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06/07/2023 | FRANCE | N°22/03361

France | France, Cour d'appel de Versailles, 21e chambre, 06 juillet 2023, 22/03361


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



21e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 06 JUILLET 2023



N° RG 22/03361 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VQCZ



AFFAIRE :



[W] [S]





C/

S.A.S.U. AVANTIF GROUPE









Décision déférée à la cour : Arrêt rendu le 19 Janvier 2022 par le Cour de Cassation de PARIS

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : W 20-12.15



Expéditi

ons exécutoires

Expéditions

Copies



délivrées le :

à :



Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE



Me Jacques LAROUSSE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SIX JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS



Devant la cour d'appel de Versaille...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

21e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 06 JUILLET 2023

N° RG 22/03361 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VQCZ

AFFAIRE :

[W] [S]

C/

S.A.S.U. AVANTIF GROUPE

Décision déférée à la cour : Arrêt rendu le 19 Janvier 2022 par le Cour de Cassation de PARIS

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : W 20-12.15

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE

Me Jacques LAROUSSE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS

Devant la cour d'appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation PARIS du 19 janvier 2022 cassant et annulant partiellement l'arrêt rendu par la cour d'appel de VERSAILLES le 28 novembre 2019 a rendu l'arrêt suivant initialement prévu le 22 juin 2023 prorogé au 6 juillet 2023 dans l'affaire entre :

Madame [W] [S]

née le 19 Octobre 1967 à [Localité 5] (MAROC)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 -, Me Rachad KOBEISSI,, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1460

DEMANDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

****************

S.A.S.U. AVANTIF GROUPE

N° SIRET : 537 935 652

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Jacques LAROUSSE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1019

DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 Mai 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,

Madame Véronique PITE conseiller,

Madame Odile CRIQ conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Isabelle FIORE,

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant contrat de travail à durée indéterminée, Mme [W] [S] a été engagée à compter du 1er juillet 2013, en qualité d'assistante commerciale personnelle, par la société Avantif Groupe, qui a une activité de holding et détient l'intégralité des actions des sociétés Avantif (Nord RP, Centre-Ouest et Grand-Sud), lesquelles ont pour activité principale l'exécution de prestations de services de coiffure, à domicile et dans des maisons de retraite, et emploie une salariée (la requérante).

Mme [S] a été placée en arrêt maladie d'août 2014 à décembre 2014, de février à mai 2015 puis continûment à compter de novembre 2015.

Par requête en date du 20 novembre 2015, Mme [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt aux fins d'entendre prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail et la condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, la société s'étant opposée à l'ensemble des demandes de la requérante.

Suivant jugement rendu le 28 juin 2017, notifié le 6 juillet 2017, le conseil a statué comme suit :

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [S] aux torts de l'employeur la société Avantif Groupe à la date du prononcé du présent jugement,

Dit que cette rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Avantif Groupe à verser à Mme [S] les sommes suivantes :

- 3 137 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1 600 euros au titre du préavis,

- 160 euros au titre des congés payés afférents,

- 613 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

Condamne la société à lui verser également la somme de 890 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Rappelle que sont exécutoires de droit à titre provisoire les condamnations ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnés à l'article R. 1454 -14 du code du travail dans la limite de six mois de salaire étant précisé que la moyenne mensuelle des salaires de Mme [S] est de 1 600 euros,

Dit qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire autre que celle de droit,

Déboute Mme [S] de ses autres demandes, fins et conclusions,

Déboute la société Avantif Groupe de ses demandes reconventionnelles,

Condamne la société Avantif Groupe aux dépens et aux frais éventuels d'exécution du présent jugement.

Par arrêt du 28 novembre 2019, la 6ème chambre de la cour d'appel de Versailles, saisie le 2 août 2017 par la salariée, a rendu la décision suivante:

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [S] aux torts de la société Avantif Groupe, en ce qu'il a condamné la société Avantif Groupe à verser à Mme [S] des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité compensatrice de préavis, une indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a condamné la société Avantif Groupe aux dépens et aux frais éventuels d'exécution ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute Mme [S] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société Avantif Groupe ;

Déboute Mme [S] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [S] aux dépens.

