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02/12/2008 | FRANCE | N°08/03215

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 02 décembre 2008, 08/03215


C O U R D'A P P E L D'O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE PRUD'HOMMES

GROSSES le 02 DÉCEMBRE 2008 à Me Claudine DEFFARGES et Me Christian QUINET
la SCP COTTY THIERRY VIVANT MARCHISIO ET LAUZERAL
COPIES le 02 DÉCEMBRE 2008 à
Serge X..., et autres
S. A. M. G. A. MONCEAU GENERALE ASSURANCES
UNEDIC
ARRÊT du : 02 DÉCEMBRE 2008

MINUTE No : 685 / 08- No RG : 08 / 03215

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE BLOIS en date du 26 Janvier 2007- Section : ENCADREMENT

ENTRE

APPELANTS :

1o) Monsieur Serge X

...

41000 BLOIS

représenté par Maître Claudine DEFFARGES, avocat au barreau de BLOIS

2o) Monsieur Jean-Françoi...

C O U R D'A P P E L D'O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE PRUD'HOMMES

GROSSES le 02 DÉCEMBRE 2008 à Me Claudine DEFFARGES et Me Christian QUINET
la SCP COTTY THIERRY VIVANT MARCHISIO ET LAUZERAL
COPIES le 02 DÉCEMBRE 2008 à
Serge X..., et autres
S. A. M. G. A. MONCEAU GENERALE ASSURANCES
UNEDIC
ARRÊT du : 02 DÉCEMBRE 2008

MINUTE No : 685 / 08- No RG : 08 / 03215

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE BLOIS en date du 26 Janvier 2007- Section : ENCADREMENT

ENTRE

APPELANTS :

1o) Monsieur Serge X...

41000 BLOIS

représenté par Maître Claudine DEFFARGES, avocat au barreau de BLOIS

2o) Monsieur Jean-François Y...

né le 14 Mai 1950 à POITIERS (86000)
41350 VINEUIL

comparant en personne, assisté de Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

3o) Madame Marie-Claire Z... épouse A...

née le 30 Avril 1952 à POUZAY (37800)
41250 MONT PRES CHAMBORD

comparante en personne, assistée de Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

4o) Monsieur Yves B...

né le 02 Août 1948 à RESTIGNE (37140)
37140 RESTIGNE

comparant en personne, assisté de Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

5o) Monsieur Claude C...

né le 19 Décembre 1953 à BLOIS (41000)
41000 ST DENIS SUR LOIRE

comparant en personne, assisté de Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

6o) Mademoiselle Catherine D...

née le 30 Décembre 1955 à TOURS (37000)
41000 BLOIS

représentée par Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

7o) Madame Annie E...

née le 09 Septembre 1948 à BLOIS (41000)
41000 BLOIS

représentée par Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

8o) Madame Jocelyne F... épouse G...

née le 23 Février 1955 à MAROLLES
41350 VINEUIL

représentée par Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

9o) Madame Annick H... épouse I...

née le 26 Mai 1950 à VILLERMAIN (41240)
41500 MENARS

comparante en personne, assistée de Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

10o) Madame Pierrette J... épouse K...

née le 29 Mai 1949 à BLOIS (41000)
41000 VILLERBON

représentée par Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

11o) Monsieur Alain L...

né le 10 Juillet 1950 à TALCY (41370)
41000 BLOIS

représenté par Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

12o) Madame Sylvie M... épouse N...

née le 18 Mai 1952 à SAINT-AIGNAN
41000 BLOIS

comparante en personne, assistée de Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

13o) Madame Françoise O... épouse P...

née le 18 Janvier 1949 à BLOIS (41000)
41000 BLOIS

comparante en personne, assistée de Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

14o) Madame Catherine Q... épouse R...

née le 12 Décembre 1957 à BLOIS (41000)
41000 BLOIS

comparante en personne, assistée de Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

15o) Madame Chantal Z... épouse S...

née le 02 Juillet 1953 à PARIS (15ÈME)
41000 BLOIS

comparante en personne, assistée de Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

16o) Monsieur Joël T...

né le 31 Mai 1955 à BLOIS (41000)
41120 CHAILLES

comparant en personne, assisté de Maître Christian QUINET, avocat au barreau de BLOIS

ET

INTIMÉE :

S. A. M. G. A. MONCEAU GÉNÉRALE ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal
1 Avenue des Cités Unies d'Europe
41100 VENDOME

représentée par Maître VIVANT de la SCP COTTY THIERRY VIVANT MARCHISIO ET LAUZERAL, avocat au barreau de PARIS

A l'audience publique du 04 Novembre 2008 tenue par Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller, et ce, en l'absence d'opposition des parties,

Assisté lors des débats de Mademoiselle Valérie LATOUCHE, Greffier,

Après délibéré au cours duquel Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller, a rendu compte des débats à la Cour composée de :

Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre,
Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller,
Madame Catherine PAFFENHOFF, Conseiller,

A l'audience publique du 02 Décembre 2008, Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre, assisté de Mademoiselle Valérie LATOUCHE, Greffier, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

RÉSUMÉ DE LA PROCÉDURE

Messieurs Jean-François Y..., Claude C..., Yves B..., ainsi que Mademoiselle Catherine D... et Madame Annie E... ont saisi le conseil de prud'hommes de BLOIS de diverses demandes à l'encontre de la SA MONCEAU GENERALE ASSURANCES, pour le détail desquelles il est renvoyé au jugement du 26 janvier 2007, la Cour se référant également à cette décision pour l'exposé de la demande reconventionnelle.

Monsieur C... a obtenu :
-26 640 € pour méconnaissance du statut protecteur,
-400 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Toutes les autres réclamations ont été rejetées.

La notification à Mademoiselle D... ne figure pas au dossier.

Le jugement a été notifié aux 4 autres salariés les 2, 3 et 21 février 2007.

Les 5 salariés ont fait appel le 22 février 2007.

Madame Marie-Claire A..., Madame Jocelyne G..., Madame Annick I..., Madame Pierrette K..., Monsieur Alain L..., Madame Sylvie N..., Madame Françoise P..., Madame Catherine R..., Madame Chantal S..., Monsieur Joël T... ont saisi le même conseil de prud'hommes de diverses demandes à l'encontre de la même société, pour le détail desquelles il est renvoyé au jugement du 8 novembre 2007 (No 288 / 2007).

Ils ont été déboutés et condamnés à payer 250 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement leur a été notifié les 17, 19 et 22 novembre 2007.

Ils en ont fait appel le 12 décembre 2007.

Enfin, Monsieur Serge X... a saisi le même conseil de prud'hommes de diverses demandes contre la même société, pour le détail desquelles il est renvoyé au jugement du 8 novembre 2007 (No287 / 2007).

Il a été débouté et condamné à payer 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement lui a été notifié le 17 novembre 2007.

Il en a fait appel le 12 décembre 2007.

Les affaires ont été jointes.

Le 4 novembre 2008, Monsieur X... et la société ont signé un procès-verbal de conciliation partielle portant sur toutes les réclamations, sauf sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur la réclamation pour frais irrépétibles.

Le 6 novembre 2008, la cour a entériné l'accord partiel conclu entre Madame E... et la société, portant sur les heures supplémentaires et l'indemnité pour travail dissimulé.

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES

Les appelants réclament des dommages et intérêts pour licenciement infondé dont le montant est le suivant :
- Madame K... : 47. 090 €
- Madame Annick H... : 34. 659, 60 €
- Madame Françoise P... : 43. 195, 80 €
- Madame Marie-Claire A... : 46. 827, 30 €
- Madame Sylvie N... : 63. 701, 10 €
- Madame Catherine R... : 34. 280, 40 €
- Monsieur Joël T... : 48. 000 €
- Madame Chantal S... : 38. 148, 30 €
- Madame Jocelyne G... : 34. 253, 40 €
- Monsieur Alain L... : 59. 921, 70 €
- Monsieur Claude C... : 61. 213, 50 €
- Monsieur Yves B... : 66. 441, 60 €
- Madame Annie E... : 59. 037, 90e
- Monsieur Jean-François Y... : 82. 165, 20e
- Madame D... : 56. 733, 30 €,
- Monsieur X... : 61. 844 €.

Monsieur C... réclame en plus 55. 500 € pour la méconnaissance de son statut protecteur.

Les appelants demandent enfin 2. 000 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile (sauf Monsieur X... qui sollicite 1. 800 €).

Ils font valoir qu'ils avaient une grande ancienneté, qu'ils travaillaient à BLOIS, que la société a décidé le transfert du siège à VENDÔME, qu'ils ont refusé, et qu'ils ont été licenciés pour motif économique le 24 octobre 2004.

Ils rappellent que la nécessité de sauvegarder la compétitivité s'apprécie au sein du secteur d'activité du groupe, comme il résulte des lettres de rupture, et donc au sein du groupe lui-même, et non du seul secteur IARD.

Ils relèvent qu'en 2003 et en 2004 le groupe était florissant, ayant des résultats bénéficiaires très importants, qui se sont encore nettement améliorés en 2005, et qu'ainsi la modification de l'implantation géographique n'avait pas pour but de sauvegarder la compétitivité, mais ne constituait qu'une opération immobilière spéculative au détriment de l'emploi, les appelants critiquant en outre l'opportunité de ce changement car la construction neuve à VENDÔME a coûté beaucoup plus cher que la réhabilitation du site de BLOIS.

Il ajoute que l'obligation de reclassement n'a pas été loyalement remplie, car les recherches doivent être précises, concrètes et personnalisées, ce qui n'a pas été le cas.

Ils font état d'un préjudice très important car ils sont toujours au chômage et nombre d'entre eux arrivent en fin de droits.

Monsieur C... soutient que son licenciement est nul car, nommé le 23 octobre 2003 comme membre du conseil d'administration de l'URSSAF, il était à ce titre protégé, alors que la société n'a pas demandé l'autorisation de le licencier.

Il nie être de mauvaise foi car il ignorait la conséquence de sa nomination sur le licenciement, ajoutant que l'employeur ne l'ignorait pas et qu'elle lui était de toutes façons opposable.

Il soutient donc qu'il doit être indemnisé sur la base de son salaire jusqu'à la fin de la période de protection en cours, soit jusqu'en novembre 2006 (25 mois), l'intimée n'expliquant pas pourquoi cette indemnisation devait être limitée à 9 mois.

La société fait appel incident pour obtenir le débouté de Monsieur C.... Elle demande 2. 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile à chaque salarié.

Après un rappel historique de son devenir et de ses rapports avec le groupe MONCEAU, elle explique qu'il était indispensable de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe, le secteur IARD, car ses difficultés économiques indéniables obligeaient le groupe à la soutenir depuis plusieurs années, affectant donc la compétitivité du groupe. Elle ajoute que les événements du 11 septembre 2001 et l'arrivée de nouveaux concurrents rendaient nécessaire la sauvegarde de sa compétitivité qui allait être, de façon certaine, affaiblie par ces événements.

Elle soutient que l'implantation du site dans des locaux neufs et équidistants de BLOIS et de PARIS était l'un des aspects de la réorganisation et ne saurait être, en tant que telle, critiquée.

Elle fait valoir que la meilleure offre de reclassement était le transfert des emplois à VENDÔME avec la mise à disposition de véhicules pour faire les trajets, que le plan social était très complet, et que la liste ciblée des postes disponibles au sein du groupe a été adressée aux appelants.

Subsidiairement, elle relève le caractère disproportionné des réclamations, en l'absence de justifications.

Elle affirme que Monsieur C... a eu un comportement déloyal en passant volontairement sous silence sa qualité de salarié protégé, ce qui doit conduire à lui refuser le bénéfice de cette protection.

Elle ajoute que le montant de son indemnisation ne peut excéder celle accordée aux représentants du personnel, qui était à l'époque de 2 ans, Monsieur C... ne pouvant donc prétendre à plus de 9 mois.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Eu égard aux dates ci-dessus, les appels, principal et incident, sont recevables.

La Société MGA est une société d'assurances qui a engagé :
- Monsieur C... le 27 mars 1972. Il était en dernier lieu rédacteur production
-Monsieur B... le 7 décembre 1970. Il était en dernier lieu rédacteur sinistre corporel
-Monsieur Y... le 7 octobre 1971. Il était en dernier lieu responsable services généraux
-Madame D... le 1er septembre 1975. Elle était en dernier lieu souscripteur risques spéciaux
-Madame E... le 6 octobre 1964. Elle était en dernier lieu responsable sinistres matériels
-Madame A... le 1er décembre 1971. Elle était en dernier lieu rédacteur sinistres dommages aux biens
-Madame G... le 1er juillet 1973. Elle était en dernier lieu rédacteur sinistres matériels
-Madame I... le 6 novembre 1972. Elle était en dernier lieu contrôleur sinistres dommages aux biens et production
-Madame K... le 3 octobre 1967. Elle était en dernier lieu dactylographe
-Monsieur L... le 22 août 1967. Il était en dernier lieu rédacteur sinistres corporels
-Madame N... le 1er juin 1972. Elle était en dernier lieu comptable
-Madame P... le 24 mars 1972. Elle était en dernier lieu hôtesse d'accueil standardiste
-Madame R... le 20 juin 1977. Elle était en dernier lieu rédacteur production
-Madame S... le 1er juillet 1973. Elle était en dernier lieu contrôleur production automobile
-Monsieur T... le 1er juillet 1973. Il était en dernier lieu contrôleur production surveillance portefeuilles
-Monsieur X... le 23 février 1971. Il était en dernier lieu chef de salle informatique.

Elle a intégré le groupe MONCEAU ASSURANCES en 2001.

Dans le cadre d'une réorganisation, elle a notamment abandonné le site de BLOIS pour intégrer de nouveaux locaux à VENDÔME.

C'est ainsi que, le 13 avril 2004, elle a proposé aux appelants la modification de leur contrat consécutive à ce déménagement, conformément à l'article L 321-1-2 du code du travail.

A la suite de leur refus, ils ont été licenciés pour motif économique le 20 octobre 2004, dans les termes suivants :
« Nous avons le regret de vous informer que nous sommes contraints de vous notifier votre licenciement pour motif économique. Cette décision s'inscrit dans le cadre de la réorganisation dont les causes ont été exposées au Comité d'entreprise, conformément aux dispositions des Livres IV et III du code du travail.
Les motifs économiques de cette décision sont les suivants :
• le groupe « Monceau Assurances » a entrepris un renforcement de son réseau et de son positionnement de proximité en vue de la rationalisation de ses coûts d'exploitation, afin de sauvegarder sa compétitivité et d'assurer par la même sa pérennité.
Ces dans cette logique que les structures juridiques rattachées à « Monceau Assurances » se réorganisent et se recentrent autour de deux pôles métiers : les assurances dommages et les assurances de personnes.
Il a donc été décidé que « Monceau Générale Assurances » prendrait un rôle clé dans les activités « dommages » du groupe dont elle a vocation à devenir leader. Elle centraliserait ainsi en grande partie ces activités et servirait de base à la conclusion d'accords de partenariat. En effet, la société présente de nombreux atouts pour le Groupe : elle dispose des compétences nécessaires et d'un réseau étendu d'agents généraux fidèles.
Afin que « Monceau Générale Assurances » soit à même de remplir ce nouveau rôle, le Groupe se doit de mettre à sa disposition les moyens nécessaires, notamment en facilitant les échanges avec les équipes parisiennes « dommages ».
En outre, le nouveau positionnement central de « Monceau Générale Assurances » dans le Groupe impose qu'elle ait une activité stable et pérenne et se donne les moyens de son développement.
La vétusté des locaux blésois imposerait des travaux de réhabilitation indispensables mais très onéreux que « Monceau Générale Assurances » n'a pas la capacité à assumer seule.
En effet, celle-ci a déjà connu une situation financière critique et n'est revenue à l'équilibre que récemment au prix d'investissements lourds financés par le Groupe. La réhabilitation du site blésois remettrait en cause, en imposant de nouveaux investissements, l'équilibre financier de l'entreprise. C'est dès lors le Groupe « Monceau Assurances » qui devrait assurer cet effort, mobilisant ses capacités financières aux seuls intérêts de « Monceau Générale Assurances ».
Or, le Groupe qui se doit de sauvegarder sa compétitivité et qui considère que le site de Blois, dans sa configuration actuelle, ne répond pas à l'objectif stratégique de positionnement de « Monceau Générale Assurances » comme leader du pôle « dommages », a décidé de mobiliser ses capacités financière dans l'intérêt global de celui-ci.
C'est pour ces raisons et compte tenu des nouveaux objectifs de « Monceau Générale Assurances » que le déménagement sur le site de VENDÔME a été décidé, ce qui implique la fermeture définitive du site blésois.
• Ce transfert à VENDÔME constitue pour de nombreux salariés de « Monceau Générale Assurances » une modification de leur contrat de travail.
Conformément à l'article L 321-1-2 du code du travail, vous avez été informée par « Monceau Générale Assurances » de son intention de modifier votre contrat de travail.
Par courrier en date du 22 avril 2004, vous avez refusé la modification de votre contrat de travail.
• Malgré nos efforts de reclassement au sein tant de notre Société que du Groupe auquel elle appartient et les propositions de postes qui vous ont été faites, votre reclassement n'a pas été possible.
C'est pourquoi, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour motif économique. »

