute de la banque dans la vérification du bon de commande, puisque s'agissant d'un grief afférent au fonctionnement du matériel. Elle affirme ne pas être tenue d'un devoir de conseil quant à l'opportunité économique du contrat de vente et soutient que les emprunteurs ont commis une faute en laissant les travaux s'exécuter en signant l'ordre de déblocage des fonds sans lequel elle n'aurait jamais payé la prestataire.

Monsieur et Madame C... demandent à la cour d'infirmer la décision critiquée en ce qu'elle les a déboutés de leur demande de nullité des contrats pour dol et de dommages et intérêts pour le préjudice subi et, statuant à nouveau, de juger que les Sociétés SUNBOX et BNP venant aux droits de la société SYGMA BANQUE sont responsables d'un dol, de prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit pour ce motif, de condamner in solidum la BNP et la SELARL EMJ ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société SUNBOX à leur verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice causé sur le fondement des anciens articles 1382 et suivants du code civil, d'ordonner sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard la restitution de l'intégralité des sommes par eux au titre de l'emprunt, de condamner in solidum la SELARL EMJ es-qualités et la BNP à reprendre à leurs frais l'intégralité des installations mises en place au domicile de Monsieur et Madame C... ainsi qu'à remettre l'intégralité de la toiture et des lieux dans l'état dans lequel ils se trouvaient avant leur intervention et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard. A tout le moins, de débouter la BNP PARIBAS de sa demande de prise en compte de la valeur du matériel conservé dans la mesure où celui-ci est impropre à sa destination et n'a aucune valeur vénale. A titre subsidiaire, ils sollicitent la confirmation du jugement déféré et en tout état de cause, la condamnation in solidum de la BNP et SUNBOX à leur payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.

La Selarl EMJ, assignée à la personne d'une employée qui n'a pas déclaré être habilitée à recevoir l'acte n'a pas comparu. Le présent arrêt sera donc rendu par défaut.

Monsieur et Madame C... ont déposé le 22 octobre 2018 des conclusions demandant à la cour d'écarter des débats les écritures signifiées par l'appelante le 10 octobre 2018 à 14 heures 52 alors que l'ordonnance de clôture était rendue le 11 octobre à 9 heures 30 et que ces conclusions contenaient des demandes et moyens nouveaux auxquels ils n'ont pas pu répondre.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que les intimés n'exposent pas quels étaient les demandes et moyens nouveaux figurant dans les dernières écritures de l'appelante auxquels ils auraient souhaité répondre ;

Que les seuls moyens nouveaux sont ceux développés par la BNP en réponse à l'appel incident formé par les époux C... au titre de l'existence d'un dol et de leurs prétentions, d'ailleurs irrecevables tendant à l'enlèvement des panneaux et à la remise en état de leur toiture tandis que les seules demandes nouvelles de l'appelant tendent à voir rejeter ces prétentions ;

Que les dernières écritures de la BNP ne faisant que répondre aux demandes des intimés, Monsieur et Madame C..., qui ne précisent pas en quoi ces conclusions nécessitaient une réponse et portent ainsi atteinte aux droits de la défense, ne peuvent réclamer le rejet des dernières écritures de l'appelante ;

Qu'il n'apparaît pas plus utile d'ordonner le rabat de l'ordonnance de clôture pour permettre aux intimés de répondre à l'argumentation de la BNP de ce que leur appel incident tendant à voir prononcer la nullité du contrat principal pour dol serait irrecevable au motif qu'ils ont déjà obtenu le prononcé de la nullité du contrat puisque ce moyen est dépourvu de tout fondement ;

Qu'en effet, les époux C... sont recevables en leur appel incident tendant à voir juger qu'ils ont été victimes d'un dol puisqu'ils sollicitent paiement de dommages et intérêts et de diverses sommes ou obligations de faire directement liés au dol dont ils font état ;

Qu'il ne peut être fait droit à la demande en paiement de dommages et intérêts que si l'existence d'un dol est démontrée, et que le prononcé de la nullité du contrat principal sur le fondement de manquements aux dispositions impératives du code de commerce n'empêche donc pas les appelants de solliciter la nullité des contrats de vente et de prêt sur le fondement du dol ;

