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18/10/2018 | FRANCE | N°16/028371

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 18 octobre 2018, 16/028371


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 18/10/2018
la X...
la SELARL A7 AVOCATS

ARRÊT du : 18 OCTOBRE 2018

No : 326 - 18 No RG : No RG 16/02837

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal d'Instance d'ORLÉANS en date du 2 Mai 2016

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SA FINANCO
agissant poursuites et diligences de son représentants légal domicilié [...]

représentée par Maître Pierre Y..., membre de la X... , avocat au barr

eau d'ORLEANS, avocat postulant et ayant pour avocat plaidant la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOËT, avocats au barreau de l'ESSO...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 18/10/2018
la X...
la SELARL A7 AVOCATS

ARRÊT du : 18 OCTOBRE 2018

No : 326 - 18 No RG : No RG 16/02837

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal d'Instance d'ORLÉANS en date du 2 Mai 2016

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SA FINANCO
agissant poursuites et diligences de son représentants légal domicilié [...]

représentée par Maître Pierre Y..., membre de la X... , avocat au barreau d'ORLEANS, avocat postulant et ayant pour avocat plaidant la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOËT, avocats au barreau de l'ESSONNE,

D'UNE PART

INTIMÉS : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Madame Elodie D... épouse Z...
née le [...] [...]
[...]

représentée par Maître Virginie A..., avocat au barreau d'ORLEANS, avocat postulant et ayant pour avocat plaidant Maître Ariane B..., membre de la SELARL A7 AVOCATS, avocat au barreau de PARIS,

Monsieur Arnaud Z...
né le [...] [...]
[...]

représentée par Maître Virginie A..., avocat au barreau d'ORLEANS, avocat postulant et ayant pour avocat plaidant Maître Ariane B..., membre de la SELARL A7 AVOCATS, avocat au barreau de PARIS,

SAS REV'SOLAIRE
prise en la personne de son mandataire judiciaire, Maître C..., [...]
[...]

Défaillante

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 26 Août 2016
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 14 Juin 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 06 SEPTEMBRE 2018, à 9 heures 30, devant Mme Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Mme Irène ASCAR, Greffier placé lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 18 OCTOBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur Arnaud Z... et son épouse, Madame Elodie D... , ont, le 12 mai 2012, conclu avec la société Rev'Solaire un contrat de fourniture et de pose d'une installation photovoltaïque moyennant le prix de 30.500 euros financé par un crédit du même montant souscrit le même jour auprès de la société FINANCO.

Après que Rev'Solaire ait été placée en liquidation judiciaire, ils ont assigné Maître C... ès qualités de liquidateur de cette société et FINANCO devant le tribunal d'instance de Tours afin de voir prononcer la résolution ou la nullité des contrats de vente et de prêt et obtenir restitution de toutes les sommes versées.

Par jugement en date du 3 novembre 2015, le tribunal a déclaré nuls les contrats de vente et de prêt et ordonné, pour le surplus, la réouverture des débats avec vérification d'écritures de l'attestation de livraison et invitation des parties à s'expliquer sur la recevabilité de la demande formée envers le liquidateur à la liquidation judiciaire de Rev'Solaire aux fins d'obtenir sa condamnation à retirer l'installation litigieuse.

Par jugement en date du 2 mai 2016 le tribunal a dit que FINANCO a commis une faute lors du déblocage des fonds, retenu que cette faute la prive du droit à percevoir le capital emprunté, condamné FINANCO à restituer aux demandeurs le montant des échéances déjà payées, déclaré irrecevable la demande des époux Z... tendant à obtenir la condamnation de la liquidation de Rev'Solaire à démonter l'installation litigieuse et condamné FINANCO à verser une indemnité de procédure de 500 euros.

FINANCO a relevé appel de cette décision.

Elle conclut à son infirmation et demande à la cour de condamner solidairement Monsieur et Madame Z... à reprendre immédiatement le paiement des échéances du prêt, avec remboursement de toutes les échéances impayées depuis le prononcé du jugement, sous peine de déchéance du terme et d'exigibilité de l'intégralité de la créance de les débouter de leurs demandes. Si la cour prononçait cependant la nullité ou la résolution du contrat de crédit, par suite de la nullité ou de la résolution du contrat de vente, ou pour toute autre raison, elle réclame condamnation des intimés à lui rembourser la somme de 30.500 euros, montant du capital emprunté en soutenant qu'elle n'a commis aucune faute et que les emprunteurs n'ont subi aucun préjudice. Elle demande que les échéances payées lui restent acquises à titre de dommages et intérêts, et réclame en tout état de cause condamnation solidaire de Monsieur et Madame Z... à lui verser 3.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.

Elle souligne tout d'abord la mauvaise foi des époux Z... qui ont contesté leur signature avant que le tribunal se livre à une comparaison de signature qui a mis en évidence que l'attestation de fin de travaux portait la signature de Madame Z....

Elle soutient que les intimés ne démontrent aucunement l'existence d'un dol ou d'un non respect des dispositions du code de la consommation et qu'en tout état de cause, les éventuelles nullités du contrat principal ont été couvertes par la confirmation résultant des agissements des époux Z... postérieurement à la conclusion du contrat.
Elle prétend que les intimés ont agi en qualité d'auteurs d'actes de commerce leur conférant à titre professionnel la qualité de commerçants et qu'il doit en conséquence être fait application des dispositions du code de commerce et, à défaut de textes spécifiques, des dispositions du code civil mais en aucun cas les dispositions du code de la consommation. Elle somme les intimés, qui n'ont pas respecté sur ce point l'ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état de verser aux débats :
- Le contrat passé avec ERDF,
- Le contrat passé avec EDF
- Les facturations adressées à EDF pour les années 2012 a 2016

Elle fait également valoir que les époux Z... n'ont pas valablement déclaré leurs créances et seraient en conséquence irrecevables en leurs demandes.
Si la cour appliquait les dispositions du code de la consommation elle fait valoir qu'au-dessus de leur signature, il est indiqué : . Je déclare être d'accord et reconnais avoir pris connaissance des articles L121-21 à L121-32 du code de la consommation (verso) applicables lors de la vente à domicile. Je reconnais avoir reçu un exemplaire du présent contrat doté du formulaire de rétractation" ; qu'il n'existe aucun vice du consentement et a fortiori de vice déterminant. ; que la banque, qui n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client, ne peut en aucun cas lui interdire de souscrire le bon de commande et qu'elle pourrait uniquement le mettre en garde et l'avertir des causes de nullités flagrantes ; que les conséquences du manquement au devoir de mise en garde entraînent tout au plus la perte d'une chance pour l'emprunteur de ne pas souscrire le bon de commande ; qu'en l'espèce, même si les écritures des intimés font état du scandale parfois causé par une installation non raccordée, le raccordement est intervenu et les époux Z... produisent et revendent de l'électricité.

Monsieur et Madame Z... soutiennent que les dispositions du code de la consommation sont bien applicables au litige et prétendent à titre subsidiaire que FINANCO aurait frauduleusement indiqué qu'étaient applicables les dispositions du code de la consommation pour obtenir leur consentement au contrat. Ils sollicitent l'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit et demandent à la cour de retenir que le prêteur a commis une faute en libérant les fonds, ce qui le prive de son droit à restitution du capital prêté. En tout état de cause, ils réclament paiement d'une indemnité de procédure de 3.500 euros et condamnation des autres parties à supporter les dépens.
Ils font valoir que le bon de commande ne mentionne pas la marque de l'onduleur ni la superficie des panneaux, ni le nom du fournisseur, ni l'adresse de ce dernier, ni le prix unitaire du matériel et la référence du prix de revente à ERFDF ; qu'en tout état de cause la venderesse a commis un dol en leur dissimulant ces éléments, ce qui a été déterminant dans l'obtention de leurs consentements et leur a promis un autofinancement qui se révèle impossible. Ils prétendent que FINANCO a commis une faute en débloquant les fonds alors que l'installation n'était pas raccordée et ne pouvait pas l'être au regard du délai écoulé depuis la commande, peu important qu'ils aient signé une attestation de fin de travaux.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que la cour est exclusivement saisie de l'appel d'un jugement du 2 mai 2016 et non du jugement précédant en date du 3 novembre 2015 qui, avant dire droit, a annulé les contrats de vente et de crédit ;

Que l'intégralité des écritures des parties sur l'application au litige du code de la consommation - qui a déjà été appliqué par le jugement du 3 novembre 2015 ayant autorité de la chose jugée, comme sur la nullité ou la résolution du contrat sont dès lors sans objet et n'ont pas à être ici examinées, la cour ne pouvant que constater que les deux contrats de vente et de prêt sont irrévocablement annulés ;

Qu'ainsi que l'a déjà rappelé le conseiller de la mise en état, la seule question demeurant en litige est celle de la faute commise par le prêteur lors de la libération des fonds et du préjudice qui en serait résulté pour les emprunteurs ;

Attendu que la nullité du contrat de crédit entraîne la remise des parties en l'état antérieur à sa conclusion et donc le remboursement, par les emprunteurs, du capital versé en leur nom par FINANCO à la société Rev'Solaire sauf pour Monsieur et Madame Z... à démontrer l'existence d'une faute privant l'établissement prêteur de sa créance de restitution;

Que les intimés font à bon droit valoir que le prêteur a fautivement omis de vérifier l'opération qu'il finançait alors qu'à la simple lecture du bon de commande, il aurait dû constater les carences que celui-ci présentait au regard des dispositions protectrices du consommateur, se persuader ainsi que le contrat principal s'en trouvait nul ou à tout le moins annulable, et refuser en conséquence de mettre les fonds à la disposition du vendeur ;

