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08/11/2018 | FRANCE | N°17/011901

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 08 novembre 2018, 17/011901


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 08/11/2018
la X...
la Y...

ARRÊT du : 08 NOVEMBRE 2018

No : 368 - 18
No RG : No RG 17/01190 - No Portalis DBVN-V-B7B-FN6L

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTARGIS en date du 23 Mars 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANT : Timbre fiscal dématérialisé No [...]

Monsieur F... C...
né le [...] [...]
[...]

Représenté par Maître Julie A..., membre de la X... , avocat au barreau de Montargis



D'UNE PART

INTIMÉE : Timbre fiscal dématérialisé No [...]

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE LOIRE
Société Civ...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 08/11/2018
la X...
la Y...

ARRÊT du : 08 NOVEMBRE 2018

No : 368 - 18
No RG : No RG 17/01190 - No Portalis DBVN-V-B7B-FN6L

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Grande Instance de MONTARGIS en date du 23 Mars 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANT : Timbre fiscal dématérialisé No [...]

Monsieur F... C...
né le [...] [...]
[...]

Représenté par Maître Julie A..., membre de la X... , avocat au barreau de Montargis

D'UNE PART

INTIMÉE : Timbre fiscal dématérialisé No [...]

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL CENTRE LOIRE
Société Civile Coopérative à capital et personnels variables, régie par le Livre V du Code Rural, agissant poursuites et diligences de son Directeur en exercice domicilié [...]

Représentée par Maître Cécile B..., membre de la Y... , avocat au barreau de Montargis

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 11 Avril 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 25 Janvier 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 20 SEPTEMBRE 2018, à 9 heures 30, devant Mme Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Mme Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 8 NOVEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

La Caisse Régionale de Crédit Mutuel Centre Loire (le Crédit Mutuel) a consenti à Monsieur F... C... :

- le 24 mars 2005 un prêt immobilier no [...] d'un montant de 50.969 euros pour l'achat d'un immeuble d'habitation,

- le 18 juin 2008 un prêt immobilier no [...] de 57.417 euros pour l'achat d'un immeuble à usage locatif,

- le 8 mars 2010 deux prêts immobiliers no [...] et [...] de montants respectifs de 49.953 euros et de 56.129 euros pour l'achat d'un immeuble à usage d'habitation.
Diverses échéances étant demeurées impayées, la banque a, le 26 octobre 2015, assigné Monsieur C... devant le tribunal de grande instance de Montargis afin d'obtenir paiement des sommes qui lui étaient dues après prononcé de la déchéance du terme intervenue le 24 août 2015.

Par jugement en date du 22 mars 2017, le tribunal, statuant sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a condamné le défendeur à verser au Crédit Mutuel :
- 9.497,12 euros outre intérêts conventionnels de 1,45% et indemnité contractuelle de 4% au titre du prêt [...]
- 22.912,65 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,72% et indemnité contractuelle de 4% au titre du prêt [...]
-29038,42 euros outre intérêts au taux conventionnel de 3,56% et indemnité contractuelle de 4% au titre du prêt [...]
- 31.857 euros outre intérêts conventionnels de 1,70% et indemnité contractuelle de 4%, au titre du prêt [...]

les intérêts assortissant ces condamnations commençant à courir le 25 août 2015 et étant capitalisés.
Le tribunal a par ailleurs déclaré recevable l'action en responsabilité contractuelle engagée par Monsieur C... mais l'en a débouté.

Monsieur C... a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 11 avril 2017.
Il en poursuit l'infirmation en demandant à la cour de condamner le Crédit Mutuel à lui payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour octroi de concours abusifs, de lui allouer une indemnité de procédure de 7.500 euros et de condamner l'intimée aux dépens dont distraction au profit de la SCPA E... A... D.... A titre subsidiaire, il demande à la cour de réduire à un euro symbolique le montant de l'indemnité contractuelle et de rejeter la demande tendant à la capitalisation des intérêts.
Il fait valoir qu'il "existe en l'espèce un évident manquement répété au devoir de conseil et de mise en garde du banquier, dont la conséquence consiste en la perte de chance pour l'acquéreur de renoncer à contracter" et il détaille ses revenus et charges.

Le Crédit Mutuel conclut à la confirmation du jugement déféré, sauf en ce qu'il a déclaré recevable la demande en paiement de dommages et intérêts formée par Monsieur C... et a réduit à 4% le montant de l'indemnité contractuelle due au titre des quatre prêts. Elle demande à la cour de déclarer irrecevable comme prescrite la demande tendant au paiement de dommages et intérêts et sollicite condamnation de l'appelant à lui verser :
- 10.161,50 euros au titre du prêt [...]
- 24.513,08 euros au titre du prêt [...]
- 31.067,63 euros au titre du prêt [...]
- 34.085,33 euros au titre du prêt [...]
avec capitalisation des intérêts.

A titre subsidiaire il demande à la cour de retenir que l'appelant était un emprunteur averti et que le prêteur n'était pas tenu d'une obligation de conseil à son égard, ou de juger qu'il n'a commis aucun manquement à une obligation de conseil et de débouter Monsieur C... de sa demande en paiement de dommages et intérêts. En tout état de cause, il sollicite 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamnation de Monsieur C... à supporter les dépens, dont distraction au profit de Maître B....

Il soutient que le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité engagée à son encontre est la date de la conclusion des contrats de prêts ; que le prêt le plus récent a été souscrit en 2010 et que l'appelant a formé pour la première fois une demande en paiement de dommages et intérêts dans ses écritures signifiées le 7 avril 2016, soit après que le délai de prescription soit écoulé.

