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15/11/2018 | FRANCE | N°17/035191

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 15 novembre 2018, 17/035191


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 15/11/2018
la X...
la SARL ARCOLE

ARRÊT du : 15 NOVEMBRE 2018

No : 380 - 18
No RG : No RG 17/03519 - No Portalis DBVN-V-B7B-FSY3

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 27 Octobre 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265214982255847

SASU RESTAURATION ORLÉANAISE CONSTRUCTION
[...]

représentée par Me Pascal Z... membre de la X... , avocat au barreau

d'ORLEANS,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SAS BRUNET Immatriculée au RCS de POITIERS sous le...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 15/11/2018
la X...
la SARL ARCOLE

ARRÊT du : 15 NOVEMBRE 2018

No : 380 - 18
No RG : No RG 17/03519 - No Portalis DBVN-V-B7B-FSY3

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 27 Octobre 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265214982255847

SASU RESTAURATION ORLÉANAISE CONSTRUCTION
[...]

représentée par Me Pascal Z... membre de la X... , avocat au barreau d'ORLEANS,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SAS BRUNET Immatriculée au RCS de POITIERS sous le no 389 818 907
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié [...]

représentée par Me Vincent A... membre de la SARL ARCOLE, avocat au barreau de TOURS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 05 Décembre 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 14 août 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 27 SEPTEMBRE 2018, à 14 heures, devant Madame Elisabeth HOURS, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Mme Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 15 NOVEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Dans le cadre de travaux portant sur un hôtel situé No [...] , la société ROC INGÉNIERIE (ROC) a consulté la Société BRUNET pour le lot électricité.

BRUNET a émis le 10 mars 2016 une proposition commerciale valant offre de prestations sur laquelle la Société ROC a porté la mention manuscrite « bon pour accord » en précisant de manière manuscrite que le marché serait soumis au planning contractuel, pièces écrites et graphiques, et à ses conditions.

Des prestations supplémentaires ont ensuite été sollicitées par le maître de l'ouvrage mais la seconde proposition de BRUNET en date du 4 avril 2016 n'a pas été acceptée.

Par courriel en date du 7 avril 2016, confirmé par courrier recommandé du 12 avril, ROC a indiqué ne pas conclure définitivement le marché de travaux.

Ce "désistement" a été refusé par BRUNET par lettre recommandée du 11 mai 2016 dans laquelle elle a fait connaître ne pas poursuivre l'exécution forcée du contrat, mais former une demande indemnitaire pour résiliation fautive du contrat par ROC.

Aucun accord n'ayant pu intervenir, BRUNET a, le 16 juin 2016, assigné ROC devant le tribunal de commerce d'Orléans afin d'obtenir sa condamnation, au visa des articles 1134 et suivants du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016, que soit prononcée aux torts de ROC la résolution du contrat et obtenir paiement de 23.697,52 euros TTC à titre de dommages et intérêts, outre intérêts au taux légal à compter de la date de mise en demeure, soit au 11 mai 2016, ainsi que d'une indemnité de procédure de 2.000 euros.

Par jugement en date du 27 octobre 2017, le tribunal a condamné ROC à payer à BRUNET 15.000 euros à titre de dommages et intérêts outre 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.

ROC relevé appel de cette décision par déclaration en date du 5 décembre 2017.

Elle en poursuit l'infirmation en demandant à la cour de débouter BRUNET de l'ensemble de ses demandes et elle sollicite reconventionnellement paiement de 10.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 3.750 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que condamnation de l'intimée à supporter les dépens.

Elle ne conteste pas avoir apposé, sur la proposition commerciale, sa signature, son cachet et un "bon pour accord"mais affirme qu'elle a indiqué de manière expresse que cette proposition ne serait définitivement entérinée qu'à condition qu'un accord soit trouvé sur le planning contractuel, sur l'ensemble des pièces écrites et graphiques, ainsi que sur ses conditions administratives, techniques et financières. Elle soutient que le devis qu'elle a accepté ne constitue dès lors qu'un avant-contrat soumis à des conditions suspensives qui ne se sont pas réalisées. Et elle prétend qu'en refusant les termes du contrat de sous-traitance qu'elle lui soumettait, BRUNET a anéanti l'accord de principe portant sur sa proposition du 10 mars 2016, ; qu'en effet le service juridique de BRUNET s'est opposé à la signature du contrat en raison de désaccords sur les conditions du marché proposé ; que le cahier des clauses techniques particulières ne convenait pas à BRUNET. Elle précise que Flavien B..., technicien du bureau d'études de BRUNET lui a adressé un courriel le 29 mars 2016 dans lequel il indique " En vue de la signature du marché, vous trouverez ci-joint le CCTP annoté par nos soins", ce qui démontre que le marché n'était pas conclu et qu'aucun accord n'avait été trouvé sur le CCTP et établit l'entière responsabilité de BRUNET dans la non réalisation de la condition suspensive mise à sa charge puisqu'il suffisait à l'intimée de manifester son accord en signant le contrat et ses pièces annexes, ce qu'elle n'a pas fait lors du rendez-vous de signature fixé au 18 mars 2016.

