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27/09/2018 | FRANCE | N°17/008381

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 27 septembre 2018, 17/008381


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 27/09/2018
la SCP BERTRAND RADISSON BROSSAS
Me Olivier Y...
ARRÊT du : 27 SEPTEMBRE 2018

No : 289 - 18 No RG : No RG 17/00838

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de Blois en date du 13 Janvier 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Société CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE SAINT JEAN DE BRAYE
[...]

représentée par Me Philippe Z... de la SCP BERTRAND RADISSON BROSSAS, avocat

au barreau d'ORLEANS
plaidant par Me A... Christiane, du barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉ : - Timbre fiscal dématér...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 27/09/2018
la SCP BERTRAND RADISSON BROSSAS
Me Olivier Y...
ARRÊT du : 27 SEPTEMBRE 2018

No : 289 - 18 No RG : No RG 17/00838

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce de Blois en date du 13 Janvier 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Société CAISSE DE CRÉDIT MUTUEL DE SAINT JEAN DE BRAYE
[...]

représentée par Me Philippe Z... de la SCP BERTRAND RADISSON BROSSAS, avocat au barreau d'ORLEANS
plaidant par Me A... Christiane, du barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉ : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

Monsieur Christian B...
né le [...] [...]
[...]

représenté par Me Olivier C..., avocat au barreau de BLOIS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 15 Mars 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 23 novembre 2017

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 21 JUIN 2018, à 9 heures 30, devant Mme Elisabeth HOURS, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame BERGES, lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 27 SEPTEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Exposé du litige :

Selon acte sous seing privé en date du 5 juin 2009, la S.A.R.L. ADM a souscrit la modification de son compte courant ouvert dans les livres de la Caisse de Crédit Mutuel de Saint Jean de Braye (le Crédit Mutuel) en concluant une convention d'autorisation de découvert.

Par acte sous seing privé en date du 5 février 2010, Monsieur Christian B..., gérant de la société, s'est porté caution solidaire au titre du découvert du compte courant à hauteur de 24.000 euros et pour la durée de "03-2013".

Selon acte distinct du 5 février 2010 comportant la mention d'un engagement de caution de Monsieur B... à hauteur de 11.886 euros pour une durée de 36 mois, la S.A.R.L. ADM a souscrit auprès de la même banque un prêt de 9.905 euros remboursable en 36 mensualités au taux annuel de 3,99%.

Par jugement du tribunal de commerce de Blois en date du 18 janvier 2013, la société ADM a été placée en redressement judiciaire, procédure qui a été convertie en liquidation judiciaire par nouvelle décision du 15 janvier 2014.

Le Crédit Mutuel a régulièrement déclaré ses créances et Monsieur B... a reconnu sa dette en proposant un plan de règlement amiable non suivi d'effet.

La banque a alors obtenu le 26 mai 2015 la délivrance, par le président du tribunal de commerce de Blois, d'une ordonnance faisant injonction à Monsieur B... de lui payer la somme de 25.902,92 euros.

Monsieur B... ayant formé opposition à cette ordonnance, le tribunal de commerce de Blois, par jugement en date du 13 janvier 2017 prononcé sous le bénéfice de l'exécution provisoire, l'a condamné à verser au Crédit Mutuel la somme de 1.902,92 euros au titre de son premier engagement de caution mais à débouté le Crédit Mutuel du surplus de ses demandes en retenant que la mention manuscrite portée sur l'engagement de caution n'est pas conforme aux dispositions de l'article L 341-2 du code de la consommation puisque ensuite de la phrase "pour la durée de" a été portée la mention "03 -2013". Le tribunal a fixé le point de départ des intérêts au taux légal à compter de la date de la liquidation, ordonné la capitalisation des intérêts et rejeté les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Crédit Mutuel a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 15 mars 2017.

Les dernières écritures des parties, prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du code de procédure civile, ont été déposées :
- le 10 octobre 2017 par l'appelante
- le 6 juillet 2017 par l'intimé.