La réorganisation destinée à sauvegarder la compétitivité est un motif économique pertinent.

Lorsque l'entreprise fait partie d'un groupe, c'est au sein du secteur d'activité de celui-ci, auquel elle appartient, qu'il convient de se placer pour apprécier la nécessité de sauvegarder cette compétitivité.

L'assurance IARD et l'assurance vie ne constituent pas des secteurs d'activité distincts. La société et le groupe ont un secteur d'activité unique, l'assurance ; en conséquence, le secteur d'activité du groupe se confond en l'espèce avec le groupe lui-même.

C'est d'ailleurs bien ce qui résulte des termes de la lettre de rupture, comme le démontrent les phrases suivantes :
- le groupe « Monceau Assurances » a entrepris un renforcement de son réseau et de son positionnement de proximité en vue de la rationalisation de ses coûts d'exploitation, afin de sauvegarder sa compétitivité et d'assurer par la même sa pérennité
-or, le groupe qui se doit de sauvegarder sa compétitivité...

La compétitivité peut être définie comme l'aptitude à faire des bénéfices et à augmenter, ou tout au moins à maintenir ses parts de marché en résistant à la concurrence.

Si les résultats nets du groupe ont été bénéficiaires en 2001 (de 8. 403. 000 €) et déficitaires en 2002 (de 16. 534. 000 €), les chiffres à prendre en considération, pour une réorganisation prenant effet en 2004 et des licenciements du 20 octobre 2004, sont ceux de 2003 et de 2004.

Or le groupe a réalisé un bénéfice :
- de 34. 628. 000 € en 2003,
- de 34. 900. 000 € en 2004.

Ainsi, après une année 2002 difficile, il s'était spectaculairement redressé en 2003 et en 2004.

Les dirigeants ont d'ailleurs légitimement exprimé leur satisfaction, en faisant savoir dans la presse, le 23 juin 2005, que les résultats 2004 ont été « les plus beaux qui ont été jamais présenté à nos sociétaires », le chiffre d'affaires ayant « décollé de 6, 20 % ».

Si la nécessité de sauvegarder la compétitivité peut être retenue lorsqu'il s'agit d'anticiper des difficultés futures mais certaines, le groupe ne peut arguer d'un contexte concurrentiel plus difficile en raison de l'arrivée sur le marché de nouveaux concurrents (des sociétés étrangères et des filiales d'établissements bancaires).

En effet, le résultat 2005 a été bénéficiaire de 61. 500. 000 €, ce qui constitue une augmentation considérable par rapport aux 2 années précédentes.