Par arrêt du 19 janvier 2022, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt du 28 novembre 2019, mais seulement en ce qu'il déboute Mme [S] de sa demande de résiliation du contrat de travail aux torts de la société Avantif Groupe et de ses demandes de dommages-intérêts et d'indemnités de rupture subséquentes, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne aux dépens et a remis l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de Versailles autrement composée pour qu'il soit statué sur les conséquences indemnitaires de la rupture du contrat de travail. Aux termes de cette même décision, la cour a dit n'y avoir lieu à renvoi du chef de la résiliation judiciaire du contrat de travail, confirmé le jugement en ce qu'il prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [S] aux torts de la société Avantif groupe et dit que cette rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et ce aux motifs suivants :

« Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile :

4. Selon le premier de ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties et selon le second, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

5. Pour infirmer le jugement qui avait fait droit à la demande de résiliation judiciaire aux torts de l'employeur et débouter la salariée de l'intégralité de ses demandes indemnitaires, la cour d'appel a indiqué qu'aucun manquement grave de l'employeur n'était caractérisé.

6. En statuant ainsi, alors que tant la salariée que l'employeur demandaient la confirmation du jugement ayant prononcé la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur, le litige portant seulement sur le montant des sommes allouées au titre des indemnités de rupture et des dommages-intérêts, la cour d'appel a violé les textes susvisés. ».

Mme [S] a saisi, le 7 novembre 2022, la cour d'appel de Versailles autrement composée.

Par ordonnance rendue le 5 avril 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 9 mai 2023.

' Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 5 janvier 2023, Mme [S] demande à la cour de :

Déclarer ses demandes recevables.

Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il :

- n'a condamné la société Avantif Groupe à lui verser que les sommes suivantes :

' 3 137 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 1 600 euros au titre du préavis et 160 euros au titre des congés payés afférents,

' 613 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

' 890 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- l'a déboutée de ses autres demandes, fins et conclusions,

Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a considéré que la convention collective de la coiffure n'est pas applicable en l'espèce.

En conséquence :

Ordonner que la convention collective applicable en l'espèce est la convention collective nationale de la coiffure et professions connexes (IDCC 2596).

Ordonner que la société Avantif Groupe est tenue de lui rembourser les frais de la mutuelle privée.

Ordonner que la société Avantif Groupe est tenue de lui communiquer les bulletins de salaires rectifiés du 1er juillet 2013 au 1er janvier 2016.

Ordonner que la société Avantif Groupe est tenue de régulariser la mutuelle privée et de communiquer les bulletins de salaires rectifiés depuis le 1er janvier 2016.

Ordonner que la société Avantif Groupe est tenue de lui verser l'indemnité due par le contrat de prévoyance.

Ordonner à la société Avantif Groupe de lui communiquer les bulletins de salaires rectifiés du 1er juillet 2013 au 1er janvier 2016 et ce sous astreinte de 90 euros par jour de retard à partir de la date de signification de la décision à intervenir.

Ordonner à la société Avantif Groupe de lui communiquer les bulletins de salaires rectifiés depuis le 1er janvier 2016 jusqu'à ce jour et ce sous astreinte de 90 euros par jour de retard à partir de la date de signification de la décision à intervenir.

Condamner la société Avantif Groupe à lui payer la somme de 809,88 euros à titre de remboursement des frais de mutuelle.

Condamner la société Avantif Groupe à lui payer la somme de 682,99 euros à titre de régularisation de la mutuelle du juillet 2013 au 28 février 2017.

Condamner la société Avantif Groupe à lui régler la somme de 5 847,28 au titre de l'indemnité de prévoyance.

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire aux torts exclusifs de l'employeur.

Ordonner que cette résiliation judiciaire trouve son origine dans le comportement fautif de l'employeur et notamment :

La violation de l'obligation de bonne foi en imitant sa signature,

Le fait qu'elle a été victime d'un harcèlement moral de la part de son employeur et que cet agissement a été à l'origine de sa maladie.

La société Avantif Groupe a violé son obligation de sécurité de résultat.

Ordonner que cette résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence

Condamner la société Avantif Groupe à lui payer la somme de 5 040 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 504 euros à titre de congés payés sur préavis.

