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15/11/2018 | FRANCE | N°17/03564

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 15 novembre 2018, 17/03564


COUR D'APPEL D'ORLÉANS


CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE






GROSSES + EXPÉDITIONS : le 15/11/2018
la SCP DUBOSC-SAUTROT
Me Estelle GARNIER


ARRÊT du : 15 NOVEMBRE 2018


No : 381 - 18
No RG : No RG 17/03564 - No Portalis DBVN-V-B7B-FS4K


DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTARGIS en date du 16 Novembre 2017


PARTIES EN CAUSE


APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265217094798962


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ayant pour avocat Me Charles François DUBOSC, membre de la SCP DUBOSC-SAUTROT, avocat au barreau de Montargis,


D'UNE PART




INTIMÉ : - Timbre fiscal d...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 15/11/2018
la SCP DUBOSC-SAUTROT
Me Estelle GARNIER

ARRÊT du : 15 NOVEMBRE 2018

No : 381 - 18
No RG : No RG 17/03564 - No Portalis DBVN-V-B7B-FS4K

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTARGIS en date du 16 Novembre 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265217094798962

Madame G... F... E... épouse A...
[...]
[...]

ayant pour avocat Me Charles François DUBOSC, membre de la SCP DUBOSC-SAUTROT, avocat au barreau de Montargis,

D'UNE PART

INTIMÉ : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265223500689826

Monsieur Sébastien C...
né le [...] à AUXERRE [...]
[...]

représenté par Me Estelle GARNIER, avocat au barreau d'ORLEANS, avocat postulant, et ayant pour avocat plaidant, Me Edwina GUSTIN, avocat au barreau de la Haute-Loire,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 8 Décembre 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 14 août 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 27 SEPTEMBRE 2018, à 14 heures, devant Madame Elisabeth HOURS, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Mme Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 15 NOVEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Madame G... E... a été mariée à Monsieur Didier C... dont elle a divorcé le 2 février 2005 sans que le régime matrimonial ne soit liquidé.

Au cours de la vie commune, Madame E... a constitué avec Monsieur Sébastien C..., fils de son époux, la SCI "[...]", chacun des associés étant propriétaire de 500 des 1.000 parts sociales d'une valeur nominale de 100 euros. Cette SCI a acquis une parcelle de terrain à bâtir située lieudit [...] à la [...] moyennant le prix de 100.000 francs payé comptant. La SCI a divisé la parcelle et y a fait édifier 3 pavillons d'habitation, le premier à partir d'un local artisanal transformé en habitation en 2004, le deuxième édifié en 2000 avec une piscine ajoutée en 2002 et une extension de salle de cinéma en 2003, le troisième commencé en 2003 et achevé beaucoup plus tard.

Monsieur Sébastien C... a cédé ses parts sociales de la SCI [...] à Madame G... E... le 6 mars 2010 moyennant le prix d'un euro.

Par jugement en date du 16 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Montargis, statuant sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a annulé la vente de ces 500 parts sociales, ordonné à Madame E... de les restituer à Monsieur C... ainsi qu'à lui verser 1.800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame E..., a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 18 décembre 2017.
Elle conclut à l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour de débouter Monsieur C... de toutes ses prétentions et de le condamner à lui verser 3.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.

Elle soutient qu'après avoir tenté de l'évincer en créant lui-même une SCI ayant le même nom, Sébastien C... a pris connaissance des importantes difficultés financières de la société qui se trouvait dans l'impossibilité, à la fin de l'année 2008, de rembourser Monsieur A... des avances qu'il avait faites pour le compte de Madame E..., sa compagne, pour financer divers travaux, les échéances de crédit et les impôts fonciers et assurer des frais d'avocats ; qu'au regard des poursuites diligentées par le Crédit Agricole Centre Loire qui avait délivré commandement aux fins de saisie immobilière, Sébastien C..., ne souhaitant pas assumer les dettes de la SCI, a librement décidé de lui céder ses parts sociales moyennant le versement de la somme symbolique d'un euro ; que l'acte de cession du 6 mars 2010 a été enregistré le 20 avril 2010, ce qui démontre qu'elle était entièrement de bonne foi et a laissé le temps à Monsieur C... de se rétracter ; que ce n'est que 5 ans et deux jours plus tard qu'il a contesté son accord. Elle affirme qu'il n'existe aucun élément permettant de caractériser la vileté du prix ; que l'action est prescrite comme ayant été engagée le 19 mars 2015, soit plus de 5 ans après la cession. A titre subsidiaire, elle prétend que l'action n'est pas fondée la valeur des parts sociales devant être estimée au jour de leur cession ; que le tribunal a à tort retenu que la SCI disposait d'un actif constitué d'un terrain de 68 ares, d'une maison construite et viable et de deux bâtiments en cours de construction alors que cet actif était entièrement obéré par un emprunt immobilier et que les constructions en cours étaient commencées en violation des règles d'urbanisme ; que le passif n'était aucunement de 33.703,89 euros ainsi que l'a indiqué le tribunal puisqu'elle-même et son époux ont réglé tant cette somme que les taxes foncières sur leurs deniers personnels, faute de quoi la SCI aurait dû déposer le bilan ; qu'elle a déposé de nouveaux permis de construire et mis aux normes les bâtiments ; que la parcelle [...] cédée le 11 avril 2011 n'avait pas, au jour de la cession des parts, la valeur de 83.000 euros ; que la parcelle [...] est raccordée au tout l'égout alors que tel n'était pas le cas en 2010 ; qu'en ce qui concerne la parcelle [...] , l'estimation de 2015 est inexacte puisque le bâtiment qui y est édifié était seulement en construction au moment de la cession des parts. Elle souligne que la cession a eu lieu en mars 2010 alors que la déchéance du terme des emprunts était prononcée par la banque ; que c'est uniquement pour échapper aux poursuites que Sébastien C... a cédé ses parts pour un prix parfaitement justifié ; qu'à la date de cette cession elle avait remboursé la banque mais que la SCI était devenue débitrice de son époux ; que des travaux importants étaient nécessaires et que l'intimé ne pouvait les financer, ce qui ressort du courrier de son courrier en date du 28 novembre 2010.

Monsieur C... sollicite la confirmation du jugement déféré et la condamnation de l'appelante à lui verser une nouvelle indemnité de procédure de 6.000 euros et à supporter les dépens, dont distraction au profit de Maître GARNIER.
Il fait valoir que c'est son père, entrepreneur en bâtiment, qui a réalisé l'ensemble des travaux de construction sur la parcelle acquise par la SCI, à l'exception du second oeuvre du troisième pavillon ; que pour acheter les fournitures et le matériel, la SCI a souscrit trois prêts auprès du Crédit Agricole pour un montant total de 48.979,60 euros ; que ce n'est qu'en raison du divorce conflictuel des époux que les prêts n'ont plus été remboursés ; que les pavillons ont été vendus l'un peu de temps après la cession 83.000 euros, l'autre cinq ans après la cession 177.800 euros, et que le troisième est en vente depuis 2016 au prix de 128.400 euros. Il affirme ne jamais avoir été demandeur à la cession mais soutient que c'est Madame E... qui l'a trompé pour le convaincre de lui vendre ses actions Il souligne que les comptes de la SCI ne sont pas produits, qu'il n'est aucunement démontré que l'appelante ait réglé les travaux et les impôts de ses deniers personnels puisque deux maisons étaient louées et que la SCI percevait des loyers.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu qu'aux termes de l'article 2241 du code civil, la demande en justice, même en référé, même devant une juridiction incompétente et même si l'assignation est annulée pour vice de procédure, interrompt le délai de prescription ; que l'article 2242 du même code précise que l'interruption produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance ;

Que c'est dès lors sans pertinence, au regard de ce texte clair, que Madame E... reproche au premier juge d'avoir retenu que l'assignation délivrée par Monsieur C... le 4 mars 2015 a interrompu la prescription quinquennale qui avait commencé à courir le 6 mars 2010 ;

Qu'elle ne saurait en effet sérieusement soutenir que seul le placet en date du 19 mars 2015 aurait saisi le tribunal plus de cinq ans après la signature de l'acte litigieux alors même que c'est la demande en justice, caractérisée par la citation ou la délivrance d'un commandement de payer ou/et tout acte tendant à l'exécution forcée qui interrompt la prescription et non la saisine du tribunal caractérisée par l'enrôlement de l'assignation ;

Que c'est dès lors à raison que le tribunal a écarté le moyen tiré de la prescription de l'action engagée par Monsieur C... ;

Attendu que, pour conclure au rejet des demandes formées à son encontre Madame E... se borne en réalité à prétendre que l'intimé ne pouvait ou ne voulait pas régler la dette bancaire dont elle s'est seule acquittée et que ce serait pour ce motif qu'il aurait souhaité se désengager entièrement de la SCI et aurait, en toute connaissance de cause, désiré céder ses parts sociales pour l'euro symbolique et ne plus être, en contrepartie, tenu d'aucun paiement ;

