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04/07/2024 | FRANCE | N°22/00482

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-6, 04 juillet 2024, 22/00482


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 89K



Chambre sociale 4-6



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 04 JUILLET 2024



N° RG 22/00482 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VAFF



AFFAIRE :



[U] [D]





C/



S.A. [9]



S.A. [7]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 19 Janvier 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : I>
N° RG : F 17/00039



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :





Me Frédéric QUINQUIS de

la SCP MICHEL LEDOUX ET ASSOCIES





Me Sophie BRASSART de

la ASSOCIATION [19]







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PE...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89K

Chambre sociale 4-6

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 JUILLET 2024

N° RG 22/00482 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VAFF

AFFAIRE :

[U] [D]

C/

S.A. [9]

S.A. [7]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 19 Janvier 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : I

N° RG : F 17/00039

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Frédéric QUINQUIS de

la SCP MICHEL LEDOUX ET ASSOCIES

Me Sophie BRASSART de

la ASSOCIATION [19]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [U] [D]

de nationalité Française

[Adresse 17]

[Localité 2]

Représentant : Me Frédéric QUINQUIS de la SCP MICHEL LEDOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Stéphanie GONSARD avocat au barreau de PARIS

APPELANT

****************

S.A. [9]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Sophie BRASSART de l'ASSOCIATION Toison - Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R087 - substitué par Me Arnaud CAMUS avocat au barreau de PARIS

S.A. [7]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Sophie BRASSART de l'ASSOCIATION Toison - Associés, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R087 - substitué par Me Arnaud CAMUS avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 23 Avril 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie COURTOIS, Présidente chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Nathalie COURTOIS, Président,

Madame Véronique PITE, Conseiller,

Madame Odile CRIQ, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,

FAITS ET PROCÉDURE

Pour une meilleure compréhension du litige et du statut des entreprises intimées, il convient de faire un bref rappel historique, tel que rappelé par les premiers juges et le salarié, non remis en cause par l'employeur:

Le 8 avril 1946, la loi de nationalisation a créé des établissements public à caractère industriel et commercial (EPIC) : [7] et [11] sont deux entités juridiques distinctes, tout en partageant des directions gérant notamment le personnel.

Dès 1947, la construction d'infrastructures de production et de transport de grande capacité est mise en chantier avec d'importants ouvrages.

A partir de 1957, les centrales de charbon prennent le relais de l'hydraulique. Puis le faible coût des hydrocarbures permet la construction de centrales thermiques au fioul, ainsi au [Localité 16] ou à [Localité 18].

A partir de 1974, suite à la crise pétrolière, la France se tourne vers l'électricité nucléaire et annonce la construction de 13 centrales nucléaires en 2 ans.

Le 1er juillet 2004, 70% du marché de l'électricité est ouvert à la concurrence: le 19 novembre 2004, [6] devient une société anonyme.

Les dispositions européennes prévoient la séparation juridique des activités concurrentielles et des activités gestionnaires de réseau de distribution de sorte que les activités de distribution d'[6] et de [12] devenu [14] ont été filialisées au profit d'[10] et de [15] le 1er janvier 2008.

Du fait du traité d'apport partiel d'actifs en date du 25 juin 2007 à effet au 31 décembre 2007, [10] vient aux droits d'[6].

De même, suite au contrat de cession d'activité de gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel en date du 20 juillet 2007, [15] vient aux droits de [14] à compter du 1er janvier 2008.

Le 8 avril 1968, M.[U] [D] a été embauché par l'EPIC devenu SA [12], en qualité d'ouvrier très qualifié.

De décembre 1990 à avril 2001, date de son départ, il a exercé les fonctions de chef d'équipe des réseaux.

Le 18 juin 2013, M.[U] [D] a saisi le conseil des prud'hommes de Nanterre des demandes suivantes:

15 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice d'anxiété

12 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice découlant du bouleversement dans les conditions d'existence

la délivrance de l'attestation d'exposition professionnelle à l'amiante prévue par le décret n°96-98 du 7 février 1996 et par l'article D416.25 du code de sécurité sociale assortie d'une astreinte de 80 euros par jour de retard

la délivrance de l'attestation aux agents CMR et agents chimiques dangereux conforme aux dispositions des articles D461-25 du code de sécurité sociale et R4412-58 du code du travail assortie d'une astreinte de 80 euros par jour de retard

2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 17 décembre 2014, l'affaire a été radiée faute de diligence des parties.