Condamner la société Avantif Groupe à lui payer la somme de 3 570 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Condamner la société Avantif Groupe à lui payer la somme de 3 862 euros à titre d'indemnité compensatrice des congés payés.

Condamner la société Avantif Groupe à lui payer la somme de 124 320 euros à titre de l'indemnité due au licenciement nul.

Condamner la société Avantif Groupe à lui payer la somme de 16 000 euros à titre de réparation du dommage moral subi.

Condamner la société Avantif Groupe à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de l'article 700 du code de procédure civile.

' Aux termes de ses dernières conclusions, remises au greffe le 6 mars 2023, la société Avantif Groupe demande à la cour de :

Juger Mme [S] irrecevable en sa demande d'infirmation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt pour ce qui concerne ses prétentions tendant à:

- Dire et juger que la convention collective applicable en l'espèce est la convention collective de la coiffure et professions connexes (IDCC 2596).

- Dire et juger que la société est tenue de rembourser à Mme [S] les frais de mutuelle privée.

- Dire et juger que la société est tenue de communiquer à Mme [S] les bulletins de salaire rectifiés du 1er juillet 2013 au 1er janvier 2016.

- Dire et juger que la société est tenue de régulariser la mutuelle privée et de communiquer les bulletins de salaire rectifiés depuis le 1er janvier 2016.

- Dire et juger que la société a violé les dispositions légales et contractuelles applicables en refusant de verser à Mme [S] l'indemnité due par le contrat de prévoyance.

- Ordonner à la société de communiquer à Mme [S] les bulletins de salaire rectifiés du 1er juillet 2013 au 1er janvier 2016, et ce sous astreinte de 90 euros par jour de retard à partir de la date de signification de la décision d'intervenir.

- Ordonner à la société de communiquer à Mme [S] les bulletins de paie rectifiés depuis le 1er janvier 2016 jusqu'à ce jour et ce sous astreinte de 90 euros par jour de retard à partir de la date de signification de la décision à intervenir.

- Condamner la société à payer à Mme [S] la somme de 809,88 euros au titre de remboursement des frais de mutuelle.

- Condamner la société à payer à Mme [S] la somme de 682,99 euros au titre de régularisation de la mutuelle du 1er juillet 2013 au 28 février 2017.

- Condamner la société à régler à Mme [S] la somme de 5 847,28 euros à titre de l'indemnité de prévoyance.

Juger Mme [S] recevable en sa demande de confirmation de la décision en ce qu'elle a prononcé la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur mais la juger mal-fondée en sa demande de réformation du quantum des condamnations prononcées par le conseil de prud'hommes du chef de la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

En conséquence,

Confirmer (à l'exception des dommages et intérêts pour rupture abusive alloués par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt mais non sollicités à hauteur d'appel par Mme [S]) le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a condamné la société aux indemnités suivantes au titre de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur :

- l 600 euros au titre du préavis et 160 euros au titre des congés payés afférents ;

- 613 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 890 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Débouter Mme [S] pour le surplus de ses demandes afférentes aux conséquences indemnitaires de la résiliation judiciaire du contrat de travail,

Juger Mme [S] irrecevable en sa demande d'indemnité pour licenciement nul.

A titre subsidiaire,

Débouter Mme [S] de l'ensemble de ses demandes portées en cause d'appel.

Et en tout état de cause :

Condamner Mme [S] à verser à la société la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

MOTIFS

Sur la saisine sur renvoi de cassation :

Il ressort de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 19 janvier 2022, d'une part, que l'arrêt de la cour d'appel du 28 novembre 2019 n'a été cassé et annulé qu'en ce qu'il déboute Mme [S] de sa demande de résiliation du contrat de travail aux torts de la société Avantif Groupe et de ses demandes de dommages-intérêts et d'indemnités de rupture subséquentes, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne aux dépens, d'autre part, qu'il n'y a lieu à renvoi du chef de la résiliation judiciaire du contrat de travail, le jugement étant confirmé en ce qu'il prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [S] aux torts de la société Avantif groupe et dit que cette rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et, enfin, que les parties sont renvoyées devant la cour d'appel de Versailles autrement composée pour qu'il soit statué sur les conséquences indemnitaires de la rupture du contrat de travail.

Par suite, Mme [S] est irrecevable en ses demandes autres que celles strictement liées aux conséquences indemnitaires de la rupture du contrat de travail en ce compris la demande tendant à voir juger que la relation de travail était soumise à la convention collective de la coiffure, prétention sur laquelle le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt a expressément statué et dont elle a été déboutée au dispositif par le chef suivant : 'déboute Mme [S] de ses autres demandes [...]'.

Sur l'indemnisation de la rupture du contrat de travail :

La salariée n'étant pas fondée à revendiquer le bénéfice des stipulations de la convention collective de la coiffure, l'indemnisation de la rupture s'apprécie au regard des dispositions légales.

La salariée peut prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, correspondant, conformément aux dispositions de l'article L. 1234-5 du code du travail, à la rémunération brute qu'elle aurait perçue si elle avait travaillé pendant la période du délai-congé.

En application des dispositions de l'article L. 1234-8 du code du travail, en l'absence de dispositions conventionnelles contraires, la période de suspension du contrat de travail pour maladie n'entre pas en compte pour la détermination de la durée d'ancienneté exigée pour bénéficier de ces dispositions.

Dès lors, c'est à bon droit que l'employeur soutient qu'il doit être déduit de l'ancienneté les périodes de suspension du contrat de travail pour maladie simple, d'août 2014 à décembre 2014, de février à mai 2015, puis continûment à compter de novembre 2015, ce qui détermine une ancienneté de Mme [S] au jour de la rupture, qui est fixée à la date de prononcé du jugement de première instance, de 20 mois, qui lui ouvre droit à une indemnité compensatrice de préavis de un mois et non de deux, ni de trois, la salariée n'établissant pas que ses fonctions relevaient du statut cadre.

C'est à bon droit que le conseil a limité le montant de cette indemnité à un mois de salaire, sous réserve toutefois que celui-ci s'établissait au jour de la rupture à 1 680 euros bruts et non 1 600 euros, outre l'indemnité au titre des congés payés afférents. Le jugement sera donc réformé en ce sens sur le quantum.

Calculée sur la base d'une ancienneté de 21 mois, délai congé d'un mois compris, et de son salaire de référence, conformément aux dispositions de l'article R 1234-2 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, l'indemnité de licenciement à laquelle la salariée peut prétendre s'établit à la somme de 644 euros. Le jugement sera réformé sur le quantum.

La salariée est fondée en sa demande d'indemnité au titre de la perte injustifiée de son licenciement.

Au jour de la rupture, Mme [S], âgée de 49 ans, percevait un salaire mensuel de 1 680 euros. La société employait moins de onze salariés.

Le seul fait que la salariée a qualifié la demande financière formulée de ce chef 'd'indemnité pour licenciement nul' alors que l'indemnisation de la perte injustifiée de son emploi doit être qualifiée d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est dépourvue de portée.

Compte tenu des éléments dont dispose la cour, et notamment de l'âge de la salariée au moment du licenciement, et des perspectives professionnelles qui en découlent, le préjudice résultant de la perte injustifiée de son emploi doit être arrêté à la somme de 5 000 euros. Le jugement sera réformé sur le montant.

Sur la demande d'indemnité compensatrice de congés payés :

Se prévalant de sa dernière fiche de paie, de laquelle il ressort qu'elle disposait de 50 jours de congés payés, la salariée demande à la cour de condamner l'employeur à lui verser la somme de 3 862 euros selon le calcul suivant : (1680 x 12/ 261) x 50.

Tout en opposant le principe selon lequel l'erreur n'est pas créatrice de droit et le fait que le logiciel de paye utilisé par la société créditait automatiquement chaque mois 2,5 jours sur le compteur des congés payés, que le mois soit travaillé, ou non, la société qui indique que la salariée n'a travaillé en tout et pour tout que 20 mois et que les périodes de maladie ne sont pas assimilées à des périodes de travail effectif pouvant générer des droits à congés payés (à défaut de convention collective qui le prévoit), soutient que le total des congés payés acquis par Mme [S] s'élève bien à 50 jours ouvrables, de sorte que le montant de l'indemnité compensatrice de congés payés s'établirait donc à la somme de 3 200 euros [(1600/25) *50] et ce au regard des 50 jours ouvrables de congés payés acquis.

