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20/09/2018 | FRANCE | N°17/017111

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 20 septembre 2018, 17/017111


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 20/09/2018
la SELARL ACTE - AVOCATS ASSOCIES
la SELARL DUPLANTIER - MALLET GIRY - X...

ARRÊT du : 20 SEPTEMBRE 2018

No : 268 - 18 No RG : 17/01711

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLÉANS en date du 13 Avril 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SAS DISTRIBUTION - PEINTURE - MATERIEL CARROSSERIE (DPMC)
Agissant poursuites et diligence de son président domicilié [...

]

représentée par Me Gaetane Z... de la SELARL ACTE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

IN...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 20/09/2018
la SELARL ACTE - AVOCATS ASSOCIES
la SELARL DUPLANTIER - MALLET GIRY - X...

ARRÊT du : 20 SEPTEMBRE 2018

No : 268 - 18 No RG : 17/01711

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLÉANS en date du 13 Avril 2017

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SAS DISTRIBUTION - PEINTURE - MATERIEL CARROSSERIE (DPMC)
Agissant poursuites et diligence de son président domicilié [...]

représentée par Me Gaetane Z... de la SELARL ACTE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

INTIMÉE : - Timbre fiscal dématérialisé No: [...]

SARL M.A CARROSSERIE
Agissant poursuites et diligence de son président domicilié [...]

représenté par Me X..., de la A... , avocat au barreau d'ORLEANS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 02 Juin 2017
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 15 mars 2018

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats à l'audience publique du 24 MAI 2018, à 14 heures , Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président, en son rapport, et Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller, ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l'article 786 et 907 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Greffier ayant assisté aux débats : Madame Guyveline BERGES,
Greffier ayant assisté au délibéré : Madame Irène ASCAR, Greffier placé,

ARRÊT :

Prononcé le 20 SEPTEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 20 mars 2008, la SAS DISTRIBUTION PEINTURE MATÉRIEL CARROSSERIE (DPMC) a conclu avec la société M.A CARROSSERIE un contrat de distribution de peinture et de matériel qui a été exécuté par les parties pendant 5 ans.

M.A CARROSSERIE a cessé de passer commande le 27 août 2015 et a notifié à la fin de l'année à sa cocontractante qu'elle cessait les relations commerciales avec elle.

DPMC lui a adressé le 30 novembre 2015 une facture de 6.130,94 euros HT correspondant selon elle aux produits consommés dans le stock qu'elle lui avait livré le 28 mars 2014 et qu'elle lui avait laissé en dépôt et, n'ayant pas reçu amiablement paiement de cette somme, a obtenu du président du tribunal de commerce d'Orléans une ordonnance en date du 20 juin 2016 faisant injonction à M.A CARROSSERIE de lui verser 7.357,13 euros TTC.

M.A CARROSSERIE ayant formé opposition à cette ordonnance, le tribunal de commerce d'Orléans, par jugement en date du 13 avril 2017, a rejeté les demandes formées par DPMC et l'a condamnée à verser une indemnité de procédure de 1.000 euros. Pour statuer ainsi, il a retenu qu'après l'expiration du contrat, aucune autre convention n'avait été conclue, le document daté du 25 mars 2014 n'étant qu'une proposition de contrat ; qu'alors que les bons de livraison correspondant à la première période contractuelle étaient tous chiffrés, celui du 28 mars 2014 ne l'était pas, ce qui confirmait les dires de M.A CARROSSERIE d'une mise à disposition par DPMC à titre gratuit de ses produits pour reconquérir sa clientèle comme il est d'usage courant dans la fourniture de produits et peinture de carrosserie ainsi qu'en témoigne un autre fournisseur de peinture. Le tribunal a en outre relevé qu'aucun bordereau contradictoirement émargé de reprise de stocks n'avait été produit par DPMC qui a en outre émis une facture 20 mois après la livraison des produits litigieux.

DPMC a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 2 juin 2017.

Les dernières écritures des parties, prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du code de procédure civile, ont été déposées :
- le 5 mars 2018 par l'appelante,
- le 12 février 2018 par l'intimée.

DPMC conclut tout d'abord à l'annulation du jugement déféré en soutenant que le tribunal, d'une part n'a pas répondu à son moyen selon lequel M.A CARROSSERIE n'avait pas protesté à réception de sa facture alors qu'il s'agissait d'un moyen de droit, d'autre part a modifié l'objet du litige en déduisant de l'absence de contrat entre les parties que la créance n'était pas fondée alors que la gratuité du contrat de dépôt n'était pas avérée et ne pouvait se déduire de l'absence d'écrit. Elle sollicite subsidiairement l'infirmation de la décision attaquée et demande à la cour de condamner l'intimée à lui verser 7.357,13 euros TTC outre une indemnité de procédure de 3.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de la Selarl Acte avocat associés.
Elle fait valoir que le contrat du 25 mars 2014 était bien conclu ; que les produits mis en dépôt lors de sa proposition commerciale ont tous fait l'objet de bons de livraison tamponnés par M.A CARROSSERIE qui ne nie pas les avoir consommés et que ces bons de livraison contiennent une clause de réserve de propriété au profit de DPMC et l'obligation de se réapprovisionner chez elle. Elle soutient que l'intimée avait connaissance de ses tarifs qui étaient circularisés chaque année et que la succession des bons de livraison jusqu'en août 2015 le prouve ; que M.A CARROSSERIE ne démontre pas avoir dénoncé le contrat en décembre 2014 et qu'elle a donc fait usage de son matériel et de son stock jusqu'en 30 novembre 2015 et ce sans contrepartie. Elle souligne que l'intimée, qui a accepté qu'elle reprenne son matériel, n'ignorait pas qu'elle en ferait un inventaire et qu'elle réclamerait paiement au titre de la partie consommée puisque ses produits n'étaient laissés à la disposition des seuls clients qui s'approvisionnaient de manière exclusive chez elle, ce que n'a pas fait MA CARROSSERIE qui s'est montrée déloyale en signant un contrat de distribution avec ses concurrents tout en utilisant le stock de peinture mis en dépôt et en continuant à lui passer quelques commandes. Elle prétend enfin que son intention libérale n'est pas avérée et que l'utilisation de ses produits sans contrepartie conduirait à un enrichissement sans cause de l'intimée.

M.A CARROSSERIE, qui conclut à la confirmation du jugement attaqué, demande à la cour d'y ajouter la condamnation de l'appelante à lui verser 1.000 euros pour procédure abusive, 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à supporter les dépens.
Elle s'oppose tout d'abord aux moyens de nullité du jugement en soutenant qu'elle a bien protesté à réception de la facture de DPMC et a appelé cette dernière par téléphone mais que la secrétaire comptable lui a affirmé qu'il s'agissait d'une erreur et qu'elle ne devait pas tenir compte de cette facturation et elle fait valoir que le tribunal a statué sur le litige qui lui était soumis sans en méconnaître l'objet. Elle prétend que le matériel et le stock étaient mis à sa disposition à titre gratuit jusqu'en décembre 2014 ; qu'il n'a jamais été convenu qu'en cas de rupture de l'essai, les produits consommés pourraient être facturés et qu'il n'était d'ailleurs prévu aucun prix sur le bon de livraison, ce qui démontre que seuls les réapprovisionnements devaient être payés ; que d'ailleurs, l'appelante ne lui a rien facturé au titre de l'année 2014. Elle fait subsidiairement valoir qu'en l'absence d'une reprise de stock contradictoire, DPMC ne démontre pas les quantités consommées et ne peut qu'être déboutée de ses demandes.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que l'indication, par l'appelante, de ce que M.A CARROSSERIE n'aurait pas protesté à réception de sa facture n'est en aucun cas un moyen de droit mais est un argument de pur fait et que DPMC ne précise d'ailleurs pas sur quel texte légal serait fondé le moyen auquel le tribunal n'aurait pas répondu ;

Que le tribunal n'avait pas à y répondre à un tel argument qui était devenu inopérant puisqu'il estimait disposer d'autres éléments lui permettant d'asseoir entièrement sa décision ;

Attendu que l'accusation d'une modification de l'objet du litige opérée par les premiers juges ne peut pas plus être comprise, le tribunal ayant été saisi d'une demande tendant à obtenir le paiement d'une facture, seule prétention sur laquelle il a statué ;

Que la motivation qu'il a retenue pour ce faire peut être critiquée par l'appelante mais n'ouvre certainement pas à cette dernière le droit de réclamer l'annulation de la décision rendue pour non admission de ses arguments et moyens ;

Que le jugement n'encourt en conséquence pas l'annulation et que la demande formée de ce chef sera rejetée comme étant entièrement dépourvue de pertinence ;

Attendu sur le fond qu'il est constant que les deux sociétés ont conclu le 20 mars 2008 et pour une durée de 5 ans un contrat de collaboration commerciale intitulé "partenariat peinture" aux termes duquel DPMC s'engageait à mettre en dépôt chez l'intimée un stock de teintes et un ensemble de matériel dont M.A CARROSSERIE s'engageait à assurer la maintenance, le tout d'une valeur de 19.930,31 euros en contrepartie de l'utilisation exclusive, par le carrossier, des peintures fournies par sa cocontractante et à assurer le maintien du stock et du matériel pendant toute la durée du contrat afin de pouvoir le restituer à sa valeur initiale sans vétusté ;

Que l'appelante ne peut soutenir que ce contrat, qui a fait l'objet d'un écrit de 7 pages s'est poursuivi à l'issue des 5 années contractuellement prévues en produisant un document d'une page intitulé "Proposition de collaboration commerciale exclusive peinture RM pour une durée de 3 ans ou 90.000 euros HT d'achat" alors que ce dernier document n'a pas été signé par M.A CARROSSERIE qui n'y a apposé ni une mention "bon pour accord" ni son cachet ;

Que le tribunal a en conséquence à raison retenu que les indications données dans ce second document d'une mise en dépôt pendant la durée du contrat "d'un stock de teinte de base neuf RM ONYX et CRYSTAL BASE" en contrepartie d'un approvisionnement exclusif auprès de DPMC n'est pas entré en vigueur ;

Attendu qu'il n'est pas contesté par M.A CARROSSERIE, et est en outre démontré par les bons de livraison produits par l'appelante, que cette dernière lui a fourni diverses peintures le 28 mars 2014 ;

Que les dispositions des articles L 442-6 du code de commerce citées par l'appelante à l'appui de ses prétentions sont inapplicables au litige puisque visant les pratiques commerciales abusives et que l'intimée n'a pas obtenu ou tenté d'obtenir de l'appelante un avantage ne correspondant à aucun service commercial rendu puisqu'elle a continué à se fournir en partie auprès d'elle jusqu'en août 2015 ;

Que DPMC n'est pas plus fondée à invoquer un enrichissement sans cause de M.A CARROSSERIE, des demandes ne pouvant être formées sur un tel fondement que lorsqu'aucune autre action n'est ouverte au demandeur, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque l'appelante invoque un non respect des dispositions contractuelles la liant à l'intimée ;

Attendu que cette dernière ne saurait démontrer, par l'attestation de la société CHAMBON, concurrente de l'appelante, qu'il est fréquent que les fabricants de peinture laissent des stocks à disposition gracieuse de leurs clients alors même que cette attestation cite des exemples de mises à disposition gratuites de matériel, mais non de peintures ;

Que le bon de livraison émis par DPMC indiquait expressément que la remise intervenait sur demande de M.A CARROSSERIE, et concernait des " Produits mis en dépôt restant notre propriété que vous devez assurer à sa valeur initiale de vente pour son remboursement sans vétusté en cas de sinistre, de vol, d'incendie, de catastrophes naturelles ou autres événements" ;

Que, si le prix de chacun de ces produits n'était pas spécifié, l'indication, sur le bon de livraison de ce que l'intégralité de ces produits restait la propriété de l'appelante, empêchait le tribunal de retenir que ces peintures et matériels avaient été livrés gracieusement et ne devaient pas être restitués, que ce soit en nature ou en valeur, après la mise à disposition ;

Que M.A CARROSSERIE qui a reçu ces produits en approuvant le bon de livraison portant les mentions d'une part de ce qu'elle les avait commandés d'autre part de ce qu'il s'agissait d'un dépôt et qu'ils demeuraient la propriété de l'appelante, n'est dès lors pas fondée à prétendre qu'elle n'avait rien demandé et n'était pas tenue de les restituer en nature ou en valeur à DPMC ;

Attendu cependant que, lorsqu'elle a procédé à la reprise de ce stock ainsi laissé en dépôt, DPMC n'a pas eu l'élémentaire prudence de procéder, dans les locaux de l'intimée, et avant enlèvement à un inventaire des produits qui lui étaient remis par celle-ci, et n'a jamais contradictoirement vérifié la quantité de produits consommée par M.A CARROSSERIE ;

Que l'appelante ne peut écrire que celle-ci n'a jamais contesté les quantités utilisées alors que l'intimée a toujours soutenu depuis le début de l'instance n'être redevable d'aucune somme, d'une part et à tort parce qu'aucune restitution n'était prévue, mais également et d'autre part parce que DPMC ne démontre pas qu'elle aurait consommé une partie du stock qu'elle a repris et ne justifie en conséquence pas être sa créancière ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1315 du code civil, il appartient à celui qui invoque l'existence d'une créance d'en démontrer l'existence ;

Que l'absence de contestation par écrit par M.A CARROSSERIE de la facture qui lui a été adressée n'est pas, à elle seule, probante d'une reconnaissance tacite par M.A CARROSSERIE de sa qualité de débitrice ;

Que nul ne pouvant se constituer de preuves à soi-même, l'émission par DPMC d'une facture reprenant les quantités de produits qui auraient été consommés par l'intimée ne peut, en l'absence de tout élément objectif et de toute vérification de ces quantités par un tiers ou par l'intimée, démontrer le bien fondé de sa réclamation ;

Qu'il ne peut donc qu'être constaté que DPMC n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce que M.A CARROSSERIE est redevable envers elle de la somme de 7.357,13 euros TTC dont elle sollicite paiement, ce qui conduit à confirmer le jugement déféré ;

Attendu que l'appelante, succombant en toutes ses prétentions, devra supporter les dépens de la procédure d'appel et qu'il sera fait application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'intimée ;

PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

DÉBOUTE la SAS DISTRIBUTION PEINTURE MATÉRIEL CARROSSERIE de sa demande tendant à voir déclarer nul le jugement déféré,

CONFIRME la décision entreprise,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE laSAS DISTRIBUTION PEINTURE MATÉRIEL CARROSSERIE à payer à la société M.A CARROSSERIE la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE laSAS DISTRIBUTION PEINTURE MATÉRIEL CARROSSERIE aux dépens d'appel.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Madame Irène ASCAR, greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 17/017111
Date de la décision : 20/09/2018
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-09-20;17.017111 ?
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