Après réinscription de l'affaire, par décision du 4 janvier 2018, le conseil s'est déclaré en partage de voix.

Par jugement de départage en date du 19 janvier 2022, le conseil a statué comme suit :

rejette la fin de non-recevoir tirée de l'existence de demandes nouvelles

rejette les demandes de mise hors de cause

déboute M.[U] [D] de toutes ses demandes

déboute les parties du surplus de leurs demandes

dit que chacune des parties supportera la charge de ses frais irrépétibles

condamne M.[U] [D] aux dépens.

Le 16 février 2022, M.[U] [D] a relevé appel de cette décision par voie électronique.

Selon ses dernières conclusions transmises par RPVA du 5 mars 2024, il sollicite de la Cour de voir:

déclarer recevable et non prescrite son action

confirmer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Nanterre le 19 janvier 2022 en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par l'employeur et rejeté les demandes de mises hors de cause d'[6] et [9]

infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 19 janvier 2022 concernant le rejet liée à la demande de réparation du préjudice d'anxiété et à la délivrance des attestations d'expositions aux CMR

Et statuant à nouveau,

Sur le préjudice d'anxiété

dire et juger que M.[U] [D] a été exposé à l'inhalation de fibres d'amiante au sein de la société [14], aujourd'hui [9]

dire et juger que la société a manqué à son obligation de sécurité en ne mettant pas en 'uvre de façon complète et effective, au bénéfice du concluant, toutes les mesures de prévention du risque amiante visées aux articles L4121-1 et L4121-2 du code du travail, (ancien L. 230-2)

dire et juger qu'il a subi en conséquence un préjudice d'anxiété qu'il convient de réparer

en conséquence, condamner la société à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice d'anxiété

Sur la délivrance des attestations

ordonner à la société de lui remettre l'attestation d'exposition à l'amiante conforme aux dispositions des articles D461-25 du code de la sécurité sociale, et à l'ancien article R4412-58 du code du travail visé par le décret n°2012 ' 134 du 30 janvier 2012

ordonner à la société de remettre au requérant les attestations d'exposition aux agents CMR et agents chimiques dangereux conforme aux dispositions des articles D461-25 du code de la sécurité sociale, et à l'ancien article R4412-58 du code du travail visé par le décret n°2012 ' 134 du 30 janvier 2012 à savoir:

benzène

braies et huiles minérales

solvants chlorés

hydrocarbures pétroliers

HPA

noir de carbone

gaz d'échappements

cadmium

nickel

brasage

prononcer à l'encontre de la société une astreinte de 80 euros par jour de retard concernant la remise de ces attestations, la Cour se réservant le droit de liquider la dite astreinte

dire et juger que faute de disposer de cette attestation, le salarié n'est pas en droit de solliciter le bénéfice d'un suivi post professionnel spécifique aux agents cancérogènes pris en charge par la sécurité sociale

dire et juger que le concluant subit en conséquence un préjudice du fait de l'absence de délivrance des fiches et des attestations d'exposition

en conséquence, condamner la société à lui verser la somme de 4 000 euros en réparation du préjudice découlant de cette absence de délivrance

en tout état de cause, condamner la société à lui verser la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par RPVA du 3 août 2022, la société [7] ([6]) demande à la cour de :

infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'existence de demandes nouvelles

rejeter les demandes de mise hors de cause

Et, statuant à nouveau,

débouter M.[U] [D] de ses demandes nouvelles en départage aux fins d'obtenir condamnation des sociétés défenderesses:

au paiement de 15 000 euros au titre du préjudice d'anxiété

au paiement de 4 000 euros en réparation du préjudice découlant de l'absence de délivrance des fiches et attestations d'exposition

prononcer la mise hors de cause d'[6] et d'[9]

confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M.[U] [D] de toutes ses demandes, dit que chacune des parties supportera la charge de ses frais irrépétibles et condamné M.[U] [D] aux dépens

y ajoutant, condamner M.[U] [D] à payer à [6] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

le condamner aux dépens d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par RPVA du 4 août 2022, la société [9] SA demande à la cour de :

infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'existence de demandes nouvelles

rejeter les demandes de mise hors de cause

Et, statuant à nouveau,

débouter M.[U] [D] de ses demandes nouvelles en départage aux fins d'obtenir condamnation des sociétés défenderesses :

au paiement de 15 000 euros au titre du préjudice d'anxiété

au paiement de 4 000 euros en réparation du préjudice découlant de l'absence de délivrance des fiches et attestations d'exposition

prononcer la mise hors de cause d'[6] et d'[9]

confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M.[U] [D] de toutes ses demandes, dit que chacune des parties supportera la charge de ses frais irrépétibles et condamné M.[U] [D] aux dépens

y ajoutant, condamner M.[U] [D] à payer à [6] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

le condamner aux dépens d'appel.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

Par ordonnance rendue le 6 mars 2024, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 23 avril 2024.

Sur la fin de non-recevoir tirée de l'existence de demandes nouvelles

Les sociétés intimées exposent que le salarié a formulé des demandes nouvelles à l'occasion de l'instance de départage à savoir la réparation d'un préjudice d'anxiété et la délivrance des fiches et attestations d'exposition. Elles soutiennent que l'instance a été réintroduite le 19 décembre 2016 après radiation, de sorte que la règle de l'unicité de l'instance n'était plus applicable et que faute d'avoir réitéré ses demandes devant le conseil des prud'hommes avant départage, il ne pouvait plus le faire devant le juge départiteur, ce que conteste M.[U] [D].

Selon l'ancien article R1452-7 du code du travail, 'Les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel. L'absence de tentative de conciliation ne peut être opposée.

Même si elles sont formées en cause d'appel, les juridictions statuant en matière prud'homale connaissent les demandes reconventionnelles ou en compensation qui entrent dans leur compétence'.

Il convient de rappeler que la réinscription d'une affaire après radiation ne vaut pas nouvelle instance mais bien continuité de l'instance initiale, sauf péremption, la radiation n'étant qu'une mesure d'administration judiciaire, ne mettant pas fin à l'instance, de sorte que cette affaire n'est pas soumise au décret n°2016-660 du 20 mai 2016 portant suppression de la règle de l'unicité de l'instance et abrogeant l'article R1452-7 précité.

En l'espèce, il n'est pas contesté par les sociétés que M.[U] [D] a formulé ses demandes dans sa requête initiale, de sorte qu'il était recevable à les réitérer devant le juge départiteur, peu importe qu'elles aient été formulées dans la requête initiale.

En conséquence, il convient de rejeter la fin de non recevoir par confirmation du jugement.

Sur les demandes de mise hors de cause des sociétés [9] et [6]

Les sociétés intimées soutiennent qu'elles ne peuvent pas voir leur responsabilité engagée, l'activité de M.[U] [D] ne relevant pas de leur domaine de compétence et donc de leur responsabilité, ce à quoi s'oppose le salarié.

Selon l'article 31 du code de procédure civile, 'L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé'.

Selon l'article 32 du code précité, ' Est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir'.

Elles rappellent que les EPIC [6] et [11] assuraient historiquement des activités de production, de commercialisation, de transport et de distribution d'électricité pour le premier et de gaz pour le second; qu'en application de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz, les EPIC [6] et [12] ont été transformés en deux sociétés anonymes; que parallèlement, et afin de garantir un accès transparent et non discriminatoire au réseau public de distribution dans les conditions fixées par la directive européenne 2003/54/CE, la seconde transposition en droit français de la directive européenne 2003/54/CE par la loi du 7 décembre 2006 a modifié la loi du 9 août 2004 :

- en prévoyant la séparation juridique entre les entreprises de production / vente et les

entreprises gestionnaires des réseaux de transport et de distribution ;

- en prescrivant des règles d'indépendance fonctionnelle lorsque ces gestionnaires de

réseaux font partie d'une entreprise verticalement intégrée.

