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24/01/2008 | FRANCE | N°07/00457

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 24 janvier 2008, 07/00457


COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS
SCP LAVAL-LUEGER
Me DAUDÉ

24 / 01 / 2008 ARRÊT du : 24 JANVIER 2008



No RG : 07 / 00457

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Commerce de MONTARGIS en date du 12 Janvier 2007

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :
Monsieur Patrick X..., demeurant ...45570 OUZOUER SUR LOIRE
représenté par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour
ayant pour avocat la société ALCIAT-JURIS, du barreau de BOURGES

Madame Nathalie Y

... épouse X..., demeurant ...45570 OUZOUER SUR LOIRE
représentée par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour
ayant pour avocat la...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

GROSSES + EXPÉDITIONS
SCP LAVAL-LUEGER
Me DAUDÉ

24 / 01 / 2008 ARRÊT du : 24 JANVIER 2008

No RG : 07 / 00457

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Commerce de MONTARGIS en date du 12 Janvier 2007

PARTIES EN CAUSE

APPELANTS :
Monsieur Patrick X..., demeurant ...45570 OUZOUER SUR LOIRE
représenté par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour
ayant pour avocat la société ALCIAT-JURIS, du barreau de BOURGES

Madame Nathalie Y... épouse X..., demeurant ...45570 OUZOUER SUR LOIRE
représentée par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour
ayant pour avocat la société ALCIAT-JURIS, du barreau de BOURGES

D'UNE PART

INTIMÉE :
SA SOCIETE GENERALE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, 29 boulevard Haussmann-75009 PARIS
représentée par Me Jean-Michel DAUDÉ, avoué à la Cour

D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 19 Février 2007

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, affaire plaidée sans opposition des avocats à l'audience publique du 20 Décembre 2007, devant Monsieur Alain GARNIER, Conseiller Rapporteur, par application de l'article 786 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Lors du délibéré :
Monsieur Jean-Pierre REMERY, Président de Chambre,
Madame Odile MAGDELEINE, Conseiller,
Monsieur Alain GARNIER, Conseiller, qui en a rendu compte à la collégialité.

Greffier :
Madame Nadia FERNANDEZ, lors des débats et du prononcé de l'arrêt.

Lecture de l'arrêt à l'audience publique du 24 Janvier 2008, par Monsieur le Président REMERY, en application des dispositions de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La SOCIETE GENERALE a consenti à la société TH FINANCE DEVELOPPEMENT CONSEIL, le 20 décembre 2001, un prêt de 199. 000 Euros destiné à financer l'acquisition des actions de la société BERNARD DEDYK, garanti par le cautionnement solidaire de Monsieur X..., avec le consentement exprès de son épouse. Par acte du 18 septembre 2004, les époux X... se sont également portés cautions solidaires au profit de la banque de tous les engagements de la société BERNARD DEDYK à concurrence de 200. 000 Euros en principal. Les deux sociétés débitrices principales ayant été mises en liquidation judiciaire, l'établissement de crédit a déclaré ses créances et assigné les cautions, par acte du 24 août 2005, en exécution de leurs engagements.

Par jugement du 12 janvier 2007, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de MONTARGIS a condamné solidairement les époux X... à payer à la SOCIETE GENERALE la somme de 260. 951,83 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 août 2005, outre une indemnité de procédure de 1. 000 Euros

Les époux X... ont relevé appel et ont obtenu par ordonnance du 10 juillet 2007 du délégué du Premier président de la Cour d'appel l'arrêt de l'exécution provisoire dont était assorti le jugement.

Par leurs dernières conclusions signifiées le 5 décembre 2007, poursuivant l'infirmation de la décision entreprise, ils font valoir que la banque, au vu de l'aggravation du solde de la société DEDYK et de l'existence d'impayés, ne pouvait ignorer la fragilité de la situation financière de sa cliente et les risques de cessation des paiements et a voulu obtenir les cautionnements pour se prémunir d'une défaillance éventuelle. Ils prétendent avoir consenti à donner leur garantie en contrepartie de l'offre de la SOCIETE GENERALE de mettre en place un billet à ordre de 200. 000 Euros, laquelle promesse n'a pas été tenue, ce qui constitue un mensonge assimilé à une manoeuvre dolosive devant entraîner la nullité de l'engagement de caution. Subsidiairement, ils considèrent que la banque, en leur laissant croire à la mise en place du billet, n'a pas respecté l'exigence de bonne foi et de loyauté imposée par l'article 1134 du Code civil et doit être condamnée à leur verser l'équivalent des sommes réclamées au titre de la société DEDYK, soit 161. 451,83 Euros. Madame X... invoque l'obligation de mise en garde des dispensateurs de crédit vis à vis des emprunteurs non avertis et en déduit que la SOCIETE GENERALE a engagé sa responsabilité à son égard et doit être sanctionnée par l'allocation de la somme de 161. 451,83 Euros en réparation du préjudice subi.

Par ses dernières écritures du 10 décembre 2007, la SOCIETE GENERALE relève que les appelants ne contestent ni le principe, ni le montant réclamé au titre de l'engagement de caution donné à la société TH FINANCE DEVELOPPEMENT CONSEIL (99. 500 Euros). Elle souligne que pour la société DEDYK, les époux X... se sont engagés en toute connaissance de cause en garantie de toutes les sommes dues et qu'ils n'ignoraient pas, Monsieur X... étant le dirigeant, que la société DEDYK présentait un solde débiteur important. Elle ajoute que Monsieur X... était à même de connaître la situation financière de sa société et que les prévisions de trésorerie fournies lors de la souscription de l'engagement n'envisageaient pas d'aggravation du solde débiteur du compte de nature à caractériser un état de cessation des paiements. Elle indique que la véritable situation de la société DEDYK n'a été découverte que le 26 avril 2005 par la note qui lui a été remise. Elle fait observer que la dette restait la même qu'elle soit enregistrée en compte ou en billet financier et que les appelants ne rapportent pas la preuve d'une quelconque manoeuvre dolosive ou d'un manquement à l'obligation de loyauté. Elle soutient que Madame X... n'est pas fondée à rechercher sa responsabilité, dès lors que le devoir de mise en garde du banquier s'applique au profit d'un emprunteur, ce qui n'est pas le cas de l'espèce et qu'au surplus, Madame X..., du fait de la qualité de son mari, était au courant de la situation, tandis que les époux X... disposait d'un patrimoine dépassant largement la créance, comme l'a retenu l'ordonnance du délégué du Premier président du 10 juillet 2007. Elle conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et à la capitalisation des intérêts.

A l'issue des débats, le président d'audience a indiqué aux parties que l'arrêt serait rendu le 24 janvier 2008.

SUR QUOI

Attendu que les époux X... ont signé le 18 septembre 2004 un cautionnement solidaire garantissant l'ensemble des engagements de la société BERNARD DEDYK pour un montant de 200. 000 Euros ; qu'à supposer même que la souscription d'un billet à ordre par la société DEDYK ait été envisagée entre Monsieur X... et la SOCIETE GENERALE, les époux X... ne justifient pas avoir subordonné leur engagement de caution à l'existence de ce billet ; qu'en effet, la cause de l'obligation de la caution est la considération du crédit accordé ou maintenu par le créancier au débiteur principal ;

Que dès le 22 septembre 2004, la SOCIETE GENERALE a adressé à la société DEDYK, à l'attention de Monsieur X..., la lettre suivante :

« Votre compte présente à ce jour une position débitrice de 220. 333,73 Euros en dépassement de la facilité de caisse de 23. 000 Euros qui vous était consentie. Suite au rendez-vous avec Monsieur Z..., vous nous avez adressé un engagement de caution personnelle et solidaire d'un montant de 200. 000 Euros en garantie de tous les engagements de votre société à notre égard. Vous nous avez également remis à l'escompte une créance de TVA de 45. 040 Euros afin de réduire ce découvert et d'autre part vendu pour 39. 000 Euros de SICAV. En conséquence le prévisionnel de trésorerie fin 2004 que vous nous avez remis doit être revu à la baisse de 84. 040 Euros. Nous serions donc disposés à envisager une autorisation temporaire de découvert en compte jusqu'au 31 décembre 2004 de 170. 000 Euros et une pointe exceptionnelle de 226. 000 Euros le 30 septembre 2004 sous réserve d'examen avant le 15 octobre 2004 du prévisionnel de trésorerie jusqu'au 30 juin 2005 et de l'état des chantiers et contrats en cours » ;

Que les autorisations mentionnées dans la lettre précitée tiennent exactement compte des prévisions de trésorerie établies par Monsieur X... jusqu'au 31 décembre 2004 et répondent donc, quant à leur montant, aux sollicitations de la société DEDYK, sans rupture ou réduction brutale des concours bancaires, ceux-ci n'ayant été dénoncés que le 2 mai 2005, après que Monsieur X... eut avisé la banque le 26 avril 2005 d'une perte prévisionnelle de 550. 000 Euros au 31 mars 2005 ;

Qu'il résulte de ce qui précède que les époux X..., qui n'ont jamais fait grief à la SOCIETE GENERALE, avant la défaillance de la société DEDYK, de l'absence de mise en place du billet à ordre allégué, ce qui, au demeurant, n'aurait pas changé la nature de la dette, prétendent vainement que la banque a cherché à les tromper de façon à les déterminer à se rendre cautions, de sorte que le dol du créancier n'est pas caractérisé, pas plus d'ailleurs qu'un manquement à l'obligation de loyauté ; qu'il sera, en outre, ajouté que Monsieur X..., en sa qualité de dirigeant de la société DEDYK, devait disposer de tous les renseignements utiles pour apprécier les risques et l'opportunité de son engagement à l'occasion du financement qu'il a lui-même sollicité ;

Attendu, s'agissant de Madame X..., que le fait qu'elle fût l'épouse du dirigeant ne suffit pas à faire présumer qu'elle avait connaissance de l'état des finances de la société cautionnée ou jouait un rôle dans la gestion de celle-ci, alors qu'elle est professeur de lycée ; qu'elle est donc recevable à se prévaloir de la faute que la banque aurait commise en raison des conditions dans lesquelles des concours ont été apportés à la débitrice principale ; qu'il lui appartient, toutefois, à défaut de se prévaloir de la disproportion entre son engagement et ses ressources qui, dans l'affirmative, pourrait faire douter du respect par l'établissement de crédit de son devoir de mise en garde sur les risques encourus, de démontrer que le banquier n'a pas normalement satisfait à ses obligations professionnelles de prudence et de diligence en accordant des crédits à une entreprise dont la situation est déjà irrémédiablement compromise et en omettant de porter cette information à la connaissance de la caution, l'incitant ainsi à s'engager ;

Mais attendu qu'un banquier n'assume pas le risque d'exploitation d'une entreprise, sa responsabilité devant s'apprécier en fonction de la situation apparente au moment où il consent le crédit ; que lors de la souscription de l'engagement litigieux, les comptes de la société DEDYK, dont la SOCIETE GENERALE avait connaissance, présentaient un résultat positif depuis plusieurs années, dont 45. 007 Euros au 31 mars 2004, et il est établi, par les pièces du dossier, que la banque, pas plus que Monsieur X..., n'étaient conscients de la dégradation considérable de la situation financière de cette société, qui avait pour activité la construction de pavillons, ce qui ne leur a été révélé qu'à la suite d'une révision approfondie des comptes par l'expert comptable, et par une note remise le 26 avril 2005 faisant apparaître une perte de 550. 000 Euros au 31 mars 2005 à la suite d'anomalies dans les modes de comptabilisation des contrats de construction ;

Que Madame X... ne prouve donc pas que la SOCIETE GENERALE savait ou aurait dû savoir que la situation de la société DEDYK était irrémédiablement obérée lors de la mise en place des crédits et sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts ;

Que le montant de la créance de la SOCIETE GENERALE n'étant pas contesté, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions ;

Attendu que la capitalisation des intérêts, judiciairement demandée depuis les dernières conclusions de la banque du 10 décembre 2007, et conforme aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil, sera ordonnée ;

Que les appelants supporteront solidairement les dépens d'appel, et verseront, en outre, une indemnité de 2. 500 Euros à la SOCIETE GENERALE sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Rejette la demande en dommages et intérêts formée par Madame X... ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du Code civil à compter du 10 décembre 2007 ;

Condamne solidairement les époux X... aux dépens d'appel et à verser la somme de 2. 500 Euros à la SOCIETE GENERALE au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Accorde à Maître DAUDE, Avoué, le droit reconnu par l'article 699 du même code ;

Et le présent arrêt a été signé par Monsieur REMERY, Président, et Madame FERNANDEZ, Greffier présent lors du prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 07/00457
Date de la décision : 24/01/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Montargis


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-01-24;07.00457 ?
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