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03/07/2008 | FRANCE | N°07/02945

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 03 juillet 2008, 07/02945


COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS
la SCP LAVAL- LUEGER
Me Estelle GARNIER

03 / 07 / 2008
ARRÊT du : 03 JUILLET 2008



No RG : 07 / 02945

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 05 Septembre 2007

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :
S. A. R. L. TOUS TRAVAUX agissant poursuites et diligences de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège, 5, Rue du Bourg-45140 BOULAY LES BARRES
représentée par la SCP LAVAL- LUEGER, avou

és à la Cour
ayant pour avocat Me AISENSTEIN, du barreau de PARIS

Monsieur Dominique Y..., demeurant ...

représenté ...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS
la SCP LAVAL- LUEGER
Me Estelle GARNIER

03 / 07 / 2008
ARRÊT du : 03 JUILLET 2008

No RG : 07 / 02945

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 05 Septembre 2007

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :
S. A. R. L. TOUS TRAVAUX agissant poursuites et diligences de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège, 5, Rue du Bourg-45140 BOULAY LES BARRES
représentée par la SCP LAVAL- LUEGER, avoués à la Cour
ayant pour avocat Me AISENSTEIN, du barreau de PARIS

Monsieur Dominique Y..., demeurant ...

représenté par la SCP LAVAL- LUEGER, avoués à la Cour
ayant pour avocat Me AISENSTEIN, du barreau de PARIS

D'UNE PART

INTIMÉE :
Madame Monique Z... épouse Y..., demeurant ...

représentée par Me Estelle GARNIER, avoué à la Cour
ayant pour avocat Me Françoise DEVIERS, du barreau d'ORLEANS

D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 18 Octobre 2007

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :
Monsieur Jean- Pierre REMERY, Président de Chambre,
Monsieur Alain GARNIER, Conseiller,
Monsieur Thierry MONGE, Conseiller.

Greffier :
Madame Nadia FERNANDEZ, lors des débats et du prononcé de l'arrêt.

DÉBATS :

A l'audience publique du 29 Mai 2008, à laquelle, sur rapport de Monsieur RÉMERY, Magistrat de la Mise en Etat, les avocats des parties ont été entendus en leurs plaidoiries.

ARRÊT :

Lecture de l'arrêt à l'audience publique du 03 Juillet 2008 par Monsieur le Président REMERY, en application des dispositions de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile.

EXPOSÉ DU LITIGE

La Cour statue sur l'appel, interjeté par la société Tous travaux et M. Dominique Y..., suivant déclaration du 18 octobre 2007 (no 07 / 02945), d'un jugement rendu le 5 septembre 2007 par le tribunal de commerce d'Orléans.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions des parties signifiées et déposées les :

*19 mai 2008 (par Mme Monique Z..., épouse de M. Dominique Y...),

*20 mai 2008 (par la société Tous travaux, et M. Y...).

Dans le présent arrêt, il sera seulement rappelé ici que la société Tous Travaux, entreprise générale de bâtiment, a été constituée sous la forme d'une SARL, dont le capital est actuellement représenté par 850 parts sociales, dont 300 appartiennent à M. Dominique Y..., époux de Mme Monique Z..., lequel exerce également la gérance de la société. D'après les statuts à jour de celle- ci, (article 7), M. Dominique Y... était, avant son mariage sous le régime légal, le 7 octobre 1972, titulaire de 50 parts, les autres parts ayant été acquises de la façon suivante : en 1983, 20 parts cédées par son père, Claude Y..., fondateur de la société, 30 parts provenant de la succession de M. Marcel Y... ; en 1989, 50 parts correspondant à un nouvel apport ; en 1991, 48 parts cédées par M. Jean Y... et 102 parts cédées par M. C..., ce qui donne bien le total de 50 + 20 + 30 + 50 + 48 + 102 = 300 parts détenues actuellement par M. Dominique Y.... L'épouse de ce de dernier, ayant manifesté en 2001 son intention d'être personnellement associée, le jugement déféré lui a, sur le fondement de l'article 1832-2 du Code civil, reconnu cette qualité à concurrence de 110 parts, soit la moitié des 220 parts acquises par son époux depuis le mariage, à l'exception des 30 parts provenant de la succession de Marcel Y... (300 parts-50 acquises avant mariage-30 provenant de cette succession = 220), ce que conteste la société et M. Dominique Y..., à l'appui de leur appel, tandis que Mme Monique Z... qui conclut à la confirmation du jugement pour l'essentiel, en demande l'infirmation seulement en ce qu'il a refusé d'annuler les assemblées générales tenues sans qu'elle soit convoquée depuis le 1er décembre 2001.

En appel, chaque partie a développé les demandes et moyens qui seront analysés et discutés dans les motifs du présent arrêt.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du magistrat de la mise en état du 27 mai 2008, dont les avoués des parties ont été avisés.

A l'issue des débats, le président d'audience a indiqué aux parties que l'arrêt serait rendu le 3 juillet 2008.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Attendu qu'aux termes de l'article 1832-2, alinéa 3 du Code civil, dont les dispositions sont applicables aux SARL, la qualité d'associé est reconnue, pour la moitié des parts souscrites ou acquises, au conjoint qui a notifié à la société son intention d'être personnellement associé, ce que Mme Monique Z... a fait, ainsi que l'admettent d'ailleurs les intimés, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception signé le 3 décembre 2001 ; que, pour s'opposer à cette prétention, abstraction faite des 50 parts acquises avant le mariage et des 30 provenant de la succession de M. Marcel Y..., dont le sort n'est pas en cause, puisque Mme Z... conclut à la confirmation du jugement de ce chef, la société et M. Dominique Y... soutiennent que les 20 parts acquises en 1983 l'ont été par voie de donation de son père Claude, que les 50 acquises en 1989 l'ont été grâce à des deniers fournis par son frère Nicolas et que les 150 (48 + 102) acquises en 1991 ont été réglées au moyen d'un don manuel consenti par son frère Pascal ;

Qu'il n'appartient pas, compte tenu de la présomption de communauté instituée à l'article 1402 du Code civil, à l'époux revendiquant d'apporter la preuve que ces acquisitions successives ont été réalisées au moyen de biens communs mais, au contraire, aux tiers (notamment M. Dominique Y...) de combattre la présomption, ce qu'il propose en produisant divers documents qu'il convient d'examiner ; qu'en ce qui concerne l'acquisition de 20 parts en 1983, M. Dominique Y... fait état d'un don manuel de son père portant sur ces parts, dont l'existence, d'ailleurs présumée en faveur du donataire, est suffisamment établie par une attestation, fût- elle postérieure et rédigée au cours de l'instance d'appel et peu important qu'elle ne respecte pas scrupuleusement les dispositions de l'article 202 du Code de procédure civile, par le donateur, Claude Y..., cette attestation étant d'ailleurs corroborée par la version des statuts de la société Tous travaux datée du 21 décembre 1992 qui fait état d'une « répartition » des parts par M. Claude Y... entre ses enfants Dominique, Pascal et Patrick ;

Qu'en ce qui concerne les 50 parts acquises en 1989, M. Dominique Y... n'invoque pas un don manuel portant sur les parts elles- mêmes, puisqu'elles ont été acquises à titre onéreux, mais soutient que les sommes nécessaires lui auraient été remises par son frère Nicolas ; qu'en ce sens, il verse aux débats un extrait du livre de banque tenu par la société faisant apparaître, au 26 décembre 1988, un apport en capital de M Dominique Y..., d'un montant de 5. 000 € et un apport de M. Nicolas Y... d'un montant de 15. 000 FF, ce qui correspond bien, pour ce dernier, à l'achat des 150 parts mentionné aux statuts ; que, parallèlement, est justifiée, dans le même temps, la remise en banque par son bénéficiaire, la société Tous travaux, d'un chèque de 20. 000 FF (5. 000 + 15. 000) émis par Nicolas Y..., ce dont on peut déduire que la participation de Dominique Y... à l'augmentation de capital décidée en 1988 et réalisée en 1989 a été réglée par son frère Nicolas, de sorte qu'elle n'a pas été financée sur des biens communs ;

Qu'en revanche, pour les acquisitions de parts de 1991, les pièces fournies sont insuffisantes à rapporter la preuve qu'elles n'ont pas été faites sur les deniers communs, puisque deux documents sont versés aux débats, dont une attestation établie par Mme D..., veuve de Pascal Y..., indiquant seulement qu'elle a déposé, en banque, en mai 1991, trois chèques de 20. 000 FF, soit la somme totale de 60. 000 FF et qu'elle a effectué deux retraits en espèces, d'un montant de 30. 000 FF chacun, ce qui est justifié par le second document (relevé de compte mensuel) chacun « sur la demande de son mari... cette somme permettant l'achat de parts pour un de ses frères », ce qui est trop imprécis, puisque la somme de 60. 000 FF ne correspond pas, d'après les statuts, au prix des cessions effectuées en 1991, qui était de la moitié de cette somme (150 parts pour Dominique + 60 pour Pascal + 49 pour Nicolas + 41 pour Evelyne = 300 parts à 100 FF, soit 30. 000 FF) et qu'on ignore quel est le frère qu'évoque l'attestation, de sorte que rien n'établit que les acquisitions faites par Dominique Y... en 1991 ne l'auraient pas été de deniers communs ;

Qu'il en résulte que Mme Monique Z... est fondée à revendiquer la qualité d'associée au titre de la moitié- soit 75- des 150 parts acquises par son époux en 1991, portant, d'après les statuts, les numéros 30 à 77 et 199 à 300 ;

Attendu que M. Dominique Y... ne peut s'opposer, par ailleurs, à cette revendication au motif que les acquisitions de 1991 se rattacheraient aux parts qui lui appartenaient en propre antérieurement, alors qu'il s'agit de l'acquisition, par voie de cession entre associés, de parts distinctes, ce qui interdit ici d'appliquer la règle de l'accessoire des propres de l'article 1406 du Code civil ; qu'il ne peut, non plus, paralyser le droit de revendication accordé par l'article 1832-2 du Code civil en faisant valoir, pour suivre une certaine opinion doctrinale restrictive, qu'il exerce une profession séparée, dont les parts seraient le support nécessaire, alors qu'à ce titre, M. Dominique Y... ne vise que sa qualité de gérant de la société, et nullement sa profession d'entrepreneur en bâtiment et qu'il pourra continuer à être gérant, même si son épouse dispose de 75 des 850 parts composant le capital (à peine 9 %, ce qui ne devrait pas davantage empêcher le fonctionnement de la société, comme le craint le gérant), ce qui démontre que les parts litigieuses ne sont nullement nécessaires à l'exercice de la profession qualifiée de séparée de M. Dominique Y... ; qu'enfin aucun agrément n'étant stipulé par les statuts, la demande de Mme Monique Z... n'est pas susceptible de se heurter à un tel obstacle ;

Attendu, sur les autres demandes, que, d'une part, les époux étant titulaires chacun, sur les 150 parts acquises en 1991, de 75 parts et non copropriétaires des 150 estimées indivises, il n'y a pas lieu de désigner, par application des dispositions de l'article 1844, alinéa 2 du Code civil, un mandataire unique pour participer aux décisions collectives comme le sollicite M. Dominique Y... ; que, d'autre part, la demande de Mme Monique Z... étant pour partie fondée, elle n'a commis aucune faute de nature à justifier la demande reconventionnelle en indemnisation d'un préjudice qu'aurait subi la société ; qu'au contraire, celle- ci et son gérant ayant indûment privé Mme Monique Z... de son droit de participer aux décisions collectives, c'est à tort que le tribunal a refusé d'annuler, conformément à l'assignation délivrée le 23 septembre 2003, les assemblées générales auxquelles l'intéressée n'a pas été convoquée depuis le 3 décembre 2001, date de notification de son intention d'être personnellement associée ;

Attendu que chaque partie succombant partiellement en ses demandes, chacune supportera ses propres frais et dépens ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

STATUANT publiquement, par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort :

CONFIRME le jugement déféré sur le principe de la qualité d'associée de Mme Monique Z..., épouse de M. Dominique Y... et sur l'obligation de convocation, sous astreinte, d'une assemblée générale, sauf à préciser que :

*1o Mme Z... n'aura personnellement la qualité d'associée de la S. A. R. L. Tous travaux que pour 75 parts sociales, correspondant à la moitié des 150 parts acquises par son époux en 1991 et portant, d'après l'article 7 des statuts, les numéros 30 à 77 et 199 à 300 et

*2o le délai de convocation d'un mois de l'assemblée générale devant modifier en ce sens les statuts, qui a été fixé par le tribunal, sera compté à partir de la date de signification du présent arrêt, la convocation incombant au gérant ;
L'INFIRME pour le surplus et ANNULE toutes les assemblées tenues après le 3 décembre 2001, pour lesquelles Mme Z... n'aura pas été convoquée ;

REJETTE toutes les autres demandes des parties et DIT que chacune d'elles supportera ses propres frais et dépens de première instance et d'appel ;
ET le présent arrêt a été signé par M. Rémery, Président et Mme Fernandez, Greffier ayant assisté au prononcé de l'arrêt.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 07/02945
Date de la décision : 03/07/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce d'Orléans


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-07-03;07.02945 ?
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