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29/03/2024 | FRANCE | N°24/01838

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-7, 29 mars 2024, 24/01838


COUR D'APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7



Code nac : 14C









N° RG 24/01838 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WNTG



( Décret n°2011-846 du 18 juillet 2011, Article L3211-12-4 du Code de la Santé publique)















Copies délivrées le :



à :



M. [L]



Me PIETROIS CHABASSIER



HOP. DE [Localité 4]



AFTPO



Min. Public









ORDONNANCE

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Le 29 Mars 2024



prononcé par mise à disposition au greffe,



Nous Madame Juliette LANÇON, conseiller à la cour d'appel de Versailles, déléguée par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière d'hospitalisation sous contrainte (décret n°2011-846 du 1...

COUR D'APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7

Code nac : 14C

N° RG 24/01838 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WNTG

( Décret n°2011-846 du 18 juillet 2011, Article L3211-12-4 du Code de la Santé publique)

Copies délivrées le :

à :

M. [L]

Me PIETROIS CHABASSIER

HOP. DE [Localité 4]

AFTPO

Min. Public

ORDONNANCE

Le 29 Mars 2024

prononcé par mise à disposition au greffe,

Nous Madame Juliette LANÇON, conseiller à la cour d'appel de Versailles, déléguée par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière d'hospitalisation sous contrainte (décret n°2011-846 du 18 juillet 2011), assistée de Madame Rosanna VALETTE greffier, avons rendu l'ordonnance suivante :

ENTRE :

Monsieur [I] [L]

actuellement hospitalisé au centre hospitalier de

VERSAILLES

comparant, assisté de Me Pauline PIETROIS CHABASSIER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 306,

APPELANT

ET :

LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 4]

non représenté,

AFTPO, curateur

non représentée,

INTIMEES

ET COMME PARTIE JOINTE :

LE PROCUREUR GENERAL DE LA COUR D'APPEL DE VERSAILLES

pris en la personne de madame Corinne MOREAU, avocat général, non présente

A l'audience publique du 29 Mars 2024 où nous étions Madame Juliette LANÇON assisté de Madame Rosanna VALETTE, greffier, avons indiqué que notre ordonnance serait rendue ce jour;

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Monsieur [I] [L], né le 12 août 1982 à Ivry Sur Seine fait l'objet depuis le 13 mars 2024 d'une mesure de soins psychiatriques, sous la forme d'une hospitalisation complète, au centre hospitalier de [Localité 4], sur décision du directeur d'établissement, en application des dispositions de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, en cas de péril imminent.

Le 20 mars 2024, Monsieur le directeur du centre hospitalier de [Localité 4] a saisi le juge des libertés et de la détention afin qu'il soit saisi conformément aux dispositions des articles L. 3211-12-1 et suivants du code de la santé publique.

Par ordonnance du 22 mars 2024, le juge des libertés et de la détention de Versailles a rejeté les moyens d'irrégularité soulevés et a ordonné le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous forme d'hospitalisation complète.

Appel a été interjeté le 25 mars 2024 par Monsieur [I] [L].

Monsieur [I] [L] et l'établissement hospitalier de [Localité 4] et L'AFTPO ont été convoqués en vue de l'audience.

Le procureur général représenté par Corinne MOREAU, avocate générale, a visé cette procédure par écrit le 27 mars 2024, avis versé aux débats.

L'audience s'est tenue le 29 mars 2024 en audience publique.

A l'audience, bien que régulièrement convoqués, le centre hospitalier de [Localité 4] et L'AFTPO n'ont pas comparu.

Le conseil de Monsieur [I] [L] a soulevé des irrégularités relatives à tardiveté de la notification des décisions d'admission et de maintien et à l'absence d'information de la commission départementale des soins psychiatriques de la décision de maintien. Elle a indiqué que c'était la troisième hospitalisation de Monsieur [I] [L], qu'il avait passé une nuit à l'isolement au début, qu'il préférait sortir, qu'il reconnaissait la nécessité du traitement et du programme de soins et qu'il voulait bien rester hospitalisé s'il avait connaissance de sa date de sortie.

