COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 27/09/2018
la SELARL CASADEI-JUNG
la SELARL LUGUET DA COSTA
ARRÊT du : 27 SEPTEMBRE 2018
No : 285 - 18 No RG : No RG 17/00704
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLÉANS en date du 03 Mai 2016
PARTIES EN CAUSE
APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé No: 1265191912428075
Monsieur X... Y...
né le [...] à [...] [...]
représenté par avocat Me Emmanuel Z... de la SELARL CASADEI-JUNG, avocat au barreau d'ORLEANS susbtitué par Me Mathilde A..., cabinet CASADEI, du barreau d'ORLEANS ;
D'UNE PART
INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265192442167482
SA CREDIT DU NORD
Société Anonyme au capital de 890.263.248 €, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LILLE sous le numéro 456 504 851, dont le siège social est situé [...] , agissant en la personne de son représentant légal domicilié [...]
représentée par Me B... DA COSTA de la SELARL LUGUET DA COSTA, avocat au barreau d'ORLEANS ;
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL en date du : 24 Février 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 23 novembre 2017
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 21 JUIN 2018, à 9 heures 30, devant Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre, en son rapport, par application de l'article 786 du code de procédure civile.
Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité,
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,
Greffier :
Greffier ayant assisté aux débats : Madame Guyveline BERGES,
Greffier ayant assisté au prononcé délibéré : Madame Irène ASCAR, Greffier placé,
ARRÊT :
Prononcé le 27 SEPTEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE
Suivant acte du 30 septembre 2010 le CRÉDIT DU NORD a consenti à la société BRASSERIE LE TRIANON une facilité de trésorerie de 15.000 euros dont le gérant Monsieur X... Y..., s'est porté caution pour une durée de 7 ans à hauteur de la somme de 19.500 euros.
Par acte du 26 novembre 2010, le CRÉDIT DU NORD a accordé à la société BRASSERIE LE TRIANON un prêt de 148.000 euros remboursable sur une durée de 7 années au taux de 3,77 %. Ce prêt a été garanti par le cautionnement de Monsieur Y... donné par acte du 23 novembre 2010 pour une durée de 9 ans dans la limite de 192.400 euros.
La société BRASSERIE LE TRIANON a été placée en redressement judiciaire suivant jugement du 6 juin 2012 du tribunal de commerce d'Orléans qui, par jugement du 22 mai 2013, a arrêté un plan de redressement. Suivant jugement du 20 juillet 2016, le tribunal a prononcé la résolution du plan et la liquidation judiciaire de la société.
Le CRÉDIT DU NORD ayant vainement mis en demeure Monsieur Y..., l'a fait assigner devant le tribunal de commerce d'Orléans en vue de le voir condamner, sous le bénéfice de l'exécution provisoire à lui payer, en sa qualité de caution, la somme de 135,45 euros augmentée des intérêts au taux contractuel à compter du 28 janvier 2015 au titre du solde débiteur du compte courant et celle de 125.921,99 euros avec intérêts au taux contractuel de 3,77 % sur la somme de 119.483,13 euros à compter du 28 janvier 2015 au titre du prêt du 26 novembre 2010. Il était également réclamé la capitalisation des intérêts ainsi qu'une somme de 4.000 euros pour frais de procédure.
Par jugement du 3 mai 2016, le tribunal de commerce d'Orléans a constaté que le CRÉDIT DU NORD n'a pas soutenu abusivement la société BRASSERIE LE TRIANON, que les engagements de caution n'étaient pas disproportionnés aux biens et revenus de Monsieur Y..., a débouté le CRÉDIT FONCIER de sa demande en paiement de la somme de 135,45 euros au titre du solde débiteur du compte courant, l'a débouté de sa demande de paiement des intérêts échus entre la date du premier incident de paiement et celle à laquelle la caution a été informée, a condamné Monsieur X... Y... à se libérer de sa dette de 125.921,99 euros envers le CRÉDIT DU NORD en 23 échéances mensuelles de 1.100 euros et une 24ème échéance comprenant le solde en capital et les intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 2015 avec capitalisation. Le tribunal a ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Pour se déterminer le tribunal a retenu que le rachat de crédit n'ayant pas alourdi l'endettement de la société BRASSERIE LE TRIANON la banque ne l'avait pas soutenu abusivement, que l'engagement de caution de Monsieur Y... était proportionné aux revenus déclarés par Monsieur et Madame Y... de 36.790 euros et à leur patrimoine immobilier de 420.000 euros, que les créances inférieures à 300 euros avaient été réglées dès l'adoption du plan de sorte qu'il n'était dû aucune somme au titre du solde du compte courant, que la banque qui n'avait pas respecté l'obligation d'information de la caution devait être déchue du droit aux intérêts.