Mais attendu que cette affirmation n'est confirmée par aucune pièce et aucun témoignage ;

Que, s'il est constant qu'un différend a opposé les parties et que Monsieur C... a tenté de faire échec à la main mise de Madame E... sur la SCI, il n'y est pas parvenu et a été évincé de la gestion de la société par l'appelante qui a sollicité celui qui est aujourd'hui devenu son nouvel époux, Monsieur A..., pour régler la somme de 39.000 euros due à l'établissement bancaire prêteur de deniers ;

Que cette somme était très inférieure à la valeur des biens possédés par la SCI puisqu'à la date de la cession il existait deux immeubles sur la parcelle propriété de la SCI et qu'une troisième était en cours de construction ;

Que l'une des maisons déjà terminée est décrite par le commandement de vente aux fins de saisie immobilière du 13 avril 2005 comme comprenant 5 pièces, un garage, une terrasse et une piscine ;

Que l'un de ces immeubles a été vendu 83.000 euros quelques mois après la cession des parts sociales litigieuse et que Madame E..., qui prétend qu'il n'avait pas une telle valeur le 6 mars 2010, ne fournit aucune pièce ou facture à l'appui de cette affirmation ;

Qu'un autre immeuble a été vendu 177.800 euros et que l'autre est en vente moyennant le prix de 128.000 euros ;

Que c'est à raison que l'intimé rappelle que son père, entrepreneur de maçonnerie a lui- même effectué la plus grande partie des travaux sur ces trois immeubles et que seul le dernier n'était pas achevé à la date de la cession de ses parts ;

Que Madame E..., qui prétend quant à elle avoir fait réaliser à grand frais le raccordement de ces biens au tout à l'égout, n'en justifie pas puisqu'elle ne produit aucune facture acquittée par ses soins ou ceux de Monsieur A... ;

Que même si l'on retenait, comme elle le soutient que le second immeuble n'était pas encore achevé à la date de la cession, il n'en demeure pas moins que ce bien avait alors une valeur certaine, et que le troisième immeuble en cours de construction n'était pas dépourvu de valeur ;

Que, pour justifier des frais qu'elle a engagés, l'appelante produit en tout et pour tout une facture de 1.614,60 euros établie en 2011, une facture de 13.800 euros en date du 23 février 2007, corrigée à deux reprises manuellement pour y porter la mention 2008, mais en tout état de cause antérieure à la cession des parts et dont il n'est aucunement justifié qu'elle a été acquittée par Monsieur A..., et une facture de consuel de 116,96 euros datant de 2014, ce qui ne saurait caractériser les très importants travaux qu'elle affirme avoir fait réaliser postérieurement à la cession des parts dans les trois immeubles appartenant à la SCI et qui justifieraient le prix de vente de ces biens ;

Qu'il sera également souligné que l'un des immeubles était loué 750 euros mensuels et que Madame E... se domicilie encore dans le troisième ;

Qu'au regard de ce qui vient d'être exposé, l'actif de cette société lui permettait aisément de faire face à ses dettes en distribuant, en cas de vente, des bénéfices aux associés et que c'est dès lors sans pertinence que l'appelante prétend que Monsieur C... aurait cherché à échapper au passif de la SCI ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1591 du code civil, le prix de la vente doit être déterminé et désigné par les parties ; que ce prix doit être réel et sérieux ;

Qu'une cession moyennant l'euro symbolique n'est pas nulle si l'objet de la vente est sans valeur, mais que tel n'est pas le cas en l'espèce ;

Qu'aucune intention libérale ne peut être imputée à l'intimé au regard de ses relations particulièrement conflictuelles avec l'appelante à la date de la cession ;

Que c'est en conséquence à raison que le premier juge a retenu que la cession des parts moyennant le prix d'un euro symbolique n'était pas justifiée par les éléments de l'espèce, ce qui justifiait l'annulation du contrat de vente ;

Que le jugement déféré sera donc entièrement confirmé ;

Attendu que Madame E..., succombant à l'instance, en supportera les dépens et qu'il sera fait application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'intimé ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE Madame G... E... à payer à Monsieur Sébastien C... la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

CONDAMNE Madame G... E... aux dépens d'appel,

ACCORDE à Maître GARNIER, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Mme Irène ASCAR, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 17/03564
Date de la décision : 15/11/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-15;17.03564 ?
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