Une telle envolée ne peut être exclusivement dûe à la réorganisation décidée en 2004, si l'on se réfère au coût des nouveaux locaux de VENDÔME ; il est donc certain que, sans elle, le résultat aurait également augmenté, bien que dans des proportions moindres. Ainsi, en 2004, les craintes sur une perte de compétitivité en 2005, à supposer qu'elles aient existé, étaient infondées et ont été démenties par les faits.

En conclusion, la réorganisation a été décidée, non pour sauvegarder la compétitivité, mais pour l'améliorer, ce qui ne constitue pas un motif économique pertinent.

En outre, la modification du contrat dont le refus constitue l'élément matériel du licenciement ne constitue pas une tentative de reclassement.

Celui-ci devait être recherché, préalablement à la rupture, dans le groupe ; ces recherches devaient être précises, concrètes et personnalisées. La société devait donc interroger les autres sociétés du groupe, puis opérer une sélection pour proposer aux appelants le ou les postes correspondant le mieux à leurs compétences et à leur profil.

Or elle ne prouve pas avoir fait le nécessaire à cet effet.

En effet, si elle produit la lettre adressée aux appelants le 7 juin 2004, par laquelle elle les invite « à prendre connaissance de la liste des postes disponibles, éventuellement susceptibles de vous convenir, au sein des sociétés de MONCEAU ASSURANCES (voir annexe I) », la copie de ces lettres ne comporte aucune annexe, en sorte que l'on ne sait pas si une liste a été réellement proposée.

En tout état de cause, cette liste aurait été la même, et il ne se serait pas agi d'offres précises, concrètes et personnalisées.

Au surplus, étant rappelé que les licenciements sont du 20 octobre 2004, aucune nouvelle proposition n'a été adressée pendant plus de 4 mois, alors qu'il est certain que de nouveaux postes se sont libérés pendant cette période ; en effet, la société invoque deux séries de lettres des 28 janvier et 17 mai 2005 (alors que les offres de reclassement doivent être antérieures au licenciement) par lesquelles elle propose une liste des postes à pourvoir (contrairement à la lettre du 7 juin 2004, une liste de postes est bien jointe à ces courriers), certains d'entre eux s'étant forcément libérés avant le licenciement.

Elle n'a donc pas complètement rempli son obligation de reclassement.

Pour ces deux motifs, les licenciements sont infondés.

Les dommages et intérêts ne peuvent être inférieurs aux salaires des 6 derniers mois, les salariés ayant plus de 2 ans d'ancienneté dans une société d'au moins 11 salariés.

L'ancienneté de tous les appelants était très importante.

Ils produisent des documents justifiant leur situation de chômage.

Certains ont toutefois subi un préjudice moindre :
- Madame R... n'est plus à la recherche d'un emploi depuis le 10 mai 2007,
- Madame A... a elle aussi retrouvé un emploi, perdu récemment,
- si Mademoiselle D... n'est plus indemnisée depuis le 1er janvier 2005, c'est parce qu'elle réside en Grèce, ce qui résulte d'un choix personnel,
- Monsieur C... a retrouvé un emploi, sans préciser quand.

Leur préjudice matériel et moral sera évalué à :
- Monsieur Y... : 49. 300 €,
- Monsieur B... : 39. 900 €,
- Monsieur C... : 24. 500 €,
- Mademoiselle D... : 34. 000 €,
- Madame E... : 35. 400 €,
- Madame A... : 20. 100 €,
- Madame G... : 31. 100 €,
- Madame I... : 25. 000 €,
- Madame K... : 32. 600 €,
- Monsieur L... : 44. 900 €,
- Madame N... : 44. 100 €,
- Madame P... : 26. 800 €,
- Madame R... : 16. 500 €,
- Madame S... : 27. 500 €,
- Monsieur T... : 29. 800 €,
- Monsieur X... : 38. 400 €.

Il convient d'ordonner le remboursement des indemnités de chômage, dans la limite de 6 mois.

Lorsqu'il a été licencié, Monsieur C... était :
- conseiller des salariés,
- membre du conseil d'administration de L'URSSAF.

Bien que protégé à ce double titre, la société n'a pas demandé l'autorisation de le licencier. La rupture est nulle.

Elle ne peut sérieusement prétendre qu'elle l'ignorait. Les réunions ne se situaient pas en dehors des horaires de travail.

De toutes façons, cette nomination était publiée au recueil des actes administratifs des préfectures et était ainsi opposable à tous, et donc à l'employeur.

La mauvaise foi de Monsieur C... n'est pas démontrée. Il pouvait ignorer qu'il bénéficiait d'une protection.

Il a droit :
- à la réparation du préjudice découlant du caractère infondé du licenciement (c'est la somme ci-dessus),
- en outre, à une indemnité forfaitaire égale à la rémunération qu'il aurait perçue entre la date de son éviction (et non de son élection, comme indiquée dans ses conclusions, ce qui n'aurait aucun sens) et la fin de la période de protection en cours.

Chacune des 2 protections lui ouvre ainsi droit à une indemnité différente. Il peut bien sur solliciter la plus favorable : c'est celle comme membre du conseil d'administration de l'URSSAF.

Elle court de la fin du préavis à la cessation de ses fonctions, sans pouvoir excéder 2 ans et 6 mois, durée de la protection des élus du personnel.

Le préavis a pris fin le 20 janvier 2005.

Le mandat a pris fin le 22 octobre 2006.

L'indemnisation est donc de 21 mois + 6 mois = 27 mois, mais Monsieur C... ne réclame que 25 mois.

Il est dû, compte tenu du 13ème mois, 2. 220 x 25 = 55. 500 €.

Il est inéquitable que les appelants supportent leurs frais irrépétibles.

Il convient d'allouer, compte tenu de deux audiences devant la Cour pour une tentative de conciliation (la 1ère ayant donné lieu à un renvoi à cause de la grève SNCF mais les conseils des salariés s'étant déplacés) :
-1. 800 € à Monsieur X...,
-400 € à chacun des 15 autres salariés (le jugement étant simplement confirmé à ce titre pour Monsieur C...).

Enfin la société supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

DÉCLARE recevables les appels, principal et incident,

CONFIRME le jugement en ce qu'il a alloué une somme à Monsieur Claude C... pour méconnaissance de son statut protecteur mais, L'INFIRMANT sur le quantum, la porte de 26. 640 € à 55. 500 €,

LE CONFIRME également en ce qu'il lui a alloué 400 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

INFIRMANT le jugement pour le surplus, CONDAMNE la SA MGA à payer aux personnes suivantes des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de :
- Monsieur Jean-François Y... : 49. 300 €,
- Monsieur Yves B... : 39. 900 €,
- Monsieur Claude C... : 24. 500 €,
- Mademoiselle Catherine D... : 34. 000 €,
- Madame Annie E... : 35. 400 €,
- Madame Marie-Claire A... : 20. 100 €,
- Madame Jocelyne G... : 31. 100 €,
- Madame Annick I... : 25. 000 €,
- Madame Pierrette K... : 32. 600 €,
- Monsieur Alain L... : 44. 900 €,
- Madame Sylvie N... : 44. 100 €,
- Madame Françoise P... : 26. 800 €,
- Madame Catherine R... : 16. 500 €,
- Madame Chantal S... : 27. 500 €,
- Monsieur Joël T... : 29. 800 €,
- Monsieur Serge X... : 38. 400 €,

ORDONNE le remboursement par la SA MGA aux organismes concernés des indemnités de chômage payées à ces 16 salariés du jour de la rupture, dans la limite de 6 mois d'indemnités pour chacun,

CONDAMNE la SA MGA à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile :
-1. 800 € à Monsieur Serge X...,
-400 € à chacun des 14 autres salariés (Monsieur C... étant indemnisé par la confirmation du jugement qui lui a alloué 400 €),

CONDAMNE la SA MGA aux dépens de première instance et d'appel.

Et le présent arrêt a été signé par le Président de Chambre et par le Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 08/03215
Date de la décision : 02/12/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Blois


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-12-02;08.03215 ?
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