Monsieur Y... a relevé appel de la décision le 24 février 2017.
Les dernières écritures des parties, prises en compte par la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile, ont été déposées :
- le 26 novembre 2017 par Monsieur Y...,
- le 21 novembre 2017 par le CRÉDIT DU NORD.
Monsieur Y..., qui sollicite l'infirmation du jugement, demande à la cour de le décharger des ses engagements de caution en raison de leur caractère disproportionné, de condamner le CRÉDIT DU NORD à lui payer la somme de 30.000 euros de dommages et intérêts et celle de 5.000 euros pour frais de procédure.
Il affirme que son engagement de caution était disproportionné à ses biens et revenus à la date à laquelle il l'a souscrit et que c'est à tort que les premiers juges ont pris en considération les revenus de son épouse alors qu'il est marié sous le régime de la séparation des biens. Il fait valoir qu'il avait un revenu de 1.350 euros par mois en 2010 pour faire face aux obligations courantes, qu'il a déclaré un prêt immobilier avec un encours de 143.600 euros et des échéances de 1.239,11 euros ainsi qu'un prêt automobile de 5.879,97 euros et que son patrimoine correspondant à ses droits dans la maison d'habitation d'une valeur de 420.000 euros, s'élevait à 120.000 euros. Il souligne que son taux d'endettement compte tenu des mensualités de l'emprunt souscrit par la société était de 152,5 % ce qui excède notablement le taux d'endettement maximal de 33%.
Il soutient que son engagement reste disproportionné à la date à laquelle il est appelé, puisqu'il ne dispose plus de patrimoine immobilier ayant vendu le 7 novembre 2011 sa maison, dont le prix a servi au remboursement des encours auprès du CRÉDIT DU NORD et des crédits souscrits, et qu'il est sans revenu.
Il estime que c'est à juste titre que le tribunal a déchu la banque des intérêts et pénalités de retard faute pour cette dernière d'avoir satisfait à son obligation d'information de l'article L 313-22 du code monétaire et financier et relève que le listage informatique communiqué ne prouve ni l'envoi des lettres d'information ni leur contenu.
Il reproche au CRÉDIT DU NORD d'avoir commis une faute en continuant à soutenir la société BRASSERIE LE TRIANON en lui octroyant des prêts malgré ses difficultés financières sans l'informer des avantages et inconvénients du crédit consenti, et prétend que la société aurait refusé de s'endetter si la banque avait satisfait à son obligation d'information et qu'il n'aurait pas eu alors à s'engager comme caution, ce qui justifie à titre de sanction du manquement de la banque qu'il soit déchargé de toute obligation de remboursement.
Faisant valoir qu'il s'est engagé comme caution sur la base des arguments avantageux présentés par le CRÉDIT DU NORD et que la banque a manqué à son obligation "de refuser d'exiger un cautionnement proportionné" eu égard à ses ressources et patrimoine, il prétend avoir subi un préjudice correspondant à la perte de chance d'éviter de s'engager en qualité de caution qu'il évalue à 30.000 euros correspondant à la différence entre la valeur de son immeuble et le prix de vente auquel il a été contraint de le céder sous la pression de la banque. Il répond aux arguments de la banque que sa demande indemnitaire qui n'est que l'accessoire et la conséquence de ses prétentions initiales au titre de son préjudice est recevable, qu'elle n'est pas prescrite puisqu'elle a été formée dans les 5 ans de la mise en demeure qui lui été adressée par la banque et que cette dernière ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce qu'il était une caution avertie et d'avoir satisfait à son obligation de mise en garde.
