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22/11/2018 | FRANCE | N°18/009901

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 22 novembre 2018, 18/009901


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 22/11/2018
Me Estelle X...
la SCP DESPLANQUESARRÊT du : 22 NOVEMBRE 2018
No. : 406 - 18
No. RG : 18/00990 - No. Portalis
DBVN-V-B7C-FVJJ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Juge de l'exécution de TOURS en date du 27 Mars 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :

Madame Catherine Z... épouse A...
née le [...] à TOURS ST SYMPHORIEN [...] [...]

Ayant pour avocat Me Estelle X..., avocat au barreau D'ORLEANS
(bénéficie d'une aide jur

idictionnelle Totale numéro 2018/002539 du 16/04/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ORLEANS)

D'UNE PA...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 22/11/2018
Me Estelle X...
la SCP DESPLANQUESARRÊT du : 22 NOVEMBRE 2018
No. : 406 - 18
No. RG : 18/00990 - No. Portalis
DBVN-V-B7C-FVJJ

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Juge de l'exécution de TOURS en date du 27 Mars 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :

Madame Catherine Z... épouse A...
née le [...] à TOURS ST SYMPHORIEN [...] [...]

Ayant pour avocat Me Estelle X..., avocat au barreau D'ORLEANS
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2018/002539 du 16/04/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de ORLEANS)

D'UNE PART

INTIMÉS

Monsieur Loïc A...
né le [...] à BLOIS (41000) [...]
[...]

Défaillant,

C.R.C.A.M. DE LA TOURAINE ET DU POITOU
Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social
Timbre fiscal : 1265228818009733
[...]

Ayant pour avocat postulant Me Valerie B..., membre de la SCP VALERIE B... , avocat au barreau D'ORLEANS, et ayant pour avocat plaidant Me Viviane D..., membre de la SCP CRUANES-DUNEIGRE, D... ET MORENO, avocat au barreau de TOURS,
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 11 Avril 2018
ORDONNANCE D'AUTORISATION D'ASSIGNATION À JOUR FIXE : en date du 2 mai 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 25 OCTOBRE 2018, à 9 heures 30, devant Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 22 NOVEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 6 novembre 2006, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Touraine et du Poitou (la CRCAM) a consenti à Monsieur Loïc A... et à son épouse, Madame Catherine Z..., un prêt immobilier [...] de 130.000 euros au taux de 4,19%.

Diverses échéances étant demeurées impayées, la CRCAM a mis en demeure les débiteurs par lettre recommandée en date du 10 juin 2016 d'avoir à régler une somme de 9.107,99 euros dans un délai de 10 jours, étant indiqué qu'à défaut de règlement, elle entreprendrait, sans nouvel avis, le recouvrement de sa créance par voie judiciaire.

Par acte en date du 18 janvier 2017, la CRCAM a ensuite fait délivrer à chacun des époux A... - Z... un commandement valant saisie immobilière, puis par exploit du 3 mai 2017, assignation à l'audience d'orientation du juge de l'exécution de Tours.

Par jugement en date du 27 mars 2018, le juge de l'exécution a constaté la régularité de la procédure de saisie immobilière engagée par la CRCAM, débouté Madame Z... de sa demande de délai de grâce, autorisé les débiteurs à vendre amiablement tout ou partie de leur bien, fixé à 250.000 euros le montant du prix en deçà duquel l'immeuble ne pourra être vendu, taxé les frais de poursuite à la somme de 4.122,91 euros et la créance du poursuivant à la somme de 79.017,13 euros à majorer des intérêts au taux conventionnel de 4,19% l'an sur la somme de 78.917,13 euros à compter du 14 juin 2017 et rejeté les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Madame Z... a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 11 avril 2018.