Rappel fait qu'eu égard à la finalité qu'assigne aux congés payés annuels la Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement et, le cas échéant, de s'être libéré de son obligation à paiement d'une indemnité compensatrice de congés payés, ce qu'il s'abstient de faire en l'espèce, il en résulte que la salariée est bien fondée à solliciter l'indemnisation des 50 jours de congés payés acquis durant son temps de présence au sein de l'entreprise. Compte tenu du montant de son salaire brut au jour de la rupture, soit 1 680 euros, la société sera condamnée à lui verser la somme de 3 862 euros bruts.

Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral :

Au soutien de sa demande d'indemnisation pour préjudice moral, Mme [S] expose que 'l'acharnement de l'employeur à (lui) nuire et son attitude méprisante et vexatoire justifient l'attribution de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil'. Elle ajoute se trouver 'en arrêt prolongé d'arrêt maladie depuis novembre 2015, situation qui nuit à son avenir professionnel et ses droits à la retraite'.

L'indemnisation de la résiliation judiciaire du contrat de travail indemnise la salariée de l'ensemble des préjudices découlant de la perte injustifiée du contrat de travail.

Faute pour Mme [S] de rapporter la preuve de ce que la rupture ait été entourée de circonstances vexatoires ou brutales imputables à la société, la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, dans la limite de la saisine découlant de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 19 janvier 2022,

Juge Mme [S] irrecevable en ses demandes tendant à voir infirmer le jugement en ce qu'il en ce qu'il a considéré que la convention collective de la coiffure n'est pas applicable en l'espèce et en ce qu'il l'a déboutée de ses autres demandes, fins et conclusions et, en conséquence de :

Ordonner que la convention collective applicable en l'espèce est la convention collective nationale de la coiffure et professions connexes (IDCC 2596),

Ordonner que la société Avantif Groupe est tenue de lui rembourser les frais de la mutuelle privée,

Ordonner que la société Avantif Groupe est tenue de lui communiquer les bulletins de salaires rectifiés du 1er juillet 2013 au 1er janvier 2016,

Ordonner que la société Avantif Groupe est tenue de régulariser la mutuelle privée et de communiquer les bulletins de salaires rectifiés depuis le 1er janvier 2016,

Ordonner que la société Avantif Groupe est tenue de lui verser l'indemnité due par le contrat de prévoyance,

Ordonner à la société Avantif Groupe de lui communiquer les bulletins de salaires rectifiés du 1e juillet 2013 au 1er janvier 2016 et ce sous astreinte de 90 euros par jour de retard à partir de la date de signification de la décision à intervenir,

Ordonner à la société Avantif Groupe de lui communiquer les bulletins de salaires rectifiés depuis le 1er janvier 2016 jusqu'à ce jour et ce sous astreinte de 90 euros par jour de retard à partir de la date de signification de la décision à intervenir,

Condamner la société Avantif Groupe à lui payer la somme de 809,88 euros à titre de remboursement des frais de mutuelle, celle de 682,99 euros à titre de régularisation de la mutuelle du juillet 2013 au 28 février 2017 et celle de 5 847,28 au titre de l'indemnité de prévoyance.

Infirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 28 juin 2017 seulement sur le montant des sommes allouées à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, et de l'indemnité de licenciement, et en ce qu'il a débouté Mme [S] de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés,

Statuant de nouveau des chefs ainsi infirmés,

Condamne la société Avantif Groupe à verser à Mme [S] les sommes suivantes :

- 1 680 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 168 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 644 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement

- 5 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement injustifié,

- 3 862 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés.

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme [S] de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral,

Y ajoutant,

Condamne la société Avantif Groupe à verser à Mme [S] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés sur renvoi de cassation, et à supporter les dépens.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Madame Isabelle FIORE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le President,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 21e chambre
Numéro d'arrêt : 22/03361
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;22.03361 ?
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