Le CRÉDIT DU NORD, qui entend voir déclarer irrecevable comme étant nouvelle la demande indemnitaire de Monsieur Y... pour manquement de la banque à l'obligation de refuser d'exiger un cautionnement eu égard aux ressources et au patrimoine du client, sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit qu'il n'avait pas soutenu abusivement la société BRASSERIE LE TRIANON et constaté que les engagements de la caution n'étaient pas disproportionnés aux revenus et biens de Monsieur Y.... Il sollicite l'infirmation de la décision pour le surplus et reprend ses prétentions de première instance. Il réclame en outre la condamnation de Monsieur Y... à lui payer la somme de 5.000 euros pour frais de procédure ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de la SELARL LUGUET DA COSTA.
Il fait valoir que l'engagement de Monsieur Y... est proportionné au regard des biens et revenus qu'il a déclarés, qu'il a en effet indiqué bénéficier d'un revenu net de 2.500 euros et être propriétaire de sa résidence principale d'une valeur de 420.000 euros sans d'ailleurs préciser qu'il s'agissait d'un bien indivis, et relève qu'il a reçu sur le prix de vente la somme de 128.251 euros après règlement du solde du prêt immobilier. Il estime qu'il n'y pas lieu dès lors de tenir compte de sa situation à la date à laquelle il est appelé en l'absence de disproportion manifeste à la date de l'engagement.
Il affirme avoir satisfait à son obligation d'information annuelle de la caution et en justifier par la production du listage informatique comme le prévoit l'acte de cautionnement aux termes duquel les parties ont convenu que ce document constituait la preuve de l'envoi de la lettre adressée par courrier simple, et fait observer que Monsieur Y... s'est engagé dans l'acte de cautionnement à suivre personnellement la situation du cautionné. Il relève que la caution a été informée de la défaillance du débiteur principal par lettre recommandée du 9 juillet 2012 dès le premier incident de paiement non régularisé de sorte qu'il est fondé en tout état de cause à obtenir les intérêts et pénalités de retard depuis cette date.
Faisant observer que seule la société BRASSERIE LE TRIANON et non Monsieur Y... aurait pu lui reprocher un soutien abusif, il réplique que la société n'a pas contesté l'inscription de sa créance à son passif, que la décision d'admission de créance est opposable à la caution, qu'en vertu de l'article L 650-1 du code de commerce, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, qu'en vertu de la jurisprudence la responsabilité d'un établissement bancaire ne peut être retenue en raison d'un soutien abusif que lorsque le concours est consenti alors que la situation de l'emprunteur est déjà irrémédiablement compromise, ce qui n'est pas le cas puisque la société a fait l'objet d'un plan de redressement, et enfin qu'une facilité de caisse de 15.000 euros et un prêt destiné à financer le rachat d'autres prêts à des conditions plus avantageuses ne peuvent constituer un soutien abusif.
Il considère que la demande indemnitaire présentée par Monsieur Y... est irrecevable s'agissant d'une prétention nouvelle qui se trouve en outre prescrite puisque formée plus de 5 ans à compter de la date du cautionnement. Il rétorque subsidiairement qu'il n'était pas tenu à une obligation de mise en garde à l'égard de Monsieur Y... qui, en sa qualité de gérant de la société BRASSERIE LE TRIANON était une caution avertie, que même à retenir qu'il ne l'était pas, ne rapporte pas la preuve d'un risque d'endettement excessif, que le préjudice allégué correspondant au différentiel entre la valeur de l'immeuble et son prix de vente est sans lien avec la prétendue perte de chance de ne pas s'engager comme caution et que Monsieur Y... ne prouve pas qu'il aurait pu prendre une autre décision.
Il affirme enfin justifier du montant de sa créance par les décomptes communiqués.