C'est ainsi que les activités de distribution d'[6] et de [11] ' devenu [14] puis [9] ont été transférées à des entreprises juridiquement distinctes.

Elles précisent que cette séparation de l'activité de distribution a été réalisée par le biais d'un traité d'apport partiel d'actifs en date du 25 juin 2007 à effet au 31 décembre 2007 par lequel [8] ([10]) vient aux droits d'[6] et d'un contrat de cession d'activité de gestionnaire de réseau de distribution de gaz naturel en date du 20 juillet 2007 à effet au 31 décembre 2007 entre [15] et [9]; qu'en application de l'article 5 de la loi du 9 août 2004 précitée, codifié à l'article L111-71 du code de l'énergie, il a été prévu que les sociétés chargées de la distribution assument les conséquences juridiques passées, présentes et futures relevant de leurs activités réalisées soit directement par elles-mêmes soit dans le cadre de services communs à d'autres entreprises non dotées de la personnalité morale. Elles en concluent que lorsque les conditions sont réunies, l'obligation de délivrance d'attestations d'exposition pèse sur l'employeur concerné par les expositions ou, en cas de restructuration (type fusion, apport partiel d'actifs...) sur la personne morale qui a repris dans son patrimoine les obligations de l'employeur concerné. Elles soutiennent que les opérations de restructuration entraînant une transmission universelle du patrimoine (fusion, apport d'actifs soumis au régime des scissions etc) obligent l'entreprise bénéficiaire de répondre du passif de la société apporteuse.

Elles rappellent que M.[U] [D] a effectué sa carrière au sein d'[6] et de [12] dans des centres de distribution en tant qu'agent mixte, effectuant des interventions sur les réseaux de distribution d'électricité et sur les réseaux de distribution du gaz, de sorte que ces interventions relevant de l'activité de distribution de gaz, la responsabilité des sociétés [6] et [9] ne peut être recherchée pour des faits qui ne relèvent pas de leurs activités, la première ayant pour activité la production d'électricité et la seconde la commercialisation du gaz naturel.

Au vu des textes et des transformations juridiques des différentes entités, c'est à tort que les premiers juges ont rejeté la demande de mise hors de cause des sociétés [6] et [9] au motif que les sociétés défenderesses ne démontraient pas avoir porté à la connaissance du salarié les changements issus de la loi de 2004 et qu'ils en ont déduit que ces changements n'étaient pas opposables au salarié alors que, comme relevé par les intimées, il s'agit de textes de loi dûment publiés au journal officiel de la République française, les modifications concernant la création des sociétés [8] et [15] étant publiées au BODAC.

En effet, la mise hors de cause s'imposait dès lors qu'en application de la loi 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz, les établissements publics à caractère industriel et commercial [6] et [12] ont été transformés en deux sociétés anonymes; que la loi du 7 décembre 2006 a prévu la séparation juridique entre les entreprises de production/vente et les entreprises gestionnaires des réseaux de transport et de distribution et qu'ainsi, les activités de distribution d'[6] et de [11] devenu [14] puis [9] ont été transférées à des entreprises juridiquement distinctes et qu'en application de l'article 5 de la loi 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz codifié à l'article L. 111-71 du code de l'énergie, les sociétés chargées de la distribution assument les conséquences juridiques passées présentes et futures relevant de leurs activités réalisées soit directement par elle-même soit dans le cadre de services communs à d'autres entreprises non dotées de la personnalité morale.

Par ailleurs, cette mise hors de cause d'[6] se déduit également du traité d'apport partiel d'actifs signé entre [6] et C6 du 25 juin 2007 et des engagements suivants:

paragraphe 1- '[...]C6 sera purement et simplement substituée dans tous les droits et obligations d'[6] au titre de l'activité apportée [...]'

paragraphe 9- 'C6 aura, à compter de la date de réalisation, tous pouvoirs pour, aux lieu et place d'[6] et relativement à l'activité apportée, intenter ou poursuivre toutes actions judiciaires et procédures arbitrales, donner tous acquiescements à toutes décisions, recevoir et payer toutes sommes dues en suite de ces actions, procédures et décisions.