Elle prétend par ailleurs que, plus d'un mois après la visite de la chambre témoin et du site, BRUNET lui a en adressé un devis de travaux supplémentaires de près de 14.000 euros HT en indiquant que ces travaux seraient nécessaires et n'auraient pas été valorisés dans l'offre initiale qui chiffrait à la somme de 342.000 euros TTC le coût total des prestations portant sur le lot électricité du chantier du Boeuf Couronné ; que ce que BRUNET qualifie de « devis complémentaire » est en fait un avenant obligatoire au devis initial, qui s'avérait incomplet ; que la première proposition commerciale en devenait automatiquement nulle et non avenue dans la mesure où son consentement avait été obtenu sur la base d'une proposition forfaitaire englobant la totalité des travaux du lot électricité moyennant le prix ferme de 342.000 euros et qu'il n'y a donc pas eu accord sur la chose et sur le prix.
Si la cour retenait que le contrat est entré en vigueur du fait de la levée des conditions suspensives, elle lui demande de juger pour les motifs sus exposés que la résolution du contrat est intervenue du fait de BRUNET.
Enfin elle prétend que l'intimée n'est pas fondée à réclamer l'indemnisation d'un préjudice en raison de l'absence de clause pénale contractuelle qui, au surplus aurait dû être réduite et affirme qu'elle ne justifie d'aucun préjudice puisqu'elle ne peut démontrer l'existence d'un gain manqué en se référant à des taux de marge de 2012 et 2013 qui ne correspondent pas à ceux applicables à un marché conclu en 2016 et ne justifie pas plus d'une perte subie en se constituant des preuves à elle-même par la production de captures d'écrans partielles.

BRUNET conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a prononcé condamnation à son profit mais sollicite sa réformation en ce qu'il ne lui a alloué que 15.000 euros de dommages et intérêts au lieu des 23.697,52 euros réclamés. Elle sollicite la capitalisation des intérêts et demande également
la condamnation de ROC à lui verser une nouvelle indemnité de procédure de 5.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de Maître Vincent A....

Elle souligne tout d'abord qu'il existerait une ambiguïté dans les demandes de l'appelante qui indique tantôt que le contrat était soumis à des conditions suspensives, tantôt qu'il ne serait qu'un avant-contrat préparatoire voire de simples pourparlers ; qu'en tout état de cause, ce contrat n'est pas un contrat de vente mais de sous-traitance ; qu'il ne contient aucune condition suspensive ; qu'elle n'a aucunement refusé les conditions de ROC mais s'est bornée à solliciter l'envoi d'un planning détaillé lui permettant de connaître la date prévisible de son intervention sur le chantier puisque cette intervention dépendait de l'état d'avancement des travaux confiés à d'autres entreprises ; qu'à supposer même qu'il soit retenu que le suivi du planning était une condition suspensive, il ne pourra qu'être constaté que ce n'est pas elle qui a refusé ce suivi mais que c'est ROC qui l'a rendu impossible en ne lui communiquant pas de devis détaillé.

Elle conteste formellement que le devis complémentaire ait concerné les mêmes travaux que ceux visés par le devis principal et soutient qu'il concernait la fourniture d'une alimentation électrique triphasée ainsi que la fourniture du lecteur de carte, prestations différentes du CCTP et donc complémentaires à la proposition commerciale initiale ; que si ce devis supplémentaire comprenait des travaux non souhaités par ROC, tels les boutons poussoirs, il suffisait à cette dernière de les refuser mais que cela ne lui permettait pas de remettre en cause le contrat initial, elle-même n'ayant aucunement lié l'exécution des prestations initiales à l'acceptation de son second devis.
Elle conclut qu'en présence d'un accord indiscutable sur la prestation à et son prix, tel que cela résulte de sa proposition commerciale acceptée, ROC a à tort et sans motif rompu le contrat, ce qui lui cause un préjudice d'une part de gain manqué, d'autre part de perte subie qu'elle détaille dans ses écritures.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que BRUNET ne peut sérieusement prétendre qu'un contrat définitif avait été signé et solliciter paiement d'une perte de marge au titre de l'absence d'exécution de ce contrat ;

Qu'en effet, elle a simplement adressé à ROC une proposition commerciale qui n'a pas été acceptée en l'état par ROC puisqu'il est constant que cette dernière, d'une part n'a pas versé l'acompte de 30% qui devait accompagner la signature de l'acceptation de l'offre, d'autre part qu'elle y a certes porté la mention " Bon pour accord" et son cachet mais a indiqué : " Conditions : planning contractuel et pièces écrites et graphiques, conditions ROC Ingénierie" ;

Que les parties ont donc conclu, ainsi que l'a relevé à bon droit le tribunal, une convention assortie de conditions suspensives ;

Attendu que BRUNET soutient que ces conditions suspensives ne se sont pas réalisées par la seule faute de ROC qui ne lui a jamais envoyé le planning tandis que l'appelante prétend qu'elles ont défailli par le fait de BRUNET, laquelle, au surplus, a émis une proposition commerciale complémentaire au titre de travaux indispensables déjà prévus par le CCTP, ajoutant ainsi une somme de 14.000 euros HT au prix convenu ;

Attendu que la seule pièce permettant au tribunal et à la cour de se former une opinion est un courriel en date du 6 avril 2017 reprenant les échanges des parties ;

Qu'il en résulte que BRUNET a fait valoir que, lors de la visite de la chambre témoin, il lui avait été fait part d'une demande de boutons poussoirs au lieu des va-et-vient qu'elle avait chiffrés dans sa proposition commerciale et que cette demande entraînait des incidences sur le câblage, ce qui l'avait conduite à adresser un devis complémentaire ;

Que ROC prétend que ce devis complémentaire d'un montant de 14.000 euros HT ne pouvait être accepté puisque BRUNET y avait fait figurer, non seulement les boutons poussoirs mais aussi des éléments de liaison et la fourniture d'une alimentation électrique triphasée indispensable ;

Que BRUNET soutient que ROC n'était pas contrainte d'accepter ce devis ;

Que cette indication est exacte puisqu'il ressort du CCTP communiqué par ROC avec ses annotations et celles de BRUNET que, si celui-ci prévoyait bien la remise en état de l'installation existante et une alimentation pour BECS de chantier, BRUNET avait indiqué qu'elle ne procéderait pas à ces travaux dans son lot, ce qui avait été accepté par ROC qui avait porté la mention " OK" en face de cette indication de sa cocontractante ;

Que le courriel susvisé démontre que les boutons poussoirs et le lecteur de carte n'étaient pas plus prévus initialement ;

Que le devis complémentaire correspond bien, contrairement à ce que prétend ROC, à des demandes supplémentaires formées par elle et qu'elle ne saurait dès lors reprocher à BRUNET de l'avoir établi en sus de sa proposition commerciale initiale étant observé qu'elle demeurait parfaitement libre de refuser ce second devis sans pour autant empêcher l'exécution de l'ensemble des autres travaux correspondant à la description du CCTP ;

Attendu qu'il résulte par ailleurs du même courriel susvisé que BRUNET réclamait le planning et précisait que s'il n'était pas fourni, il faudrait supprimer la mention le concernant dans les conditions posées par ROC ;

Que cette dernière a alors répondu que le planning détaillé était en cours de réalisation et assujetti à des éléments décoratifs et indiquait qu'il convenait de prévoir une réception au 31 août 2016 avec levées de réserves le 30 septembre ;

Que BRUNET concluait qu'elle en prenait note mais qu'elle restait dans l'attente du planning qui devrait être validé par les autres corps d'état, ce qui ne permet aucunement de soutenir qu'elle aurait refusé le planning établi par ROC ;

Qu'enfin les parties s'étaient mises d'accord sur un acompte de 50 K€, sur le montant des pénalités et sur la compétence exclusive du tribunal de commerce d'Orléans en cas de litige, et qu'il apparaît en conséquence que ROC ne peut faire état d'aucun refus de BRUNET sur les conditions qu'elle souhaitait voir appliquer au contrat ;

Attendu qu'en l'absence de démonstration, par ROC, de la non réalisation des conditions suspensives ou de l'établissement, par BRUNET, d'un devis faisant état de travaux qui auraient dû être compris dans la proposition commerciale, il convient de retenir que l'appelante est bien à l'origine de la non conclusion définitive du contrat qu'elle a refusé de signer malgré son engagement de le faire si les conditions suspensives étaient levées ;

Que, même si la convention ne prévoyait aucune clause pénale, la faute ainsi commise par ROC a causé à BRUNET un préjudice financier certain résultant notamment des frais d'étude approfondis qu'elle a pu exposer pour satisfaire l'appelante après que celle-ci ait accepté sa proposition ;

Que c'est en faisant une exacte appréciation des faits qui lui étaient soumis que le tribunal a retenu que le préjudice causé par cette faute doit être entièrement réparé par l'octroi d'une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Que le jugement déféré sera donc confirmé ;

Attendu qu'aux termes des dispositions de l'article 1343-2 nouveau du code civil, applicable à la date à laquelle la Cour statue puisque la loi nouvelle régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisés, la capitalisation des intérêts n'est pas de droit et ne sera pas ordonnée;

Attendu que ROC, succombant entièrement dans ses prétentions, supportera les dépens de la présente procédure et qu'il sera fait application au profit de l'intimée des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise,

Y AJOUTANT,

DÉBOUTE la société BRUNET de sa demande tendant à la capitalisation des intérêts ;

CONDAMNE la société ROC INGÉNIERIE à payer à la société BRUNET la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

CONDAMNE la société ROC INGÉNIERIE aux dépens d'appel,

ACCORDE à Maître A..., avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Mme Irène ASCAR, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/035191
Date de la décision : 15/11/2018
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-11-15;17.035191 ?
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