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16/02/2006 | FRANCE | N°05/01291

France | France, Cour d'appel d'Orléans, 16 février 2006, 05/01291


COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE GROSSES + EXPÉDITIONS SCP LAVAL-LUEGER SCP -DESPLANQUES-DEVAUCHELLE Notifications Me Villa T. X... R.DOINEAU Parquet Général Tcde Tours ARRÊT du : 16 FEVRIER 2006 No :

No RG : 05/01291 DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Commerce de TOURS en date du 01 Avril 2005 PARTIES EN CAUSE APPELANT : Maître Francis VILLA agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société ALLAIRE SNE fonction à laquelle il a été nommé par jugement du Tribunal de Commerce de TOURS du 20 mai 2003,

18 rue Néricault Destouches - BP 31348 - 37013 TOURS CEDEX représenté ...

COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE GROSSES + EXPÉDITIONS SCP LAVAL-LUEGER SCP -DESPLANQUES-DEVAUCHELLE Notifications Me Villa T. X... R.DOINEAU Parquet Général Tcde Tours ARRÊT du : 16 FEVRIER 2006 No :

No RG : 05/01291 DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Tribunal de Commerce de TOURS en date du 01 Avril 2005 PARTIES EN CAUSE APPELANT : Maître Francis VILLA agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la Société ALLAIRE SNE fonction à laquelle il a été nommé par jugement du Tribunal de Commerce de TOURS du 20 mai 2003, 18 rue Néricault Destouches - BP 31348 - 37013 TOURS CEDEX représenté par la SCP LAVAL - LUEGER, avoués à la Cour ayant pour avocat la SCP GROGNARD - LEPAGE-BAUDRY-ALQUIER, du barreau de TOURS D'UNE PART INTIMÉS : Monsieur Thierry X..., ... par la SCP DESPLANQUES - DEVAUCHELLE, avoués à la Cour ayant pour avocat la SELARL PRUNIER du barreau de TOURS Monsieur René Y..., ... par la SCP DESPLANQUES - DEVAUCHELLE, avoués à la Cour ayant pour avocat Me Jean-Marc BOIZARD, du barreau de NIORT MADAME LE PROCUREUR GENERAL,D'AUTRE PART DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 03 mai 2005 DOSSIER RÉGULIÈREMENT COMMUNIQUÉ AU MINISTÈRE PUBLIC LE 14 novembre 2005 COMPOSITION DE LA COUR Lors des débats et du délibéré : Monsieur Jean-Pierre REMERY, Président de Chambre, Madame Odile MAGDELEINE, Conseiller, Monsieur Alain GARNIER, Conseiller. Greffier : Madame Nadia Z..., lors des débats et du prononcé de l'arrêt. DÉBATS : A l'audience publique du 02 Février 2006. ARRÊT : Lecture de l'arrêt à l'audience publique du 16 Février 2006 par Monsieur le Président REMERY, en application des dispositions de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile. EXPOSÉ DU LITIGE : La Cour statue sur l'appel d'un jugement du Tribunal de commerce de Tours rendu le 1er avril 2005, interjeté

par Me Villa, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société ALLAIRE SNE, suivant déclaration du 2 mai 2005. Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions des parties signifiées et déposées les : *30 janvier 2006 (M. X...), *31 janvier 2006 (Me Villa), *31 janvier 2006 (M. Y...). Dans le présent arrêt, il sera seulement rappelé que la S.A.R.L. Allaire SNE, qui avait été créée en mai 2001 pour reprendre, dans le cadre de la cession d'une unité de production, certains actifs de la société Vêtements Allaire en liquidation judiciaire, a été mise elle-même en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de Tours du 29 avril 2003, cette procédure collective étant convertie en liquidation judiciaire le 20 mai 2003, avec Me Villa en qualité de liquidateur. Après qu'une mission d'investigation comptable eut été confiée à M. A... par le juge-commissaire, Me Villa a, par acte d'huissier de justice du 12 août 2004, saisi le Tribunal de Commerce d'une demande tendant au prononcé de sanctions personnelles à l'encontre de MM. Y... et X..., anciens salariés de la société Vêtements Allaire y occupant respectivement les postes de directeur financier et de directeur des achats, devenus cogérants de la S.A.R.L. Allaire, tout en conservant leurs anciennes fonctions. Par le jugement aujourd'hui déféré à la Cour, le tribunal, après avoir rejeté tant la demande principale d'ouverture d'une procédure collective-sanction que la demande subsidiaire de prise en charge de tout ou partie de l'insuffisance d'actif de la société Allaire SNE, a prononcé une mesure d'interdiction de gérer d'une durée identique de 10 ans à l'encontre de chacun des gérants. Un appel principal a été interjeté par Me Villa et des appels incidents ont été formés par MM. Y... et X... En cause d'appel, chaque partie a présenté les demandes et

moyens qui seront exposés et discutés dans les motifs ci-après. La cause a été communiquée au Procureur général. L'instruction a été clôturée par ordonnance du 31 janvier 2006, ainsi que les avoués des parties en ont été avisés. MOTIFS DE L'ARRÊT : Attendu, au préalable, que Me Villa a renoncé expressément (p. 6 et 23 de ses conclusions) à la demande qu'il avait présentée devant les premiers juges tendant à l'ouverture, à titre de sanction, d'une procédure collective personnelle à l'encontre des deux dirigeants en cause, en raison des dispositions transitoires de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ; Qu'ayant abandonné cette première demande, Me Villa reprend, en appel, sa demande subsidiaire de condamnation au paiement de l'insuffisance d'actif, mais, en p. 17 et 23 de ses conclusions, forme aussi une demande tendant à l'application des dispositions, qu'il vise expressément aux pages indiquées, de l'article L. 652-1 nouveau du Code de commerce, relatif à l'obligation aux dettes sociales, ce qui est possible puisque cette disposition est, en vertu de l'article 191.5o de la loi précitée, applicable aux procédures en cours ; que la cour d'appel est donc saisie à la fois d'une demande de condamnation à supporter l'insuffisance d'actif, sur le fondement de l'ancien article L. 624-3 du Code de commerce, encore applicable, puisque l'article 191.5o précité écarte l'application immédiate du nouvel article L. 651-2 du même Code, et d'une demande tendant à mettre à la charge des dirigeants les dettes sociales sur le fondement du nouvel article L. 652-1 de ce Code, déjà applicable ; que, cependant, dès lors que le dernier alinéa de ce texte prohibe le cumul d'actions, il en résulte que si l'une des fautes mentionnées par l'article L. 652-1 est établie, l'action en paiement de l'insuffisance d'actif est exclue ; qu'il appartient donc à la cour d'appel, en présence des deux demandes de Me Villa, de se prononcer d'abord sur l'application de ce texte ; Attendu que Me Villa fonde,

notamment, sa demande sur les dispositions du 4o de l'article L. 652-1 du Code de commerce, aux termes desquelles peut être obligé aux dettes sociales le dirigeant qui aura poursuivi abusivement dans un intérêt personnel une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements ; que ni M. Y..., ni M. X... ne contestent le caractère déficitaire de l'exploitation de la société Allaire SNE au moins depuis avril 2002 ; que le rapport de M. A... montre qu'à partir de cette date, le résultat d'exploitation et le résultat courant n'ont cessé de baisser, de mois en mois et dans de très fortes proportions, même en tenant compte de l'impact du caractère saisonnier de l'activité de la société consistant dans la confection de vêtements pour dames ; que, bien plus, si l'on examine les résultats procurés par l'activité industrielle propre de la société, c'est dès la fin de l'année 2001, à peine quelques mois après la cession d'unité de production, que l'exploitation s'est révélée déficitaire, la production n'ayant quasiment jamais permis à la société Allaire SNE d'obtenir un résultat positif par son activité propre, les pertes de chiffre d'affaires étant en partie masquées par des ventes de stocks repris de la société vêtements Allaire ; que le déséquilibre financier constaté ainsi que ses causes - l'incapacité d'obtenir un résultat d'exploitation suffisant - étant très antérieurs à l'automne 2002, les dirigeants ne pouvaient sérieusement penser que la vente de la collection été 2003 le résorberait, alors que, dès le début du deuxième trimestre 2002, l'on constate des minorations des bases taxables à la TVA, ce qui n'est pas le signe d'une bonne gestion et, dès cette période, une insuffisance brute d'exploitation au lieu d'un excédent ; que, dans ces conditions, la poursuite de l'activité déficitaire ne pouvait tendre qu'à la cessation des paiements et, dès la fin de l'automne 2002, le recours de plus en plus massif au crédit

