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27/03/2024 | FRANCE | N°24/01742

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-7, 27 mars 2024, 24/01742


COUR D'APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7



Code nac : 14C









N° RG 24/01742 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WNJK



( Décret n°2011-846 du 18 juillet 2011, Article L3211-12-4 du Code de la Santé publique)









Copies délivrées le :



à :



Mme [N]



Me LUNEAU



HOP. [5]



Mme [J]



PARQUET GENERAL















ORDONNANCE





LE VI

NGT SEPT MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE



prononcé par mise à disposition au greffe,



Nous, Juliette LANÇON, conseiller à la cour d'appel de Versailles, déléguée par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière d'hospitalisation sous contrainte (décret n°2011-846 du...

COUR D'APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7

Code nac : 14C

N° RG 24/01742 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WNJK

( Décret n°2011-846 du 18 juillet 2011, Article L3211-12-4 du Code de la Santé publique)

Copies délivrées le :

à :

Mme [N]

Me LUNEAU

HOP. [5]

Mme [J]

PARQUET GENERAL

ORDONNANCE

LE VINGT SEPT MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE

prononcé par mise à disposition au greffe,

Nous, Juliette LANÇON, conseiller à la cour d'appel de Versailles, déléguée par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière d'hospitalisation sous contrainte (décret n°2011-846 du 18 juillet 2011), assistée de Rosanna VALETTE greffier, avons rendu l'ordonnance suivante :

ENTRE :

Madame [X] [N]

actuellement hospitalisée à l'hôpital [5]

à [Localité 6]

comparante, assistée par Me Benoît LUNEAU, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 269,

APPELANTE

ET :

LE DIRECTEUR DE [Localité 3] [5]

non représenté,

Madame [S] [J], tiers

[Adresse 1]

[Localité 2]

non comparante, non représentée,

INTIMES

ET COMME PARTIE JOINTE :

LE PROCUREUR GENERAL

pris en la personne de Corinne MOREAU, avocat général, non présente,

A l'audience publique du 27 Mars 2024 où nous étions Juliette LANÇON, conseiller, assistée de Rosanna VALETTE, greffier, avons indiqué que notre ordonnance serait rendue ce jour;

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Madame [X] [N], née le 6 octobre 1993 à [Localité 4] fait l'objet depuis le 11 mars 2024 d'une mesure de soins psychiatriques, sous la forme d'une hospitalisation complète, au centre hospitalier [5] de [Localité 6], sur décision du directeur d'établissement, en application des dispositions de l'article L. 3212-3 du code de la santé publique, en urgence et à la demande d'un tiers, en la personne de Madame [S] [J], sa mère.

Le 18 mars 2024, Monsieur le directeur du centre hospitalier [5] a saisi le juge des libertés et de la détention afin qu'il soit saisi conformément aux dispositions des articles L. 3211-12-1 et suivants du code de la santé publique.

Par ordonnance du 20 mars 2024, le juge des libertés et de la détention de Nanterre a ordonné le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous forme d'hospitalisation complète.

Appel a été interjeté le 21 mars 2024 par le conseil de Madame [X] [N].

Madame [X] [N], l'établissement [5] et Madame [S] [J] ont été convoqués en vue de l'audience.

Le procureur général représenté par Corinne MOREAU, avocate générale, a visé cette procédure par écrit le 25 mars 2024, avis versé aux débats.

L'audience s'est tenue le 27 mars 2024 en audience publique.

A l'audience, bien que régulièrement convoqués, le centre hospitalier [5] et Madame [S] [J] n'ont pas comparu.

Le conseil de Madame [X] [N] a soutenu des irrégularités relatives à l'irrégularité de la demande du tiers, au défaut d'information de la patiente et à l'irrégularité des certificats de la période d'observation (24 et 72 heures). Sur le fond, il a indiqué que la patiente n'avait pas à être maintenue, qu'elle était d'accord pour suivre des soins en libre et qu'elle voulait se soigner.

Madame [X] [N] a été entendue en dernier et a dit qu'elle se sentait mieux depuis le début de son hospitalisation, qu'elle voulait évaluer ce mieux être en conditions réelles, en continuant à prendre les traitements chez elle, que c'était sa deuxième hospitalisation et qu'elle recherchait un emploi dans l'enseignement car elle donnait des cours particuliers.

L'affaire a été mise en délibéré.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel a été interjeté dans les délais légaux. Il doit être déclaré recevable.

Sur les irrégularités soulevées

Sur l'irrégularité de la demande du tiers

L'article L. 3212-1 du code de la santé publique dispose que « I. - Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L. 3211-2-1.

II. - Le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission :

1° Soit lorsqu'il a été saisi d'une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade ». 

L'article R. 3212-1 du même code dispose que « la demande d'admission en soins psychiatriques prévue à l'article L. 3212-1 comporte les mentions manuscrites suivantes :

1° La formulation de la demande d'admission en soins psychiatriques ;

2° Les nom, prénoms, date de naissance et domicile de la personne qui demande les soins et de celle pour laquelle ils sont demandés ;

3° Le cas échéant, leur degré de parenté ou la nature des relations existant entre elles avant la demande de soins ;

4° La date ;

5° La signature ».

Par ailleurs, l'irrégularité affectant une décision administrative n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet, conformément aux dispositions de l'article L. 3216-1 du code de la santé publique, cette atteinte devant être appréciée in concreto.

