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17/12/2008 | FRANCE | N°07/03374

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 17 décembre 2008, 07/03374


COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE
GROSSE à :

Aurèle X...

EXPÉDITIONS à : COMPAGNIE D'ASSURANCES MATMUT
Me Sylvie CELERIER
S. A. R. L. GARAGE Y... JEAN-CLAUDE
CPAM DU LOIRET
la SCP LE METAYER-CAILLAUD-CESAREO-BONHOMME
D. R. A. S. S. ORLÉANS
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ORLEANS ARRÊT du : 17 DECEMBRE 2008

N° R. G. : 07 / 03374

Décision de première instance : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ORLEANS en date du 20 Novembre 2007

ENTRE

APPELANTE :
r>COMPAGNIE D'ASSURANCES MATMUT
66 Rue de Sotteville
76003 ROUEN CEDEX

Représentée par Me Sylvie CELERIER (avocat au barre...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE
GROSSE à :

Aurèle X...

EXPÉDITIONS à : COMPAGNIE D'ASSURANCES MATMUT
Me Sylvie CELERIER
S. A. R. L. GARAGE Y... JEAN-CLAUDE
CPAM DU LOIRET
la SCP LE METAYER-CAILLAUD-CESAREO-BONHOMME
D. R. A. S. S. ORLÉANS
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ORLEANS ARRÊT du : 17 DECEMBRE 2008

N° R. G. : 07 / 03374

Décision de première instance : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'ORLEANS en date du 20 Novembre 2007

ENTRE

APPELANTE :

COMPAGNIE D'ASSURANCES MATMUT
66 Rue de Sotteville
76003 ROUEN CEDEX

Représentée par Me Sylvie CELERIER (avocat au barreau d'ORLEANS)

D'UNE PART,
ET

INTIMÉS :
Monsieur Aurèle X...

...

45470 TRAINOU Représenté par la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES (avocats au barreau d'ORLEANS)
S. A. R. L. GARAGE Y... JEAN-CLAUDE

...

72440 TRESSON Représentée par la SCP LE METAYER-CAILLAUD-CESAREO-BONHOMME (avocats au barreau d'ORLEANS)

CPAM DU LOIRET
9 Place du Général de Gaulle
Service contentieux
45021 0RLEANS CEDEX 1

Représentée par Mme Sylvie LAJUGIE en vertu d'un pouvoir général

PARTIE AVISÉE :

DIRECTION REGIONALE DES AFFAIRES SANITAIRES ET SOCIALES
25 Boulevard Jean Jaurès
45044 ORLEANS CEDEX 1

Non comparante, ni représentée,

D'AUTRE PART,

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :

Monsieur Alain GARNIER, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre,
Monsieur Yves FOULQUIER, Conseiller,
Monsieur Thierry MONGE, Conseiller.

Greffier :

Madame Sylvie CHEVREAU, faisant fonction de Greffier, lors des débats et du prononcé de l'arrêt.

DÉBATS :

A l'audience publique le 22 OCTOBRE 2008.

ARRÊT :

Lecture de l'arrêt à l'audience publique du 17 DECEMBRE 2008 par Monsieur le Conseiller GARNIER, en application des dispositions de l'article 452 du Code de Procédure Civile.
Monsieur Aurèle X..., en contrat d'apprentissage chez la SARL GARAGE Y..., a été victime d'un accident du travail le 1er août 2003, alors qu'il nettoyait un carter de moteur de motocyclette dans une fontaine remplie d'un liquide solvant qui a explosé en provoquant un incendie à l'origine de graves brûlures. Par jugement définitif du 3 février 2005, le Tribunal correctionnel d'ORLEANS a pénalement sanctionné Monsieur Y..., représentant légal de la société, pour blessures involontaires sur la personne de Monsieur X... et infractions à la réglementation générale sur l'hygiène et la sécurité du travail. Les parents de la victime, administrateurs légaux de leur fils mineur, ont alors engagé une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, Monsieur Aurèle X... ayant repris la procédure en son nom à sa majorité. Par jugement du 20 novembre 2007, le Tribunal des affaires de sécurité sociale d'ORLEANS, devant lequel la MATMUT, assureur de responsabilité civile de la société GARAGE Y... est intervenue volontairement, a dit que l'accident dont avait été victime Monsieur X... était dû à la faute inexcusable de son employeur, déclaré opposable à ce dernier la décision de la CPAM du Loiret de prise en charge de l'accident, a fixé au maximum la majoration de la rente et a ordonné une expertise aux fins d'évaluation des préjudices personnels du salarié. Le tribunal a également alloué à Monsieur X... une provision de 20. 000 Euros et constaté qu'aucune demande de garantie n'était, en l'état, formulée à l'encontre de l'assureur. La MATMUT a relevé appel.
Poursuivant l'infirmation de la décision entreprise, elle prétend que la CPAM ne rapporte pas la preuve d'avoir respecté la procédure contradictoire de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident prévue par l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale, et qu'en outre, elle n'a pas fait procéder à l'enquête légale de l'article L. 442-1 du même code, de sorte que la décision de prise en charge de l'accident doit être déclarée inopposable à l'employeur. Elle considère que le caractère inexcusable de la faute de la société Y... n'est pas établi dès lors que le salarié, en dépit de la condamnation pénale, ne démontre pas que les mesures de prévention et de sécurité aient été insuffisantes ni que l'employeur ait eu conscience du danger. Elle s'en rapporte à la sagesse de la Cour sur la demande d'expertise et la majoration de la rente. La société GARAGE Y... s'en rapporte à justice.
Monsieur X... relève qu'en fonction de la motivation du jugement du tribunal correctionnel, la faute inexcusable, caractérisée par un manquement évident aux obligations de sécurité de résultat, apparaît manifeste. Il conclut à la confirmation du jugement, sauf à compléter la mission de l'expert sur la diminution de ses capacités professionnelles. La CPAM du Loiret rappelle que le caractère professionnel de l'accident a été admis d'emblée dès lors que la déclaration d'accident ne comportait pas de réserve. Elle prie la Cour de confirmer le jugement et de dire que la MATMUT sera tenue de garantir son assurée la société GARAGE Y... des conséquences dommageables de l'accident.

SUR CE

Sur l'opposabilité de la décision de prise en charge de l'accident

Attendu que la CPAM a pris sa décision, sans procéder à une mesure d'instruction, au vu de la seule déclaration d'accident du travail transmise sans réserve par l'employeur, et en fonction des seuls renseignements initialement fournis dont celui-ci avait parfaitement connaissance ; que la notion de réserve doit s'entendre de la contestation du caractère professionnel de l'accident par l'employeur en fonction des circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou de l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; qu'en l'espèce, la déclaration d'accident effectuée le jour même par la société GARAGE Y... indique que l'accident a eu lieu le 1er août 2003 à 11 heures 30 dans l'atelier motos et qu'à la suite d'un incendie, la victime à subi des brûlures à la tête, aux membres supérieurs, aux mains et au tronc, tandis qu'elle a été transportée à l'hôpital de TOURS et qu'un rapport de police a été établi par la gendarmerie de CHECY ; que, dans ces conditions, le tribunal a décidé à bon droit que l'organisme social n'était pas tenu à l'obligation d'information prévue par l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale avant de prendre sa décision ;

Attendu, au surplus, que l'enquête prévue par les dispositions de l'article L. 442-1 du Code de la sécurité sociale, désormais abrogé, n'était obligatoire qu'en cas de blessures paraissant entraîner la mort ou une incapacité totale de travail ou lorsque la victime est décédée ; que telle n'étant pas la situation dans la présente instance, la Caisse n'avait pas à faire procéder à l'enquête contradictoire exigée par la loi, de sorte que sa décision est opposable à l'employeur ;

Sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur

Attendu qu'en raison du principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, les décisions de la justice pénale ont au civil autorité absolue, à l'égard de tous en ce qui concerne ce qui a été nécessairement jugé quant à l'existence du fait incriminé, sa qualification, la culpabilité ou l'innocence de ceux auxquels le fait est imputé ;
Attendu que, pour condamner Monsieur Jean-Claude Y..., gérant de la SARL GARAGE Y... des chefs de blessures involontaires et d'infractions aux règles relatives à la sécurité des travailleurs, le Tribunal correctionnel d'ORLEANS, au vu d'un procès-verbal établi par l'inspection du travail, a retenu l'insuffisante ventilation du local dans lequel était utilisée la fontaine à solvant, les défauts de protection contre les risques d'inflammation des produits utilisés et de vérification de conformité de l'installation électrique depuis plus de dix ans ; que les juges ajoutent que Monsieur Y... ne disposait pas de la fiche sécurité du produit lors de son utilisation par ses salariés, ce qui l'empêchait de connaître les précautions à mettre en oeuvre et de vérifier la compatibilité de son installation électrique et, qu'enfin, il n'avait pas procédé à l'évaluation des risques susceptibles de résulter de l'atmosphère explosive créée par le produit utilisé ; que le tribunal correctionnel indique encore que " l'imprudence commise par Monsieur Y... a créé la situation qui a permis la réalisation du dommage... et manifeste sa carence dans la prise de mesures permettant d'éviter la réalisation des risques " et conclut que les manquements décrits " sont constitutifs de fautes caractérisées... en raison de la nature du produit solvant utilisé et des risques d'explosion, dont la dangerosité ne pouvait être ignorée par... un professionnel établi depuis de nombreuses années " ; Attendu que l'employeur condamné pénalement, dans les termes qui viennent d'être rapportés, commet nécessairement une faute inexcusable dès lors que l'obligation de sécurité de résultat qui pèse sur lui n'a pas été respectée et qu'il aurait dû avoir conscience du danger encouru par la victime et n'a pris aucune mesure de protection nécessaire ; qu'au surplus, lors de la tentative de conciliation, préalable à la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale, la SARL GARAGE Y... n'avait pas contesté le principe de sa faute inexcusable ; que le jugement entrepris mérite donc confirmation sur la reconnaissance de la faute inexcusable de cette société ; Sur les conséquences de la reconnaissance de la faute inexcusable

Attendu que la procédure sans représentation obligatoire applicable au contentieux général de la sécurité sociale étant une procédure orale, les moyens retenus par le tribunal, notamment que Monsieur X... a demandé la majoration de sa rente à son maximum, sont présumés, sauf preuve contraire non rapportée en l'espèce, avoir été contradictoirement débattus ;
Que, dès lors qu'il a retenu l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur, c'est donc à bon droit que le tribunal, sans statuer ultra petita comme le soutient la MATMUT, a fixé au maximum la majoration de la rente versée à Monsieur X..., la mention selon laquelle cette majoration devrait suivre l'évolution du taux d'incapacité de la victime résultant simplement du fait qu'elle est calculée, d'après la pratique actuelle des caisses, en fonction de la réduction de capacité dont celle-ci reste atteinte ;

Attendu que dans les missions imparties à l'expert désigné, le Docteur A..., outre l'évaluation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales ainsi que les préjudices esthétique et d'agrément, le tribunal a souhaité obtenir toutes précisions utiles à la détermination du préjudice personnel de Monsieur X..., mais sans préciser s'il s'agissait de la perte de possibilités de promotion professionnelle qui constitue, néanmoins, un préjudice indemnisable au sens de l'article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale ; qu'il convient donc de compléter la mission impartie à l'expert dans les conditions qui seront indiquées au dispositif ;

Sur la garantie de l'assureur

Attendu que le tribunal a réservé l'examen de la garantie de l'assureur dans l'attente du rapport d'expertise ;

Que, devant la Cour, la CPAM du Loiret demande de dire que la MATMUT sera tenue de garantir les conséquences dommageables de la faute inexcusable de l'employeur ; que, saisie par l'effet dévolutif de l'appel de l'ensemble du litige, la Cour, investie de la plénitude de juridiction tant en matière civile qu'en matière sociale, est tenue d'apporter à cette demande une solution au fond ; que, dès lors, et puisque la MATMUT ne conteste pas sa garantie, il y a lieu d'accueillir la demande de la CPAM, dans la limite du contrat d'assurance souscrit par la société GARAGE Y... ;
Attendu que la société GARAGE Y... versera une indemnité de procédure de 2. 000 Euros à Monsieur X... et que la MATMUT, succombant en son appel, sera condamnée au paiement d'un droit de 277 Euros, tel que prévu par l'article R. 144-10, alinéa 2 du Code de la sécurité sociale ; PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement entrepris ;

Y ajoutant ;

Dit que la mission de l'expert désigné, le Docteur A...,..., doit être complétée comme suit :

- Fournir au tribunal toute information utile relative à la perte ou à la diminution des possibilités de promotion professionnelle de Monsieur X... ;

Dit que la MATMUT sera tenue de garantir les conséquences dommageables de la faute inexcusable de la société GARAGE Y..., dans la limite du contrat d'assurance souscrit par cette société ;

Renvoie le dossier de la procédure devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale d'ORLEANS pour la fixation des préjudices personnels de Monsieur X... au vu du rapport d'expertise ;
Condamne la société GARAGE Y... à verser la somme de 2. 000 Euros à Monsieur X..., au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la MATMUT au paiement d'un droit de 277 Euros par application de l'article R. 144-10, alinéa 2, du Code de la sécurité sociale ;

Et le présent arrêt a été signé par Monsieur GARNIER, Président, et par Madame CHEVREAU, faisant fonction de Greffier présent lors du prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 07/03374
Date de la décision : 17/12/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal des affaires de sécurité sociale d'Orléans


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-12-17;07.03374 ?
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