fournisseur ainsi qu'à nouveaux décalages dans le paiement de la TVA, dont M. X..., en sa qualité de cogérant, ne pouvait s'exonérer au motif que c'était l'autre cogérant, également directeur administratif et financier, qui en était seul responsable, montrent que la cessation des paiements était inéluctable ; qu'il existe donc en l'espèce, une poursuite abusive de l'exploitation déficitaire ne pouvant déboucher que sur la cessation des paiements, aucune perspective de redressement n'étant sérieusement envisageable, faute que l'activité propre de la société ait jamais pu lui procurer les ressources et la rentabilité nécessaires ; Que cette poursuite a eu lieu dans l'intérêt personnel de chaque cogérant ; qu'en effet, en ce qui concerne M. X..., s'il est exact que le rapport de M. A... ne tient pas nécessairement compte, pour ses calculs, des mêmes périodes, il n'en demeure pas moins, indépendamment de tout autre élément, que, tant au titre de sa fonction de directeur des achats, qu'en celle de dirigeant, M. X... a continué à percevoir, selon ce qu'il reconnaît dans ses écritures, une rémunération d'environ 5.500 ç par mois et cela jusqu'en avril 2003, date de l'ouverture de la procédure collective ; qu'il en est de même de M. Y..., pour un montant voisin ; que la perception d'une telle rémunération, même stable, alors que, pendant la même période la situation de la société ne cessait de se dégrader, constitue un intérêt personnel suffisant, au sens de l'article L. 652-1.4o du Code de commerce, à la poursuite d'une exploitation déficitaire qui seule permettait le versement de tels salaires aux dirigeants, lesquels étaient, par ailleurs, conscients que la réduction de la masse salariale était nécessaire, même s'il s'agissait, d'après la note jointe à leur déclaration de cessation des paiements, de la masse salariale de la production ; Qu'il résulte de tout ce qui précède que l'un et l'autre des cogérants, en poursuivant abusivement dans un intérêt personnel

l'exploitation de plus en plus déficitaire de la société Allaire SNE, ce qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements, ont commis l'une des fautes ayant contribué à cette cessation des paiements qui sont visées à l'article L. 652-1 du Code de commerce, justifiant l'obligation aux dettes sociales, exclusive de la condamnation au paiement de l'insuffisance d'actif ; que, cependant, la cour n'est pas tenue, faisant application de ce nouveau texte, de prononcer une condamnation intégrale et, malgré l'importance de l'insuffisance d'actif constatée (plus de 2.800.000 ç), il importe de tenir compte des difficultés particulières rencontrées actuellement dans l'activité de la confection de vêtements et du fait que la création de la société Allaire SNE a surtout répondu au souci louable d'éviter des pertes d'emploi ; que, dans ces conditions, la faute de chaque cogérant étant équivalente, il y a lieu de mettre à la charge de chacun d'eux, mais sans solidarité, les dettes sociales à concurrence de la somme de 25.000 ç pour chacun d'eux ; Attendu que les nouvelles dispositions sur la faillite personnelle ou l'interdiction de gérer étant applicables, il y a lieu de prononcer cette dernière mesure à l'encontre de chacun des dirigeants sur le fondement des article L. 652-1.4o et L. 653-4 du Code de commerce, sauf à ramener à 6 ans la durée de la mesure prononcée ; Que compte tenu du sens du présent arrêt, la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par M. Y..., qui est condamné, ne peut qu'être rejetée ; Attendu que les dépens d'appel seront mis à la charge de MM. Y... et X... qui seront également tenus, de payer à Me Villa, ès qualités, la somme de 2.000 ç chacun sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour tous les frais hors dépens exposés ; PAR CES MOTIFS : LA COUR, STATUANT publiquement, par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort : CONFIRME le jugement entrepris, outre sur les dépens de

première instance, en ce qu'il a prononcé une mesure d'interdiction de gérer à l'encontre de MM. Y... et X..., mais en FIXE la durée à 6 ans ; L'INFIRME pour le surplus et CONDAMNE MM. Y... et X..., au titre de l'obligation aux dettes sociales, par application des dispositions de l'article L. 652-1.4o nouveau du Code de commerce, à supporter celles-ci à concurrence de la somme de 25.000 (vingt-cinq mille) ç chacun, sans solidarité, et à payer cette somme entre les mains de Me Villa, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société ALLAIRE SNE ; REJETTE la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par M. Y... ; CONDAMNE MM. Y... et X... à supporter chacun la moitié des dépens d'appel et à payer chacun à Me Villa la somme de 2.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, en remboursement de l'ensemble des frais hors dépens exposés en première instance et appel ; ACCORDE à la SCP Laval-Lueger, titulaire d'un office d'avoué près la cour d'appel d'Orléans, le droit à recouvrement direct reconnu par l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ; ET le présent arrêt a été signé par M. Rémery, Président et Mme Z..., Greffier ayant assisté au prononcé de l'arrêt. LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Orléans
Numéro d'arrêt : 05/01291
Date de la décision : 16/02/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-02-16;05.01291 ?
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