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17/06/2008 | FRANCE | N°08/00247

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 17 juin 2008, 08/00247


CHAMBRE SOCIALE
Prud'hommes

GROSSES le 17 juin 2008
à
Me Christian BERGER
Thierry X...


COPIES le 17 juin 2008
à
S. A. CERI



MINUTE N° : 373 / 08

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE TOURS en date du 28 Novembre 2007- Section : ENCADREMENT

ENTRE

APPELANTE :

S. A. CERI prise en la personne de son gérant
13 Mail Francis de Miomande
37200 TOURS

représentée par Maître Christian BERGER, avocat au barreau de TOURS

ET

INTIMÉ :

Monsieur Thierry

X...


...


comparant en personne

Après débats et audition des parties à l'audience publique du 20 Mai 2008

LA COUR COMPOSÉE DE :

Monsieur Daniel V...

CHAMBRE SOCIALE
Prud'hommes

GROSSES le 17 juin 2008
à
Me Christian BERGER
Thierry X...

COPIES le 17 juin 2008
à
S. A. CERI

MINUTE N° : 373 / 08

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE TOURS en date du 28 Novembre 2007- Section : ENCADREMENT

ENTRE

APPELANTE :

S. A. CERI prise en la personne de son gérant
13 Mail Francis de Miomande
37200 TOURS

représentée par Maître Christian BERGER, avocat au barreau de TOURS

ET

INTIMÉ :

Monsieur Thierry X...

...

comparant en personne

Après débats et audition des parties à l'audience publique du 20 Mai 2008

LA COUR COMPOSÉE DE :

Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre
Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller
Madame Catherine PAFFENHOFF, Conseiller

Assistés lors des débats de Mademoiselle Valérie LATOUCHE, Greffier,

Puis ces mêmes magistrats en ont délibéré dans la même formation et à l'audience publique du 17 Juin 2008, Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre, assisté de Mademoiselle Valérie LATOUCHE, Greffier, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Monsieur Thierry X... est employé par la SA CERI depuis le 12 juin 1989, en qualité d'analyste programmeur ; il a été promu chef de projet avec le statut de cadre par courrier du 21 mai 2001.

Le 29 juillet 2006, il prend acte de la rupture aux torts de son employeur.

Par requête du 13 octobre 2006, il saisit le conseil de prud'hommes de plusieurs demandes au titre de rappel de salaire, d'heures supplémentaires et de dommages et intérêts pour rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, demandes pour le détail desquelles il est renvoyé au jugement du 28 novembre 2007, la cour se référant également à cette décision pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure, de la demande reconventionnelle et des moyens initiaux des parties.

Faisant partiellement droit aux prétentions du requérant, les premiers juges lui allouent :

- 8 190, 52 € d'heures supplémentaires,
- 819, 05 € de congés payés afférents,
- 741, 66 € de repos compensateur,
- 74, 16 € de congés payés afférents,
- 17. 252, 58 € d'indemnité de licenciement,
- 18. 267, 78 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Le 21 janvier 2008, la société CERI relève appel du jugement notifié le 8 janvier 2008.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

A / L'employeur

La société CERI poursuit l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions hormis en ce qui concerne le rappel de salaire dont le salarié a déjà été débouté par le conseil de prud'hommes.

Au soutien de son appel, elle fait valoir que :

Thierry X... a perçu des salaires supérieurs aux minima conventionnels de sorte qu'il ne lui est dû aucune somme de ce chef ;

le temps passé en déplacement n'est pas du temps de travail effectif et son contrat prévoit une contrepartie financière forfaitaire en fonction du nombre de déplacements effectués ; il ne déduit pas le temps des repas ; le temps de travail du salarié a été décompté de façon très favorable pour lui ;

il a effectué des déplacements et des dépassements d'horaire en dehors de toute directive de sa hiérarchie, notamment en choisissant de se déplacer en dehors du temps de travail, préférant partir très tôt le matin plutôt que la veille ainsi que cela lui était demandé ; il ne respectait pas davantage les heures de travail convenues sur le contrat de prestation qui ne devait jamais dépasser sept heures par jour ;

elle n'a pas reconnu l'existence d'heures supplémentaires devant le conseil de prud'hommes contrairement à ce qui ressort du jugement, la pièce n° 9 ayant été remplacée par une pièce 14 qui prenait en compte les demi- journées de la veille ou du matin de l'intervention chez le client, omises dans le premier décompte partiellement calqué sur celui du salarié ;

ce dernier assimile, à tort, les journées de récupération qui lui ont été accordées au titre du compte temps correspondant aux heures supplémentaires récupérées, à des journées RTT prévues pour les salariés maintenus à 39 heures alors que son temps de base est de 35 heures portées à 38, 5 heures en contrepartie d'un salaire de 115 %, ce qui exclut les heures supplémentaires comprises entre 35 et 39 heures ;

la prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur n'étant pas justifiée, Monsieur X... doit être débouté de l'intégralité de ses demandes.

B / Le salarié

Thierry X... indique qu'il est d'accord avec les calculs du conseil de prud'hommes en ce qui concerne les heures supplémentaires ; il sollicite également la confirmation du jugement concernant la rupture du contrat de travail et réclame 99, 40 € de rappel de salaire, outre 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il réplique que :

malgré plusieurs réclamations de sa part, la société CERI n'a pas voulu lui payer ses salaires et les heures supplémentaires dont il justifie, raison pour laquelle il a été contraint de prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur ;

il lui est dû un rappel de salaire car la société prend en compte les congés payés pour le calcul de son salaire réel qui, en réalité, est inférieur au minimum conventionnel pour l'année 2006 ;

ses heures de déplacement ont entraîné des heures supplémentaires que l'employeur refuse de lui payer au prétexte, notamment, qu'elles ont été récupérées sous forme de RTT, ce qui n'est pas le cas, ceux- ci étant uniquement destinés à compenser le passage des 39 heures initialement prévues dans son contrat, à la semaine de 35 heures ;

la société CERI facturait les prestations au client sur la foi des plannings qu'il élaborait avant sa prestation et des bons d'intervention signés par ce dernier, de sorte qu'elle ne saurait soutenir aujourd'hui qu'elle n'avait pas autorisé les heures supplémentaires qui en découlaient ;

il ne lui était pas possible de partir l'après- midi pour le lendemain, car il était déjà en intervention et il était également tributaire des horaires d'avion et du nombre de vols qui ne lui laissait guère le choix du moment de son départ s'il voulait accomplir les prestations prévues chez le client précédent.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le rappel de salaire :

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Thierry X... de sa demande de ce chef jusqu'en 2005, après avoir constaté que la société CERI lui avait versé des salaires d'un montant au moins égal à 115 % du minimum conventionnel correspondant aux modalités de gestion des horaires de l'article 3 de l'accord sur la réduction du temps de travail du 22 juin 1999 dont relève le salarié.

Concernant l'année 2006, c'est à bon droit qu'ont été inclus dans le montant global des salaires versés au salarié les congés payés perçus au moment de son départ au titre du solde de tout compte.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Sur les jours de réduction du temps de travail :

L'avenant du 21 mai 2001 renvoie aux conditions générales de la convention collective nationale applicables au personnel des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseils ainsi qu'aux conditions fixées par le règlement intérieur de l'entreprise.

Il est également stipulé les conditions particulières suivantes, applicables à compter du premier avril 2001 :

- une rémunération annuelle de 221. 000 francs correspondant à 13 versements bruts mensuels de 17. 000 francs,
- le bénéfice du statut de cadre,
- la mise à disposition d'une voiture de cadre,
- l'organisation d'un planning,
- une prime de déplacement de 100 francs pour un déplacement, 300 francs pour deux déplacements et 500 francs pour trois déplacements.

Le premier janvier 2002, un nouvel avenant intervient relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail stipulant :

- l'application de la loi sur la réduction du temps de travail n'entraînera pas de diminution des salaires,
- l'allocation d'une prime brute de 100 francs par journée de déplacement aux conditions suivantes : nuit passée à l'extérieur, une journée de déplacement avec un minimum d'amplitude de 12 heures.

Il est également institué un compte de temps disponible constitué pour tout salarié " quel que soit le mode retenu pour la comptabilisation de son temps de travail ", géré sur une période de référence de 12 mois consécutifs (année civile) concrétisé par 10 jours de RTT, calculée sur la base d'une durée de travail de 39 heures pour un nombre de jours travaillé de 252 jours auxquels on retire 25 jours de congés payés, soit 227 jours ramenés à 217 pour une RTT de 35 heures hebdomadaires.

Dans la mesure où elles sont allouées indépendamment du mode retenu pour la comptabilisation du temps de travail, elles sont dues au salarié en tout état de cause, sans pouvoir compenser les heures supplémentaires effectuées par ce dernier au- delà de 39 heures.

Les mentions portées sur les bulletins de paie confirment que Thierry X..., rémunéré sur la base de 169 heures mensuelles et 39 heures hebdomadaires jusqu'en décembre 2001, a vu son salaire maintenu au même montant pour 151, 67 heures de travail mensuel correspondant à 35 heures par semaine à partir du 1er janvier 2002, date d'entrée en vigueur de l'avenant signé du même jour.

Ces stipulations plus favorables que la convention collective et l'accord du 22 juin 1999 consenties postérieurement à ces textes et en toute connaissance de cause, s'imposent à l'employeur.

Sur le nombre d'heures supplémentaires :

Compte tenu de ce qui précède, les heures supplémentaires doivent être décomptées à partir de 39 heures de travail hebdomadaire.

Les heures de déplacement dépassant le temps de déplacement normal pour se rendre du domicile du salarié à son lieu de travail constituent du temps de travail effectif, sous réserve qu'elles aient été autorisées par l'employeur et sauf à déduire la durée normale de déplacement du salarié pour se rendre de son domicile sur le lieu d'exécution de son contrat au début de chaque grand déplacement, fixée à une heure en l'occurrence.

Cette autorisation est présumée avoir été donnée chaque fois qu'il a été demandé au salarié de rejoindre un lieu situé loin de son domicile le lundi matin ou encore chaque fois que l'employeur a manifesté son approbation en procurant ou en réservant des billets d'avion pour des déplacements de Monsieur X... tôt le matin, quel que soit le jour de la semaine, tout en facturant une journée entière de travail au client, à partir de 9 heures.

S'agissant des trajets de retour, il n'a jamais été question de les effectuer le lendemain des interventions.

Le salarié devait donc rentrer à l'issue de sa prestation chez le client ; la société CERI, qui ne pouvait l'ignorer, a implicitement autorisé les heures supplémentaires subséquentes.

Ces heures de déplacement constituent du temps de travail effectif au- delà de 17 heures 30, dont à déduire le temps normal pour se rendre du domicile du salarié sur le lieu d'exécution de son contrat et pour en revenir, soit une heure à la fin de chaque grand déplacement.

Le temps de travail sur place ne devait pas dépasser le temps facturé au client, soit 7 heures par jour d'intervention, sauf autorisation expresse de l'employeur dont Thierry X... ne justifie pas au cours des cinq années litigieuses.

Le temps de travail effectif à prendre en compte pour les interventions est donc de 7 heures en tout entre 9 heures et 17 heures 30, dont à déduire une heure et demie pour les repas durant lesquels le salarié n'est pas à la disposition de son employeur.

Application faite de l'ensemble de ces paramètres, la société CERI est redevable à Monsieur X... de 255 heures supplémentaires du 13 octobre 2001 au mois de décembre 2004, outre 4, 45 heures en 2006, que ne peuvent compenser les journées de RTT pour les raisons sus- énoncées, soit un rappel de salaire de 5. 996, 94 € outre 599, 69 € de congés payés afférents sans repos compensateur, ces heures ne dépassant jamais le contingent annuel de 90 heures.

Sur la rupture du contrat de travail :

La prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse lorsque celui-ci rapporte la preuve qui lui incombe de griefs imputables à l'employeur ; elle s'analyse en une démission dans le cas contraire.

La lettre de prise d'acte ne fixe pas les limites du litige, de sorte qu'un salarié peut invoquer d'autres griefs que ceux qui y sont énoncés.

En l'espèce, le non- paiement d'un montant important d'heures supplémentaires est d'une gravité suffisante pour justifier la rupture du contrat de travail aux torts de la SA CERI.

Le jugement sera confirmé sur ce point ainsi qu'en ce qui concerne le montant des sommes allouées au salarié conformément à la convention collective applicable s'agissant de l'indemnité conventionnelle de licenciement et à l'article L. 1235-3 du nouveau code du travail pour les dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

Il convient d'allouer à Monsieur X... une indemnité de 800 € de ce chef en dédommagement des frais non compris dans les dépens qu'il a dû exposer pour faire valoir ses droits en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions, hormis en ce qui concerne le montant des heures supplémentaires et des congés payés afférents,

STATUANT À NOUVEAU DE CE CHEF,

CONDAMNE la société CERI à verser à Thierry X... :

- 5. 996, 94 € au titre des heures supplémentaires,
- 599, 69 € de congés payés afférents,

ORDONNE la remise des documents de fin de contrat rectifiés conformément à ces dispositions et à celles du jugement lorsqu'elles ont été confirmées,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société CERI à verser à Thierry X... :

- 800 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs prétentions,

CONDAMNE la SA CERI aux entiers dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 08/00247
Date de la décision : 17/06/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Tours


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-06-17;08.00247 ?
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