Elle conclut à son infirmation et demande à la cour de juger prescrites les échéances ayant couru du 10 février 2014 au 10 février 2015, de dire que la CRCAM ne justifie pas d'une mise en demeure préalable et donc d'une déchéance du terme et d'une créance exigible, de juger nul et de nul effet le commandement aux fins de saisie immobilière et de rejeter les demandes formées à son encontre. A titre subsidiaire, elle fait valoir que la majoration d'intérêts de 3 points et l'indemnité de 7% constituent des clauses pénales manifestement excessives et en sollicite la réduction à l'euro symbolique, et elle demande à la cour de lui accorder un délai de grâce de 24 mois à compter de l'arrêt à intervenir pour s'acquitter des sommes pouvant être dues afin de permettre la vente en tout ou en partie de l'immeuble ou à défaut de l'autoriser à vendre à l'amiable tout ou en partie de l'immeuble saisi. En tout état de cause, elle réclame condamnation de la CRCAM à payer à son conseil la somme de 2.400 euros en vertu de l'article 37-2 de la loi du 10 juillet 1991 ainsi qu'à supporter les entiers dépens, en ce compris les frais de poursuite et d'exécution, dont distraction conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.

Elle fait valoir que la mise en demeure qui lui a été adressée indique que le premier incident de paiement non régularisé est en date du 10 février 2014; que les courriers de Monsieur A... invoqués par la banque comme étant interruptifs de prescription ne visent pas expressément le prêt litigieux ; que le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, mais que celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ; que la mise en demeure qui lui a été adressée ne mentionne pas expressément que le non-respect du délai de 10 jours entraînera la déchéance du terme et qu'au surplus la CRCAM ne lui a jamais notifié la déchéance du terme.

Elle soutient par ailleurs que les clauses pénales mises en oeuvre sont excessives au regard du taux d'intérêt contractuel et de l'absence de préjudice spécifique allégué par le prêteur.
Enfin elle expose qu'elle a entrepris toutes les démarches utiles pour parvenir à la vente de l'immeuble dont la valeur vénale en tout ou en partie est supérieure à sa dette mais que la nature du bien saisi, qui est un hôtel particulier du XVIIème siècle qui comporte deux corps de bâtiments avec une partie hôtel et une partie logis, demande du temps. Et elle précise qu'en l'absence de réponse de Monsieur A... à ses demandes, elle a obtenu une décision d'aide juridictionnelle le 20 février 2017 pour engager une action lui permettant d'être autorisée à vendre seule le bien en cas de proposition d'achat pour le prix demandé.

La CRCAM sollicite la confirmation du jugement déféré, hormis sur le montant auquel sa créance a été fixée et elle demande à la cour de dire qu'elle est créancière à hauteur de 85.644,19 euros outre intérêts de 4,19% à compter du 14 juin 2017 sur 78.017,13 euros. Elle sollicite par ailleurs condamnation de Madame Z... à lui verser une indemnité de procédure de 3.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de la C... .

Elle soutient que l'interruption de la prescription résulte des courriers qui lui ont été adressés par Monsieur A... les 7 novembre 2014, 27 avril et 22 août 2016, lesquels valent reconnaissance de dette et elle précise que des règlements ont été effectués à compter de novembre 2014.

Elle fait valoir que s'appliquent au litige les dispositions de l'article 1139 ancien du code civil et affirme qu'elle a régulièrement mis en demeure les débiteurs de payer par courrier en date du 10 juin 2016 ; que, n'ayant pas reçu de réponse, elle a procédé au recouvrement de sa créance sans avoir à notifier de déchéance du terme qui était intervenue automatiquement en application des dispositions contractuelles ; qu'au surplus le contrat prévoyait expressément la possibilité de prononcer la déchéance du terme sans adresser de mise en demeure aux débiteurs. Elle demande à la cour d'approuver le premier juge qui a appliqué les intérêts de retard jusqu'à la date de déchéance du terme et sollicite l'infirmation du jugement qui a réduit la clause pénale de 7% à 100 euros, somme dérisoire alors même qu'elle a dû poursuivre les débiteurs pour obtenir paiement puisque les échéances n'ont plus été régulièrement honorées à compter de février 2014.
Enfin elle s'oppose à la demande de délais présentée par l'appelante en faisant observer qu'elle n'a toujours pas vendu son bien après avoir bénéficié du délai de quatre mois accordé par le premier juge.

