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03/07/2008 | FRANCE | N°07/03078

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 03 juillet 2008, 07/03078


CHAMBRE SOCIALE
Prud'hommes

GROSSES à
Me Stéphanie BLANC- PELISSIER
SCP SIMON- WURMSER- SCHWACH- BOUDIAS- FREZARD

COPIES à
Richard Y...

S. A. S. BIOTRONIK FRANCE

MINUTE N° : 437

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE TOURS en date du 31 Octobre 2007- Section : ENCADREMENT

ENTRE

APPELANT :

• Monsieur Richard Y..., né le 27 juin 2008 à CHATEAULT- RENAULT (45), demeurant ...


comparant en personne, assisté de Me Stéphanie BLANC- PELISSIER, avocat au barreau de TOURS

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INTIMÉE :

La Société par Actions Simplifiée BIOTRONIK FRANCE, dont le siège social est 2 Rue Nicolas Ledoux- Silic 231-94258 RUNGIS C...

CHAMBRE SOCIALE
Prud'hommes

GROSSES à
Me Stéphanie BLANC- PELISSIER
SCP SIMON- WURMSER- SCHWACH- BOUDIAS- FREZARD

COPIES à
Richard Y...

S. A. S. BIOTRONIK FRANCE

MINUTE N° : 437

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE TOURS en date du 31 Octobre 2007- Section : ENCADREMENT

ENTRE

APPELANT :

• Monsieur Richard Y..., né le 27 juin 2008 à CHATEAULT- RENAULT (45), demeurant ...

comparant en personne, assisté de Me Stéphanie BLANC- PELISSIER, avocat au barreau de TOURS

ET

INTIMÉE :

La Société par Actions Simplifiée BIOTRONIK FRANCE, dont le siège social est 2 Rue Nicolas Ledoux- Silic 231-94258 RUNGIS CEDEX, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

représentée par Me BOUDIAS de la SCP SIMON- WURMSER- SCHWACH- BOUDIAS- FREZARD, avocats au barreau de PARIS

Après débats et audition des parties à l'audience publique du 26 Juin 2008

LA COUR COMPOSÉE DE :

Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre
Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller
Madame Catherine PAFFENHOFF, Conseiller

Assistés lors des débats de Madame Geneviève JAMAIN, Greffier,

Puis ces mêmes magistrats en ont délibéré dans la même formation et à l'audience publique du 26 juin 2008, prorogé au jeudi 3 juillet 2008, Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre, assisté de Madame Geneviève JAMAIN, Greffier, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

RÉSUMÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Monsieur Richard Y... a été engagé, le 13 juin 2000, par la SARL BIOTRONIK France, en contrat à durée indéterminée, en qualité de responsable des ventes sur le secteur Ouest.

Le 13 février 2003, il a été convoqué à un entretien préalable fixé au 25 février suivant.

Finalement le conflit a été réglé au moyen d'un protocole d'accord signé le 16 juin de la même année.

Considérant que l'employeur n'avait pas rempli les obligations contenues dans l'accord, le salarié a saisi le Conseil de Prud'hommes de TOURS, section Encadrement, d'une action en résolution de la transaction et pour voir son ancien employeur condamné à lui verser :

- 111. 136, 14 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 15. 000 euros d'indemnité pour préjudice moral
- 4. 000 euros sur le fondement de l'article 700 Code de Procédure Civile

Pour sa part, la société a conclu au débouté des demandes présentées et à la condamnation de l'employé à payer :

- 10. 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du Code civil
- une amende civile en vertu de l'article 36-1 Code de Procédure Civile
- 3. 000 euros en application de l'article 700 Code de Procédure Civile

Par jugement du 31 octobre 2007, le Conseil de Prud'hommes de TOURS a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

Il a fait appel de la décision le 30 novembre 2007.

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES :

1 / Ceux du salarié, appelant :

Il sollicite l'infirmation du jugement contesté. Il conclut à la condamnation de son ancien employeur à lui verser :

- 111. 136, 14 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 15. 000 euros d'indemnité pour préjudice moral
- 4. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Il explique que la transaction conclue avec l'employeur soumettait les parties à une obligation de discrétion afin de ne pas nuire à l'une ou à l'autre, et de ne pas porter atteinte à leur réputation respective.

Il relève que la société, en répondant à une enquête sociale dans le cadre d'une procédure l'opposant à son ex- épouse, est allée trop loin dans ses déclarations et n'a pas respecté les obligations contenues dans la transaction.