Il souligne subsidiairement que, si les deux derniers prêts ont été souscrits pour l'achat d'un immeuble d'habitation, le bien acquis était en réalité à usage locatif, l'appelant résidant toujours à la même adresse, qui est celle de l'immeuble financé par le premier prêt ; que ces faits sont confirmés par sa déclaration de revenus qui fait apparaître qu'il détient des parts de SCI et est par ailleurs propriétaire de deux biens à usage locatif ; que les nombreux achats et les revenus fonciers de Monsieur C... démontrent qu'il était coutumier de l'achat d'immeuble à des fins locatives et était en conséquence un emprunteur averti envers lequel elle n'était tenue d'aucun devoir de conseil. Il fait valoir que l'appelant ne démontre aucunement l'existence du vice du consentement dont il fait état et qui ne résulte que de ses seules affirmations ; qu'en tout état de cause et ainsi que l'a retenu le tribunal, Monsieur C... ne courait pas de risque particulier d'endettement puisque, célibataire et sans charges particulières, il percevait des revenus mensuels de 5.276 euros en 2004, de 3.054 euros en 2006 et de 3.579 euros en 2009, et, en sus de ses biens immobiliers, détenait une épargne de 200.000 euros. Il souligne que l'appelant n'apparaît pas plus endetté aujourd'hui puisque la saisie conservatoire de ses comptes titres a permis de vérifier qu'il bénéficiait d'avoirs de l'ordre de 25.000 euros qui lui auraient permis d'honorer les échéances des prêts qui sont demeurées impayées ; qu'il ne peut prétendre ne plus détenir de patrimoine immobilier alors que la banque a fait inscrire deux hypothèques et il fait observer que, si Monsieur C... avait vendu ses immeubles, il aurait dû rembourser le solde des prêts avec les fonds obtenus.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que l'appelant fait exclusivement état d'un "manquement répété au devoir de conseil et de mise en garde du banquier, dont la conséquence consiste en la perte de chance pour l'acquéreur de renoncer à contracter";

Que ce n'est que lorsqu'une caution engage une action en responsabilité que la prescription commence à courir à compter du jour où il lui est demandé d'honorer ses engagements mais que le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde envers l'emprunteur, consistant en une perte de chance de ne pas contracter, se manifeste envers l'emprunteur dès l'octroi des crédits (cf notamment Cass. civ. 1, 15 février 2005, no 03-11.979 et Cass com. 25 octobre 2017 no16-15.116) ; Que les premières conclusions par lesquelles Monsieur C... a recherché la responsabilité de la banque ont été notifiées à cette dernière le 7 avril 2016, c'est-à-dire après l'expiration du délai de prescription ;

Qu'en effet, la loi ayant réformé la prescription a réduit de 10 ans à 5 ans la prescription applicable au premier prêt souscrit en 2005 et a donc, en application de l'article 2222 du code civil, fait courir un nouveau délai de 5 années à compter de son entrée en vigueur ;

Qu'en conséquence l'action fondée sur un manquement de la banque à son obligation de mise en garde était prescrite le 19 juin 2013 pour les deux premiers prêts et le 9 mars 2015 pour les deux derniers et que le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il l'a déclarée recevable ;

Que ce n'est que surabondamment qu'il sera relevé que l'appelant ne communique aucune pièce et aucune contestation à l'appui de ses dires d'agissements dolosifs du prêteur qui l'aurait convaincu de contracter de nouveaux crédits alors que sa situation financière était déjà très obérée ;

Attendu que le Crédit Mutuel ne conteste pas que l'indemnité contractuelle de 7% prévue dans chacun des prêts consentis à l'appelant est une clause pénale pouvant être réduite par le juge ;

Qu'il fait cependant état d'un préjudice résultant du bouleversement de l'économie des contrats du fait de la résiliation anticipée ;

Mais attendu que cette résiliation lui permet d'être immédiatement créancier des fonds prêtés qu'il n'aurait reçus qu'à la fin des prêts si ceux-ci étaient parvenus à terme et que c'est en faisant une exacte appréciation des situations respectives des parties que le premier juge a retenu que les clauses pénales contractuelles étaient manifestement excessives et les a réduites à 4% en tenant compte u caractère spéculatif des placements opérés par l'appelant ;

Attendu que la capitalisation annuelle des intérêts est contractuellement prévue et que Monsieur C... n'expose pas sur quel fondement il demande à la cour de l'écarter ;

Attendu que Monsieur C..., succombant à l'instance, en supportera les dépens et qu'il sera fait application au profit de l'intimé des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise, hormis en ce qu'elle a déclaré recevable l'action en responsabilité contractuelle intentée par Monsieur F... C... et l'en a débouté,

STATUANT À NOUVEAU de ces seuls chefs,

DÉCLARE irrecevable comme prescrite l'action en responsabilité pour manquement au devoir de conseil engagée par Monsieur F... C... à l'encontre de la Caisse Régionale de Crédit Mutuel Centre Loire,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE Monsieur F... C... à payer à la Caisse Régionale de Crédit Mutuel Centre Loire la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

CONDAMNE Monsieur F... C... aux dépens d'appel,

ACCORDE à Maître B..., avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Mme Irène ASCAR, Greffier placé greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/011901
Date de la décision : 08/11/2018
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-11-08;17.011901 ?
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