DOSSIER N 07 / 00135
ARRÊT DU 10 DECEMBRE 2007
DV-No 2007 / 00
COUR D'APPEL D'ORLEANS
Prononcé publiquement le LUNDI 10 DECEMBRE 2007, par la 2ème Chambre des Appels Correctionnels, section 1.
Sur appel d'un jugement du Tribunal correctionnel de TOURS du 18 JANVIER 2007.
PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :
X... Mansourah divorcée X...
née le 07 Avril 1962 à OULED DJEMAA (ALGERIE)
Fille de X... Mohamed et de A... Kheira
Assistante maternelle
Divorcée
De nationalité française
Jamais condamnée
Demeurant... 92100 BOULOGNE BILLANCOURT
Prévenue, intimée
Non comparante
Représentée par Maître MOLUSSON-DAVID Sylvie, avocat au barreau de TOURS, substituant Maître PAY-BERTIN Marie-Réale, avocat au barreau de TOURS
C... Boudjemaa
né le 04 Septembre 1952 à OULED AOUAT (ALGERIE)
Fils de C... Tayeb et de C... Aldjia
Maçon
De nationalité algerienne
Jamais condamné
Demeurant Chez Madame E... Malika-... 37300 JOUE LES TOURS
Prévenu, intimé
Comparant
Assisté de Maître BLACHER Nathalie, avocat au barreau de TOURS
E... Malika
née le 18 Janvier 1949 à SKIKDA (ALGERIE)
Fille de E... Mohamed et de H... Ayachi
Divorcée
De nationalité française
Jamais condamnée
Demeurant... 37300 JOUE LES TOURS
Prévenue, intimée
Comparante
Assistée de Maître BLACHER Nathalie, avocat au barreau de TOURS
G... Catherine Agnès Yvonne épouse I...
née le 28 Septembre 1972 à TOURS (37)
Fille de G... Serge et de J... Agnès
Mére au foyer
Mariée
De nationalité française
Déjà condamnée
Demeurant... 37270 ATHEE SUR CHER
Prévenue, intimée
Non comparante, ni représentée
LE MINISTERE PUBLIC
Appelant,
X... Abdelkader, demeurant... 92100 BOULOGNE BILLANCOURT
Partie civile, appelant
Comparant
COMPOSITION DE LA COUR,
lors des débats, du délibéré de l'arrêt,
Président : Monsieur VELLY,
Conseillers : Monsieur BERSCH,
Monsieur LEBRUN,
GREFFIER :
lors des débats et au prononcé de l'arrêt, Madame Evelyne PEIGNE.
MINISTÈRE PUBLIC :
représenté aux débats par Madame AMOUROUX, Substitut Général.
et au prononcé de l'arrêt par Monsieur GESTERMANN, Avocat Général.
L'arrêt a été prononcé en audience publique, par Monsieur VELLY, Président.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE :
LE JUGEMENT :
Le Tribunal correctionnel de TOURS, par jugement contradictoire à l'égard des prévenus et de la partie civile, et contradictoire à signifier à l'encontre de Madame G... (signifié le 07 / 02 / 2007 à sa personne).
SUR L'ACTION PUBLIQUE :
-a relaxé X... Mansourah divorcée X... des fins
d'USAGE D'UNE ATTESTATION OU D'UN CERTIFICAT INEXACT, fin 1999 et 1er semestre. 2000, à JOUE LES TOURS 37, NATINF 000152, infraction prévue par l'article 441-7 AL. 1 3 du Code pénal et réprimée par les articles 441-7 AL. 1,441-10,441-11 du Code pénal
-a relaxé C... Boudjemaa des fins
d'ETABLISSEMENT D'UNE ATTESTATION OU D'UN CERTIFICAT INEXACT, les 21octobre 28 octobre et 29. 10. 1999, à JOUE LES TOURS 37, NATINF 000153, infraction prévue par l'article 441-7 AL. 1 1 du Code pénal et réprimée par les articles 441-7 AL. 1,441-10,441-11 du Code pénal
-a relaxé E... Malika des fins
d'ETABLISSEMENT D'UNE ATTESTATION OU D'UN CERTIFICAT INEXACT, les 21octobre 28 octobre et 29. 10. 1999, à JOUE LES TOURS 37, NATINF 000153, infraction prévue par l'article 441-7 AL. 1 1 du Code pénal et réprimée par les articles 441-7 AL. 1,441-10,441-11 du Code pénal
-a relaxé G... Catherine Agnès Yvonne épouse I... des fins
d'ETABLISSEMENT D'UNE ATTESTATION OU D'UN CERTIFICAT INEXACT, les 21octobre 28 octobre et 29. 10. 1999, à JOUE LES TOURS 37, NATINF 000153, infraction prévue par l'article 441-7 AL. 1 1 du Code pénal et réprimée par les articles 441-7 AL. 1,441-10,441-11 du Code pénal
SUR L'ACTION CIVILE :
A déclaré la constitution de partie civile de M. X... Abdelkader recevable mais mal fondée ;
A laissé à la charge de M. X... Abdelkader les sommes exposées par lui et non comprises dans les frais et dépens.
LES APPELS :
Appel a été interjeté par :
Monsieur X... Abdelkader, le 22 Janvier 2007 contre Madame G... Catherine, Monsieur C...Boudjemaa, Madame E... Malika, Madame X...Mansourah, son appel étant limité aux dispositions civiles
M. le Procureur de la République, le 29 Janvier 2007 contre Madame G... Catherine, Monsieur C...Boudjemaa, Madame E... Malika, Madame X...Mansourah
DÉROULEMENT DES DÉBATS :
A l'audience publique du 05 NOVEMBRE 2007
Ont été entendus :
Monsieur VELLY en son rapport.
C...Boudjemaa, E... Malika en leurs explications.
X... Abdelkaderen ses observations.
Le Ministère Public en ses réquisitions.
Maître MOLUSSON-DAVID Sylvie, substituant Maître PAY-BERTIN Marie-Réale, Maître BLACHER Nathalie, Avocats des prévenus en leur plaidoirie
C...Boudjemaa, E... Malika à nouveau ont eu la parole en dernier.
Le Président a ensuite déclaré que l'arrêt serait prononcé le 10 DECEMBRE 2007.
DÉCISION :
Résumé des faits et de la procédure :
Le 20 Mars 2000, Abdel Kader X..., professeur de sciences-français déposait plainte avec constitution de partie civile auprès du Doyen des Juges d'Instruction de TOURS contre Mesdames Malika E..., Catherine G... épouse I... et Monsieur Boudjemaa C... pour établissement d'attestations faisant état de faits matériellement inexacts et contre son épouse Mansourah X... pour usage desdites attestations.
Il exposait que dans le cadre de la procédure de divorce engagée par son épouse, Mansourah X..., celle-ci avait produit des attestations mensongères datées des 21,28 et 29 Octobre 1999 dans lesquelles, d'une part, Mesdames E... et G... décrivaient les violences qu'il aurait fait subir à son épouse au cours d'une scène qui se serait déroulée au bas de leur immeuble et, d'autre part, Monsieur Boudjemaa C... précisait l'avoir toujours vu consommer de l'alcool dans le débit de boissons dans lequel lui-même avait l'habitude de se rendre.
Une information était ouverte le 4 Août 2000.
Mise en examen le 1er Mars 2001, Mansourah X... contestait avoir commis une quelconque infraction. Elle affirmait que les faits relatés par les personnes qui avaient témoigné en sa faveur étaient réels. Elle indiquait qu'en réalité Abdel Kader X... ne tolérait pas sa demande de divorce et qu'en définitive il voulait la " guerre " pour lui faire du mal.
Catherine G... épouse I... et Malika E... étaient mises en examen le même jour du chef d'établissement d'attestation faisant état de faits matériellement inexacts, puis Boudjemaa C... pour les mêmes infractions le 12 Mars 2001.
Catherine G... affirmait avoir assisté en 1998 à la scène de violence relatée par elle dans ce document et avoir vu, de son balcon, un homme qui s'en prenait à une femme dont elle avait su par Madame E... qu'il s'agissait de Madame X.... Elle ajoutait n'avoir aucun intérêt à relater une scène imaginaire, mais précisait qu'elle avait employé l'expression " roué de coups " pour décrire ce qui était plutôt " une forte bousculade ". C'est Malika E... qui lui demandera une attestation.
Malika E... contestait l'infraction pour laquelle elle était mise en examen indiquant avoir assisté en 1998 à la scène de violence décrite par Catherine G... épouse I..., elle leur avait même dit qu'elle alerterait la police.
Boudjemaa C... relatait que le jour de la scène de violence ci-dessus décrite il était présent au domicile de Malika E... situé ... à JOUE LES TOURS c'est à dire au dessus du lieu où se situait ladite scène et que s'il ne l'avait pas vue, il avait entendu des cris. Il ajoutait qu'au vu de la description faite par Madame E... de l'auteur des violences il avait reconnu Abdel Kader X... qu'il connaissait sous le surnom de " Tarzan " pour l'avoir rencontré à plusieurs reprises dans le débit de boissons que lui-même fréquentait.
Au cours d'une confrontation organisée par le Magistrat Instructeur, Abdel Kader X... maintenait n'avoir ni frappé, ni bousculé son épouse dans les circonstances indiquées par les témoins.
Malika E... et Catherine G... épouse I... confirmaient avoir vu la scène relatée par elle.
Madame X...Mansourah indiquait en outre que son époux s'alcoolisait ce qui pouvait le faire devenir violent. Le magistrat instructeur faisait ressortir que ceci ne résultait pas d'autres documents que l'attestation de Boudjemaa C... et n'était pas en rapport avec le maintien de la partie civile. Elle assurait que les témoins n'avaient dit que la stricte vérité..
A l'issue de la confrontation le 16 Mars 2001, Abdel Kader X... remettait au magistrat instructeur l'enregistrement de la conversation téléphonique qu'il avait eue avec Madame E... le jour où il avait reçu son attestation par son avocat.
Au cours de l'audition de la partie civile en date du 13 Avril 2001, le juge d'instruction précisait avoir écouté cette cassette où Madame E... niait avoir rencontré X... et contestait avoir rédigé l'attestation litigieuse.
Le 14 Septembre 2001, sur réquisitions conformes du parquet, le magistrat instructeur rendait une ordonnance de non lieu en considérant que la preuve du caractère mensonger des attestations n'était pas rapportée.
Sur appel, la Chambre de l'instruction, par arrêt du 15 Novembre 2001, infirmait cette décision en considérant que l'enregistrement de la cassette n'avait pas été retranscrit, que Madame E... n'avait pas été entendue sur son contenu alors qu'elle niait avoir rencontré Abdel Kader X... et contestait avoir rédigé l'attestation litigieuse ; qu'il y avait lieu par ailleurs de vérifier auprès du propriétaire du débit de boissons cité par Boudjemaa C... dans son attestation si Abdel Kader X... fréquentait cet établissement.
Le magistrat instructeur faisait exécuter des vérifications auprès des tenanciers des bars situés rue Chantepie et rue des Ribains à JOUE LES TOURS. L'un déclarait que Abdel Kader X... fréquentait son établissement le matin pour acheter le journal et ne pas se souvenir qu'il consommait de l'alcool, tandis que le second indiquait ne pas connaître Abdel Kader X....
Le Juge d'instruction rendait le 16 Juillet 2004 une seconde ordonnance de non-lieu frappée d'appel.
Par arrêt du 2 Décembre 2004, la Chambre d'instruction de cette Cour a infirmé l'ordonnance de non-lieu critiquée et a renvoyé les trois premiers mis en examen pour avoir à JOUE LES TOURS les 21,28 et 29 Octobre 1999 établi pour le compte de Madame X... des attestations faisant état de faits matériellement inexacts pouvant porter préjudice à Monsieur X..., et Madame X... pour avoir fait usage, fin 1999 et au cours du premier semestre 2000, à TOURS et JOUE LES TOURS de ces attestations, devant le Tribunal Correctionnel d'ORLEANS. Saisie d'un pourvoi le 7 Décembre 2004, la Cour de Cassation l'a déclaré non admis le 17 Février 2005.
Par jugement du 18 Janvier 2007, cette juridiction a déclaré non coupables ces quatre personnes et déclaré recevable en la forme la partie civile mais non fondée.
Le 22 Janvier 2007, Monsieur X... a relevé appel des dispositions civiles de ce jugement et le lundi 29 Janvier 2007, le Procureur de la République a enregistré son appel contre les quatre relaxés.
Demandes et moyens des parties :
1o) ceux de Monsieur X..., partie civile :
Il a sollicité, en personne,15. 000,00 euros de dommages-intérêts pour réparer son préjudice, au terme de neuf années d'instruction, contre les quatre mis en examen, en soulignant que tous sont manipulés par son épouse.
2o) ceux de Madame l'Avocat Général :
Elle a requis la relaxe pour les quatre mis en examen, en soulignant que la fausseté n'était pas démontrée et en faisant valoir que l'appel général du parquet de TOURS n'était destiné qu'à permettre à la Cour d'examiner l'affaire en son entier.
3o) ceux des intimés :
Maître BLACHER a plaidé pour Madame E... et Monsieur C..., que ses clients ne connaissaient pas le couple X..., qu'ils n'avaient rien surajouté, alors que rien ne démontrait qu'ils aient pu mentir, en sorte que le délit n'était pas caractérisé, faute d'éléments constitutifs réunis en l'espèce, ce qui commandait la confirmation de la relaxe.
Mesdames I... et X... sont restées absentes.
MOTIFS de la décision :
1o) sur l'action publique :
Pour que le délit d'établissement de fausse attestation soit établi, il convient de démontrer que les attestations faisaient état de faits matériellement inexacts.
Les trois témoins ont rédigé ainsi leurs récits :
A T T E S T A T I O N S
Madame I... :
Le 28 Octobre 1999 elle atteste avoir été témoin des faits suivants :
" J'ai vu Monsieur X... agresser son épouse au bas de mon immeuble à la sortie du club de loisirs, il l'a rouée de coups tout en hurlant des mots en arabe ".
Monsieur C... :
Le 29 Octobre 1999, il a écrit :
" Je vais au café rue Chantepie pour jouer au loto, je le vois toujours en train de boire de l'alcool ".
Madame E... :
Le 21 Octobre 1999 elle écrivait :
" Le Club où travaillait Madame X... se trouve juste sous mon balcon. J'ai vu un homme qui venait lui faire un cinéma, il était ivre mort, quand j'ai demandé qui était cet homme qui insultait cette femme auprès des enfants, on m'a dit que c'était son mari, il parlait en arabe comme ça personne ne témoignerait tout en parlant il l'a poussée en disant ces mots sale pute, tu n'es qu'une femme rien de plus, je me moque de la loi ici aussi je suis ton mari, encore c'est moi la loi, tu ne peux rien faire, personne ne te croira avec beaucoup de chose d'autre ".
Madame E... :
-a confirmé devant le magistrat instructeur avoir assisté en 1998 à la scène décrite (cote D 79o)
-a maintenu sa version en cote D 124,
-l'a rééditée devant le Tribunal Correctionnel de TOURS le 14 Décembre 2006,
-ainsi que devant cette Cour le 5 Novembre 2007.
Monsieur C... :
-maintenait sa version (cote D 82),
-ce qu'il a confirmé tant devant le Tribunal Correctionnel,
-que devant cette Cour.
Madame I... :
-a développé (cote D78) le récit de son attestation devant le Juge d'instruction,
-l'a confirmé lors de la confrontation (cote D 83).
Dans le dossier d'information, qui a fait l'objet d'un supplément, rien n'a permis de démontrer que les attestations confirmées résultaient d'un complot manigancé par Madame X... contre son mari ou d'un mensonge organisé, alors qu'aucun des trois attestants ne connaissait Monsieur X....
Certes, Monsieur X... s'est permis de téléphoner à Madame E... qui lui aurait nié alors avoir rédigé une telle attestation, mais la dénégation peut parfaitement se comprendre par la peur de réaction violente d'un tel interlocuteur au téléphone.
Et si l'attestation de Monsieur C... sur le fait d'avoir vu Monsieur X... boire de l'alcool, n'est confortée par aucun élément objectif du dossier, puisque le gérant du bar, entendu, a déclaré que Monsieur X... ne buvait que du café le matin, rien ne démontre qu'il ait rédigé l'attestation avec une intention mensongère.
Dès lors, les éléments constitutifs de l'infraction ne sauraient être réunis, faute d'intention frauduleuse de leur part, et de preuve de la connaissance de l'inexactitude matérielle.
De même, Madame X..., qui a utilisé en justice ces attestations, dont il n'est pas démontré que les faits rapportés soient matériellement inexacts, ne peut rien se voir reprocher.
Il en résulte que la relaxe doit être confirmée pour tous les quatre.
2o) Sur l'action civile :
La constitution de partie civile de Monsieur X... doit être déclarée irrecevable, dès lors que la relaxe est intervenue pour chacune des quatres personnes poursuivies.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR STATUANT publiquement et contradictoirement, mais par arrêt contradictoire à signifier pour Madame I... et Madame X...,
RECOIT, en la forme, les appels de la partie civile et du ministère public,
Au fond,
CONFIRME le jugement critiqué (Tribunal Correctionnel de TOURS du 18 Janvier 2007) sur les relaxes de Mesdames I..., E... et X... et de Monsieur C...,
Mais L'INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau,
DECLARE irrecevable Monsieur X... en sa constitution de partie civile.