SUR CE
I - Sur la disproportion de l'engagement de caution :
Attendu qu'aux termes de l'article L 341-4 du code de la consommation, l'engagement de caution conclu par une personne physique au profit d'un créancier professionnel ne doit pas être manifestement disproportionné aux biens et revenus déclarés par la caution à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ;
Attendu que la disproportion s'apprécie lors de la conclusion du contrat de cautionnement au regard du montant de l'engagement souscrit et des biens et revenus de la caution et que doit être pris en considération l'endettement global de cette dernière et notamment celui résultant d'autres engagements de caution antérieurs ou concomitants (cf Cass Com 22 mai 2013 pourvoi no11-24812), fussent-ils ensuite annulés puisque c'est au moment de la conclusion de l'engagement que la disproportion doit être appréciée ;
Attendu que la disproportion éventuelle de l'engagement de caution d'une caution mariée sous le régime de la séparation de biens s'apprécie au regard de ses biens et revenus personnels (Cass. Com. 24 mai 2018 pourvoi no 16-23.036) ;
Attendu qu'il appartient à la caution qui entend se prévaloir du caractère disproportionné de son engagement par rapport à ses biens et revenus, d'en rapporter la preuve ;
Attendu qu'il résulte la fiche de renseignement de solvabilité dont Monsieur Y... a certifié l'exactitude le 17 septembre 2010 qu'il a indiqué être marié sous le régime de séparation de biens, qu'il a déclaré un revenu de 2.500 euros mensuel, un encours au titre du prêt immobilier de 143.000 euros à échéance finale de 2013, un prêt automobile à échéance finale de 2011 dont il n'a pas mentionné le montant mais dont il indique sans être contredit qu'il était de 5.879,97 euros, un immeuble d'habitation d'une valeur de 420.000 euros ;
Attendu que la banque ayant également fait signer la fiche de renseignement par Madame Y... elle ne pouvait ignorer compte tenu du régime matrimonial des époux que l'immeuble leur servant de résidence était en indivision et qu'ils en étaient par conséquent propriétaire chacun pour moitié alors au surplus qu'elle leur a consenti le prêt immobilier ;
Attendu qu'il ressort effectivement de l'extrait de la comptabilité du notaire ayant reçu l'acte de vente de l'immeuble indivis que les époux Y... étaient co emprunteurs de l'emprunt immobilier puisque le solde du prêt a été déduit du prix de vente, de sorte que la valeur nette du patrimoine déclaré par Monsieur Y... était de 138.500 euros, soit 420.000 euros - 143.000 euros / 2 ;
Attendu que le montant des engagements de caution souscrits par Monsieur Y... s'élève à la somme de 211.900 euros soit 19.500 euros au titre de la facilité de trésorerie de 15.000 euros et 192.400 euros au titre du prêt de 148.000 euros ;
Attendu que ces engagements qui représentent 1,257 fois le montant de son revenu annuel de 30.000 euros et de son patrimoine de 138.500 euros étaient manifestement excessifs à la date à laquelle il les a souscrits ; qu'ils lui sont en conséquence inopposables ;
Attendu que la banque ne rapporte pas la preuve qu'à la date à laquelle il est appelé Monsieur Y... dispose d'un patrimoine lui permettant de faire face à ses obligations alors que l'immeuble a été vendu le l7 novembre 2011 et que le prix de vente a servi notamment à rembourser le découvert en compte de la société ;
Qu'il convient en conséquence de débouter le CRÉDIT DU NORD de sa demande en paiement et d'infirmer la décision déférée en conséquence ;
Attendu que par suite il n'y a pas lieu de se prononcer sur la demande de Monsieur Y... tendant à être déchargé de son obligation de caution en raison de la faute qu'il reproche à la banque d'avoir commise en accordant un soutien abusif au débiteur principal, ni sur la déchéance du droit aux intérêts pour défaut d'information annuelle, ces demandes étant sans objet dès lors que le cautionnement a été jugé disproportionné ;
II - sur la demande indemnitaire :
