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06/12/2018 | FRANCE | N°17/029131

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 06 décembre 2018, 17/029131


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 06/12/2018
la SCP LAVAL - FIRKOWSKI
la SCP GUILLAUMA PESME

ARRÊT du : 6 DÉCEMBRE 2018

No : 413 - 18
No RG : No RG 17/02913 - No Portalis DBVN-V-B7B-FRQ6

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal d'Instance de BLOIS en date du 2 Août 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Monsieur D... A...
né le [...] à SAN PIETRO (ITALIE)
[...]

représenté par Maître Olivier B..., membre de

la SCP LAVAL - FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SA CREATIS
ag...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 06/12/2018
la SCP LAVAL - FIRKOWSKI
la SCP GUILLAUMA PESME

ARRÊT du : 6 DÉCEMBRE 2018

No : 413 - 18
No RG : No RG 17/02913 - No Portalis DBVN-V-B7B-FRQ6

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal d'Instance de BLOIS en date du 2 Août 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Monsieur D... A...
né le [...] à SAN PIETRO (ITALIE)
[...]

représenté par Maître Olivier B..., membre de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SA CREATIS
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié [...]

Ayant pour avocat Maître Pierre C..., membre de la SCP GUILLAUMA PESME , avocat au barreau d'Orléans, avocat postulant et ayant pour avocat plaidant la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOËT HÉLAIN, avocats au barreau de l'ESSONNE,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 28 Septembre 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 13 Septembre 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 08 NOVEMBRE 2018, à 9 heures 30, devant Mme Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Greffier lors des débats Madame Irène ASCAR, greffier placé,
Greffier lors du prononcé : Madame Maëlle BOUGON, greffier placé,

ARRÊT :

Prononcé le 6 DÉCEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 21 février 2010, la société CRÉATIS a consenti à Monsieur D... A... un prêt d'un montant de 28.100 euros remboursable en 132 mensualités au taux nominal de 6,66%.

L'emprunteur a saisi, le 17 septembre 2012, la commission de surendettement des particuliers du Loir et Cher d'une demande de mesures imposées ou recommandées permettant de résoudre sa situation de surendettement.

Selon ordonnance en date du 9 janvier 2013, le juge d'instance de Blois a homologué les mesures recommandées par la commission de surendettement, lesquelles prévoyaient, concernant la créance de CRÉATIS, un moratoire de 21 mois expirant le 9 décembre 2014, puis un apurement sur une période de 75 mois au moyen de mensualités de 177,84 euros.

Le 17 avril 2015, la société SYNERGIE, mandatée par CRÉATIS, a mis en demeure Monsieur A... de payer la somme de 960,30 euros, en se référant explicitement au plan de surendettement.

Après avoir procédé à plusieurs paiements, Monsieur A... a cessé tout versement.

Le 20 mai 2016, CRÉATIS a assigné Monsieur A... devant le tribunal d'instance de Blois en réclamant sa condamnation à lui verser la somme de 27.467,67 euros outre une indemnité de procédure.

Par jugement en date du 2 août 2017, le tribunal a déclaré recevable l'action de CRÉATIS, condamné Monsieur A... à lui payer la somme de 24.484,85 euros avec intérêts au taux contractuel de 6,66% à compter de la mise en demeure du 18 février 2016, accordé des délais de paiement au débiteur, dit n'y avoir lieu application de l'article 700 du code de procédure civile et débouté Monsieur A... de sa demande tendant au renvoi de son dossier devant la commission de surendettement.

Monsieur A... a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 28 septembre 2017.

Il en poursuit l'infirmation en demandant à la cour de constater l'absence de caducité des mesures recommandées par la commission de surendettement, d'infirmer en conséquence le jugement déféré, d'enjoindre à CREATIS de reprendre l'apurement de la dette selon les termes et conditions des mesures recommandées et de la débouter de ses demandes. A titre subsidiaire et reconventionnellement, d'ordonner le renvoi du dossier à la commission de surendettement du Loir et Cher et l'octroi de délais de paiement en fixant à 323,11 euros le montant des mensualités dont il devra s'acquitter pendant 24 mois, le solde étant "à revoir à l'issue". En tout état de cause il réclame, manifestement par une erreur de plume, condamnation de "la SA Créatis à payer la somme de 500 euros HT à la société Créatis, au titre de l'article 700 du NCPC" ce qui doit être lu comme demandant à son profit versement d'une indemnité de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et il sollicite condamnation de l'intimée à supporter les dépens.

Il reprend exactement son argumentation présentée au tribunal pour prétendre que la caducité ne pouvait être prononcée au motif qu'il n'avait pas compris que SYNERGIE représentait CREATIS, que cette dernière ne l'a jamais recontacté pour mettre en place un prélèvement direct, qu'elle n'a pas plus saisi la commission de surendettement avant de prononcer la caducité, que les mesures homologuées par le tribunal ne relèvent pas des dispositions de l'article R.732-2 du code de la consommation prévoyant une possible caducité. Il conteste également les sommes réclamées par l'intimée et sollicite des délais de paiement en faisant valoir que CREATIS s'oppose abusivement à sa proposition de régler pendant 24 mois les mêmes mensualités que celles mises à sa charge par la commission de surendettement.

CREATIS sollicite la réformation du jugement attaqué et demande à la cour de condamner Monsieur A... à lui payer à la SA CREATIS la somme de 27.464,67 euros avec intérêts au taux contractuel de 6,66% l'an à compter de la mise en demeure du 12 février 2016. A titre subsidiaire et si la cour estimait que la déchéance du terme et du plan ne lui est pas acquise, de constater les manquements graves et réitérés de Monsieur D... A... à son obligation contractuelle de remboursement du plan, de prononcer la résolution judiciaire du contrat de prêt et du plan de surendettement sur le fondement de l'article 1184 du code civil et de condamner alors l'appelant à lui verser la même somme avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêté de comptes du 10 mai 2016. En tout état de cause, elle s'oppose à l'octroi de délais et sollicite condamnation de Monsieur A... à lui verser une indemnité de procédure ainsi qu'à supporter les dépens.

Elle fait valoir que l'appelant n'expose pas pourquoi les dispositions du code de la consommation ne seraient pas applicables à des mesures homologuées par un tribunal, qu'il ne conteste pas ne pas avoir respecté le plan de surendettement dont il bénéficiait, qu'il connaissait la société SYNERGIE et a d'ailleurs payé entre ses mains, que la caducité est valablement intervenue et que Monsieur A... qui n'a jamais, depuis février 2015, réglé une seule des échéances complètes de 177,84 euros mises à sa charge et n'a pas plus payé depuis la signification du jugement déféré, ne saurait obtenir des délais de paiement.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que Monsieur A... ne conteste pas ne pas avoir réglé une seule des mensualités de 177,84 euros mises à charge par le jugement arrêtant les mesures propres à redresser sa situation de surendettement ;

Que c'est sans pertinence et sans bonne foi qu'il prétend qu'il n'avait pas à payer au motif que les relances et mises en demeures qu'il a reçues émanaient de SYNERGIE et qu'il ignorait tout de cette société ;

Qu'il ne pouvait en effet ignorer que SYNERGIE intervenait au nom de CREATIS qui l'avait mandatée afin de « réaliser toutes opérations et d'exercer toutes actions entrant dans le cadre de la gestion contentieuse des dossiers de CREATIS » (pièce no 11 de l'intimée ) puisque:
- le nom de SYNERGIE est accolé à celui de CREATIS dans le dossier de surendettement,
- les courriers adressés par la commission de surendettement l'ont été à "CREATIS domiciliée chez SYNERGIE", ce qui démontre que la commission, qui ne disposait que des pièces adressées par le débiteur, avait pu constater que le créancier poursuivant par l'intermédiaire de SYNERGIE était bien CREATIS, ce que ne pouvait ignorer Monsieur A... qui avait souscrit l'emprunt litigieux,
- l'ordonnance homologuant les mesures recommandées mentionne en son en-tête parmi les créanciers " SYNERGIE (créance CREATIS)"
- le no du crédit CREATIS, rappelé dans le plan homologué, était également rappelé par SYNERGIE dans son courrier de mise en demeure du 23 janvier 2015,
- Monsieur A... a payé entre les mains de SYNERGIE, ce qui démontre qu'il avait compris quel était son créancier ;

Attendu que c'est par ailleurs sans expliquer sur quel fondement il formule de telles affirmations que l'appelant reproche à CREATIS de ne l'avoir "jamais recontacté depuis l'homologation du plan de surendettement pour mettre en place le prélèvement automatique des sommes qui lui étaient dues" alors qu'il ne revient pas au créancier de s'assurer de l'exécution d'un plan d'apurement du passif mais qu'il appartient au débiteur, qui en est le bénéficiaire, de mettre en oeuvre tous les moyens de paiement qu'il estime appropriés pour assurer le règlement de sa dette ;

Que, de même, CREATIS n'avait pas à entrer en contact avec la commission de surendettement pour l'informer du non respect de ses engagements par Monsieur A..., cette commission étant dessaisie par l'homologation du plan de surendettement et n'ayant pas à assurer le suivi du plan ainsi homologué, ce que ne peut ignorer Monsieur A... qui est assisté d'un conseil, praticien du droit ;

Attendu que Monsieur A... présente devant la cour très exactement la même argumentation que devant le tribunal, auquel il s'adresse d'ailleurs parfois dans ses écritures, alors qu'il se trouve en appel ;

Qu'ainsi, il prétend que les dispositions de l'article R.732-2 du code de la consommation prévoyant le prononcé de la caducité de plein droit d'un plan conventionnel de redressement quinze jours après une mise en demeure ne s'appliqueraient pas en l'espèce s'agissant de mesures recommandées homologuées par le tribunal ;

Qu'aux termes de l'article R.732-2 susvisé du code de la consommation " Le plan conventionnel de redressement mentionne qu'il est de plein droit caduc quinze jours après une mise en demeure restée infructueuse, adressée au débiteur d'avoir à exécuter ses obligations" ;

Qu'il résulte de ces dispositions, d'une part que rien n'interdit à un plan non conventionnel homologué par le tribunal de prévoir une telle caducité automatique, d'autre part que l'initiative de la constatation de la caducité est laissée aux créanciers ;

Qu'il sera relevé qu'aux termes de l'article R.733-12 du même code, les mesures recommandées sont annexées à la décision d'homologation du tribunal et qu'en l'espèce les mesures recommandée, qui sont annexées à l'ordonnance prévoient expressément la caducité automatique du plan quinze jours après une mise en demeure restée infructueuse ;

Que le juge ayant homologué toutes ces mesures a également homologué celle prévoyant cette caducité ;

Qu'en l'espèce et ainsi que l'a retenu le premier juge par des motifs complets et pertinents entièrement approuvés par la cour et auxquels Monsieur A... n'objecte rien de sérieux, la déchéance du plan est dûment intervenue quinze jours après la mise en demeure du 12 février 2016 dont l'avis de réception a été signé par l'appelant ;

Attendu que c'est de manière tout aussi fantaisiste que Monsieur A... reproche à CREATIS de ne pas avoir demandé au tribunal de constater ou prononcer la caducité du plan, cette dernière étant intervenue de plein droit et la condamnation prononcée à son encontre résultant expressément d'une telle caducité ;

Attendu que Monsieur A... prétend ensuite que, depuis le mois de janvier 2015, date d'expiration du moratoire de 21 mois, il a procédé au paiement d'une somme totale de 720 euros entre les mains de Synergie ;

Mais attendu qu'avant février 2016, date de la caducité, il est justifié de paiements à hauteur de 460 euros (60 + 63 + 63 + 65 + 62+ 77 + 70) ;

Que n'apparaît pas dans le décompte de CREATIS un virement de 65 € du 25 août 2015 justifié par Monsieur A... ( sa pièce no2)

Que les virements postérieurs à la caducité doivent être pris en compte au titre de l'apurement de la créance ;

Attendu que cette dernière est ainsi ventilée au 12 février 2016 :
- capital restant dû : 25.253,70 euros
- intérêts 405,63 euros
- indemnité conventionnelle 2.023,61 euros
- à déduire versements de 460 euros

Que l'indemnité conventionnelle apparaît manifestement excessive au regard du taux des intérêts conventionnels et de l'absence de préjudice spécifique allégué par le prêteur ;

Que la caducité du plan étant intervenue, Monsieur A... ne peut s'opposer au paiement d'intérêts au taux conventionnel ;

Qu'en tenant compte du versement de 65 euros, il sera en conséquence condamné à payer à CREATIS la somme de 25.134,33 euros ( 25.253,70 +405,63 - 460 -65) assortie d'intérêts au taux de 6,66% à compter du 13 février 2016 ;

Attendu que Monsieur A... prétend que CRÉATIS refuse abusivement qu'il apure cette dette en reprenant le paiement de l'échéancier initialement fixé mais que, la caducité étant intervenue, il prétend sans sérieux que ce refus "passe outre la force exécutoire desdites mesures" puisque celle-ci ne s'appliquent plus de par son seul fait ;

Que, certes, la situation de Monsieur A... est obérée mais que des délais de paiement ne peuvent être accordés qu'aux débiteurs qui peuvent apurer la créance dans le délai maximum de deux années imposées par la loi ;

Qu'en l'espèce Monsieur A... a proposé au tribunal de s'acquitter de sa dette au moyen de versements mensuels de 323,11 euros, ce qui, sans même tenir compte des intérêts conventionnels dont il est désormais redevable, nécessiterait 78 mensualités pour apurer le passif ;

Que cette proposition ne peut être retenue au regard des autres sommes dont l'appelant est redevable et que la décision déférée sera donc infirmée en ce qu'elle a accordé des délais de paiement à Monsieur A... ;

Attendu enfin que les dispositions de l'article L 332-12 ancien du code de la consommation visées par l'appelant pour solliciter le renvoi du dossier à la commission de surendettement sont inapplicables puisqu'elles ne concernent, comme l'a déjà indiqué le tribunal, que le juge saisi d'une procédure de surendettement ;

Attendu que Monsieur A..., succombant en toutes ses prétentions, supporter les dépens de l'instance d'appel mais que, bien que son appel soit dépourvu de tout fondement sérieux, l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'intimée ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME la décision entreprise, hormis en ce qu'elle a déclaré recevable l'action engagée par la société CREATIS, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile, débouté Monsieur D... A... de sa demande tendant au renvoi de son dossier devant la commission de surendettement des particuliers et l'a condamné aux dépens,

STATUANT À NOUVEAU sur ses autres chefs,

CONDAMNE Monsieur D... A... à payer à la société CREATIS la somme de 25.199,33 euros assortie d'intérêts au taux de 6,66% à compter du 13 février 2016,

DÉBOUTE Monsieur D... A... de sa demande tendant à l'octroi de délais de paiement,

Y AJOUTANT,

DÉBOUTE la société CREATIS de sa demande formée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur D... A... aux dépens d'appel.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Madame Maëlle BOUGON, greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/029131
Date de la décision : 06/12/2018
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-12-06;17.029131 ?
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