Monsieur [I] [L] a été entendu en dernier et a dit que cela se passait bien avec les infirmières et les soignants, qu'il voulait retrouver un emploi comme chauffeur poids lourd, qu'il prenait des médicaments suite à une leucémie, qu'il se sentait plutôt bien sans le traitement, qu'il habitait chez sa mère qu'il avait vue quand il était en diabétologie et qu'il l'avait eue au téléphone, que les difficultés avec sa mère avait duré cinq minutes et qu'il pouvait aller chez son père à [Localité 1] ou chez son frère à [Localité 3].

L'affaire a été mise en délibéré.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel a été interjeté dans les délais légaux et il est motivé. Il doit être déclaré recevable.

Sur les moyens d'irrégularité soulevés

Sur la tardiveté de la notification des décisions d'admission et de maintien

Aux termes de l'article L. 3211-3 du code de la santé publique, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est informée le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, des décisions d'admission et de maintien, ainsi que des raisons qui les motivent, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1 du même code.

Par ailleurs, l'irrégularité affectant une décision administrative n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet, conformément aux dispositions de l'article L. 3216-1 du code de la santé publique, cette atteinte devant être appréciée in concreto.

En l'espèce, la décision d'admission en date du 13 mars 2024 a été présentée au patient le 15 mars 2024, ce dernier s'étant trouvé dans l'impossibilité de signer compte tenu de son état délirant et son opposition aux soins décrit dans le formulaire de notification des droits et dans le certificat médical initial. Néanmoins, Monsieur [I] [L] a été informé des décisions le concernant lors de chaque examen médical.

La décision de maintien du 16 mars 2024 a été notifiée le 18 mars 2024, le patient ayant refusé de signer. L'ensemble des documents lui ont été notifiés et remis de nouveau le 19 mars 2024 et Monsieur [I] [L] a signé la notification. Il n'en est donc résulté aucun grief. L'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a rejeté ce moyen.

Sur le défaut d'information de la commission départementale des soins psychiatriques

Aux termes de l'article L. 3212-5 du code de la santé publique, le directeur de l'établissement d'accueil transmet sans délai au représentant de l'Etat dans le département ou, à [Localité 2], au préfet de police, et à la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l'article L. 3222-5 toute décision d'admission d'une personne en soins psychiatriques en application du présent chapitre. Il transmet également sans délai à cette commission une copie du certificat médical d'admission, du bulletin d'entrée et de chacun des certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2.

L'article L. 3223-1 du même code dispose que « la commission prévue à l'article L. 3222-5 :

1° Est informée, dans les conditions prévues aux chapitres II et III du titre Ier du présent livre, de toute décision d'admission en soins psychiatriques, de tout renouvellement de cette décision et de toute décision mettant fin à ces soins ; » 

L'article R. 3211-24 du même code dispose que « la saisine est accompagnée des pièces prévues à l'article R. 3211-12 ainsi que de l'avis motivé prévu au II de l'article L. 3211-12-1. Cet avis décrit avec précision les manifestations des troubles mentaux dont est atteinte la personne qui fait l'objet de soins psychiatriques et les circonstances particulières qui, toutes deux, rendent nécessaire la poursuite de l'hospitalisation complète au regard des conditions posées par les articles L. 3212-1 et L. 3213-1. » 

L'article R. 3211-12 du même code dispose que « sont communiqués au juge des libertés et de la détention afin qu'il statue :

1° Quand l'admission en soins psychiatriques a été effectuée à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent, une copie de la décision d'admission motivée et, le cas échéant, une copie de la décision la plus récente ayant maintenu la mesure de soins, les nom, prénoms et adresse du tiers qui a demandé l'admission en soins ainsi qu'une copie de sa demande d'admission ;

2° Quand l'admission en soins psychiatriques a été ordonnée par le préfet, une copie de l'arrêté d'admission en soins psychiatriques et, le cas échéant, une copie de l'arrêté le plus récent ayant maintenu la mesure de soins ;

3° Quand l'admission en soins psychiatriques a été ordonnée par une juridiction, une copie de la décision et de l'expertise mentionnées à l'article 706-135 du code de procédure pénale ;

4° Une copie des certificats et avis médicaux prévus aux chapitres II à IV du titre Ier du livre II de la troisième partie de la partie législative du présent code, au vu desquels la mesure de soins a été décidée et de tout autre certificat ou avis médical utile, dont ceux sur lesquels se fonde la décision la plus récente de maintien des soins ; »

Il convient en premier lieu de rappeler qu'en application des articles précités, la preuve de l'information de la commission départementale des soins psychiatriques n'est pas une pièce obligatoire qui doit être envoyée au juge des libertés et de la détention lorsqu'il est saisi.

En l'espèce, il est démontré que cette commission a été informée des décisions d'admission et de maintien (du 16 mars 2024) et des différents documents afférents à l'hospitalisation de Monsieur [I] [L] le 18 mars 2024 à 9h34 à l'adresse secretariat-cdsp78@ars.santé.fr. L'ordonnance sera donc confirmée en ce qu'elle a rejeté ce moyen.

Sur le fond

Aux termes du I de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, « une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1 ».

Le certificat médical initial du 13 mars 2024 et les certificats suivants des 14, 16 et 19 mars 2024 détaillent avec précision les troubles dont souffre Monsieur [I] [L]. Le certificat du 27 mars 2024 du docteur [G] indique : « patient hospitalisé pour décompensation de son trouble psychiatrique chronique invalidant en rupture de traitement et de suivi depuis six mois. Monsieur [L] a décidé d'interrompre son suivi et son traitement car il ne se considère pas malade. En effet, le patient n'a aucune conscience de son trouble : il nous dit ne pas être malade. De plus, il regrette que sa mère l'ait poussé à demander la MDPH et un foyer médical. Par ailleurs, il rapporte avoir déjà entendu des voix qui seraient des 'djinns d'après le Coran' mais il dit ne plus avoir d'hallucinations acoustico-verbales actuellement. En entretien ce jour, le patient est de contact bizarre : le faciès est figé, le discours est maniéré, le débit de parole est saccadé et le ton de voix est monocorde. Il nie avoir eu un comportement auto et hétéro agressif auparavant. Il ne reconnaît pas les dégâts matériels dont il serait à l'origine à domicile. Quand nous lui demandons la raison de son hospitalisation, il nous dit avoir cassé une assiette dans le cadre d'une crise clastique. Monsieur [L] se serait mis en colère car sa mère lui aurait interdit de voir son petit frère. Il décrit effectivement des relations conflictuelles avec sa mère.

Concernant ses projets, le patient souhaite apprendre l'arabe et faire "son pèlerinage". Dans ce contexte, nous avons besoin de davantage de temps pour mettre en place un traitement efficace et organiser un suivi en ambulatoire sur son secteur pour assurer la continuité des soins. Il est nécessaire que la mesure de contrainte soit maintenue chez un monsieur qui banalise ses troubles, nie ses troubles du comportement et présente donc une imprévisibilité comportementale.

Recueil des observations (commentaires) du patient autour des soins psychiatriques : 'je ne suis pas malade'. »

Il conclut que les soins psychiatriques doivent être maintenus à temps complet.

Cet avis médical est suffisamment précis pour justifier les restrictions à l'exercice des libertés individuelles de Monsieur [I] [L], qui demeurent adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis, l'intéressé se trouvant dans l'impossibilité de consentir aux soins en raison des troubles décrits, son état nécessitant des soins assortis d'une surveillance constante. L'ordonnance sera donc confirmée en ce qu'elle a maintenu Monsieur [I] [L] en hospitalisation complète.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance réputée contradictoire,

Déclarons l'appel de Monsieur [I] [L] recevable,

Confirmons l'ordonnance entreprise,

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

Prononcé par mise à disposition de notre ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées selon les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Rosanna VALETTE, greffier, Juliette LANÇON, conseiller,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-7
Numéro d'arrêt : 24/01838
Date de la décision : 29/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-29;24.01838 ?
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