Le Crédit Mutuel conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur B... au titre de son engagement de caution du prêt, mais à son infirmation sur le surplus en demandant à la cour de condamner l'intimé à lui verser 24.000 euros au titre de son engagement de caution concernant le solde débiteur du compte courant à compter du 2 octobre 2015 avec capitalisation des intérêts et une indemnité de procédure de 3.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de la SCP BERTRAND , RADISSON, BROSSAS.
Il fait valoir qu'ainsi que l'a retenu le tribunal, le premier engagement de Monsieur B... est valable puisque sa signature est apposée entre l'offre de prêt et la mention manuscrite de cautionnement et que le second l'est tout autant, la mention d'un cautionnement prenant fin en mars 2013 n'affectant ni le sens ni la portée de l'engagement de Monsieur B....

Monsieur B... conclut, au contraire de l'appelante, à l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a condamné au titre de son engagement de caution du prêt mais à sa confirmation pour le surplus réclamant donc le rejet de toutes les demandes formées à son encontre ou, subsidiairement, la déchéance du prêteur de son droit à réclamer paiement faute d'information annuelle de la caution. En tout état de cause, il sollicite paiement d'une indemnité de procédure de 2.000 euros et la condamnation du Crédit Mutuel aux dépens.
Il soutient que la mention " 03.2013" n'est pas une durée valable de cautionnement mais au mieux un terme au demeurant tout à fait imprécis puisqu'on ne peut savoir à quelle date exacte il prend effet, ce qui rend l'engagement indéterminé et indéterminable ; que le Crédit Mutuel indique d'ailleurs que l'engagement est de trois ans mais que, le prêt ayant été consenti le 5 février 2010, la garantie devrait expirer le 6 février 2013 et non en mars. A titre subsidiaire et à supposer l'acte de caution opposable, il fait valoir que la convention de compte courant ne peut faire office d'autorisation de découvert ; que l'indication de l'adoption de la formule "souplesse pro" ne permet pas de connaître le plafond de ce découvert, de sorte que ses engagements contractuels étaient, là encore, indéterminés et, qu'aucune convention n'ayant été établie, il ne peut la cautionner. Il fait par ailleurs valoir que les mentions manuscrites de l'engagement de caution ne sont pas signées par lui et qu'il n'a approuvé que l'offre de prêt.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu qu'aux termes de l'article 2292 du code civil, le cautionnement ne se présume pas ; qu'il doit être exprès et ne peut être étendu au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ;

Qu'en application de l'article L. 341-2 du code de la consommation, toute personne physique qui s'engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : "En me portant caution de SCP BERTRAND, dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si SCP BERTRAND n'y satisfait pas lui-même." ;

Qu'après avoir exigé, à peine de nullité du cautionnement, une rédaction de la mention manuscrite strictement conforme aux prescriptions légales, la jurisprudence a assoupli sa position et opère une distinction entre les mentions manuscrites emportant la nullité et celles qui, bien que ne correspondant pas exactement au texte rappelé ci-dessus, permettent à la caution de mesurer la portée exacte de son engagement et d'en comprendre le sens ;

Attendu en ce qui concerne le cautionnement consenti le 5 février 2010 au titre du découvert du compte courant à hauteur de 24.000 euros et pour la durée de "03-2013", qu'il ne saurait être prétendu par la caution que la convention d'autorisation de découvert conclue entre la banque et la société ADM n'aurait pas été assez précise pour comprendre la portée de ses engagements ;

Qu'en effet Monsieur B... ne s'est pas porté caution pour l'intégralité de ce découvert, quel qu'il soit, mais exclusivement à hauteur de 24.000 euros, ce qui déterminait très précisément le montant cautionné, peu important en conséquence que le montant exact de l'autorisation de découvert consentie à ADM soit ou non supérieur à ce montant ;