Si la demande d'admission en soins psychiatriques émanant du tiers n'est pas signée ni datée, il est toutefois justifié de la pièce d'identité permettant d'établir la qualité du tiers, l'ensemble des autres mentions de la demande étant tout à fait conformes. Quant à l'absence de date, cette erreur matérielle entachant ladite demande du tiers ne saurait causer un grief de nature à entraîner la nullité de la procédure. En effet, il est justifié d'une décision d'admission en soins psychiatriques sans consentement prise par le directeur de l'établissement en date du 12 mars 2024 et notifiée à Madame [X] [N] le même jour. L'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a rejeté ce moyen.

Sur le défaut d'information de la patiente

L'article L. 3211-3 du code de la santé publique dispose que « ['] toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

a) Le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l'admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1 ».

Le conseil de Madame [X] [N] soutient que la décision par laquelle Madame [X] [N] a été hospitalisée sans son consentement mentionne la demande d'un tiers mais ne précise pas quelle est son identité.

Contrairement à ce que soutient le conseil de Madame [X] [N], l'identité du tiers n'a pas à être expressément mentionnée dans la décision d'admission, seul doit être précisé l'article du code de la santé publique applicable au type d'hospitalisation ainsi que la type d'hospitalisation, la date et le nom du médecin rédacteur du certificat médical initial, l'identité complète de la personne, ce qui est bien le cas en l'espèce. Le moyen sera rejeté.

Sur l'irrégularité des certificats de la période d'observation (24 et 72 heures)

L'article L. 3211-2-2 du code de la santé publique dispose que « lorsqu'une personne est admise en soins psychiatriques en application des chapitres II ou III du présent titre, elle fait l'objet d'une période d'observation et de soins initiale sous la forme d'une hospitalisation complète.

Dans les vingt-quatre heures suivant l'admission, un médecin réalise un examen somatique complet de la personne et un psychiatre de l'établissement d'accueil établit un certificat médical constatant son état mental et confirmant ou non la nécessité de maintenir les soins psychiatriques au regard des conditions d'admission définies aux articles L. 3212-1 ou L. 3213-1. Ce psychiatre ne peut être l'auteur du certificat médical ou d'un des deux certificats médicaux sur la base desquels la décision d'admission a été prononcée.

Dans les soixante-douze heures suivant l'admission, un nouveau certificat médical est établi dans les mêmes conditions que celles prévues au deuxième alinéa du présent article ».

L'article L. 3212-3 du code de la santé publique dispose qu'en « cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, le directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d'un tiers l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade au vu d'un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d'un médecin exerçant dans l'établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L.3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts. »

En l'espèce, les certificats médicaux ont été rédigés par trois médecins différents et que si le Docteur [O] et le Docteur [Z] sont médecins praticiens attachés associés en psychiatrie à l'hôpital [5], exerçant sous la responsabilité du Docteur [F], praticien hospitalier, ce sont bien deux psychiatres différents qui ont examiné Madame [X] [N] et qui ont rédigé les certificats médicaux des 24 et 72 heures. L'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a rejeté ce moyen.

Sur le fond

Aux termes du I de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, « une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1°

Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1 ».

Le certificat médical initial du 11 mars 2024 et les certificats suivants des 12 et 14, 18 mars 2024 détaillent avec précision les troubles dont souffre Madame [X] [N]. Le certificat du 26 mars 2024 du docteur [O] indique qu'il « s'agit d'une patiente hospitalisée à notre niveau en SPDTU suite à une décompensation psychotique et une rupture de soins.

L'entretien ce jour retrouve :

Une patiente calme sur le plan moteur, le contact est de bonne qualité, son discours est peu cohérent, reste délirant émaillé des idées délirantes de persécution à mécanisme essentiellement interprétatif ainsi que des hallucinations acousticoverbales et visuelles

L'humeur est légèrement anxieuse, elle ne verbalise pas d'idées noires ou de velléités suicidaires ce jour.

La patiente reste toujours imprévisible et opposante aux soins, elle est dans la négociation des traitements et conteste son hospitalisation.

L'adhésion aux soins est encore très fragile et l'insight est médiocre.

En conclusion, l'hospitalisation et les soins psychiatriques sous contrainte sont toujours nécessaire afin de poursuivre l'évaluation psychiatrique et la prise en charge ».

Il conclut que les soins psychiatriques doivent être maintenus à temps complet.

Cet avis médical est suffisamment précis pour justifier les restrictions à l'exercice des libertés individuelles de Madame [X] [N], qui demeurent adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en 'uvre du traitement requis, l'intéressé se trouvant dans l'impossibilité de consentir aux soins en raison des troubles décrits, son état nécessitant des soins assortis d'une surveillance constante. L'ordonnance sera donc confirmée en ce qu'elle a maintenu Madame [X] [N] en hospitalisation complète.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance réputée contradictoire,

Déclarons l'appel de Madame [X] [N] recevable,

Confirmons l'ordonnance entreprise,

Y ajoutant,

Rejetons le moyen d'irrégularité soulevé,

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

Prononcé par mise à disposition de notre ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées selon les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Rosanna VALETTE, greffier, Juliette LANÇON, conseiller,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-7
Numéro d'arrêt : 24/01742
Date de la décision : 27/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-27;24.01742 ?
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