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22/11/2018 | FRANCE | N°17/033751

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 22 novembre 2018, 17/033751


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 22/11/2018
SCP X...
SCP Y...

ARRÊT du : 22 NOVEMBRE 2018
No : 399 - 18
RG no 17/03375
No Portalis DBVN-V-B7B-FSPH

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLÉANS en date du 12 octobre 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE : timbre fiscal dématérialisé no: 1265 2058 4810 5735

SARL CSF CAR,
prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège [...]

représentée

par Maître Hugues Y..., membre de la SCP Hugues Y... , avocat au barreau d'ORLÉANS,

D'UNE PART

INTIMÉE : timbre fiscal dématéria...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 22/11/2018
SCP X...
SCP Y...

ARRÊT du : 22 NOVEMBRE 2018
No : 399 - 18
RG no 17/03375
No Portalis DBVN-V-B7B-FSPH

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLÉANS en date du 12 octobre 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE : timbre fiscal dématérialisé no: 1265 2058 4810 5735

SARL CSF CAR,
prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège [...]

représentée par Maître Hugues Y..., membre de la SCP Hugues Y... , avocat au barreau d'ORLÉANS,

D'UNE PART

INTIMÉE : timbre fiscal dématérialisé no: 1265 2053 1567 1571

SAS PRESTIGE AUTOMOBILES 45,
prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège [...]

représentée par Maître Julie B..., membre de la SCP C... , avocat au barreau de MONTARGIS

D'AUTRE PART

Déclaration d'appel en date du : 15 novembre 2017
Ordonnance de clôture du : 13 septembre 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 4 OCTOBRE 2018, à 9 heures 30, devant Mme Elisabeth HOURS, Conseiller Rapporteur faisant fonction de Président de Chambre, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :

Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, magistrat rapporteur qui en a rendu compte à la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Mme Irène ASCAR, greffier placé lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 22 NOVEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

La S.A.R.L. CSF CAR, qui exerce une activité de revente de véhicules, a passé deux commandes concernant plusieurs véhicules d'occasion auprès de la SAS PRESTIGE AUTOMOBILES 45 moyennant le prix total de 18.553 euros.

Des versements n'étant intervenus qu'à hauteur de 6.553 euros, PRESTIGE AUTOMOBILES 45, après avoir vainement mis en demeure sa cocontractante de s'acquitter du solde dû, l'a assignée le 24 novembre 2016 devant le tribunal de commerce d'Orléans en sollicitant paiement du principal de 12.000 euros, de la clause pénale contractuelle ainsi que de l'indemnité forfaitaire de recouvrement et elle a réclamé paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive ainsi que d'une indemnité de procédure.

Par jugement en date du 12 octobre 2017, le tribunal a condamné CSF CAR à payer à PRESTIGE AUTOMOBILES 45 la somme de 12.000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 2016 et capitalisation des intérêts outre 2.400 euros au titre de la clause pénale, 40 euros au titre de l'indemnité de recouvrement, 1.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive et 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CSF CAR a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 15 novembre 2017.

Elle en poursuit l'infirmation en demandant à la cour de fixer à 7.828 euros la somme dont elle est redevable et de condamner PRESTIGE AUTOMOBILES 45 à lui verser 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. À titre subsidiaire, elle demande à la cour de rejeter la clause pénale ou de la réduire à un euro, de rejeter les demandes de l'intimée tendant au versement de dommages et intérêts, à la capitalisation des intérêts et au paiement de frais irrépétibles, et de laisser à la charge de PRESTIGE AUTOMOBILES 45 les dépens qu'elle aura exposés.

Elle fait valoir qu'elle était en relations d'affaires avec l'intimée auprès de laquelle elle se fournissait régulièrement en véhicules pour les revendre ; qu'elle prenait certains véhicules "au prix fort" mais que l'intimée lui consentait alors des prix minorés sur d'autres véhicules sur lesquels elle avait une plus grande marge. Elle soutient que sa cocontractante n'a plus respecté cet accord à compter d'octobre 2015 et qu'elle n'a donc pas accepté de payer les véhicules commandés au prix prévu. Elle reconnaît que cette pratique n'est pas confirmée par des écrits mais souligne que deux témoins en ont attesté. Elle se plaint de manoeuvres dolosives de PRESTIGE AUTOMOBILES 45 qui l'ont amenée à commander des véhicules au prix fort, c'est à dire au delà de leur valeur argus, sans bénéficier de véhicules à prix minorés. Elle soutient que ses bons de commande n'avaient qu'une valeur provisoire dans l'attente de propositions sur des véhicules à prix minorés et elle affirme qu'ils sont incomplets, de sorte que leur opposabilité à son égard est "discutable".

Subsidiairement, elle fait valoir qu'elle n'a jamais eu connaissance des conditions générales de vente de PRESTIGE AUTOMOBILES 45 et que la clause pénale qui y est mentionnée est inapplicable et en outre manifestement abusive comme étant de 20% du montant de la commande.

