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08/11/2018 | FRANCE | N°17/012821

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 08 novembre 2018, 17/012821


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 08/11/2018
Me Thierry X...
la Y...

ARRÊT du : 8 NOVEMBRE 2018

No : 373 / 18
No RG : No RG 17/01282 - No Portalis DBVN-V-B7B-FOEF

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLÉANS en date du 22 Mars 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Monsieur Patrick A...
né le [...] [...]
[...]

Ayant pour avocat Maître Thierry X..., avocat au barreau d'Orléans, avocat

postulant et ayant pour avocat plaidant Maître Aurélie B..., membre de la C... , avocat au barreau de MONTPELLIER,

D'UNE PART

I...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 08/11/2018
Me Thierry X...
la Y...

ARRÊT du : 8 NOVEMBRE 2018

No : 373 / 18
No RG : No RG 17/01282 - No Portalis DBVN-V-B7B-FOEF

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance d'ORLÉANS en date du 22 Mars 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Monsieur Patrick A...
né le [...] [...]
[...]

Ayant pour avocat Maître Thierry X..., avocat au barreau d'Orléans, avocat postulant et ayant pour avocat plaidant Maître Aurélie B..., membre de la C... , avocat au barreau de MONTPELLIER,

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE CENTRE
Société coopérative à forme anonyme, directoire et conseil de surveillance (COFAD) prise en la personne de son représentant légal
[...]

représentée par Me Hugues D... de la Y... , avocat au barreau d'ORLEANS substitué par Me Marie-stéphanie E..., avocat au barreau d'ORLEANS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 20 Avril 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 25 Janvier 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 20 SEPTEMBRE 2018, à 9 heures 30, devant Mme Elisabeth HOURS, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Mme Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 8 NOVEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 15 mai 2010, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Loire Centre (la Caisse d'Epargne) a consenti à Monsieur Patrick A... quatre prêts immobiliers :
- no 7707833 d'un montant de 50.000 euros, au taux effectif global (TEG)de 3,89% et au taux nominal de 3,38%,
- no7707834 d'un montant de 26.734,71 euros au TEG de 4,02% et au taux nominal de 3,49%,
- no7707835 d'un montant de 10.000 euros au TEG de 3,53% et au taux nominal de 2,98%,
- no7707836 d'un montant de 20.000 euros au TEG de 3,72% et au taux nominal de 0,265%,
et ce aux fins d'acquérir un immeuble à usage locatif sous le régime d'une vente en l'état futur d'achèvement.

Contestant la régularité des TEG appliqués par la banque, Monsieur A... l'a, le 27 mars 2013, assignée devant le tribunal de grande instance d'Orléans en réclamant la déchéance de son droit à percevoir les intérêts conventionnels et l'application d'intérêts au taux légal et en sollicitant versement d'une indemnité de procédure.

Par jugement en date du 22 mars 2018, le tribunal l'a débouté de l'ensemble de ses demandes, a rejeté la demande de la banque tendant au versement de dommages et intérêts pour procédure abusive et a condamné Monsieur A... à verser une indemnité de procédure de 2.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens.

Monsieur A... a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 20 avril 2018.
Il réclame l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour de constater que la Caisse d'Epargne utilise comme base de calcul une année de 360 jours qui entraîne la nullité du TEG, de prononcer la nullité des TEG, ou à titre subsidiaire, d'ordonner la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et de dire que les prêts sont soumis à l'intérêt légal applicable à la date de leur souscription, de condamner l'intimée à lui reverser les sommes trop perçues et à produire un nouveau tableau d'amortissement, d'ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir et de condamner la banque aux dépens dont distraction au profit de Maître X... ainsi qu'à lui verser la somme de 4.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il reprend en substance devant la cour les arguments présentés devant le premier juge en soutenant de plus qu'il suffit que les calculs de la banque soient différents de ceux prévus par les dispositions du code de la consommation pour entraîner la nullité du taux d'intérêt conventionnel sans qu'il ait à démontrer un préjudice.