Il en conclut que celle- ci doit être résolue du fait de la faute commise par l'employeur.

Par ailleurs, il estime que la lettre de licenciement ne contient pas de griefs précis et vérifiables et que, dès lors, les concessions de l'employeur matérialisées par la transaction sont dérisoires, justifiant l'annulation de celle- ci.

Il conteste également les motifs de son licenciement. Il prétend qu'il a toujours eu une attitude constructive au travail et qu'il a toujours veillé à remplir les objectifs qui lui étaient assignés. Dans ce contexte, il considère que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Enfin, il précise qu'il a subi un préjudice moral important puisqu'il avait été débauché par la société BIOTRONIK, celle- ci lui ayant fait miroiter un poste important et une rémunération intéressante.

2 / Ceux de la société :

Elle sollicite la confirmation de la décision critiquée. Elle conclut au débouté des demandes du salarié et à sa condamnation à payer :

- 10. 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du Code civil
- une amende civile en vertu de l'article 36-1 Code de Procédure Civile
- 3. 000 euros en application de l'article 700 Code de Procédure Civile

Elle rappelle qu'en vertu de l'article 2052 du Code civil la transaction a l'autorité de la chose jugée.

Elle explique qu'elle n'a fait que répondre à une enquêtrice dans le cadre de la procédure de divorce du salarié.

Elle précise également que la lettre de licenciement qui a été adressée à l'employé est parfaitement motivée.

Par ailleurs, elle indique que, dans le cadre de la transaction, elle a versé 35. 000 euros au salarié, ce qui représente selon elle une concession réelle eu égard à l'ancienneté et à la rémunération de l'appelant.

Enfin, elle prétend que l'appelant s'est entêté à conduire un procès abusif qui a occasionné un préjudice qu'il convient de réparer.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La notification du jugement est intervenue le 7 novembre 2007, en sorte que l'appel, régularisé le 30 novembre suivant, au greffe de cette Cour, dans le délai légal d'un mois, s'avère recevable en la forme.

1 / Sur l'allégation d'irrespect des obligations contractuelles :

L'article 1134 du Code Civil dispose que des conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

L'article 1147 du même code édicte, pour sa part, que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement des dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

L'article 1184 du Code Civil précise que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisferait point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté a le choix de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

L'article 2044 prévoit que la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.

Enfin, le dernier article du Code Civil invoqué par Monsieur Y... est l'article 2052, aux termes duquel les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort et ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion.

En l'espèce, le protocole d'accord transactionnel du 16 juin 2003 stipule :

" ... Les parties se sont rapprochées et, se faisant des concessions réciproques, se sont mises d'accord pour conclure une transaction dans les conditions des articles 2044 et suivants du Code Civil.

La société BIOTRONIK accepte de verser à Monsieur Y... une indemnité transactionnelle et forfaitaire de 35. 000 euros, s'engageant aussi à faire son affaire du paiement de l'éventuel CSG et CRDS afférents à cette somme, versée le jour de la signature, par chèque BNP PARIBAS, venant en sus du solde de tout compte perçu par Monsieur Y....

... En contrepartie, Monsieur Y... donne l'assurance à BIOTRONIK de n'avoir introduit aucun contentieux et s'estime pleinement rempli de tous ses droits nés ou à naître relatifs à la relation de travail ".

La teneur des deux articles 2044 et 2052 du Code Civil était rappelée et un dernier paragraphe était rajouté, ainsi rédigé :

" Les parties s'engagent l'une envers l'autre dès la pleine et entière exécution par l'autre partie de ses obligations telles que prévues à la présente transaction, à ne se livrer à aucun comportement ou indiscrétion fautifs ayant pour objet de nuire à l'autre partie ou de porter atteinte à sa réputation. "

A six centimètres de cette phrase de trois lignes, les parties ont apposé les mentions manuscrites : " lu et approuvé, bon pour accord ".

Dans l'ordonnance de non- conciliation du 15 mai 2003, le juge aux affaires familiales de Tours a estimé qu'un doute subsistait sur l'aptitude de Monsieur Y... de s'occuper de ses enfants, provenant du fait qu'il avait perdu son emploi dans des conditions peu claires, en sorte qu'il convenait " d'ordonner une enquête sociale aux fins de déterminer les conditions matérielles et morales de vie des enfants au domicile de chacun des parents ".

L'enquête sociale, dont n'est communiquée à la Cour que la page 13 concernant " les indications extérieures ", précise qu'a été consulté " l'ex- employeur de Monsieur Y... ".

Dans le paragraphe " cursus scolaire et vie professionnelle ", il est exposé ceci :

" il travaillait pour la société BIOTRONIK depuis juin 2000 avant d'être licencié en janvier suite à un entretien avec préavis de trois mois. Il avait déjà fait une formation pour la société BIOTRONIK et l'avait quittée. Il avait demandé une réintégration. Il a des qualités professionnelles incontestables, cependant, son comportement s'est tellement dégradé au fur et à mesure du temps que sa société ne pouvait plus le garder. Il n'assurait plus son travail et était injoignable tant pour les clients que pour son employeur, son responsable a dû faire des démarches extérieures pour s'enquérir de ce qu'il faisait en fin d'année 2002. Il a été licencié pour raisons liées à l'activité professionnelle et a accepté ce licenciement... "

Il est certain :

- que la transaction s'est appliquée sans encombre dans sa teneur principale,
- que la société BIOTRONIK ne s'est pas livrée spontanément à ces confidences, mais sur demande de l'autorité judiciaire qui a mandaté un enquêteur social,
- que les " confidences " répondaient à des questions précises de cet enquêteur sur la vie professionnelle de Monsieur Y... et les raisons de son licenciement,
- que l'enquête sociale judiciaire ne peut être invoquée que pour asseoir une décision quant à l'intérêt des enfants, elle reste " secrète " et ne doit pas sortir de l'enceinte de justice.

Cependant, l'ex- employeur n'aurait pas dû perdre de vue les engagements qu'il avait signés dans la transaction quelques mois auparavant, quant à l'indiscrétion fautive, sans que les écarts commis par celui- ci, lors de l'enquête sociale, puissent remettre en question les fondements de la transaction, la Cour estime qu'en évoquant :

- qu'il était injoignable tant pour les clients que l'employeur, que l'employeur a dû faire des démarches extérieures pour s'enquérir de ce qu'il faisait fin 2002,
- que son comportement s'est tellement dégradé.

L'ex- employeur n'a pas respecté ainsi les termes de la condition de confidentialité rappelée plus haut qui le contraignait à ne pas lui nuire ou ne pas porter atteinte à sa réputation.

Or ces confidences-là nuisent incontestablement à sa réputation professionnelle vis-à-vis de son épouse dont il est en train de divorcer et vis-à-vis des avocats de la cause.

En application de l'article 1147 du Code Civil, la Cour cantonnera à 1 500 euros les dommages et intérêts à allouer à Monsieur Y... dans la mesure où l'écho des confidences est resté très cantonné, mais où le préjudice moral subi mérite réparation.

2 / Sur les demandes concernant le licenciement :

Dès lors que la Cour considère n'y avoir lieu de prononcer la résolution de la transaction intervenue, toutes les demandes et tous les moyens soulevés à propos de la révision de la transaction et l'examen nouveau des conditions de licenciement seront rejetés comme mal fondés.

Au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Monsieur Y... devra recevoir une somme arbitrée à 1 500 euros pour la première instance et l'appel.

Les dépens seront partagés par moitié, aucune partie n'ayant triomphé dans l'intégralité de ses prétentions.

Il résulte de ces considérations que les demandes de dommages et intérêts divers présentées par la société devront être repoussées comme infondées.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

DÉCLARE,

RECOIT en la forme l'appel de Monsieur richard Y...,

AU FOND, CONFIRME le jugement critiqué (Conseil de prud'hommes de Tours, Encadrement, 31 octobre 2007) en toutes ses dispositions sauf sur les dommages et intérêts pour préjudice moral, l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens ;

ET STATUANT À NOUVEAU sur ces points-là,

DIT que la clause de confidentialité contenue dans la transaction du 16 juin 2003 n'a pas été parfaitement respectée par la société BIOTRONIK FRANCE, ce qui a provoqué un préjudice moral à Monsieur Y....

EN CONSÉQUENCE, CONDAMNE cette société à payer à Monsieur Y... :

- 1 500 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral
- 1 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile pour la première instance et l'appel.

DÉBOUTE les parties de toutes leurs autres demandes

DIT que les dépens de l'instance et d'appel seront partagés par moitié entre les parties.

Et le présent arrêt a été signé par le Président de Chambre et par le Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 07/03078
Date de la décision : 03/07/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Tours


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-07-03;07.03078 ?
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