Mais attendu que les époux Z... prétendent sans pertinence qu'ils n'ont pas à démontrer l'existence d'un préjudice au motif que les dispositions de l'article L 311-31 du code de la consommation du code de la consommation prévoient que le prêteur est privé de son droit à restitution lorsqu'il s'est fautivement libéré des fonds ;

Que ces dispositions devenues dans des termes inchangés les articles L 312-48 et L 312-49 du code de la consommation prévoient cependant uniquement que "Les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ; en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci. Le vendeur ou le prestataire de services doit conserver une copie du contrat de crédit et le présenter sur leur demande aux agents chargés du contrôle" ;

Qu'elles n'édictent pas une sanction de déchéance du droit à réclamer paiement des sommes dues lorsque la livraison du bien ou la fourniture de la prestation est réellement intervenue comme tel est le cas en l'espèce ;

Que par ailleurs, aux termes de la jurisprudence, une faute, quelle qu'elle soit, n'entraîne une sanction que lorsqu'elle a causé un préjudice né et actuel que, non seulement les juges doivent apprécier mais qu'ils doivent également caractériser ;

Que, si la privation de la créance de restitution invoquée par les appelants sanctionne habituellement la faute commise par le prêteur, c'est parce qu'elle répare le préjudice tenant à ce que les emprunteurs se retrouvent en situation de devoir payer le prix d'une installation qui n'a jamais été en mesure d'assurer correctement sa fonction, sans perspective de se retourner utilement contre leur fournisseur en déconfiture alors que la livraison du bien n'est pas effectivement intervenue ;

Que tel n'est pas le cas de Monsieur et Madame Z... dont le préjudice ne peut résulter du seul versement à la société REV SOLAIRE du capital emprunté alors qu'ils bénéficient également d'une installation en parfait état de marche qu'ils n'ont payée que grâce aux fonds remis par le prêteur ;

Qu'en effet, s'ils n'ont pas déféré à l'injonction du conseiller de la mise en état de communiquer le contrat de revente conclu avec ERDF et l'ensemble des factures émises entre 2012 et 2016 au titre de la revente d'énergie, il n'en demeure pas moins qu'il est justifié, par la communication d'une facture unique de revente au titre de l'année 2013-2014 que l'installation est reliée au réseau, qu'elle fonctionne et qu'elle leur rapporte des revenus annuels d'au moins 1.500 euros ;

Que les intimés dénient sans bonne foi l'existence du raccordement de leur installation et qu'il sera retenu qu'ils bénéficient de panneaux photovoltaïques efficaces, sûrs et correctement installés, puisque ERDF a vérifié l'installation qui produit de l'énergie commercialisée ;

Que leur préjudice n'est pas caractérisé par une rentabilité moindre que celle espérée puisqu'une telle rentabilité n'était pas contractuellement garantie ;

Qu'il est moins que vraisemblable que la société Rev'Solaire, en liquidation judiciaire, pourra procéder au démontage de l'installation et que Monsieur et Madame Z... continuent d'ailleurs à bénéficier de leur installation photovoltaïque et à revendre l'énergie produite, alors que la nullité du contrat de vente a été prononcée il y a trois ans ;

Que le préjudice qui pourrait résulter de la reprise par la société liquidée de l'installation litigieuse n'est dès lors pas né et actuel et qu'il est très peu vraisemblable qu'il naisse un jour, de sorte que ce préjudice purement hypothétique n'est pas réparable ;

Que les emprunteurs ne subissent aujourd'hui aucun dommage résultant de l'absence de certaines des indications devant être portées sur le bon de livraison et de l'annulation subséquente du contrat de vente et qu'en l'absence de préjudice démontré, ils ne peuvent réclamer qu'il soit jugé que le prêteur est privé du droit de solliciter paiement de sa créance de restitution du cpial emprunté ;

Que le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef et que Monsieur et Madame Z... seront condamnés à rembourser à FINANCO la somme de 30.500 euros correspondant au capital emprunté ;

- demande de dommages et intérêts :

Attendu que FINANCO ne fait état d'aucun élément caractérisant l'abus de procédure qu'elle reproche aux intimés et sera déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;

Qu'elle ne fait état d'aucun autre préjudice justifiant que les échéances déjà versées devront lui rester acquises à titre de dommages et intérêts complémentaires et que ces échéances devront s'imputer par compensation sur le capital restant dû ;

Attendu qu'il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort

INFIRME la décision entreprise,

STATUANT À NOUVEAU

CONDAMNE solidairement Arnaud Z... et son épouse, Madame Elodie D... à payer à la société FINANCO la somme de 30.500 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt,

DÉBOUTE la société FINANCO de ses demandes en paiement de dommages et intérêts,

CONDAMNE in solidum Arnaud Z... et son épouse, Madame Elodie D... à payer à la société FINANCO la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum Arnaud Z... et son épouse, Madame Elodie D... aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Mme Irène ASCAR, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 16/028371
Date de la décision : 18/10/2018
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-10-18;16.028371 ?
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