La Caisse d'Epargne sollicite la confirmation du jugement déféré, hormis en ce qu'il a rejeté sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive et lui a alloué une indemnité de procédure de 2.000 euros. Elle réclame paiement de 3.000 euros de dommages et intérêts ainsi que d'une indemnité de procédure de première instance de 4.000 euros et demande à la cour d'y ajouter la condamnation de Monsieur A... à lui verser une nouvelle indemnité de procédure de 4.000 euros en cause d'appel ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de Maître D....
Elle fait valoir en substance valoir que le calcul du TEG auquel elle a procédé est exact et ne contrevient donc pas aux dispositions d'ordre public du code de la consommation.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que Monsieur A... ne reprend pas devant la cour le moyen tiré d'une omission des frais de notaire dans le calcul du TEG et, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'argumentation développée par la banque sur ce point, il sera référé à la motivation du jugement attaqué, entièrement approuvée par la cour ;

Attendu que l'irrégularité du calcul du TEG n'entraîne pas sa nullité mais, aux termes de l'ancien article L313-33 du code de la consommation, applicable au litige, a pour seule sanction la substitution du taux légal au taux d'intérêt contractuel ;

Attendu que le premier juge n'a pas fait une application erronée des textes en vigueur mais a au contraire exactement mis en oeuvre leurs dispositions, et que, contrairement à ce que prétend l'appelant, son application des textes n'est pas contraire à la jurisprudence mais confirmée par les décisions de la Cour de cassation ( cf notamment 1re Civ., 15 juin 2016, pourvoi no 15-16.498 Com., 4 juillet 2018, pourvoi no 17-10.349 ) ;

Attendu en effet que l'offre de prêt indique que "les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours » ;

Attendu que, si le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l'intérêt légal, être calculé sur la base de l'année civile, il revient cependant à l'emprunteur de démontrer que le TEG appliqué ne correspond pas à celui qui aurait été obtenu s'il avait été calculé sur la base d'une année civile ( cf arrêts de la Cour de cassation susvisés) ;

Que l'appelant prétend uniquement que " les mêmes intérêts, selon qu'ils soient rapportés à 360 ou 365 jours ne peuvent donner le même taux" en procédant, après avoir rappelé les formules mathématiques complexes prévues pour le calcul du TEG, non à l'application de ces formules, mais à une simple division entre le taux appliqué et le nombre de jours de l'année, ce qui ne correspond à aucun des calculs pouvant être réalisés pour vérifier l'exactitude d'un TEG ;

Que, par ses calculs, Monsieur A... démontre en effet uniquement que le même taux n'aboutit pas au même résultat selon qu'il est divisé par 365 ou par 360, ce qui est une évidence, mais ne justifie aucunement de l'inexactitude du taux qu'il divise alors qu'il lui appartient précisément d'apporter la preuve d'une erreur affectant ce taux ;

Attendu que l'objection de Monsieur A... porte en réalité sur l'écart entre les dates utilisées pour le calcul du TEG ;

Qu'il oublie simplement que cet écart n'est pas de 365 jours ou de 360 jours mais provient d'une division entre un nombre de jours par mois et un nombre de jours par année ;

Que le fait que le dénominateur (nombre de jours par année) ne soit pas le même est indifférent si le numérateur (nombre de jours par mois) n'est pas non plus le même, puisque l'on peut selon le principe de l'égalité de fractions, obtenir le même résultat en opérant deux divisions comportant des chiffres différents ;

Attendu que si, en l'espèce, l'offre de prêt retient une période de 360 jours au lieu de 365 jours, ce qu'un emprunteur non averti peut a priori considérer comme une irrégularité affectant le taux effectif global, il convient cependant de rechercher, si, comme le soutient la banque, le taux effectif global de du prêt est exactement le même que s'il avait été calculé en fonction d'un mois normalisé de 30,41666 jours rapporté à la durée de 365 jours ;