Que la mention manuscrite que Monsieur B... a portée pour matérialiser son engagement comporte une erreur sur la durée de cet engagement puisqu'elle se réfère non pas à une durée indiquée en mois mais au terme de la garantie ;

Que cette erreur purement matérielle dans la rédaction de la mention légale est cependant sans conséquence puisque l'indication "03-2013" permettait sans contestation possible de permettre à Monsieur B... de comprendre qu'il s'engageait envers le Crédit Mutuel jusqu'en mars 2013, et, en l'absence de précision sur le jour, jusqu'au premier mars 2013 à 0 heure ;

Que l'erreur ainsi commise est minime et ne modifie ni le sens ni la portée de l'engagement de caution ;

Qu'il convient dès lors, par infirmation du jugement déféré, de retenir la validité de ce cautionnement et de condamner Monsieur B... à payer au Crédit Mutuel la somme de 24.000 euros ;

Attendu en ce qui concerne le cautionnement donné au titre du prêt consenti à la société ADM que, si Monsieur B... a approuvé les conditions du prêt en sa qualité de gérant de cette société en portant sa signature sous le contrat de prêt, il a ensuite rédigé un engagement manuscrit de caution qu'il n'a pas signé ;

Que la signature du gérant d'une société sous un acte de prêt ne saurait valoir approbation d'une mention distincte de son engagement de caution portée ensuite dans le même document sans avoir été signé, ces deux engagements étant entièrement distincts l'un de l'autre et l'approbation du premier signé par le représentant légal d'une société au nom de celle-ci ne pouvant à l'évidence valoir approbation du second pris en son nom personnel et non signé ;

Qu'il convient dès lors de retenir l'absence de validité de ce cautionnement et d'infirmer à nouveau le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Monsieur B... à verser au Crédit Mutuel la somme de 1.902,92 euros au titre de cet engagement ;

Attendu que Monsieur B... soutient par ailleurs sans pertinence que la banque n'a pas respecté son obligation d'information annuelle de la caution puisque le Crédit Mutuel produit les courriers qui lui ont été adressés les 16 février 2011, 2012, 2013 et 2014 et qu'il ne conteste pas les avoir reçus ;
Qu'il sera dès lors débouté de sa demande tendant à voir déchoir le prêteur de son droit à percevoir les intérêts conventionnels ;

Attendu que le Crédit Mutuel sollicite paiement d'intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2014, date de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire ;

Qu'il sera fait droit à cette demande puisque la banque justifie avoir adressé une mise en demeure à Monsieur B... le 15 janvier 2013, soit avant l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, puis le 31 mars 2014, et qu'elle produit, sous sa pièce no9 le courrier qui lui a été adressé en réponse par l'intimé le 10 avril 2014 confirmant son information de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire le 15 janvier 2014 et indiquant souhaiter l'élaboration d'un plan de règlement ;

Qu'aux termes des dispositions de l'article 1343-2 nouveau du code civil, applicable à la date à laquelle la cour statue puisque la loi nouvelle régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisés, la capitalisation des intérêts n'est pas de droit et ne sera pas ordonnée ;

Attendu que Monsieur B..., succombant à l'instance, en supportera les entiers dépens et qu'il sera fait application au profit de l'appelante des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME la décision entreprise hormis en ce qu'elle a mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer,

STATUANT À NOUVEAU sur ses autres chefs,

CONDAMNE Monsieur Christian B... à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de Saint Jean de Braye la somme de 24.000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2014,

DEBOUTE la Caisse de Crédit Mutuel de Saint Jean de Braye de ses autres prétentions,

CONDAMNE Monsieur Christian B... à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de Saint Jean de Braye la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur Christian B... aux dépens de première instance et d'appel,

ACCORDE à la SCP BERTRAND , RADISSON, BROSSAS, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Madame BERGES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/008381
Date de la décision : 27/09/2018
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-09-27;17.008381 ?
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