COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE
GROSSES + EXPÉDITIONS SCP LAVAL-LUEGER SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE Me GARNIER
ARRÊT du : 13 SEPTEMBRE 2007
No RG : 06 / 01977
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Commerce de TOURS en date du 19 Mai 2006
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE : S. A. AXA FRANCE IARD agissant poursuites et diligences de son Président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège,26, Rue Drouot-75009 PARIS représentée par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour ayant pour avocat la SCP WEDRYCHOWSKI et associés du barreau d'ORLEANS
D'UNE PART
INTIMÉS : S. A. HAGER ELECTRO SAS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,132 boulevard de l'Europe-67210 OBERNAI représentée par la SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE, avoués à la Cour ayant pour avocat Me BUREAU, du barreau de PARIS
Compagnie d'assuranc ZURICH INTERNATIONAL, demeurant Zurich-Haus am Opernplatz-D-60252 FRANKFURT AM MAIN (ALLEMAGNE)-représentée par la SCP DESPLANQUES-DEVAUCHELLE, avoués à la Cour
ayant pour avocat Me BUREAU, du barreau de PARIS
S. A. TAT EXPRESS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,47, rue Christian Huygens-37100 TOURS représentée par Me Estelle GARNIER, avoué à la Cour ayant pour avocat la SCP GROGNARD-LEPAGE-BAUDRY, du barreau de TOURS
Monsieur David Y... exerçant sous le nom commercial FAST COURSE, demeurant... 14630 FRENOUVILLE N'ayant pas constitué avoué.
Maître Alain Z... pris en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur David Y..., nom commercial FAST COURSES... 14000 CAEN CEDEX N'ayant pas constitué avoué.
D'AUTRE PART
DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 04 Juillet 2006
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats et du délibéré : Monsieur Jean-Pierre REMERY, Président de Chambre, Madame Odile MAGDELEINE, Conseiller, Monsieur Alain GARNIER, Conseiller.
Greffier : Madame Nadia FERNANDEZ, lors des débats et du prononcé de l'arrêt.
DÉBATS :
A l'audience publique du 06 Septembre 2007, à laquelle, sur rapport de Monsieur RÉMERY, Magistrat de la Mise en Etat, les avocats des parties ont été entendus en leurs plaidoiries.
ARRÊT :
Lecture de l'arrêt à l'audience publique du 13 Septembre 2007 par Monsieur le Président REMERY, en application des dispositions de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile.
EXPOSÉ DU LITIGE
La Cour statue sur l'appel d'un jugement rendu le 19 mai 2006 par le tribunal de commerce de Tours, tel que cet appel est interjeté par la société AXA France IARD (société AXA), suivant déclaration du 4 juillet 2006, enregistrée au greffe de la Cour sous le no 1977 / 2006.
Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions des parties signifiées et déposées les :
*21 mars 2007 (par les sociétés Hager Electro et Zurich International, ci-après : société Hager),
*24 juillet 2007 (par la société AXA),
*30 juillet 2007 (société TAT Express, ci-après : société TAT).
M. Y... a été cité à sa personne le 12 avril 2007, mais son liquidateur judiciaire, Me Z..., a refusé de recevoir l'acte le 20 mars 2007 en raison de la clôture de la liquidation judiciaire, faite le 14 juin 2006, alors même qu'il existait un contentieux en cours. L'arrêt sera réputé contradictoire.
Dans le présent arrêt, il sera seulement rappelé ici que, le 17 décembre 2002, la société Hager a confié à la société TAT le soin de transporter, d'Obernai à Douvres-La-Delivrande (Calvados), à destination de la société Charrier, un moule pesant 11,925 kg-et non 11. 925 kg comme parfois indiqué-d'une valeur de 16. 000 €. Le déplacement aurait été effectué par M. Y..., exerçant sous l'enseigne Fast Courses. Bien qu'un bon de livraison ait été signé, il serait établi que le moule n'a, en fait, jamais été livré.
La société Hager et son assureur, la société Zurich International (société Zurich), ont fait assigner la société TAT et M. Y...-avec mise en cause postérieure du liquidateur de ce dernier-en paiement, avec solidarité, de la valeur du moule et la société TAT a elle-même appelé en garantie M. Y..., son liquidateur et son assureur, la société AXA.
Par le jugement déféré à la Cour dans la présente instance, le tribunal a déclaré la société Zurich recevable à agir, par voie de subrogation, au lieu et place de la société Hager, condamné solidairement la société TAT, Me Z..., ès qualités et la société AXA à payer à la société Zurich la somme de 16. 000 €, avec intérêts capitalisés à compter du 16 décembre 2003, date d'une première assignation, et condamné la société AXA à garantir intégralement la société TAT de cette condamnation.
La société AXA a relevé appel.
En cause d'appel, chaque partie a présenté, plus précisément, les demandes et moyens qui seront exposés et discutés dans les motifs ci-après.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du magistrat de la mise en état du 28 août 2007, dont les avoués des parties ont été avisés.
Par note conjointe du président et du greffier adressée la veille de la date du présent arrêt, les avoués des parties ont été également avisés que le prononcé de l'arrêt était avancé à cette date.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Attendu, au préalable, que n'est plus discutée en appel la recevabilité de l'action en paiement en tant qu'elle est exercée par la société Zurich entièrement subrogée dans les droits de son assurée, la société Hager ;
Attendu qu'à l'appui de son appel, la société AXA prétend, en premier lieu, que la preuve ne serait pas rapportée de l'intervention, pour le transport considéré, de son assuré, M. Y..., ni, subsidiairement, de l'utilisation du seul véhicule assuré aux termes de la police d'assurance ;
Que, sur le premier point, il convient d'abord de relever que c'est très tardivement, puisqu'elle ne l'avait pas soutenu devant le premier juge, que la société AXA a imaginé contester la participation de son assuré au transport ; que, non seulement, il résulte de l'expertise amiable de M. B..., dont le rapport du 22 octobre 2003 a été versé aux débats depuis l'origine, que le responsable de Fast Courses a déclaré à un responsable de TAT, selon ce dernier, que " son chauffeur avait déposé le colis par dessus une clôture ", laissant présumer que l'entreprise Fast Courses est bien intervenue, mais encore que le contrat-cadre du 26 juin 2002 conclu entre la société TAT et M. Y..., régissant les opérations de sous-traitance de transport confiées à ce dernier, lui assignait une tournée no 1406 correspondant exactement au secteur géographique particulier dans lequel se situe le lieu de la livraison litigieuse, tournée pour laquelle M. Y... a bien facturé ses prestations en décembre 2002, période également en cause ; qu'enfin, sans aucune contestation de M. Y..., la société Zurich, comme la société TAT, ont été admises au passif de la liquidation judiciaire de M. Y... pour le montant de l'indemnité de 16. 000 € ; que de l'ensemble de ces éléments, il ressort que M. Y... a effectué matériellement le déplacement considéré ;
Que, sur le second point, la société AXA soutient que sa police ne garantirait que le véhicule immatriculé 9737 XD 14 mentionné aux conditions particulières ; que, cependant, en l'espèce, si, effectivement, ce véhicule est seul indiqué, dans les conditions particulières, sous l'intitulé « Assuroute A, Liste et caractéristiques des véhicules transporteurs.... », il résulte du rapprochement des conditions générales et particulières de la police que la garantie de la société AXA n'est pas due en raison de la seule utilisation de ce véhicule mais pour couvrir la responsabilité civile professionnelle que M. Y... était susceptible d'encourir dans l'exercice de son activité désignée au contrat, c'est-à-dire celle de voiturier ou transporteur ;
Attendu que la société AXA prétend alors, subsidiairement et en second lieu, que M. Y..., dont il vient d'être établi qu'il a effectué matériellement le transport de la marchandise, l'aurait fait, non en qualité de transporteur, mais en celle de loueur de véhicule de transport avec mise à disposition de personnel, activité non couverte par la police d'assurance, étant précisé, au contraire, que celle de sous-traitant n'est pas exclue, sauf s'il s'agit de sous-traitance temporaire, ce qui n'était pas le cas en l'espèce ; qu'à cette fin, la société AXA cherche à démontrer que seule la société TAT aurait eu la qualité de voiturier et non celle de commissionnaire qu'elle revendique ; que, cependant, en principe, tout déplacement matériel de marchandises à titre onéreux s'effectue sous l'empire d'un contrat de transport, qui est le mode normal d'exploitation d'un véhicule utilitaire, sauf à l'intéressé-ou à son assureur-à démontrer l'existence d'une location qui est une exception ; que le seul fait, invoqué par la société AXA que la société TAT ait agi elle-même comme voiturier ou comme commissionnaire de transport n'a, sur cette preuve, aucune influence, celui qui a déplacé la marchandise pouvant avoir, dans les deux hypothèses, la qualité de transporteur ; que, bien plus, en l'espèce, il résulte clairement du contrat-cadre du 26 juin 2002, déjà examiné, que M. Y... n'agissait qu'en qualité de sous-traitant de la société TAT et qu'aucun élément au dossier n'établit sa qualité prétendue de loueur de véhicule ; que, dès lors, la société TAT est fondée à demander, dans son principe, garantie à son substitué ;
Attendu, enfin, que, bien que ses conclusions (p. 8) ne soient pas très claires sur ce point, la société AXA semble contester l'existence d'une faute lourde de son assuré ; qu'elle invoque en tout cas une franchise et un plafond de garantie qui sont opposables aux tiers ;
Que, s'agissant de l'existence de la faute lourde, elle est évidente ; qu'il résulte, en effet, du bon de livraison signé que le colis aurait été livré le 23 décembre 2002 et réceptionné par un certain C..., alors que M. B... a établi que le destinataire, la société Charrier, était fermée ce jour-là en raison des fêtes de fin d'année, qu'aucun de ses salariés ne portait le nom du prétendu signataire du bon de livraison, de sorte qu'on peut en déduire que celui-ci est un faux, et qu'en réalité le colis avait été, tout simplement, jeté par dessus une clôture ; que ces éléments démontrent l'existence d'une faute lourde du sous-traitant, dont le préposé, d'ailleurs ensuite licencié, s'est débarrassé du colis en le jetant et en établissant un faux bon de livraison ;
Attendu, en conséquence, que la société TAT garante de son sous-traitant devra indemniser l'assureur de son client, la société Zurich, pour le montant de 16. 000 €, aucune limitation d'indemnisation n'étant applicable, que la responsabilité de M. Y... sera retenue tant à l'égard de la société Zurich que de la société TAT, sur l'appel en garantie de celle-ci, mais que, contrairement à ce qu'a fait le tribunal, seule une fixation de la créance en principal pourra intervenir en ce qui concerne M. Y...-qui a été mis en liquidation judiciaire le 25 février 2004, après avoir été assigné en paiement le 16 décembre 2003-; que, par ailleurs, comme la société AXA le fait valoir (p. 8 de ses conclusions), elle est fondée à opposer tant à la société Zurich qu'à la société TAT son plafond de couverture par sinistre de 50. 000 FF, soit 7. 622,45 €, et sa franchise de 10 % en cas de faute lourde, puisqu'aux termes de la police, la garantie reste acquise si une juridiction retient une telle faute, mais sous déduction de la franchise contractuelle (p. 7 des conditions générales pour le principe et p. 7 des conditions particulières pour le montant) ; que la garantie d'AXA est donc limitée à 6. 860,20 € (90 % du plafond d'indemnisation, la franchise s'appliquant sur le plafond) ; qu'aucun intérêt ne pourra être fixé au passif de la liquidation judiciaire de M. Y..., ceux dus par la société TAT l'étant à compter du 15 décembre 2003 ; que ceux dus par la société AXA le seront à compter du 30 mars 2004, date de la première assignation la visant, la capitalisation n'intervenant, dans les deux cas, qu'un an après ;
Sur les demandes accessoires
Attendu que la société AXA supportera seul les dépens et, à ce titre, sera tenue de verser à chacune des sociétés Zurich et TAT la somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, en remboursement des frais hors dépens exposés aux deux degrés de juridiction ;
PAR CES MOTIFS LA COUR,
STATUANT publiquement, par arrêt réputé contradictoire et rendu en dernier ressort :
CONFIRME sur le principe le jugement déféré, mais réécrivant son dispositif :
CONDAMNE la société TAT Express à payer à la société Zurich International la somme de 16. 000 € avec intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2003, ces intérêts étant capitalisés à compter du 15 décembre 2004 ;
DIT que cette condamnation de la société TAT Express au profit de la société Zurich International est également prononcée solidairement à l'encontre de la société AXA France IARD, mais dans la limite de la somme de 6. 860,20 € (plafond de garantie + franchise en cas de faute lourde), outre intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2004, ces intérêts étant capitalisés à compter du 30 mars 2005 ;
FIXE la créance d'indemnité de la société Zurich International au passif de la liquidation judiciaire de M. Y... à la somme de 16. 000 €, sans intérêts ;
REÇOIT l'appel en garantie de la société TAT Express formé à l'encontre de la société AXA France IARD, mais dit que son recours sera limité comme ci-dessus, la créance de la société TAT Express au titre de la garantie due par M. Y... lui-même étant fixée au passif de sa liquidation judiciaire à la somme de 16. 000 € sans intérêts ;
DIT que tous les dépens de première instance et d'appel seront supportés exclusivement par la société AXA France IARD qui devra verser à chacune des sociétés Zurich International et TAT Express la somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en remboursement de tous frais hors dépens exposés aux deux degrés de juridiction ; ACCORDE à la SCP Desplanques-Devauchelle et à Me Garnier, titulaires d'un office d'avoué près la cour d'appel, le droit à recouvrement direct reconnu par l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ;
ET le présent arrêt a été signé par M. Rémery, Président et Mme Fernandez, Greffier ayant assisté au prononcé de l'arrêt.