Qu'en effet l'annexe de l'article R. 313-1 du code de la consommation dispose en son paragraphe c) que l'écart entre les dates utilisées pour le calcul est exprimé en années ou en fraction d'année ; qu'une année compte 365 jours ; ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines, ou 12 mois normalisés ; qu'un mois normalisé compte 30,41666 jours (c'est-à-dire 365/12), que l'année soit bissextile ou non ;

Que lorsque les dates d'échéance sont fixées au même jour de chaque mois, comme c'est le cas en l'espèce, le prêteur peut recourir au mois normalisé, ce qui aboutit en réalité à appliquer une fraction du taux annuel mentionné au contrat et donc à calculer les intérêts sur la base de 1/12ème de l'année civile (30,41666/ 365 = 0,08333 = 1/12ème ) sans tenir compte du nombre exact de jours ayant couru entre deux échéances, que les mois de l'année soient de 28, 29, 30 ou 31 jours ;

Que le résultat du calcul des intérêts mensuels est le même que l'on utilise le rapport 30,41666 / 365 (mois normalisé / nombre de jours de l'année) prévu par l'annexe de l'article R 313-1 du code de la consommation ou le rapport 30 / 360 (nombre de jours du mois /360 jours) appliqué en l'espèce par la banque ;

Qu'en effet 30/360 = à 0,08333 et que 30,41666/ 365 = également 0,08333 ;

Qu'il en résulte que la banque qui a calculé le TEG en appliquant la formule :
(capital restant dû x taux nominal) x 30/360
lequel aboutit à un résultat strictement identique à celui que le premier juge a indiqué devoir être appliqué :
(capital restant dû x taux nominal) x 30,41666 /365
a obtenu un TEG conforme aux dispositions légales qui n'est, en conséquence, entaché d'aucune erreur ;

Que le résultat mathématique de ces deux rapports étant identique, la critique formulée par Monsieur A... quant à l'irrégularité du calcul du TEG n'est pas fondée et a été à bon droit écartée par le tribunal, la banque ayant bien opéré un calcul correspondant à l'année civile devant être prise en considération ;

Attendu que l'appelant soutient ensuite que " le tribunal a fait fausse route en conditionnant la sanction de la banque à la démonstration par l'emprunteur d'un préjudice qu'il subirait" et cite à l'appui de cet argument des arrêts de plusieurs cours d'appel ;

Que ce moyen est cependant dépourvu de pertinence puisque les arrêts reproduits dans les écritures de l'appelant sont contraires à la jurisprudence de la Cour de cassation, à laquelle cette cour préfère se référer, laquelle retient que, pour obtenir la substitution du taux d'intérêt légal au taux conventionnel, l'emprunteur doit démontrer que l'erreur aurait conduit à modifier le résultat du calcul stipulé à l'acte de prêt au-delà du seuil légal fixé par l'article R.313-1 du code de la consommation à une décimale ( cf Cass. Com., 18 mai 2017, pourvoi no 16-11.147 ) ;

Que Monsieur A... n'apporte pas cette preuve et que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a écarté ses contestations relatives au TEG ;

Attendu que la Caisse d'Epargne ne fait état d'aucun élément caractérisant l'abus de procédure qu'elle reproche à l'appelant, même si celui-ci, comme de nombreux emprunteurs, a pu croire dans les affirmations de sites Internet peu sérieux ; que le jugement déféré sera donc également confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;

Que le tribunal a fait une juste application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et que le jugement déféré sera en conséquence entièrement confirmé ;

Attendu que Monsieur A..., succombant à l'instance, en supportera les dépens et qu'il sera fait application, au profit de l'appelante, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE Monsieur Patrick A... à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Loire Centre la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur Patrick A... aux dépens d'appel,

ACCORDE à Maître D..., avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Mme Irène ASCAR, Greffier placé , auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/012821
Date de la décision : 08/11/2018
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-11-08;17.012821 ?
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