COUR D'APPEL D'ORLÉANS CHAMBRE COMMERCIALE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE GROSSES + EXPÉDITIONS SCP LAVAL-LUEGER Me GARNIER ARRÊT du : 08 DECEMBRE 2005 No : No RG : 05/00259 DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE :
Tribunal de Commerce d'ORLEANS en date du 24 Novembre 2004 PARTIES EN CAUSE APPELANTE : S.A.S. CGE DISTRIBUTION agissant poursuites et diligences de son représentant légal (Président et Administrateur) domicilié en cette qualité au siège, 15-17, Boulevard du Général de Gaulle - 92120 MONTROUGE représentée par Me Estelle GARNIER, avoué à la Cour ayant pour avocat Me Gilles FOUGERAT, du barreau de PARIS D'UNE PART INTIMÉ : Maître Jean-Paul JOUSSET pris en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL ELEC 21, 2 Rue Adolphe Crespin - 45000 ORLEANS représenté par la SCP LAVAL-LUEGER, avoués à la Cour D'AUTRE PART DÉCLARATION D'APPEL EN DATE DU 29 Décembre 2004 COMPOSITION DE LA COUR Lors des débats et du délibéré :
Monsieur Jean-Pierre REMERY, Président de Chambre, Madame Odile MAGDELEINE, Conseiller, Monsieur Alain GARNIER, Conseiller. Greffier : Madame Nadia X..., lors des débats et du prononcé de l'arrêt. DÉBATS : A l'audience publique du 24 Novembre 2005. ARRÊT : Lecture de l'arrêt à l'audience publique du 08 Décembre 2005 par Monsieur le Président REMERY, en application des dispositions de l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile. EXPOSÉ DU LITIGE : La Cour statue sur l'appel d'un jugement du Tribunal de commerce d'Orléans rendu le 24 novembre 2004, interjeté par la société CGE Distribution, suivant déclaration du 29 décembre 2004. Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions des parties signifiées et déposées les :3 novembre 2005 (Me Jousset, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Elec 21). Dans le présent arrêt, il sera seulement rappelé que la société
CGE, fournisseur de matériel électrique, a vendu, avec réserve de propriété jusqu'à complet paiement du prix, et livré à la société Elec 21, notamment pour l'approvisionnement d'un important chantier rue Capron, à Paris XVIIIème, que celle-ci avait obtenu en sous-traitance, des marchandises qui ne lui ont pas été réglées. Par ordonnance sur requête du 19 février 2004, la société CGE a obtenu du président du Tribunal de commerce d'Orléans l'autorisation de pratiquer, au préjudice de la société Elec 21, des saisies conservatoires de créances entre les mains, d'une part, de la société SUPAE le de France, entrepreneur principal du chantier de la rue Capron et, d'autre part, de la Banque populaire Val de France, agence de Pithiviers, à concurrence d'un montant global de 168.248,94 ç. Les saisies ont été pratiquées les 20 (Banque populaire qui a indiqué le solde créditeur d'un compte bancaire : 47.708,26 ç) et 23 février 2004 (SUPAE qui a déclaré ne plus rien devoir), puis signifiées à la société Elec 21 le 26 février 2004, en ce qui concerne la saisie faite entre les mains de l'établissement de crédit. Par assignation du 11 mars 2004, la société CGE a fait, ensuite, citer la société Elec 21 devant le juge des référés du Tribunal de Commerce de Nanterre en vue de sa condamnation à lui payer une provision sur créance de 169.179,17 ç outre intérêts au taux légal à compter du 10 février 2004, condamnation qu'elle a obtenue par ordonnance de référé du 6 avril 2004, mais le 10 mars 2004 le Tribunal de commerce d'Orléans avait ouvert la procédure de liquidation judiciaire de la société Elec 21 et désigné Me Jousset en qualité de liquidateur. Le 23 avril 2004, la société CGE a alors déclaré sa créance de 169.179,17 ç en principal et saisi, parallèlement, le liquidateur d'une requête en revendication du prix de ses marchandises laissées impayées, en se prévalant à cette fin de la réserve de propriété. Me Jousset n'ayant pas acquiescé à la revendication, la société
CGE.saisissait le 9 juin 2004 le juge-commissaire qui, par ordonnance du 24 juin 2004, accueillait la demande en revendication "dans la mesure où il est établi qu'ils mobiliers et matériels revendiqués existaient en nature ou pouvaient être individualisables à la date de l'ouverture de la procédure" collective. Indiquant avoir sollicité la revendication du prix des marchandises vendues, sur le fondement de l'article L. 621-124 du Code de commerce, la société CGE a formé un recours devant le Tribunal qui l'a rejeté par le jugement aujourd'hui déféré à la Cour, lequel jugement a rejeté, en outre, toutes ses demandes. La société CGE a relevé appel. En cause d'appel, chaque partie a présenté les