COUR D'APPEL D'ORLÉANS
CHAMBRE SOCIALE
Prud'Hommes
GROSSES le
à (SCP GROGNARD LEPAGE BAUDRY)
Me PASTOR
COPIES le
à M. Y...
M. Z...
ARRÊT du : 28 JUIN 2007
No RG : 06 / 03320
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE TOURS en date du 13 Novembre 2006
Section : INDUSTRIE
ENTRE
APPELANTE :
Madame Isabelle Y...
...
37130 LANGEAIS
représentée par la SCP GROGNARD-LEPAGE-BAUDRY-, avocats au barreau de TOURS substituée par Me Stéphanie ROGER, avocat au même barreau
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2004 / 000559 du 15 / 03 / 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'ORLEANS)
ET
INTIMÉ :
Monsieur Philippe Z...
...
37230 LUYNES
comparant en personne, assisté de Me Monique PASTOR, avocat au barreau de TOURS
Après débats et audition des parties à l'audience publique du 24 Mai 2007
LA COUR COMPOSÉE DE :
Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre
Monsieur Pierre LEBRUN, Conseiller
Madame Catherine PAFFENHOFF, Conseiller
Assistés lors des débats de Madame Ghislaine GAUCHER, Greffier,
Puis ces mêmes magistrats en ont délibéré dans la même formation et à l'audience publique du 28 Juin 2007,
Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre
Assisté de Madame Ghislaine GAUCHER, Greffier,
A rendu l'arrêt dont la teneur suit :
RÉSUMÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Madame Isabelle Y... a saisi le Conseil de Prud'hommes de TOURS de diverses demandes à l'encontre de Monsieur Philippe Z..., pour le détail desquelles il est renvoyé au jugement du 17 novembre 2006, la Cour se référant également à cette décision pour l'exposé de la demande reconventionnelle.
Elle a obtenu :
-l'annulation de l'avertissement du 30 novembre 2004 ;
-500 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Le jugement lui a été notifié le 30 novembre 2006.
Elle en a fait appel le 15 décembre 2006.
DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES
Outre la confirmation de la nullité, elle demande :
-1000 € de dommages et intérêts à ce titre ;
-la résiliation du contrat aux torts de l'employeur ;
-800 € de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement ;
-1. 600 € de préavis ;
-160 € de congés payés afférents ;
-8. 000 € de dommages et intérêts pour licenciement abusif (subsidiairement pour la rupture prononcée le 4 octobre 2005) ;
-2. 000 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Elle expose que, vendeuse a temps partiel, elle est passée au service de Monsieur Z..., qui a repris l'établissement, le 1er septembre 2004, avant d'être licenciée pour inaptitude le 4 octobre 2005.
Elle explique pourquoi les griefs visés dans l'avertissement ne sont pas prouvés, ajoutant qu'il lui a causé un préjudice moral important.
Elle fonde la résiliation sur le harcèlement subi, établi par de nombreuses attestations et par son arrêt de travail de plusieurs mois pour dépression (reproches fantaisistes, intention de la faire " craquer ", non paiement du maintien de salaire, reproches sur son absence alors que son arrêt de travail venait d'être renouvelé).
Elle invoque subsidiairement une méconnaissance de l'obligation de reclassement, Monsieur Z... se déchargeant de ses obligations a cet égard sur elle même ou sur le médecin du travail.
Elle fait état d'un préjudice important car elle est toujours au chômage.
Monsieur Z... fait appel incident pour obtenir le débouté intégral et 2. 000 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Il explique pourquoi :
-l'avertissement était fondé ;
-même s'il ne l'était pas, Madame Y... n'a subi aucun préjudice ;
-il n'y a eu aucun harcèlement ;
-il a normalement rempli ses obligations en matière de reclassement, rendu impossible par la très petite structure de l'entreprise et par la proposition, restée sans écho, d'un aménagement du temps de travail.
Il remarque enfin qu'aucune pièce n'est produite sur le préjudice.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Eu égard aux dates ci-dessus, les appels, principal et incident, sont recevables.
Les époux C..., boulangers-pâtissiers, ont engagé Madame Y..., le 3 décembre 2001, comme vendeuse à temps partiel (23h par semaine).
Monsieur Z... a acheté l'établissement à l'été 2004.
Madame Y... est donc passée à son service le 1er septembre 2004, sans modification.
L'avertissement du 30 novembre 2004
Il est essentiellement motivé par des propos et des attitudes déplacés avec les clients.
Dés lors l'attestation de Monsieur D..., fournisseur, et inopérante.
Celle de Madame E... est sans intérêt.
En revanche, Madame F..., cliente, indique que, voyant que Madame Y... perdait de son entrain, elle s'en est inquiétée, Madame Y... lui déclarant " qu'elle n'avait plus le droit de parler à la clientèle (d'avant) et qu'elle n'était là que pour vendre ". Madame F... précise que, comme d'autres clientes, elle en a été " offusquée ", et n'est plus revenue.
Il importe peu de savoir si ce qu'elle a dit était vrai ou non, les attestations produites étant contradictoires ; Madame Y... a ainsi fait devant plusieurs clientes une réflexion désobligeante pour ses employeurs, qui a conduit Madame F... a cesser de fréquenter l'établissement.
Ce seul élément est fautif et justifie l'avertissement, étant de nature à nuire à la réputation des époux Z... qui venaient de s'installer.
La demande sera rejetée.
La résiliation fondée sur un harcèlement
Les reproches fantaisistes
Mme Y... produit diverses attestations.
Celles de Monsieur G..., son compagnon, et de Madame H..., sa soeur (qui au demeurant se borne à dire qu'elle était plus triste qu'avant) seront écartées en raison de ce lien très proche.
Celle de Monsieur M... le sera également, car il a intenté un procès prud'hommal à Monsieur Z..., et de ce fait ne peut être considéré comme un témoin objectif.
Madame I... indique seulement qu'elle était devenue " tristounette ".
Monsieur J... précise que Madame Y... ne parlait plus et ne souriait plus.
Madame F... n'a fait que rapporter ce que Madame Y... lui avait dit.
Madame K... parle d'un air " fatigué et triste ".
Quant a Monsieur L..., il ne parle que de son cas personnel.
Aucun témoin ne fait donc état de reproches qui auraient été faits par les époux Z... (Monsieur Z... étant quant à lui au laboratoire).
Ce point sera écarté.
Les demandes d'arrêts de travail
Alors que son arrêt s'achevait le 28 février 2005 et que le suivant lui avait été délivré ce jour-là, Monsieur Z... a écrit à Madame Y... le 1er mars 2005, en lettre recommandée avec accusé de réception pour lui demander l'avis suivant.
Cette réaction était certes mal venue, Madame Y... ayant 48 heures pour en justifier, mais elle aurait pu téléphoner après le passage du médecin pour aviser Monsieur Z... et lui permettre d'organiser son remplacement.
Un autre arrêt ne couvrant pas le 16 mai 2005, Monsieur Z... a cette fois ci attendu le 18 pour le réclamer par écrit.
La même remarque peut être faite.
Les retards dans l'envoi des bulletins de paie et de la garantie de salaire :
Madame Y... se borne a des affirmations d'ordre général.
En outre, pour janvier et février 2005, il résulte des lettres de Monsieur Z... et de l'expert comptable que Madame Y... n'avait pas transmis ses relevés d'indemnités de sécurité sociale pour calculer le montant du maintien de salaire.
Ces griefs sont infondés.
Le syndrome anxieux dépressif peut avoir une origine extra professionnelle, ou une simple divergence de vue avec les nouveaux patrons, qui étaient plus exigeants, mais celle-ci ne saurait constituer un harcèlement.
Les demandes a ce titre seront rejetées.
Le licenciement
Les 22 août et 6 septembre 2005, le médecin du travail a déclaré Madame Y... " inapte à tous les postes de l'entreprise ".
Le 6 septembre 2005, Monsieur Z... a écrit :
-a l'inspecteur du travail pour lui dire que compte tenu de la situation de l'entreprise, la seule possibilité de reclassement lui paraissait être l'aménagement des horaires de Madame Y..., l'employeur interrogeant son interlocuteur sur ce point et lui demandant d'autres possibilités de reclassement ;
-à la médecine du travail dans les mêmes termes ;
-à Madame Y... dans des termes identiques.
Celle-ci a répondu le 17 septembre 2005 qu'elle ne comprenait pas la demande eu égard a la décision du médecin.
Le médecin du travail avait répondu le 12 septembre 2005 " qu'il ne n'apparaît pas souhaitable pour Madame Y... de solliciter un aménagement de son poste dans votre entreprise ".
Quand à l'inspecteur, après s'être renseigné téléphoniquement auprès de Madame Z... le 12 septembre 2005, il a répondu le 25 septembre que Monsieur Z... était tenu de proposer à Madame Y... un autre emploi approprié à ses capacités.
C'est pourquoi l'appelante a été licenciée le 4 octobre 2005 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Monsieur Z... a ainsi fait les démarches nécessaires pour tenter de reclasser Madame Y..., mais cela n'était pas possible. :
-une mutation était inenvisageable, Monsieur Z... n'employant au laboratoire qu'un boulanger et 2 apprentis ;
-il en était de même d'une transformation de poste, au demeurant exclue par le médecin du travail ;
-enfin l'aménagement du temps de travail a été proposé mais n'a recueilli ni écho favorable, ni même le moindre intérêt.
Monsieur Z... a rempli ses obligations et n'a pas agi de façon précipitée.
La demande sera rejetée.
Les frais irrépétibles
Il n'est pas inéquitable que Monsieur Z... les supporte.
Les dépens
Madame Y... les supportera.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
DÉCLARE l'appel recevable,
CONFIRME le jugement, sauf sur le point ci-après ;
L'INFIRMANT de ce chef, et statuant à nouveau,
REJETTE la demande d'annulation de l'avertissement ;
REJETTE la demande de Monsieur Philippe Z... pour frais irrépétibles ;
CONDAMNE Madame Isabelle Y... aux dépens de première instance et d'appel.
Et le présent arrêt a été signé par Monsieur Daniel VELLY, Président de Chambre et par Madame Ghislaine GAUCHER, Greffier.