C6 sera substituée dans l'ensemble des droits et obligations d'[6] au titre de toute procédure devant toutes juridictions (civiles, commerciales, prud'homales, administratives ou arbitrales), relatives à l'activité apportée, autre que de nature pénale.[...]'

[...]De son côté, C6 s'engage à supporter en lieu et place d'[6], toutes sommes qui pourraient être mises à la charge d'[6], par toutes juridictions (civiles, commerciales, pénales, prud'homales, administratives ou arbitrales), à titre de dommages-intérêts civils à raisons de l'activité apportée, pour des faits antérieurs à la date de réalisation [...]'.

Il en est de même du contrat de cession de l'activité gestionnaire de réseaux de distribution de gaz naturel du 21 décembre 2007 signé entre [11] et [13] d'où il ressort:

- paragraphe 3.2 'substitution': 'En application de la loi du 9 août 2004 précitée et notamment son article 14-1, le cessionnaire est substitué dans l'ensemble des droits et obligations dont le cédant est titulaire ou redevable au titre de l'activité.

Le cessionnaire sera notamment débiteur, aux lieu et place du cédant, des dettes de celui-ci qu'il prend en charge, sans qu'il en résulte novation à l'égard des créanciers [...]'

- paragraphe 4.1 ' prise en charge du passif': '[...] (i) que le cessionnaire assumera seul l'intégralité des dettes et charges du cédant se rapportant à l'activité, y compris celles qui pourraient remonter à une date antérieure à la date de signature du présent contrat et qui auraient été omises dans la comptabilité du cédant, de sorte que le cédant s'en trouvera déchargé [...]'.

- paragraphe 4.3: 'Absence de recours': '[...]Le cessionnaire fera également son affaire personnelle aux lieu et place du cédant sans recours contre celui-ci pour quelque cause que ce soit de l'exécution ou de la résiliation à ses frais, risques et périls de tous accords, traités, contrats ou engagements qui auront pu être souscrits par le cédant au titre de l'activité [...]'. - paragraphe 4.7.1 'contrats de travail': ' Le cessionnaire reprendra les droits et obligations découlant des contrats de travail auxquels le cédant est partie concernant le personnel du cédant attaché à l'activité. Conformément aux dispositions de l'article 14-1 de la loi du 9 août 2004 précitée, et à l'article L122-12 alinéa 2 du code du travail, le cessionnaire se substituera purement et simplement au cédant, par le seul fait de la réalisation de la présente cession, dans le bénéfice et la charge des stipulations des contrats de travail des salariés transférés.

Les parties rappellent expressément que le cessionnaire se substituera au cédant dans ses droits et obligations au titre de la convention du 18 avril 2005, notamment les droits et obligations relatifs aux salariés de l'activité qui sont co-employés par le cédant et [7], et dont [7] prend en charge tout ou partie du salaire et des charges sociales et impôts relatifs dans les conditions rappelées dans ladite convention [...]'.

M. [U] [D] a effectué sa carrière au sein d'[6] et de [12] dans des centres de distribution en tant qu'agent mixte, effectuant des interventions sur les réseaux de distribution d'électricité et sur les réseaux de distribution du gaz. Or, la société [6] a pour activité la production d'électricité et la société [9], la commercialisation du gaz naturel, l'activité de distribution étant reprise pour la première par [10] et pour la seconde par [15].

En conséquence, il convient de mettre hors de cause les sociétés [6] et [9], faute de qualité à défendre, par infirmation du jugement et de débouter M.[U] [D] de ses demandes par confirmation du jugement.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile .

Sur les dépens

Il convient de condamner M.[U] [D] aux dépens de l'appel.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de mise hors de cause des sociétés [6] et [12];

Confirme le surplus;

Statuant à nouveau et y ajoutant;

Met hors de cause les sociétés [6] et [9];

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M.[U] [D] aux dépens.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Nathalie COURTOIS, Président et par Madame Isabelle FIORE Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-6
Numéro d'arrêt : 22/00482
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;22.00482 ?
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