demandes et moyens qui seront exposés et discutés dans les motifs ci-après. L'instruction a été clôturée par ordonnance du 16 novembre 2005, ainsi que les avoués des parties en ont été avisés. MOTIFS DE L'ARRÊT : Attendu que, malgré l'habileté de sa formulation synthétique, opposée à la motivation jugée trop analytique du Tribunal, l'argumentation juridique développée par la société CGE n'est pas fondée ; Qu'en effet, d'une part, la seule saisie conservatoire de créance utile en l'espèce, celle pratiquée le 20 février 2004 entre les mains de la Banque populaire qui a déclaré détenir à ce moment pour le compte de la société Elec 21 un solde de 47.708,26 ç, n'a pas été convertie en saisie-attribution avant l'ouverture du jugement de liquidation judiciaire de la société débitrice saisie ; que, dès lors, elle ne pouvait plus produire aucun effet ; que, pour ce seul motif, la demande de la société CGE - c'est d'ailleurs la seule - tendant à se faire attribuer "les fonds saisis par elle le 20 février 2004 auprès de l'agence de la Banque populaire de Pithiviers et ordonner la remise des fonds à son profit" ne peut déjà qu'être rejetée ; Que, d'autre part, la société CGE essaie habilement de se faire remettre les sommes saisies sous couvert d'une action en revendication du prix de revente des marchandises
litigieuses, sans se soumettre aux conditions de ce type de revendication, au motif qu'en raison de la fongibilité de la monnaie, le prix dû par la société SUPAE, sous-acquéreur des marchandises (les conclusions de la société CGE lui attribuent expressément cette qualité en p. 5), aurait été transféré sur le compte bancaire de la société Elec 21 objet de la saisie conservatoire et que, par conséquent, le vendeur initial, bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété, pourrait les y appréhender ; que, non seulement, la conclusion de ce raisonnement méconnaît le fait que la saisie-conservatoire, comme on l'a vu, n'a plus aucun effet, et certainement pas un effet attributif, mais encore la condition essentielle de la revendication du prix sur le fondement de l'article L.621-124 du Code de commerce n'est pas remplie ; qu'il résulte, en effet, des écritures de la société CGE et, surtout, d'un courrier non contesté de la société SUPAE du 4 juin 2004 et de la réponse antérieurement faite le 23 février 2004 à l'huissier de justice ayant pratiqué la saisie conservatoire entre ses mains, que la société SUPAE avait définitivement effectué, au plus tard le 11 février 2004, les paiements correspondant à la part du marché sous traité à la société Elec 21, de sorte que le prix revendiqué, sur le fondement de l'article L. 621-124 précité, avait été réglé avant l'ouverture de la procédure collective, ce qui interdit toute revendication, peu important qu'une partie de ce prix se soit éventuellement et naturellement retrouvé sur le compte bancaire de la société débitrice et y ait fait l'objet d'une saisie conservatoire dénuée d'effet ; Que, par aucun moyen, la société CGE ne peut donc obtenir de la Banque populaire les fonds objets de sa saisie conservatoire qui doivent être, au contraire, remis au liquidateur ; Que le jugement sera confirmé et les dépens d'appel mis à la charge de la société CGE, qui devra en outre verser la somme de 1.200 ç à Me Jousset, ès
qualités, par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS : LA COUR, STATUANT publiquement, par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort :
CONFIRME le jugement entrepris ; LE PRÉCISANT, DIT que la société CGE Distribution n'a aucun droit sur les fonds détenus par la Banque populaire, Val de France, Agence de Pithiviers pour le compte de la société ELEC 21 qui ont fait l'objet d'une saisie conservatoire de créance selon procès-verbal du 20 février 2004 pratiquée par Me Courion, huissier de justice à Puiseaux et ORDONNE, en tant que de besoin, que les fonds saisis soient remis à Me Jousset, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société ELEC 21, au vu d'une copie exécutoire du présent arrêt ; CONDAMNE la société CGE Distribution aux dépens d'appel et à payer à Me Jousset, ès qualités, une somme de 1.200 ç sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; ACCORDE à la SCP Laval-Lueger, titulaire d'un office d'avoué près la Cour d'appel d'Orléans, le droit à recouvrement direct reconnu par l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ; ET le présent arrêt a été signé par M. Rémery, Président et Mme X..., Greffier ayant assisté au prononcé de l'arrêt. LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT