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08/11/2018 | FRANCE | N°17/011961

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 08 novembre 2018, 17/011961


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 08/11/2018
la SELARL ENVERGURE AVOCATS

ARRÊT du : 08 NOVEMBRE 2018

No : 369 - 18
No RG : No RG 17/01196 - No Portalis DBVN-V-B7B-FN6X

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 28 Mars 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Société CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE NORMANDIE
Pris en la personne de son représentant légal domicilié [...]

reprÃ

©sentée par Maître Corinne Y..., membre de la SELARL ENVERGURE AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

D'UNE PART

INTIMÉ :

Monsi...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 08/11/2018
la SELARL ENVERGURE AVOCATS

ARRÊT du : 08 NOVEMBRE 2018

No : 369 - 18
No RG : No RG 17/01196 - No Portalis DBVN-V-B7B-FN6X

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOURS en date du 28 Mars 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Société CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE NORMANDIE
Pris en la personne de son représentant légal domicilié [...]

représentée par Maître Corinne Y..., membre de la SELARL ENVERGURE AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

D'UNE PART

INTIMÉ :

Monsieur Jérôme Z...
né le [...] à
[...]

Défaillant,

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 12 Avril 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 25 Janvier 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 20 SEPTEMBRE 2018, à 9 heures 30, devant Mme Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Mme Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 8 NOVEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE :

Aux termes d'une offre préalable acceptée le 3 octobre 2012, la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Normandie (la Caisse d'Epargne ou la banque) a consenti à Monsieur Jérôme Z..., un prêt immobilier d'un montant total de 17.199,57 euros remboursable en 300 mensualités au taux effectif global (TEG) de 4,48% et au taux nominal fixe de 4,010%.

Plusieurs échéances étant demeurées impayées, la banque a prononcé la déchéance du terme le 11 décembre 2014 puis a assigné Monsieur Z... le 6 juillet 2015 devant le tribunal d'instance de Tours en réclamant sa condamnation à lui verser la somme de 18.322,33 euros assortie des intérêts au taux conventionnel à compter du 11 décembre 2014.

Par jugement en date du 28 mars 2017, le tribunal a dit recevable l'action engagée par la banque, annulé la stipulation de l'intérêt conventionnel, ordonné la substitution du taux légal, condamné en conséquence Monsieur Z... à payer à la demanderesse la somme de 15.381,65 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2014 et celle de 100 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement. Pour statuer ainsi, il a retenu que l'offre de prêt stipule que les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû au taux d'intérêt indiqué sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours alors qu'en application des dispositions combinées des articles 1907 du code civil, R 313-1,R313-2 et R313-3 du code de la consommation le taux effectif global doit être calculé sur la base d'une année civile de 365 ou 366 jours sous peine de se voir substituer l'intérêt légal.

La Caisse d'Epargne a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 12 avril 2017
Elle demande à la cour de l'infirmer en ce qu'elle a annulé la stipulation de l'intérêt nominal conventionnel et réduit l'indemnité de 7 % et de la confirmer pour le surplus, de condamner en conséquence Monsieur Z... à lui verser la somme de 18.322,33 euros assortie des intérêts au taux conventionnel à compter du 11 décembre 2014, celle de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens de première instance et d'appel comprenant les frais éventuels d'exécution.
Elle fait valoir que, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, le calcul du TEG auquel elle a procédé ne contrevient pas aux dispositions d'ordre public du code de la consommation.

Monsieur Z..., assigné par procès-verbal de recherches infructueuses, n'a pas comparu. Le présent arrêt sera donc rendu par défaut.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que la Caisse d'Epargne a intégralement repris ses écritures de première instance auxquelles il n'y a pas lieu de répondre entièrement en l'absence de Monsieur Z... qui ne réclame pas devant cette cour le prononcé de la nullité du TEG, laquelle n'a pas à être prononcée puisqu'aux termes de l'ancien article L313-33 du code de la consommation applicable au litige, la seule sanction de l'irrégularité du TEG est la substitution du taux légal au taux conventionnel ;

Attendu que l'offre de prêt indique que "les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours »;

Attendu que le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l'acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile ; que cependant, il revient à l'emprunteur de démontrer que le taux nominal et le TEG appliqués ne correspondent pas à celui qui aurait été obtenu s'ils avaient été calculés sur la base d'une année civile ;

Que si, en l'espèce, l'offre de prêt retient une période de 360 jours au lieu de 365 jours, ce qu'un emprunteur non averti peut a priori considérer comme une irrégularité affectant le taux nominal ( et non le TEG), il convient cependant de rechercher, si, comme le soutient la banque, le taux nominal du prêt est exactement le même que s'il avait été calculé en fonction d'un mois normalisé de 30,41666 jours rapporté à la durée de l'année civile et si le TEG n'est affecté d'aucune irrégularité ;

Qu'est exclusivement interdite en effet l'utilisation d'une « année lombarde », dans laquelle montant des intérêts journaliers est calculé sur la base d'une année de 360 jours, puis appliqué pour chaque mois pour sa durée réelle (soit 31, 30, 29 ou 28 jours) ce qui conduit à comptabiliser 365 jours d'intérêts par an selon un taux journalier déterminé sur la base d'une année de 360 jours, et est défavorable à l'emprunteur ;

Attendu que l'annexe de l'article R. 313-1 du code de la consommation dispose en son paragraphe c) que l'écart entre les dates utilisées pour le calcul est exprimé en années ou en fraction d'années ; qu'une année compte 365 jours ; ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines, ou 12 mois normalisés ; qu'un mois normalisé compte 30,41666 jours (c'est-à-dire 365/12), que l'année soit bissextile ou non ;

Que lorsque les dates d'échéance sont fixées au même jour de chaque mois, comme c'est le cas en l'espèce, le prêteur peut recourir au mois normalisé, ce qui aboutit en réalité à appliquer une fraction du taux annuel mentionné au contrat et donc calculer les intérêts sur la base de 1/12ème de l'année civile (30,41666/ 365 = 0,08333 = 1/12ème ) sans tenir compte du nombre exact de jours ayant couru entre deux échéances, que les mois de l'année soient de 28, 29, 30 ou 31 jours ;

Que le résultat du calcul des intérêts mensuels est le même que l'on utilise le rapport 30,41666 / 365 (mois normalisé / nombre de jours de l'année) prévu par l'annexe de l'article R 313-1 du code de la consommation ou le rapport 30 / 360 (nombre de jours du mois /360 jours) appliqué en l'espèce par la banque ;

Qu'en effet 30/360 = à 0,08333 et que 30,41666/ 365 = également 0,08333 ;

Qu'il en résulte que la banque qui a calculé le taux nominal en appliquant la formule :
( capital restant dû x taux nominal) x 30/360
qui aboutit à un résultat strictement identique à
(capital restant dû x taux nominal) x 30,41666 /36
a obtenu un taux nominal conforme aux dispositions légales qui n'est en entaché d'aucune erreur;

Que le résultat mathématique de ces deux rapports étant identique, la critique formulée par Monsieur Z... quant à l'irrégularité du calcul du taux nominal n'était pas fondée et qu'est encore moins fondée leur critique du TEG dépourvue de toute motivation pertinente qui ne pouvait en conséquence être retenue par le tribunal ;

Que ce n'est que surabondamment qu'il sera relevé que le premier juge ne pouvait substituer l'intérêt au taux légal à l'intérêt conventionnel sans démontrer que l'erreur aurait conduit à modifier le résultat du calcul stipulé à l'acte de prêt au-delà du seuil légal fixé par l'article R.313-1 du code de la consommation à une décimale ( cf Cass. 1ère Civ, 1er octobre 2014 no 13–22778), ce qu'il n'a pas fait ;

Attendu que la créance de la banque est ainsi ventilée :
Echéances impayées ....................... 379,56 euros
Capital restant dû.............................16.366, 28 euros
Intérêts sur capital restant dû ............395,86 euros
Frais dossier ..................................... 35,00 euros
Indemnité d'exigibilité 7% ................ 1.145,63 euros
Total = 18.322,33 euros ;

Que l'appelante fait valoir qu'elle aurait dû percevoir une somme supplémentaire de 10.064,75 euros si la déchéance du terme n'avait pas été prononcée et que le contrat s'était poursuivi jusqu'à son terme contractuel alors qu'elle n'a perçu au total à ce titre que la somme de 591,89 euros et qu'elle subit donc une perte de 9.472,86 euros, et elle soutient que l'indemnité de résiliation d'un montant de 1.145,63 euros réclamée n'est en conséquence aucunement excessive ;

Mais attendu que la banque ne prend pas en considération le fait que les sommes qui lui sont dues sont immédiatement exigibles et qu'elle n'a pas à attendre l'expiration du contrat de prêt, en l'espèce 12 octobre 2037, pour les percevoir ; que le paiement de la somme de 9.472,86 euros qu'elle indique avoir perdue était justifié par la durée pendant laquelle les fonds prêtés étaient indisponibles, ce qui n'est plus le cas puisqu'elle peut obtenir paiement 20 ans plus tôt que le terme prévu ;

Que la déchéance du terme n'entraîne dès lors pas pour elle le préjudice dont elle fait état ;

Qu'au regard du taux d'intérêts supérieur à celui aujourd'hui en vigueur, et en l'absence de préjudice spécifique démontré par la banque, il apparaît que la clause pénale est manifestement excessive, ce qui motive sa réduction à la somme d'un euro ;

Que les frais de dossier ne sont pas justifiés ;

Que Monsieur Z... sera donc condamné à verser à la Caisse d'Epargne la somme de 17.14 2,70 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 4,010% sur 16.745,84 euros et au taux légal sur le surplus à compter de la mise en demeure du 11 décembre 2014 ;

Attendu que Monsieur Z..., succombant à l'instance, en supportera les dépens qui ne comprendront pas la part de frais de recouvrement que la loi laisse à la charge du créancier, et qu'il sera fait application, au profit de l'appelante, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME la décision entreprise hormis en ce qu'elle a jugé recevable l'action engagée par la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Normandie et a condamné Monsieur Jérôme Z... aux dépens,

STATUANT À NOUVEAU sur ses autres chefs,

CONDAMNE Monsieur Jérôme Z... à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Normandie la somme de 17.142,70 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de 4,010% sur 16.745,84 euros et au taux légal sur le surplus à compter du 11 décembre 2014,

CONDAMNE Monsieur Jérôme Z... aux dépens d'appel, qui ne comprendront pas la part de frais de recouvrement que la loi laisse à la charge du créancier,

CONDAMNE Monsieur Jérôme Z... à payer à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance de Normandie la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Mme Irène ASCAR, Greffier placé greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/011961
Date de la décision : 08/11/2018
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-11-08;17.011961 ?
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