Attendu cependant que cet appel incident n'est aucunement fondé ;

Qu'en effet, aux termes de l'ancien article 1116 du code civil en sa rédaction applicable au litige, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que sans elles l'autre partie n'aurait pas contracté ;

Qu'il ne se présume pas et doit être prouvé ;

Qu'en l'espèce, les intimés prétendent qu'ils n'ont contracté qu'en raison des manœoeuvres de SUNBOX qui les a trompés sur la capacité de production de l'installation et la possibilité d'un autofinancement ;

Qu'ils reprochent au tribunal d'avoir écarté le rapport d'expertise amiable qu'ils produisent sans l'examiner plus avant alors qu'il est la preuve tangible des manoeœuvres dolosives de SUNBOX ;

Mais attendu qu'aux termes d'une jurisprudence constante depuis l'arrêt de la chambre mixte de la Cour de cassation en date du 28 septembre 2012 (no de pourvoi 11-18 710), si le juge ne peut refuser d'examiner une pièce produite par l'une des parties, il ne peut cependant se fonder exclusivement sur une expertise réalisée à la demande de l'une d'elles ;

Qu'une telle règle s'explique par le fait que l'expert amiable ainsi diligenté a été entièrement rémunéré par l'une des parties qui ne peut donc imposer ses conclusions à ses adversaires ;

Que c'est de manière peu compréhensible que les intimés prétendent que seule SUNBOX pourrait se prévaloir du caractère non contradictoire de cette expertise mais non la BNP, alors même qu'ils recherchent la responsabilité du prêteur sur le fondement d'un dol commis à leur préjudice ;

Attendu qu'en tout état de cause l'expertise communiquée, qui ne fait qu'établir que l'installation ne produit pas à la hauteur des espérances des époux C..., ne permet pas de vérifier que c'est volontairement, et dans le but d'obtenir leur consentement qu'ils n'auraient pas donné autrement, et non par simple incompétence, que SUNBOX a donné des informations erronées et a trompé les époux C... sur l'impossibilité d'obtenir les rendements promis ;

Qu'une telle preuve n'est pas apportée puisque Monsieur et Madame C... ne démontrent pas qu'ils n'auraient pas contracté s'ils avaient su, qu'ainsi qu'il sera exposé ci-après, l'installation rapporterait 70 euros mensuels de moins que la somme qu'ils escomptaient percevoir au titre de l'énergie revendue ;

Que le dol reproché à SYGMA BANQUE est encore plus dépourvu de fondement que celui reproché à SUNBOX puisque les emprunteurs se contentent de faire valoir qu'ils n'ont pas été les seules "victimes" de SUNBOX, ce que, selon eux, le prêteur ne pouvait ignorer, mais qu'ils ne tiennent pas le moindre compte de ce qu'ils ont acheté leur installation en mai 2012, que SUNBOX a été placée en liquidation judiciaire en décembre 2013 et que, n'ayant, entre ces deux dates, jamais eux-mêmes informé SYGMA BANQUE des difficultés rencontrées, ils ne peuvent présumer que d'autres acquéreurs auraient informé le prêteur de l'incompétence du vendeur avant qu'ils ne souscrivent eux-mêmes l'emprunt litigieux ;

Que la "légèreté" qu'ils semblent reprocher à SYGMA BANQUE ne peut en aucun cas caractériser un dol dont la définition juridique a été ci-dessus rappelée et que c'est dès lors à raison que la demande de nullité formée sur ce fondement par les époux C... a été rejetée ;

Attendu par ailleurs qu'est entièrement irrecevable la demande de Monsieur et Madame C... tendant à voir condamner le liquidateur judiciaire à reprendre l'installation litigieuse et à remettre l'installation en état puisqu'aux termes d'une jurisprudence, là encore constante, une telle condamnation de faire ne peut être prononcée contre un liquidateur, dépourvu de tout moyen pour y déférer puisque les actifs de la société ont été vendus, les salariés licenciés et les assurances, au titre d'éventuels dommages résultant des travaux, résiliées ;

Que les intimés n'exposent pas sur quel fondement juridique ils pourraient demander à un établissement prêteur de procéder à la dépose d'une installation, le prêteur n'étant jamais tenu, en application, une nouvelle fois, d'une jurisprudence établie, de reprendre les travaux qu'il a financés s'ils ne donnent pas satisfaction ;

Que nul ne plaidant par procureur, la BNP est irrecevable à solliciter qu'il soit enjoint de restituer, à leurs frais, l'installation à la SELARL EMJ, es-qualité de liquidateur judiciaire de la société SUNBOX puisque ce liquidateur n'a quant à lui par formé une telle demande;

Attendu que la BNP ne conteste pas le chef de la décision déférée qui a prononcé la nullité des contrats de vente et de crédit pour non respect des dispositions d'ordre public du code de la consommation ;

Qu'il ne peut être compris pourquoi le tribunal n'a pas ordonné aux emprunteurs la restitution des échéances déjà versées, cette restitution résultant de plein droit de la nullité du contrat et les sommes restituées ainsi mises à la charge du prêteur devant simplement se compenser avec le capital restant dû, s'il est jugé que les emprunteurs en demeurent redevables ;

Attendu que la nullité du contrat de crédit entraîne la remise des parties en l'état antérieur à sa conclusion et donc le remboursement, par les emprunteurs, du capital versé en leur nom sauf pour eux à démontrer l'existence d'une faute privant l'établissement prêteur de sa créance de restitution ;

Attendu que la banque fait valoir qu'elle ne pouvait constater les nullités affectant le contrat puisque les exemplaires qui lui avaient été remis à l'occasion du financement étaient parfaitement réguliers ;

Qu'en effet, si Monsieur et Madame C... communiquent, sous le numéro 1 de leurs pièces communiquées un bon de commande qui ne précise pas la marque des panneaux photovoltaïques, ni celle de l'éolienne acquise, ni les délais de livraison ni d'installation, ni si l'installation est financée au moyen d'un crédit ou au comptant et qui comprend un bordereau de rétractation ne pouvant être détaché sans amputer le contrat de ses signatures situées au recto, la BNP produit quant à elle un contrat d'achat comprenant toutes les mentions légalement exigées ;

Qu'au surplus, il sera rappelé que les dispositions de l'article L 311-31 du code de la consommation, devenues dans des termes inchangés les articles L 312-48 et L 312-49 du même code, prévoient uniquement que "Les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ; en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci. Le vendeur ou le prestataire de services doit conserver une copie du contrat de crédit et le présenter sur leur demande aux agents chargés du contrôle" ;

Que ces dispositions n'édictent donc pas une sanction de déchéance du droit à réclamer paiement des sommes dues lorsque la livraison du bien ou la fourniture de la prestation est réellement intervenue comme tel est le cas en l'espèce ;

Que par ailleurs, aux termes de la jurisprudence, une faute, quelle qu'elle soit, n'entraîne une sanction que lorsqu'elle a causé un préjudice né et actuel que, non seulement les juges doivent apprécier mais qu'ils doivent également caractériser ;

Que, si la privation de la créance de restitution invoquée par les appelants sanctionne habituellement la faute commise par le prêteur, c'est parce qu'elle répare le préjudice tenant à ce que les emprunteurs se retrouvent en situation de devoir payer le prix d'une installation qui n'a jamais été en mesure d'assurer correctement sa fonction et sans perspective de se retourner utilement contre leur fournisseur en déconfiture et que la livraison du bien n'est pas effectivement intervenue ;

Que tel n'est pas le cas de Monsieur et Madame C... dont le préjudice ne peut résulter du seul versement à la société SUNBOX du capital emprunté alors qu'ils bénéficient d'une installation désormais en état de marche qu'ils n'ont payée que grâce aux fonds remis par le prêteur ;

Que les époux C... conservent les matériels et travaux qu'ils ont commandés, y compris le kit éolienne qu'ils passent sous silence et, ne devant rembourser que le capital prêté sans intérêts, ne démontrent dès lors aucun préjudice ;

Attendu que les intimés font cependant valoir que l'installation ne produit pas la qualité d'énergie promise ;

Qu'ils affirment que le contrat estimait une production d'environ 4.114,40Kwh pour la première année au tarif de rachat en vigueur de 0,3777 euros / Kwh ;

Que cependant, aucune des pièces contractuelles qu'ils communiquent ne fait état d'une telle production garantie et qu'il est juste indiqué, en en-tête du contrat une production estimée à 4.114,40Kwh avec un tarif de rachat d'EDF à ce jour de 0,3777 euros / Kwh ;

Que les époux C... se sont eux-mêmes trompés sur l'étendue du contrat qu'ils ont souscrit, une telle production ne leur étant aucunement garantie par la prestataire ;

Qu'au surplus, ils produisent une expertise amiable qui fait état d'une "perte d'exploitation de 850 euros annuels" ;

Que cette "perte" n'est que la perte d'un espoir des époux C... de percevoir des revenus plus importants de leur installation et qu'elle correspond tout au plus à un "manque à gagner", encore une fois espéré mais non garanti contractuellement, de 70,83 euros mensuels, ce qui est moins que le montant des intérêts mensuels dont les emprunteurs sont déchargés ;

Que les pièces produites, qui ne permettent pas de connaître le montant des sommes annuelles payées par EDF en rachetant l'énergie produite, ne peuvent conduire à retenir que l'opération réalisée par les intimés se révélerait ruineuse pour eux ou même défavorable financièrement puisque ne leur est réclamé que le capital emprunté et non les intérêts de l'emprunt ;

Qu'en l'absence de démonstration d'un préjudice causé par la faute du prêteur et au regard de la livraison complète du matériel commandé, il convient d'infirmer le jugement déféré et de condamner les intimés à payer à la BNP la somme de 25.800 euros correspondant au capital emprunté ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de condamner la BNP ou les époux C... à verser une indemnité de procédure mais que SUNBOX sera condamnée à verser -aux époux C... exclusivement puisque la BNP n'en fait pas la demande- à la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civil

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

DÉBOUTE Monsieur Aurélien C... et son épouse, Madame Virginie G..., de leur demande tendant à voir rejeter les dernières écritures de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ou à ordonner le rabat de l'ordonnance de clôture,

INFIRME la décision entreprise hormis en ce qu'elle a :

- déclaré recevables les époux C... en leur action en nullité et en résolution du contrat de vente,
- prononcé la nullité de ce contrat et celle du contrat de crédit affecté pour non respect des dispositions du code de la consommation,
- débouté les époux C... de leur demande en paiement de dommages et intérêts,
- et a condamné la société SUNBOX aux dépens,

STATUANT À NOUVEAU sur ses autres chefs,

DÉCLARE recevable la demande de Monsieur Aurélien C... et de Madame Virginie G... tendant à voir prononcer la nullité des contrats pour dol mais LES EN DÉBOUTE,

DÉCLARE irrecevable la demande de Monsieur Aurélien C... et de Madame Virginie G... tendant à voir ordonner à la société SUNBOX de reprendre les panneaux litigieux,

LES DÉBOUTE de leur demande tenant à voir ordonner à la société BNP PERSONAL FINANCE de procéder à la remise en état de leur toiture et à la dépose de ces mêmes panneaux,

DÉCLARE irrecevable la demande de la société BNP PERSONAL FINANCE tendant à voir condamner Monsieur et madame C... à restituer les panneaux litigieux à la liquidation judiciaire de la société SUNBOX,

CONDAMNE la société BNP PERSONAL FINANCE à rembourser à Monsieur Aurélien C... et à Madame Virginie G... le montant des échéances du prêt déjà versées,

CONDAMNE solidairement Monsieur Aurélien C... et Madame Virginie G... à payer à la société BNP PERSONAL FINANCE la somme de 25.800 euros,

ORDONNE la compensation entre les sommes respectivement dues par les parties

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la société EMJ, ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société SUNBOX, à payer à Monsieur Aurélien C... et Madame Virginie G..., ensemble, la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

CONDAMNE la société EMJ, ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société SUNBOX aux dépens d'appel,

ACCORDE à la Selarl X... , avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et, Madame Maëlle BOUGON, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 18/004251
Date de la décision : 06/12/2018
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-12-06;18.004251 ?
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