COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
Chambre sociale 4-6
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 06 JUIN 2024
N° RG 22/01240 -
N° Portalis DBV3-V-B7G-VENU
AFFAIRE :
[H] [V]
C/
S.A.S. DXC TECHNOLOGY FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Mars 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY
N° Section : E
N° RG : 21/00133
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Olivier GADY de
la AARPI COLIN GADY PUISSANT AVOCATS
Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de
la SCP COURTAIGNE AVOCATS
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SIX JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [H] [V]
né le 04 Septembre 1975 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentant : Me Olivier GADY de l'AARPI COLIN GADY PUISSANT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1531 substitué par Me Claire DEYSSON avocat au barreau de PARIS
APPELANT
****************
S.A.S. DXC TECHNOLOGY FRANCE
N° SIRET : 315 26 8 6 64
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 - - Représentant : Me Laurent GUARDELLI de la SCP COBLENCE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0053 -substitué par Me Bérengère NGUYEN TRONG avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Odile CRIQ, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Nathalie COURTOIS, Président,
Madame Véronique PITE, Conseiller,
Madame Odile CRIQ, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,
Greffier lors du prononcé : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI
FAITS ET PROCÉDURE
M. [H] [V] a été engagé en qualité de Practice Partner, statut cadre, par la société Dxc Technology France, selon contrat à durée indéterminée à compter du 17 juillet 2017.
La société Dxc Technology France a une activité de conseil, d'intégration de systèmes d'information et d'externalisation, emploie plus de dix salariés et relève de la convention collective des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseils, dite Syntec.
Le 22 novembre 2017, la société a décidé de rompre la période d'essai de M. [V].
M. [V] a saisi initialement le conseil de prud'hommes de Nanterre qui a renvoyé l'affaire le 11 février 2021, devant le conseil de prud'hommes de Poissy. M. [V] a sollicité la requalification de la rupture de sa période d'essai en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que la condamnation de la société au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, ce à quoi la société s'est opposée.
Par jugement rendu le 15 mars 2022, notifié le 18 mars 2022, le conseil a statué comme suit :
Dit que la rupture de période d'essai du contrat de M. [V] est régulière.
Fixe la moyenne mensuelle des salaires en application des dispositions de l'article R.1454-28 du code du travail à la somme de 12.083 euros bruts ;
Condamne la société Dxc Technology France à verser à M. [V] avec intérêts légaux à compter du prononcé du présent jugement la somme de 43 498,80 euros au titre de la contrepartie financière à la clause de non-concurrence ;
Déboute M. [V] du surplus de ses demandes.
Sur les demandes reconventionnelles de la partie défenderesse :
Condamne M. [V] à verser à la société Dxc Technology France, avec intérêts légaux à compter du prononcé du présent jugement les sommes suivantes :
15 000 euros au titre du remboursement du " welcome bonus " indument versé ;
3 068,50 euros au titre de l'indemnité de congés payés indûment perçues;
Déboute la société Dxc Technology France du surplus de ses demandes.
Le 14 avril 2022, M. [V] a relevé appel de cette décision par voie électronique.
Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 12 juillet 2022, M. [V] demande à la cour de :
Le juger recevable et fondé en son appel,
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [V] des demandes suivantes : Condamner la société Dxc Technology France au paiement des sommes suivantes :
Indemnité compensatrice de préavis : 24.166 euros
Indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 2.416,60 euros
Indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse : 12.083 euros
Indemnité pour licenciement irrégulier : 12.083 euros
Indemnité de congés payés afférents : 4.349,88 euros
Article 700 du code de procédure civile : 2.000 euros
Ordonner à la société Dxc Technology France la délivrance de documents sociaux conformes.
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [V] à régler à la société Dxc Technology France les sommes suivantes :
Remboursement du « welcome bonus » : 15.000 euros
Indemnité compensatrice de congés payés : 3.068,50 euros
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Condamner la société Dxc Technology France au paiement des sommes suivantes :
Indemnité compensatrice de préavis : 24.166 euros
Indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 2.416,60 euros
Indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse : 12.083 euros
Indemnité pour licenciement irrégulier : 12.083 euros
Débouter la société Dxc Technology France de ses demandes reconventionnelles.
Ordonner à la société Dxc Technology France la délivrance de documents sociaux conformes au jugement à intervenir.
Condamner la société Dxc Technology France au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure en première instance.
Condamner la société Dxc Technology France au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure en appel.
Condamner la société Dxc Technology France aux entiers dépens d'instance.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 22 septembre 2022, la société Dxc Technology France demande à la cour de :
Recevoir la société Dxc Technology France en ses présentes conclusions ;
L'en dire bien fondée ;
Par conséquent,
Confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Poissy le 15 mars 2022 ;
Débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes ;
Condamner M. [V] à payer à la société la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance rendue le 10 janvier 2024, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 11 mars 2024.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.
MOTIFS
Sur la rupture de la période d'essai :
M. [V] soutient que la rupture de sa période d'essai est abusive pour être intervenue après son terme. Il affirme avoir été donc définitivement engagé le 16 novembre 2017 à 00 h 00 et que pour preuve de cet engagement, il recevait au mois de novembre le bonus exceptionnel de 15 000 euros stipulé à l'article 4.2 de son contrat de travail prévu en cas de validation de la période d'essai.
La société réplique que la période d'essai a été prolongée d'autant de jours que M.[V] a été absent au cours de la période.
L'article L. 1231-1 du code du travail exclut la rupture durant la période d'essai du formalisme exposé dans le Titre III du code du travail consacré à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée.
L'article L. 1221-20 du code du travail autorise les parties à prévoir une période d'essai destinée à permettre à l'employeur d'apprécier les qualités professionnelles du salarié et pendant laquelle chacune des parties peut, sauf abus, rompre le contrat à tout moment sans motif.
Ainsi, l'employeur n'a pas à justifier de sa décision de rupture de la période d'essai et il appartient au salarié qui la conteste de rapporter la preuve d'un abus de droit de sa part. La rupture est abusive lorsqu'elle intervient pour un motif non inhérent à la personne du salarié.
Selon le contrat de travail de M. [V] conclu pour une durée indéterminée à compter du 17 juillet 2017, il était prévu en son article 2, une période d'essai d'une durée de quatre mois, renouvelable une fois pour une durée de quatre mois, par accord écrit des deux parties.
Ainsi, la période d'essai prenait fin le 16 novembre à 00h00.
En l'espèce, il est constant que par lettre en date du 22 novembre 2017, l'employeur a notifié au salarié sa décision de rompre la période d'essai.
La période d'essai étant destinée à évaluer les capacités du salarié, il est de principe que sa durée est prolongée d'une durée équivalente aux périodes de suspension du contrat de travail pour congés du salarié, accident du travail ou arrêt maladie.
Il résulte (pièce n°4 de la société intimée) d'un courriel de M. [V] du 7 août 2017, adressé à M [J] que le salarié disait être en congés les 08 et 10 août 2017 et le 9 août 2017 l'après-midi, soit une durée de 2 jours et demi.
S'agissant de la demi-journée du 9 août 2017, le salarié n'établit pas l'incidence d'une éventuelle convention de forfait jours dont il ne justifie d'ailleurs pas la conclusion entre les parties, sur la durée de la période probatoire laquelle suppose l'accomplissement d'un travail effectif.
Il ressort d'un message automatique d'absence du salarié du 15 août 2017, (pièce n°5 de la société intimée) que ce dernier faisait état d'un retour au bureau le 21 août. M. [V] était donc absent du 16 au 18 août, soit pendant trois jours.
Vainement le salarié fait-il état avoir eu seulement l'intention de prendre quelques jours de congés sur cette période, mais n'en n'avoir pas bénéficié et avoir exécuté sa prestation de travail, notamment chez le client SAP.
Certes les bulletins de paye de M. [V] ne mentionnent aucun jour de congés payés, et le reçu pour solde de tout compte ainsi que le dernier bulletin de salaire font mention de 13 jours de congés payés, réglés soit la totalité du nombre de jours acquis, depuis son embauche.
Néanmoins, le salarié ne communique aux débats aucun élément de nature à contredire ses propres affirmations telles qu'elles résultent de son courriel du 7 août 2017 adressé à sa hiérarchie et de son message automatique d'absence du 15 août 2017 et à établir l'accomplissement d'un travail effectif de sa part sur la période contestée.
Il est constant que le salarié a été en arrêt de travail pour maladie les 21 et 22 octobre 2017.
Vainement M. [V] allègue ne pas avoir posé de jours de congés payés relativement à ces deux journées, dès lors que la durée de la période d'essai était suspendue pour ce motif.
Par ailleurs, aucun élément ne vient objectiver les allégations du salarié sur le fait que ce dernier aurait appris lors d'une discussion avec le service des ressources humaines une semaine avant la fin de la période d'essai, la volonté de la direction de valider sa période d'essai.
Certes, l'employeur a versé au salarié en novembre 2017, le bonus de 15 000 euros contractuellement prévu en cas de confirmation de ce dernier dans ses fonctions au terme de la période d'essai.
Pour autant, il ne saurait être déduit de ce seul fait, ni du silence gardé par l'employeur à un courriel du salarié adressé le 17 novembre 2017 évoquant la satisfaction de ce dernier, aucune volonté contraire de la société, alors que cette dernière exprimait clairement sa volonté de rompre la période probatoire par courrier en date du 22 novembre 2017.
Le salarié allègue également que la société s'inscrivait dans une volonté de supprimer des postes après que la direction des ressources humaines ait annoncé le 15 novembre 2017, l'ouverture d'un plan de départs volontaires visant le départ de 80 salariés de l'entreprise.
Si M. [V] justifie (pièce n° 9) de l'information donnée par la société du lancement d'un plan de départs volontaires au 15 novembre 2017, pour autant, la proposition de l'employeur, faite au salarié le 15 novembre 2017 de renouveler la période d'essai jusqu'au 16 mars 2018 n'accrédite aucun abus de la part de la société, dès lors que le salarié n'a pas donné suite à cette proposition.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [V] a été absent sur un total de (2,5 jours + 3jours +2 jours) 7,5 jours pendant sa période de préavis.
La période d'essai qui prenait fin le 16 novembre à 00h00 a donc été prolongée de 7,5 jours.
Force est de constater que la rupture de la période d'essai est intervenue le 22 novembre 2017, alors que cette période avait été prolongée de sept jours et demi, avant l'expiration de la période.
Il s'en déduit que la rupture de la période d'essai du salarié lui a été notifiée régulièrement avant son terme et ne peut s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
C'est donc à bon droit que les premiers juges ont débouté M. [V] de ce chef. Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [V] de toutes ses demandes en lien avec la rupture de sa période d'essai dont le bonus exceptionnel.
Sur la demande en remboursement d'une fraction de l'indemnité compensatrice de congés payés versée dans le cadre du solde de tout compte :
La société demande la condamnation du salarié au remboursement de la somme de 3 068,50 euros au titre des congés payés indûment rémunérés.
Il suit de ce qui précède que M. [V] s'est absenté pour congés les 8 août ,9 août après-midi, 10 août, 16 août, 17 août, et 18 août 2017, soit cinq jours et demi. Ces jours de congés lui ayant été payés tel qu'il résulte du solde de tout compte (pièce n° 3 de l'appelant), le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [V] à payer à la société la somme de 3 068,50 euros de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Poissy en date du 15 mars 2022, en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit que chacune des parties supportera la charge de ses frais irrépétibles.
Condamne M. [H] [V] aux dépens d'appel.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Nathalie COURTOIS, Président et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,