Elle affirme enfin avoir fait opposition aux chèques remis à sa cocontractante parce que celle-ci lui avait indiqué les avoir perdus et soutient ne pas avoir abusivement résisté aux demandes formées à son encontre.

PRESTIGE AUTOMOBILES 45 conclut à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation de l'appelante à lui verser 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de la SCP Hugues Y... .

Elle fait valoir que la preuve d'un dol ne peut être rapportée par deux témoignages émanant d'un ami du gérant de l'appelante et de l'un de ses anciens salariés puisque, à supposer même que ceux-ci aient été présents pour prendre livraisons des véhicules commandés, ils n'ont pas été témoins des transactions et des conditions de vente. Elle affirme qu'aucun autre véhicule n'avait été réservé par CSF CAR ; que les transactions ne se font jamais sur les bases décrites par l'appelante de véhicules plus chers et de véhicules moins chers ; et elle souligne que CSF CAR avait réglé diverses sommes et lui avait remis en paiement deux chèques, ce qui démontre qu'elle s'était reconnue redevable de la somme convenue, précisant que l'appelante a frauduleusement fait opposition à ces effets. Elle soutient que la résistance abusive de CSF CAR est démontrée tant par cette opposition que par l'appel qu'elle a formé dans un but purement dilatoire contre la décision ayant prononcé condamnation à son encontre.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que, pour démontrer que l'intimée n'a pas respecté ses engagements, l'appelante communique deux attestations émanant de personnes qui indiquent avoir été présentes lorsque le commercial de PRESTIGE AUTOMOBILES 45 aurait promis de vendre des véhicules plus intéressants si des véhicules anciens étaient repris au prix fort par CSF CAR puis aurait finalement refusé les ventes avantageuses promises au motif d'un refus de son patron ;

Qu'ainsi, Monsieur D..., ancien salarié de CSF CAR, témoigne en ces termes : "à plusieurs reprises le commercial nous promettait des véhicules et le moment venu pour retirer le lot, il retirait des véhicules suivant les ordres du patron comme il disait à chaque fois. Par exemple une Fiat blanche que Monsieur E... (gérant de CSF CAR) comptait pour faire la marge sur ces lots le commercial nous a fait attendre deux mois et enfin ce véhicule était récupéré pour la concession d'Orléans" ;

Que Monsieur F..., ami du dirigeant de CSF CAR, atteste quant à lui avoir accompagné à plusieurs reprises Monsieur E... et indique : "le commercial lui montrait des véhicules qui lui sont réservés mais il ne peut pas les récupérer pour le moment et en, ma présence le commercial lui a demandé de prendre des véhicules que ça faisait longtemps qu'ils étaient sur le parc vu leur état. (...) Par la suite un autre jour nous nous sommes présentés pour récupérer la Scénic III (un véhicule promis pour un prix intéressant) le commercial lui a présenté un Scénic II 7 ans plus vieux à la place du Scénic III qui était récupéré pour qu'il soit vendu à Orléans selon les ordres du patron. Un autre jour nous nous sommes présentés pour récupérer un Suzuki SUV le commercial nous a fait comprend que le patron avait décidé de le garder pour lui et il a promis à Monsieur E... de lui céder un véhicule d'une valeur de 2.500 à 3.000 euros à 100 euros pour l'indemniser sur le lot qu'il avait déjà pris" ;

Mais attendu que ces témoins ne précisent pas la date à laquelle ils auraient accompagné le gérant de CSF CAR pour récupérer des véhicules détenus par la concession de PRESTIGE AUTOMOBILE 45 de Pithiviers ;

Que ni l'un ni l'autre ne font état des trois transactions litigieuses et n'attestent avoir été présents lors de leurs conclusions ;

Qu'en effet CSF CAR a signé, le 16 octobre 2015, un premier bon de commande mentionnant deux véhicules de marque FIAT et RENAULT et un second bon de commande concernant trois autres véhicules : une SUSUKI une FIAT et une PEUGEOT moyennant le prix de 6.000 euros pour la première commande et de 3.053 euros pour la seconde ; qu'elle s'est acquittée de la somme de 1.053 euros par carte bancaire et a réglé le solde de 8.000 euros au moyen d'un chèque de ce montant qui a été rejeté ;

Qu'elle ne prétend pas ne pas avoir obtenu la remise de ces 5 véhicules ;

Qu'elle a également commandé le 24 décembre 2015 trois autres véhicules FIAT, RENAULT et CITROËN pour un montant total de 9.500 euros qui a été réglé au moyen d'un paiement intervenu le jour même à hauteur de 3.500 euros et d'un chèque de 6.000 euros qui a été rejeté ;

Attendu qu'elle n'explique pas pourquoi les bons de commande qu'elle a signés auraient été incomplets et quels sont les motifs les rendant "discutables" ;

Qu'il ne peut être compris, si le commercial de PRESTIGE AUTOMOBILES 45 avait, ainsi qu'il est décrit, refusé d'honorer ses promesses au moins à trois reprises, que le gérant de CSF CAR :

- lui ait passé commande de huit autres véhicules d'occasion, sans aucune mention de véhicules différents devant lui être livrés en sus,
- lui ait réglé plus de 4.000 euros et remis deux chèques de 6.000 et 8.000 euros pour payer l'intégralité du prix convenu sans s'assurer de la remise d'un ou de plusieurs autres véhicules moyennant un prix intéressant pour lui,
- ai réglé 2.000 euros ensuite du rejet des deux chèques susvisés ;

Qu'il ne peut au surplus qu'être observé que CSF CAR, qui a ainsi acquis huit véhicules au moyen de commandes groupées, se contente, pour démontrer qu'elle les avait achetés à un prix excessif en l'attente de livraisons plus intéressantes, de communiquer la cote argus de trois d'entre eux sans justifier du prix des 5 autres ;

Qu'en conséquence et à supposer même que sa version d'achats au-dessus et au-dessous de la cote argus habituelle puisse être retenue, il ne pourrait qu'être constaté qu'elle n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'achat des huit véhicules à un prix supérieur à leur cote et donc d'un dol commis par l'intimée en ne lui remettant que les véhicules cotés au-dessous de l'argus et non ceux cotés au-dessous ;

Attendu par ailleurs que l'appelante ne communique aucun courrier de PRESTIGE AUTOMOBILES 45 l'informant de la perte des chèques remis en paiement et d'une demande d'opposition les concernant ;

Que ses dires d'une telle perte, formellement contestés par l'intimée, sont d'autant moins crédibles que les chèques n'ont pas été remis par elle à la même date, ni même le même mois ; que leur perte simultanée est peu vraisemblable qu'il ne pourrait être expliqué qu'après avoir informé l'acquéreur de cette perte, PRESTIGE AUTOMOBILES 45 les ait remis à l'encaissement à deux dates différentes ;

Qu'il sera donc retenu que c'est bien CSF CAR qui a décidé de faire opposition au paiement de ces effets bancaires pour empêcher leur paiement ;

Attendu que PRESTIGE AUTOMOBILES 45, qui sollicite paiement d'une clause pénale de 20% prévue par ses conditions générales de vente, ne produit pas ses conditions générales et que l'existence d'une telle pénalité n'est pas mentionnée sur les bons de commande signés par CSF CAR ;

Qu'à supposer qu'elle existe sur les factures émises par l'intimée, ce que la cour ne peut vérifier puisqu'en raison des caractères de typographie tellement "discrets" qui ont été utilisés, la photocopie de ces deux pièces ne permettent pas de lire les mentions portées en bas de page,
seules les indications "CONDITIONS de VENTE , MODALITÉS DE RÈGLEMENT et CLAUSE DE RÉSERVE DE PROPRIÉTÉ" ayant pu être déchiffrées, il sera relevé qu'il n'est pas démontré ni même allégué qu'un original des factures a été remis à CSF CAR, ni que ces documents lui ont été donnés le jour de la vente et non ensuite adressés ;

Qu'il n'est dès lors pas justifié que CSF CAR a eu connaissance de l'existence d'une clause pénale avant de contracter avec l'intimée ;

Qu'il appartient à celui qui se prétend créancier de démontrer l'existence de sa créance et que la demande tendant au paiement d'une telle clause pénale, non opposable à l'appelante, ne peut par infirmation du jugement déféré, qu'être rejetée ;

Que, pour les mêmes motifs, sera également rejetée la demande tendant au paiement d'une indemnité de 40 euros qui est peut être prévue par les conditions de vente ou les modalités de paiement portés sur les factures mais n'est pas, pour les motifs invoqués ci-dessus, opposable à CSF CAR ;

Attendu qu'au regard de l'opposition irrégulière formée par CSF CAR au paiement des chèques remis en paiement et de l'absence de tout versement alors qu'elle se reconnaissait redevable au moins de la somme de 7.828 euros, la résistance de l'appelante à tout paiement pendant près de trois années apparaît manifestement abusive et a causé à l'intimée un préjudice résultant d'une privation de trésorerie de 12.000 euros pendant près de trois années ;

Que le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il lui a alloué la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Attendu que CSF CAR, succombant à l'instance d'appel, en supportera les dépens et qu'il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'intimée ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise, hormis en ce qu'elle a condamné la société CSF CAR à payer à la société PRESTIGE AUTOMOBILES 45 les sommes de 2.400 euros au titre d'une clause pénale, de 40 euros au titre d'une indemnité de recouvrement,

STATUANT A NOUVEAU de ces seuls chefs,

DÉBOUTE la société PRESTIGE AUTOMOBILES 45 de sa demande en paiement d'une clause pénale et d'une indemnité de recouvrement,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la société CSF CAR à payer à la société PRESTIGE AUTOMOBILES 45 la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

CONDAMNE la société CSF CAR aux dépens d'appel,

ACCORDE à la SCP Hugues Y... , avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Mme Irène ASCAR, greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/033751
Date de la décision : 22/11/2018
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-11-22;17.033751 ?
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