Monsieur A... assigné à domicile n'a pas comparu. Le présent arrêt sera donc rendu par défaut.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que la CRCAM produit :

- un courrier de Monsieur A... en date du 5 novembre 2014 dans lequel celui-ci s'engage à verser tous les mois la somme de 1.588,65 euros " pour le règlement des prêts habitat et l'ADI" ;

- un courrier du même en date du 27 avril 2016 dans lequel il indique "ne plus être en mesure de rembourser les prêts et l'assurance liée à ces derniers" et où il précise que son épouse refuse de signer des mandats de vente à des prix raisonnables, ce qui ne permet pas la vente amiable du bien qu'il aurait souhaité pour rembourser le prêteur ;

Que c'est sans bonne foi que l'appelante prétend que ces courriers ne seraient pas interruptifs de prescription puisqu'ils ne font pas état des numéros des prêts concernés alors même qu'elle ne soutient pas que Monsieur A... aurait souscrit auprès de la CRCAM d'autres prêts que ceux aujourd'hui soumis à l'appréciation de cette cour ;
Que les courriers de Monsieur A..., qui reconnaissent clairement la dette des époux, ont donc interrompu la prescription et que la CRCAM n'est pas prescrite en ses demandes;

Attendu que, si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier, sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ( Cass 1re Civ., 22 juin 2017, no 16-18.418 );

Que le contrat de prêt indique uniquement que le prêteur pourra se prévaloir de l'exigibilité immédiate de la créance mais ne prévoit pas expressément qu'il pourra le faire sans mise en demeure préalable ;

Que l'absence d'une stipulation expresse et non équivoque dans le contrat de prêt pour dispenser le prêteur de l'envoi d'une telle mise en demeure préalable est cependant sans incidence puisque l'intimée justifie avoir adressé aux emprunteurs le 10 juin 2016 un courrier les mettant en demeure de régulariser les impayés pour un montant total de 17.854,14 euros dans un délai de 10 jours, faute de quoi elle entreprendrait sans nouvel avis le recouvrement de sa créance par voie judiciaire ;

Que c'est à nouveau sans vraie bonne foi que Madame Z... fait valoir que ce courrier ne mentionne pas l'expression "déchéance du terme" alors que les emprunteurs ne pouvant avoir aucun doute sur le prononcé de la déchéance du terme avant réclamation devant les tribunaux de l'intégralité des sommes restant dues constituant la créance de la banque ;

Que c'est dès lors à raison que le premier juge a écarté ce moyen ;

Attendu que c'est à raison que le premier juge a réduit à 100 euros le montant de la clause pénale de 7% prévue par le contrat en tenant compte de son caractère manifestement excessif au regard du taux des intérêts contractuels ;

Que la majoration des intérêts de trois points contractuellement prévue, dont la banque ne conteste pas qu'elle a le caractère d'une clause pénale, conduirait à appliquer aux sommes dues un intérêt majoré de 7,19%, ce qui apparaît manifestement excessif au regard de l'absence de préjudice particulier autre qu'un retard de paiement allégué par le prêteur et des situations respectives des parties, Monsieur A... ayant toujours manifestement tenté de procéder le plus rapidement possible à une vente amiable refusée par son ex-épouse qui souhaitait obtenir un prix trop élevé du bien financé ;

Que, par infirmation du jugement sur ce point, il convient dès lors de réduire cette majoration d'intérêts à néant et de maintenir les intérêts conventionnels à 4,19% ;

Attendu enfin que Madame Z..., qui ne justifie pas de la valeur de son immeuble, a déjà été autorisée en vain par le premier juge à le vendre à l'amiable et a obtenu un nouveau délai grâce à l'appel qu'elle a diligenté ;

Que la vente n'a pas abouti depuis le 27 mars 2018, date de la décision déférée, et qu'il n'y a dès lors pas lieu, en l'absence de production de pièces permettant de penser qu'elle pourrait intervenir très prochainement, d'accorder un nouveau délai à Madame Z...;

Attendu que les dépens d'instance seront utilisés en frais privilégiés de vente et qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, rendu par défaut et en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise, hormis en ce qu'elle a fixé la créance du poursuivant à 79.017,13 euros avec majoration des intérêts au taux conventionnel sur 78.917,13 euros à compter du 14 juin 2017,

STATUANT A NOUVEAU sur ce seul point,

FIXE la créance de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Touraine et du Poitou à la somme de 74.587,31 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 4,19% l'an sur 71.143,81 euros et au taux légal sur le surplus à compter du 14 juin 2017

Y AJOUTANT,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que les dépens d'appel seront utilisés en frais privilégiés de vente,

ACCORDE à Maître B..., avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président et Madame Irène ASCAR, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 18/009901
Date de la décision : 22/11/2018
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-11-22;18.009901 ?
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