Attendu que Monsieur Y... soutient que le CRÉDIT DU NORD a manqué à son obligation "de refuser d'exiger un cautionnement proportionné" eu égard à ses ressources, ce qui lui a causé un préjudice résidant dans la perte de chance qu'il a subie d'éviter de s'engager qu'il chiffre à la différence entre la valeur de sa résidence principale et celle à laquelle il a été contraint de la vendre sous la pression du CRÉDIT DU NORD pour rembourser ses encours financiers, soit à la somme 30.000 euros dont il réclame le paiement par application des articles 1147 et 1149 du code civil ;
Attendu que cette demande de Monsieur Y... de condamnation du CRÉDIT DU NORD à lui payer des dommages et intérêts à raison de la faute qu'il lui reproche d'avoir commise s'analyse en une demande reconventionnelle ;
Attendu que les articles 565 et 566 du code de procédure civile sont étrangers aux conditions de recevabilité de la demande reconventionnelle présentée pour la première fois en cause d'appel qui, conformément à l'article 70 du même code, s'apprécie au regard du lien que la demande reconventionnelle présente avec les prétentions originaires (Cass. Civ 2ème 23 février 2017 pourvoi no16-12.859) ;
Attendu que la demande indemnitaire de Monsieur Y... en raison de la faute qu'elle reproche à la banque d'avoir commise à l'occasion de son engagement de caution se rattache par un lien suffisant à la demande principale en paiement de la banque formée en vertu de cet engagement de sorte qu'elle est recevable bien que présentée pour la première fois en appel;
Qu'il s'ensuit que le moyen opposé par l'intimée n'est pas fondé ;
Attendu qu'il est de jurisprudence constante que le point de départ de l'action en responsabilité exercée par la caution contre la banque est fixé au jour où la caution a su, par sa mise en demeure qui lui a été adressée, que les obligations résultant de son engagement allaient être mises à exécution du fait de la défaillance du débiteur principal (Cass. Com. 12 mai 2014 pourvoi no 02-10.653 ; Cass. Com. 12 juillet 2017 pourvoi no 15-26155) ;
Attendu que le CRÉDIT DU NORD a mis en demeure Monsieur Y... d'exécuter son engagement de caution par lettre recommandée du 9 juillet 2012, que la demande indemnitaire a été formée pour la première fois par conclusions notifiées devant la cour le 24 mai 2017 dans le délai de prescription de 5 ans ;
Qu'il s'ensuit que le moyen tiré de la prescription de la demande n'est pas davantage fondé;
Attendu que le préjudice de Monsieur Y... s'analyse en une perte de chance de ne pas contracter les engagements de caution comme il l'indique à juste titre ;
Attendu toutefois, que le préjudice dont il se prévaut correspondant à la différence entre valeur déclarée de l'immeuble et la valeur à laquelle il a été vendu ne peut résulter de la perte de chance de ne pas s'engager comme caution alors même que cette vente est intervenue le 7 novembre 2011 soit 8 mois avant que Monsieur Y... ne soit actionné comme caution que le prix de vente a été utilisé pour faire une donation à son épouse, rembourser le prêt automobile, le prêt étudiant de sa fille, le prêt destiné au rachat des parts de Madame D... et à régler les encours bancaires de la société, étant relevé qu'il n'est pas établi que la banque ait fait pression sur Monsieur Y... pour qu'il vende l'immeuble ni justifié que le prix de 390.000 euros ait été inférieur à celle du marché à la date de la vente ;
Qu'enfin le cautionnement lui étant inopposable il n'a subi aucun préjudice ;
Qu'il convient en conséquence de débouter Monsieur Y... de sa demande de dommages et intérêts ;
III - sur les autres demandes :
Attendu que le CRÉDIT DU NORD qui succombe en sa demande principale sera condamné aux dépens et à payer à Monsieur Y... la somme de 1.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort :
INFIRME la décision déférée en toutes ses dispositions ;
DIT que les engagements de caution de Monsieur X... Y... à hauteur de 19.500 euros du et de 192.400 euros du sont manifestement disproportionnés ;
DÉBOUTE la société CRÉDIT DU NORD de ses demandes en paiement ;
DÉBOUTE Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts ;
CONDAMNE la société CRÉDIT DU NORD à payer à Monsieur X... Y... la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société CRÉDIT DU NORD aux dépens de première instance et d'appel.
Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Madame Irène ASCAR, greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT