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12/06/2024 | FRANCE | N°21/06582

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-7, 12 juin 2024, 21/06582


COUR D'APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7







Code nac : 96E









N° RG 21/06582

N° Portalis DBV3-V-B7F-U2BG



(Décret n° 2000-1204 du 12 décembre 2000 relatif à l'indemnisation à raison d'une détention provisoire)









































Copies délivrées le :

à :

M. [K]

Me KAMINSKI

AJE

Me DANCKAERT
r>MIN. PUBLIC



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DOUZE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE



a été rendue, par mise à disposition au greffe, l'ordonnance dont la teneur suit après débats et audition des parties à l'audience publique du 24 avril 2024 où nous étions Jean-François BEYNEL, ...

COUR D'APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7

Code nac : 96E

N° RG 21/06582

N° Portalis DBV3-V-B7F-U2BG

(Décret n° 2000-1204 du 12 décembre 2000 relatif à l'indemnisation à raison d'une détention provisoire)

Copies délivrées le :

à :

M. [K]

Me KAMINSKI

AJE

Me DANCKAERT

MIN. PUBLIC

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DOUZE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE

a été rendue, par mise à disposition au greffe, l'ordonnance dont la teneur suit après débats et audition des parties à l'audience publique du 24 avril 2024 où nous étions Jean-François BEYNEL, premier président de la cour d'appel de Versailles assisté par Rosanna VALETTE, Greffière, le prononcé de la décision a été renvoyée à ce jour ;

ENTRE :

Monsieur [O] [K]

né le [Date naissance 1] 1990

résidant chez sa soeur [D] [K]

[Adresse 2]

[Localité 5]

comparant, assisté de Me David-Olivier KAMINSKI, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Chloé MAILLOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1710

DEMANDEUR

ET :

L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

[Adresse 3]

[Adresse 6]

[Localité 4]

représenté par Me Marie-hélène DANCKAERT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 520

ET :

Le ministère public pris en la personne de Mme GULPHE-BERBAIN, avocat général

Nous, Jean-François BEYNEL, premier président de la cour d'appel de Versailles, assisté de Rosanna VALETTE, Greffière,

Vu l'arrêt de la 8ème chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Versailles du 19 mai 2021 relaxant monsieur [O] [K], devenu définitif par un certificat de non-pourvoi du 27 février 2024 ;

Vu la requête de monsieur [O] [K], né le [Date naissance 1] 1990, reçue au greffe de la cour d'appel de Versailles le 27 février 2024 ;

Vu les pièces jointes à cette requête, le dossier de la procédure ;

Vu les conclusions de l'agent judiciaire de l'Etat, reçues au greffe de la cour d'appel de Versailles le 25 janvier 2024 ;

Vu les conclusions du procureur général, reçues au greffe de la cour d'appel de Versailles le 29 février 2024 ;

Vu les lettres recommandées en date du 14 mars 2024 notifiant aux parties la date de l'audience du 24 avril 2024 ;

Vu les articles 149 et suivants et R26 du code de procédure pénale ;

EXPOSÉ DE LA CAUSE

Monsieur [O] [K] sollicite la réparation de sa détention provisoire du 16 mai 2019 au 16 avril 2020 et du 23 octobre 2020 au 14 avril 2021 à la maison d'arrêt de [Localité 7].

Il sollicite dans sa requête les sommes suivantes :

- 321 600 euros en réparation de son préjudice moral ;

- 49 558 euros en réparation de son préjudice matériel ;

Dans ses conclusions reçues le 25 janvier 2024, à titre principal, l'agent judiciaire de l'Etat constate ne pas être en mesure de pouvoir apprécier si la demande indemnitaire du requérant ne se heurte à aucune fin de non-recevoir pour la première période du 16 mai 2019 au 16 avril 2020 en raison de l'absence de précision de l'exécution de la condamnation du 25 mars 2020. A titre subsidiaire, l'agent judiciaire de l'Etat sollicite une réparation du préjudice moral n'excédant pas 19 000 euros. Il fait valoir que le requérant était célibataire, sans enfants et faisait l'objet de 14 condamnations dont deux incarcérations, ce qui amoindrit le choc carcéral. S'agissant des conditions de détention, il retient qu'aucune justification ne caractérise des conditions personnelles difficiles de détention. Il ajoute que la séparation avec les proches est inhérente à la détention. Au titre du préjudice matériel, l'agent judiciaire de l'Etat conclut à la recevabilité de la demande d'indemnisation au titre de la perte de revenus mais il réserve sa proposition indemnitaire à la communication du contrat de professionnalisation mentionnant la durée de la formation ainsi que la preuve de la poursuite de la formation après l'incarcération. Il rejette le remboursement des frais de défense pénale au motif que les factures forfaitaires produites par le requérant ne détaillent aucune prestation.

Dans ses conclusions reçues le 18 mars 2024, le procureur général conclut à la recevabilité de la requête et s'en rapporte à l'appréciation du premier président s'agissant du montant de la réparation du préjudice moral subi. Il précise que le requérant était célibataire et n'avait pas d'enfants. Il fait valoir que le requérant a fait l'objet de plusieurs incarcérations ce qui constitue un facteur de minoration du préjudice moral. S'agissant des conditions de détention, le procureur général constate que le requérant ne rapporte aucune preuve de troubles psychologiques découlant de la détention. Au titre du préjudice matériel, le procureur général s'en rapporte à l'évaluation de l'agent judicaire de l'Etat concernant l'indemnisation de la perte de revenus. Il conclut à la recevabilité de la demande d'indemnisation au titre de la perte de revenus mais il réserve sa proposition indemnitaire à la communication du contrat de professionnalisation mentionnant la durée de la formation ainsi que la preuve de la poursuite de la formation après l'incarcération. Il déboute le requérant au titre de la réparation des frais de défense.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la requête

Aux termes des articles 149, 149-1, 149-2 et R26 du code de procédure pénale, la personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.

La requête en indemnisation doit contenir l'exposé des faits, le montant de la réparation demandée, et toutes indications utiles prévues à l'article R26. Elle doit être présentée au premier président de la cour d'appel dans un délai de six mois à compter du jour où la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement acquiert un caractère définitif.

En l'espèce, il ressort de la fiche pénale du requérant que sa détention provisoire a démarré le 16 mai 2019 jusqu'au 16 avril 2020, jour de sa remise en liberté sous contrôle judiciaire avant de faire l'objet d'un placement sous mandat de dépôt par le tribunal correctionnel de Nanterre et d'être à nouveau détenu du 23 octobre 2020 au 14 avril 2021.

Ainsi, la requête est recevable pour une période de détention provisoire d'1 an 4 mois et 22 jours, soit 509 jours.

Sur le préjudice moral

Monsieur [O] [K] a été incarcéré 509 jours, alors qu'il était âgé de 28 ans.

Le choc carcéral doit être relativisé dès lors que le requérant a déjà été détenu antérieurement.

En l'espèce, le requérant a été incarcéré à plusieurs reprise ce qui atténue le choc carcéral.

Le requérant sera donc débouté sur ce chef.

S'agissant des conditions de détention, il appartient au requérant de justifier des conditions difficiles qu'il allègue.

En l'espèce, le requérant relate avoir des séquelles psychologiques mais il ne fournit pas de preuves justifiant des conditions de détention particulièrement difficiles. Le rapport de détention confirme le bon comportement du détenu qui a pu faire des activités et recevoir des visites.

Le requérant sera donc débouté sur ce chef.

La somme de 50 000 euros paraît proportionnée eu égard à la période de détention injustifiée. Il convient donc d'allouer à monsieur [O] [K] la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Sur le préjudice matériel

Sur la perte de revenus professionnels

Le requérant a droit à l'indemnisation de l'ensemble des prestations non perçues pendant la période de détention. Il doit néanmoins apporter la preuve qu'il exerçait un travail et percevait des salaires avant son placement en détention.

En l'espèce, le requérant fournit trois bulletins de paye dont le dernier concerne le mois de mai 2019. Or le requérant a été placé en détention provisoire le 16 mai 2019 et sur ses bulletins figure la mention " contrat de professionnalisation sans bac pro ". Il justifie bien qu'il exerçait un travail et percevait des salaires avant son placement en détention provisoire. Les bulletins de salaires versés au dossier font état d'un salaire mensuel de 978 euros.

Le requérant sera donc indemnisé sur ce chef.

La somme de 10 758 euros paraît proportionnée eu égard à la période de détention injustifiée et de la prise en compte d'un facteur d'aggravation du préjudice matériel subi. Il convient donc d'allouer à monsieur [O] [K] la somme de 10 758 euros en réparation de son préjudice matériel.

Sur le remboursement des frais de défense pénale

Seules sont indemnisées les prestations directement liées à la privation de liberté dès lors qu'elles sont à la charge du requérant et à la condition qu'il fournisse une facture d'honoraires énumérant de façon détaillée les prestations effectuées pour obtenir sa libération ainsi que leur coût, notamment les visites à l'établissement pénitentiaire, les diligences effectuées pour faire cesser la détention par des demandes de mise en liberté.

En l'espèce, le requérant produit une facture forfaitaire d'un montant global de 29 800 euros sans détailler les prestations.

Le requérant sera donc débouté sur ce chef.

Ainsi, le requérant sera débouté de sa demande d'indemnisation de son préjudice matériel au titre du remboursement des frais de défense pénale.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance contradictoire,

DÉCLARONS recevable la requête de Monsieur [O] [K];

ALLOUONS à Monsieur [O] [K] :

- La somme de CINQUANTE MILLE EUROS (50 000 euros) en réparation de son préjudice moral ;

- La somme de DIX MILLE SEPT CENT CINQUANTE-HUIT EUROS (10 758 euros) en réparation de son préjudice matériel ;

LAISSONS les dépens de la présente procédure à la charge de l'agent judiciaire de l'Etat.

Prononcé par mise à disposition de notre ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées selon les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

ET ONT SIGNÉ LA PRÉSENTE ORDONNANCE

Jean-François BEYNEL, premier président de la cour d'appel de Versailles

Rosanna VALETTE, greffier

LE GREFFIER LE PREMIER PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-7
Numéro d'arrêt : 21/06582
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;21.06582 ?
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