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25/10/2007 | FRANCE | N°06/03090

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 25 octobre 2007, 06/03090


CHAMBRE SOCIALE

Prud'Hommes

GROSSES
à
SELARL BARON- BELLANGER- PALHETA
SCP GROGNARD- LEPAGE- BAUDRY

COPIES
à
M. Y...

SAS SEYFERT DESCARTES



DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE TOURS en date du 25 Octobre 2006

Section : INDUSTRIE

ENTRE

APPELANT :

Monsieur Christophe Y...


...


représenté par Maître Philippe BARON, membre de la SELARL BARON- BELLANGER- PALHETA, avocat au barreau de TOURS

ET

INTIMÉE :

S. A. S. SEYFERT DESCARTE

S prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
Avenue Monseigneur Romero
37160 DESCARTES

représentée par Maître LEPAGE, memb...

CHAMBRE SOCIALE

Prud'Hommes

GROSSES
à
SELARL BARON- BELLANGER- PALHETA
SCP GROGNARD- LEPAGE- BAUDRY

COPIES
à
M. Y...

SAS SEYFERT DESCARTES

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE TOURS en date du 25 Octobre 2006

Section : INDUSTRIE

ENTRE

APPELANT :

Monsieur Christophe Y...

...

représenté par Maître Philippe BARON, membre de la SELARL BARON- BELLANGER- PALHETA, avocat au barreau de TOURS

ET

INTIMÉE :

S. A. S. SEYFERT DESCARTES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
Avenue Monseigneur Romero
37160 DESCARTES

représentée par Maître LEPAGE, membre de la SCP GROGNARD- LEPAGE- BAUDRY-, avocat au barreau de TOURS

Après débats et audition des parties à l'audience publique du 20 Septembre 2007,

LA COUR COMPOSÉE DE :

Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre
Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller
Madame Catherine PAFFENHOFF, Conseiller

Assistés lors des débats de Madame Ghislaine GAUCHER, Greffier,

Puis ces mêmes magistrats en ont délibéré dans la même formation et à l'audience publique du 25 Octobre 2007,

Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre

Assisté de Mademoiselle Valérie LATOUCHE, Greffier,

A rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE,

Monsieur Christophe Y..., embauché par la société SEYFERT DESCARTES au mois de juillet 1983, était bobineur au dernier état de son emploi.

Victime d'un accident de chasse en 1989, il a dû subir une intervention chirurgicale au cours de l'année 2004 ; placé en arrêt de travail à compter du 8 mars 2004, il est licencié pour inaptitude le 11 février 2005 après deux visites de reprise en date des 7 et 25 janvier 2005.

Par requête du 1er mars 2005, il conteste son licenciement devant le conseil de prud'hommes de TOURS qu'il saisit de plusieurs demandes pour le détail desquelles il est renvoyé au jugement de départition du 25 octobre 2006, la cour se référant également à cette décision pour l'exposé des faits, de la demande reconventionnelle et des moyens initiaux des parties.

Débouté de l'intégralité de ses demandes, le salarié relève appel du jugement le 23 novembre 2006.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

A / Le salarié

L'appelant poursuit l'infirmation du jugement et sollicite la condamnation de la société SEYFERT DESCARTES à lui verser :

- 20. 000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- 1. 600 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il fait valoir que :

à la suite de son licenciement pour inaptitude à la suite d'une maladie non professionnelle, l'employeur était tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités au vu des conclusions du médecin du travail et au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que des mutations ou des transformations de son poste de travail, conformément aux dispositions de l'article L. 122-24-4 du code du travail, ce qu'il n'a pas fait ;

le point de départ de l'obligation de reclassement est fixé à la date de la seconde visite de reprise ;

c'est à l'employeur de démontrer avoir rempli cette obligation loyalement en procédant à des recherches au sein de l'ensemble des entreprises du groupe ;

en l'occurrence, aucune recherche ni proposition n'ont été faites postérieurement au second examen du médecin du travail, ce qui atteste du manque de sérieux et de loyauté de la société qui l'a convoqué à un entretien préalable dès le surlendemain de cette visite médicale ;

aucun organigramme du groupe n'étant versé aux débats, il est impossible de vérifier la consistance du groupe ;

le poste de cariste vieux papiers ne lui a pas été proposé alors que la société a procédé à une embauche dès le 1er avril 2005 ainsi qu'à celle d'un réceptionniste onduleur et d'un aide-conducteur, tous compatibles avec son état de santé ; 42 personnes ont été embauchées en tout entre le 7 janvier et le 1er septembre 2005 ; la société SEYFERT FOREZ a embauché, pour sa part, un opérateur conditionnement le 1er février et un cariste expédition le 1er mars suivant ; la société SEYFERT PROVENCE a embauché deux aides- conducteurs le 1er mars, autant de postes qui auraient pu lui être proposés si les recherches de l'employeur en vue de son reclassement avaient été effectuées avec suffisamment de sérieux ;

la société, enfin, n'a jamais envisagé des aménagements de poste ou des possibilités de formation ;

contrairement à ce qu'a décidé la formation de départition, l'article 29 de la convention collective est toujours applicable concernant la garantie supplémentaire qu'elle accorde aux salariés licenciés ; en se dispensant de la viser expressément dans la lettre de licenciement, l'entreprise s'est abstenue de justifier de l'impossibilité de reclassement auprès de son salarié ;

il subit un important préjudice puisqu'il n'a toujours pas retrouvé d'emploi.

B / L'employeur

La société SEYFERT DESCARTES conclut à la confirmation du jugement et sollicite la condamnation de l'appelant à lui verser 1. 600 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

EIle fait valoir que :

comme l'a dit le juge départiteur, l'article L. 122-24-4 du code du travail n'impose à l'employeur de débuter les recherches en vue du reclassement qu'à partir du second examen médical de reprise, sachant que dans le même temps un délai minimum d'un mois est imparti à ce dernier pour procéder au licenciement à défaut de possibilité de reclassement ;

en l'occurrence, elle a répondu immédiatement au médecin du travail qui avait énuméré les restrictions concernant l'activité de Monsieur Y... dès le 21 décembre 2004, elle a proposé une réunion du CHSCT après visite in situ du médecin du travail. Le 4 janvier, le salarié était dispensé de reprendre son emploi dans l'attente du résultat des investigations du médecin du travail qui a visité l'entreprise le 10 janvier suivant et étudié les différents postes existants ;

aucun poste de cariste n'a pu être libéré et les différentes filiales interrogées ont répondu par la négative concernant l'ensemble des postes identifiés par le médecin du travail comme pouvant permettre le reclassement du salarié ;

les embauches ciblées par Monsieur Y... ont été réalisées après son licenciement et elles concernent des postes impliquant le port de charges lourdes incompatible avec l'état de santé de ce dernier ou encore des emplois nécessitant des compétences spécifiques que celui- ci n'avait pas ; s'agissant des emplois temporaires, il n'a jamais été question que de remplacer des salariés malades ou en congé d'été, pour assurer la production de l'usine qui travaille 24 / 24 heures toute l'année ;

les dispositions de l'article 29 de la convention collective qui concernent le licenciement personnel préexistaient à la loi de 1982 sur le licenciement et sont obsolètes.

La cour renvoie expressément aux conclusions des parties déposées le 21 mai 2007 pour la SAS SEYFERT DESCARTES et le 20 septembre 2007 pour Monsieur Christophe Y..., conformes à leurs plaidoiries, pour le développement de leurs moyens respectifs.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'appel interjeté dans le mois de la notification de la décision critiquée est recevable.

Sur l'application des dispositions de la convention collective :

La cour fait siens les motifs pertinents des premiers juges en ce qu'ils ont dit que les dispositions de l'article 29 de la convention collective applicables étaient obsolètes depuis que le législateur impose à tous les employeurs de motiver la lettre de licenciement ab initio.

Sur le reclassement :

L'article L. 122-14-3 du code du travail dispose que " en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles. (...)
Si un doute existe, il profite au salarié. "

C'est à bon droit que le juge départiteur a considéré que l'employeur n'était pas tenu d'attendre la seconde visite de reprise pour débuter les recherches de reclassement du salarié, à charge pour le juge d'apprécier si cette obligation a été satisfaite au regard des dispositions de l'article L. 122-24-4 du code du travail, au vu des conclusions définitives du médecin du travail.

La cour relève, en premier lieu, que le Docteur Françoise A... avait déjà attiré l'attention de l'entreprise sur la nécessité d'un changement de poste pour Monsieur Y..., le 25 octobre 2004, à l'issue d'une visite de pré- reprise. À cette occasion, le médecin avait précisé que ce dernier devait éviter tout effort de soulèvement ou de manutention un peu brutal ainsi que tout travail à une température supérieure à 25° et qu'il se livrait à une étude de poste, tout en excluant d'emblée un poste de conducteur d'engin, sauf très occasionnellement.

Dans un courrier du 13 décembre 2004, c'est l'employeur lui- même qui se rapprochait du Docteur B..., remplaçante du Docteur A..., pour lui dire son inquiétude pour la santé physique du salarié qu'elle présupposait apte à la reprise de son poste avec des réserves.

La société rappelait alors le cursus médical du salarié et les difficultés que posait son état de santé pour l'emploi de bobineur, démontrant ainsi une parfaite connaissance du dossier et un réel souci de la prise en compte de la santé de celui- ci.

Le 15 décembre 2004, le médecin du travail, qui venait d'effectuer une pré- visite, maintenait que les aptitudes physiques de Monsieur Y... étaient compatibles avec le poste de bobineur qu'il occupait jusqu'alors, à l'exception de la sécherie. Elle interrogeait l'employeur sur les possibilités de trouver un poste en rapport avec cette restriction et, à défaut, d'autres postes dans l'entreprise.

Le 21 décembre, le directeur d'exploitation de l'usine interpellait à nouveau le médecin du travail et précisait les raisons pour lesquelles tous les postes de production lui paraissaient incompatibles avec l'état de santé de Monsieur Y..., qu'il s'agisse des charges à manutentionner en début ou en fin de chaîne, de la température des ateliers, de l'humidité ambiante et enfin de l'obligation pour toute l'équipe de travailler près de la sécherie.

Il invitait également le médecin à se rendre sur le site avec le CHSCT afin d'étudier les différents postes et pouvoir ainsi se prononcer sur l'aptitude du salarié tout en indiquant que les recherches de reclassement seraient reprises dans l'entreprise ou à l'intérieur du groupe après sa décision suite à la visite de reprise.

C'est dans ce contexte que le 7 janvier 2005, après une rencontre avec le CHSCT sur site, le Docteur B... déclarait Monsieur Y... inapte au poste de bobineur, et indiquait qu'il pouvait occuper un poste sans port de charges lourdes (supérieures à 20 kg) sans tirer de charges lourdes avec une température inférieure à 30° sans travail en sécherie.

Le 10 janvier suivant, elle s'expliquait de façon détaillée sur les raisons pour lesquelles il est effectivement impossible que le salarié reprenne son poste de bobineur ; elle ajoutait qu'elle le reverrait soit pour une éventuelle aptitude à un nouveau poste, soit pour sa deuxième visite d'inaptitude si aucun poste pouvant lui convenir n'était trouvé.

Le 20 janvier, l'employeur expliquait au médecin du travail avoir procédé, en collaboration avec le CHSCT, à une étude des solutions de reclassement du salarié compatibles avec les réserves médicales énoncées, mais en vain, tous les postes d'atelier tels que sécheur, gouverneur, conducteur, comportant des contraintes physiques en inadéquation avec l'état de santé du salarié.

Il ajoutait, d'une part, que les seuls postes disponibles, à savoir agent logistique interne, aide- bobineur et électricien, demandaient des compétences spécifiques ne correspondant pas à la formation et à la qualification de Monsieur Y... ou encore incompatibles avec les réserves médicales et, d'autre part, que les postes administratifs nécessitaient des compétences de niveau trop élevé, toutes recherches ayant été opérées par ailleurs dans les autres unités du groupe, en vain.

Il est justifié, par ailleurs, d'une étude de poste détaillée ainsi que des démarches entreprises auprès des salariés pour libérer un poste en vue du reclassement de Monsieur Y..., dès le 14 janvier.

Les quatre autres sociétés d'exploitation du groupe SEYFERT, à savoir SEYFERT TRANSWELL, SEYFERT PROVENCE, SEYFERT FOREZ et SEYFERT CHAMPAGNE ont indiqué les 13, 20 et 21 janvier 2005, en réponse à un courrier de la SEYFERT DESCARTES en date du 12 janvier précédent, qu'elles ne disposaient pas de postes pour le reclassement de Monsieur Y....

Au vu des registres du personnel et des organigrammes de ces unités, il est démontré qu'aucun poste n'était disponible pour ce dernier, ni compatible avec son état de santé au moment de son licenciement intervenu le 11 février, ni dans le mois qui a suivi, hormis un poste de cariste expédition pourvu le 1er mars 2005 chez SEYFERT FOREZ, mais dont rien ne laisse supposer que cette embauche était prévisible lorsque celle- ci a été interrogée par la société SEYFERT DESCARTES, ni qu'elle l'aurait été début février si cette dernière l'avait relancée à l'issue de la seconde visite de reprise.

De ce qui précède, il ressort que l'employeur n'a pas manqué à son obligation de reclassement en procédant loyalement à des recherches sérieuses pendant plusieurs semaines pour tenter de reclasser le salarié, mais en vain, de sorte qu'elle n'a pas eu d'autre choix que de le licencier pour inaptitude.

Le jugement doit être également confirmé de ce chef.

Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

L'équité commande de laisser à la charge de la société SEYFERT DESCARTES la totalité des sommes non comprises dans les dépens qu'elle a dû exposer pour faire valoir ses droits.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement

CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de TOURS le 25 octobre 2006 en toutes ses dispositions

Y AJOUTANT,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

CONDAMNE Monsieur Christophe Y... aux entiers dépens d'appel

Et le présent arrêt a été signé par Monsieur Daniel VELLY, Président de chambre, et Mademoiselle Valérie LATOUCHE, Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 06/03090
Date de la décision : 25/10/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Tours


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-10-25;06.03090 ?
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