La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/09/2018 | FRANCE | N°18/004071

France | France, Cour d'appel d'Orléans, C1, 13 septembre 2018, 18/004071


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 13/09/2018
la SCP LAVAL - FIRKOWSKI
Me Hugues LEROY
ARRÊT du : 13 SEPTEMBRE 2018

No : 262 - 18 No RG : 18/00407

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 30 Janvier 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265214961458465

SAS RESTAURATION ORLEANAISE CONSTRUCTION (ROC) agissant en la personne de son représentant légal domicilié [...]
représentée par Me Stéphanie BA

UDRY de la SELARL WALTER etamp; GARANCE AVOCATS, avocate au barreau de TOURS, et ayant pour avocat postulant Me Oliv...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE, ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 13/09/2018
la SCP LAVAL - FIRKOWSKI
Me Hugues LEROY
ARRÊT du : 13 SEPTEMBRE 2018

No : 262 - 18 No RG : 18/00407

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 30 Janvier 2018

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265214961458465

SAS RESTAURATION ORLEANAISE CONSTRUCTION (ROC) agissant en la personne de son représentant légal domicilié [...]
représentée par Me Stéphanie BAUDRY de la SELARL WALTER etamp; GARANCE AVOCATS, avocate au barreau de TOURS, et ayant pour avocat postulant Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL- FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS

D'UNE PART

EN PRESENCE DE :

SELARL B... prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement
judiciaire de la SAS ROC ; mission conduite par Maître Julien B...
[...]
représentée Me Olivier LAVAL de la SCP LAVAL - FIRKOWSKI, avocat au barreau d'ORLEANS

INTIMEE : - Timbre fiscal dématérialisé No: 1265214076099016

SAS BOUYGUES BATIMENT ILE DE FRANCE prise en la personne de son représentant légal
[...]
représentée par la SELARL SALTANA agissant par Me Michel JOCKEY, avocat au barreau de PARIS et ayant pour postulant la SCP LEROY, avocat au barreau d'ORLEANS

D'AUTRE PART

DÉCLARATION D'APPEL en date du : 09 Février 2018
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 17 mai 2018
COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 24 MAI 2018, à 9 heures 30, devant Madame Elisabeth HOURS, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du code de procédure civile.

Lors du délibéré :
Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de Chambre, qui en a rendu compte à la collégialité
Monsieur Jean-Louis BERSCH, Conseiller,
Madame Fabienne RENAULT-MALIGNAC, Conseiller,

Greffier :

Madame BERGES, lors des débats et du prononcé.

ARRÊT :

Prononcé le 13 SEPTEMBRE 2018 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Exposé du litige :

Par jugement en date du 7 mai 2015, le tribunal de commerce d'Orléans a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société RESTAURATION ORLÉANAISE CONSTRUCTION (ROC) et a désigné Maître Julien B... en qualité de mandataire judiciaire.

La société BOUYGUES BÂTIMENT ILE de FRANCE ( BOUYGUES) a alors déclaré une créance à titre chirographaire à hauteur de 382.268,64 euros au titre du chantier [...] et de 290.801,89 euros au titre du chantier [...].

ROC a contesté en totalité cette créance en faisant connaître qu'une instance était en cours au titre du premier chantier et une expertise au titre du second.

Par ordonnance définitive en date du 16 juin 2016, notifiée aux parties le 30 juin 2016, le juge commissaire a constaté l'existence d'une instance en cours concernant le chantier de la rue [...] , constaté l'existence d'une contestation sérieuse portant sur la créance relative au chantier [...] et renvoyé les parties à saisir la juridiction compétente dans le délai d'un mois à compter de la notification de sa décision.

Par ordonnance en date du 30 janvier 2018, le juge commissaire a constaté l'absence de désignation de la partie devant saisir la juridiction compétente, dit n'y avoir lieu à prononcer la forclusion, confirmé l'existence d'une contestation sérieuse et "complété" l'ordonnance du 26 juin 2016 en invitant la société BOUYGUES à saisir la juridiction compétente dans le délai d'un mois.

ROC a formé un recours contre cette décision par déclaration en date du 9 février 2018.

Les dernières écritures des parties, prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du code de procédure civile, ont été déposées :
- le 11 mai 2018 par l'appelante
- le 30 avril 20 18 par la SELARL B...
- le 30 avril 2018 par BOUYGUES.

ROC sollicite l'infirmation de la décision déférée et demande à la cour de constater que la créance de 290.801,89 euros dont se prévaut BOUYGUES est atteinte par la forclusion, de la rejeter, de dire que la mention de l'arrêt sera portée sur l'état des créances et de condamner BOUYGUES à lui verser une indemnité de procédure de 5.000 euros ainsi qu'à supporter les dépens.
Elle soutient qu'en l'absence de saisine du juge du fond dans le délai d'un mois suivant la notification de l'ordonnance du 16 juin 2016, le juge commissaire ne pouvait que constater que la créance de BOUYGUES était atteinte par la forclusion faute pour l'une des parties d'avoir relevé appel. Elle prétend que cette ordonnance n'était pas affectée d'une omission de statuer puisque personne n'avait sollicité la désignation de la partie devant saisir la juridiction du fond ; qu'au surplus la désignation de cette partie n'est qu'une faculté et non une obligation ; que la saisine de la juridiction compétente incombait manifestement à BOUYGUES ; que cette dernière est dès lors forclose et ne peut solliciter l'inscription de sa créance, laquelle doit être rejetée. Elle prétend qu'à supposer même que la cour retienne l'existence d'une omission de statuer, celle-ci ne pourrait faire obstacle à l'écoulement du délai de forclusion ; qu'en effet, à supposer que le juge commissaire ait eu pouvoir de se saisir d'office d'une telle omission, il ne pouvait reporter le point de départ du délai de forclusion puisqu'en application de l'article 463 du code de procédure civile, il ne peut compléter sa décision qu'en ne portant pas atteinte à ce qui a déjà été jugé.

Maître B... s'associe aux demandes formées par ROC et sollicite paiement d'une indemnité de procédure de 1.000 euros.

BOUYGUES demande à la cour de juger irrecevable ou en tous cas mal fondé l'appel, de confirmer l'ordonnance déférée et de condamner ROC à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir qu'à l'issue de la procédure d'expertise judiciaire qu'elle avait sollicitée, ROC l'a assignée le 29 mai 2017 devant le tribunal de grande instance de Paris en sollicitant sa condamnation à lui verser 43.000.000 euros au titre de dommages et intérêts ; que ce n'est qu'ensuite de cette assignation qu'elle a saisi le juge commissaire d'une demande tendant à voir rejeter sa créance ; que le juge commissaire n'était pas dessaisi de la procédure d'admission de la créance et se devait de statuer ; qu'il n'avait donc d'autre choix, sous peine de déni de justice, que de constater que les conditions de la forclusion n'étaient pas réunies et de rectifier l'erreur matérielle affectant sa première décision, ce qu'il a fait, mais qu'il ne s'est aucunement prononcé sur une omission de statuer.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR :

Attendu que l'ordonnance déférée, après avoir constaté qu'aucune partie n'avait été invitée à saisir le juge du fond, a dit n'y avoir forclusion ;

Qu'après avoir indiqué dans ses motifs, que l'ordonnance devait être "rectifiée", le juge commissaire a mentionné dans le dispositif de sa décision :
" Constatons l'absence de désignation de la partie devant saisir la juridiction compétente dans l'ordonnance du 16 juin 2016,
Disons que de ce fait il n'y a pas lieu à prononcer la forclusion,
Confirmons l'existence d'une contestation sérieuse,
Complétons notre ordonnance du 16 juin 2017 et y ajoutons les mots "Invitons en conséquence la société BOUYGUES BÂTIMENT ILE DE FRANCE à saisir la juridiction compétente dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente ordonnance" ;

Attendu qu'il résulte de cette rédaction du dispositif de l'ordonnance attaquée, qui a seul l'autorité de la chose jugée, que le premier juge a ainsi procédé à la rectification d'une omission de statuer -et non à la rectification d'une erreur matérielle- ce qui est confirmé par le fait que la notification de l'ordonnance mentionne que la voie de recours est l'appel et non le pourvoi devant la Cour de cassation qui aurait été seul ouvert aux parties par l'article 462 du code de procédure civile après rectification d'une erreur matérielle ;

Attendu qu'il n'est aucunement contesté que la créance de BOUYGUES fait l'objet d'une contestation sérieuse ;

Qu'aux termes de l'article R 624-5 du code de commerce dans sa version modifiée par le décret du 30 juin 2014 et antérieure au 6 mai 2017, seule applicable à l'ordonnance du 16 juin 2016 : "Lorsque le juge commissaire se déclare incompétent ou constate l'existence d'une contestation sérieuse, il renvoie, par ordonnance spécialement motivée, les parties à mieux se pourvoir et invite selon le cas, le créancier, le débiteur ou le mandataire judiciaire à saisir la juridiction compétente dans le délai d'un mois à compter de la notification ou de la réception de l'avis délivré à cette fin à peine de forclusion, à moins de contredit dans les cas où cette voie de recours est ouverte" ;

Qu'en l'espèce si, dans son ordonnance en date du 16 juin 2016, le juge commissaire a bien renvoyé les parties à mieux se pourvoir, il a omis de désigner à qui, du créancier, du débiteur ou du mandataire judiciaire, il appartenait de saisir la juridiction compétente ;

Qu'il importe peu que les parties n'aient pas sollicité cette désignation puisque l'article R 624-5 du code de commerce l'exige ;

Attendu cependant que le juge commissaire n'a pas simplement, dans son ordonnance, omis d'indiquer à qui incombait la saisine de la juridiction du fond mais a expressément mentionné qu'il appartenait "aux parties" de la saisir ;

Qu'il a ainsi commis, non une omission de statuer, mais une erreur de droit en désignant "les parties" au lieu de préciser à laquelle incombait l'obligation de saisine ;

Qu'une erreur de droit ne peut être rectifiée et, qu'aucune des parties n'ayant formé un recours contre cette première ordonnance, elle est désormais irrévocable et doit recevoir application ;

Attendu que les jurisprudences produites par l'appelante sont toutes antérieures au 30 juin 2014, date d'entrée en vigueur du décret ayant modifié les dispositions de l'article R 624-5 susvisé ;

Qu'avant cette date, le juge commissaire qui constatait l'existence d'une contestation sérieuse devait surseoir à statuer et inviter les parties à saisir la juridiction compétente ;

Qu'il restait donc saisi de la question de la fixation de la créance litigieuse ;

Que désormais, le juge commissaire ne peut surseoir à statuer mais doit inviter les parties à mieux se pourvoir ;

Qu'il en résulte qu'il est entièrement dessaisi du pouvoir de fixer la créance, un tel pouvoir revenant exclusivement à la juridiction du fond ;

Que le juge commissaire ne peut donc plus rejeter une créance après s'être déclaré incompétent pour en connaître mais qu'il peut cependant constater, par une stricte application de sa première ordonnance, qu'est forclose la partie qu'il a désignée pour saisir le juge du fond compétent pour fixer la créance ;

Attendu qu'en l'espèce, le juge commissaire a invité les deux parties à saisir la juridiction du fond ;

Que les deux parties ont été régulièrement avisées qu'en cas d'absence de saisine dans le délai d'un mois, la forclusion serait acquise ;

Que cette même décision irrévocable a constaté l'existence d'une contestation sérieuse portant sur la créance de BOUYGUES constituée de pénalités de retard ;

Que BOUYGUES, qui ne disposait d'aucun titre, n'ignorait donc pas que, si elle ne saisissait pas le juge compétent dans le délai imparti pour faire fixer sa créance, la forclusion intervenue l'empêcherait de voir fixer cette créance au passif de ROC ;

Qu'il convient dès lors de constater que la forclusion est intervenue et d'infirmer la décision déférée ;

Attendu que les dépens seront portés en frais privilégiés de procédure collective sans qu'il y ait lieu de faire application au profit de l'une ou l'autre des parties, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME la décision entreprise,

STATUANT À NOUVEAU,

DIT n'y avoir lieu à rectification de l'ordonnance du 16 juin 2016,

CONSTATE la forclusion et l'impossibilité qui en résulte pour la société BOUYGUES BÂTIMENT ILE de FRANCE de solliciter la fixation de sa créance de 290.801,89 euros au titre du chantier [...] au passif de la société RESTAURATION ORLÉANAISE CONSTRUCTION,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que les dépens seront portés en frais privilégiés de procédure collective.

Arrêt signé par Madame Elisabeth HOURS, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et Madame BERGES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Formation : C1
Numéro d'arrêt : 18/004071
Date de la décision : 13/09/2018
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.orleans;arret;2018-09-13;18.004071 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award